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Communiqués de presse Procédures spéciales

Une experte de l'ONU s'inquiète de l'utilisation signalée des liens familiaux comme seul motif pour les désignations de sanctions

16 octobre 2024

GENÈVE – Une experte de l'ONU* a exhorté aujourd'hui le Conseil de l'Union européenne et le gouvernement suisse à revoir leur impositions de sanctions à Aleksandra Melnichenko, l'épouse d’Andrey Melnichenko, un milliardaire russe sanctionné, et à permettre l'accès aux preuves utilisées pour sa désignation en vertu des cadres de mesures restrictives.

Le 3 juin 2022, le Conseil de l'UE imposa des mesures restrictives à l'encontre d'Aleksandra Melnichenko pour avoir été « associée » à son mari en raison de ses liens présumés avec le gouvernement russe. En mars de cette année, le Conseil a maintenu les mesures restrictives à son encontre au motif que « (...) Aleksandra Melnichenko profite de la fortune et de la richesse de son mari (...) elle est un membre de la famille immédiate bénéficiant de son mari et liée à lui par des intérêts financiers communs ».

La Suisse a emboîté le pas à l’UE en incluant Mme Melnichenko dans sa liste de sanctions basée sur l'« Ordonnance sur les mesures en rapport avec la situation en Ukraine ».

« Je souhaite exprimer ma vive inquiétude quant à l'application de mesures restrictives à l'encontre de Mme Melnichenko sans aucune procédure formelle d'examen et de présentation de preuves, qui pourraient être contestées devant un tribunal », a déclaré Alena Douhan, rapporteuse spéciale sur les mesures coercitives unilatérales et les droits de l'homme.

« Compte tenu de l'impact d'une telle désignation sur sa vie et ses droits humains, ainsi que sur ceux des membres de sa famille proche, et des conséquences qui peuvent être comparables à celles des sanctions pénales, Mme Melnichenko a le droit inaliénable de bénéficier de toutes les garanties d'une procédure régulière et d'un procès équitable, y compris la présomption d'innocence, ainsi que de l'accès à un recours effectif »

L'experte a déclaré que l'utilisation des liens familiaux comme seul motif de responsabilité, quel qu'il soit, peut être qualifiée de punition collective interdite par le droit international des droits de l'homme.

Les appels d'Aleksandra Melnichenko au Conseil pour qu'il réexamine son cas et la retire de la liste des mesures restrictives de l'UE n'auraient pas abouti et elle n'aurait pas reçu de réponse claire, a déclaré l’experte. « En l'absence de preuves étayant un acte répréhensible ou criminel présumé, les liens familiaux ne peuvent pas être utilisés comme motifs de responsabilité dans les affaires liées aux sanctions, sous peine d'être perçus comme une punition collective, ce qui est interdit par le droit international en matière de droits de l'homme », a déclaré M. Douhan.

Aleksandra Melnichenko a également demandé, sans succès, au Département fédéral suisse de l'économie, de la formation et de la recherche, le 21 novembre 2022, de la retirer de la liste des sanctions suisses et de corriger ses données personnelles.

Outre les conséquences financières, elle et sa famille seraient confrontées à des restrictions de circulation au sein de l'UE et ne pourraient pas entrer en Suisse, bien qu'elles aient un statut de résident permanent. « J’attire l'attention sur les obstacles multiples qui peuvent entraver l'accès à la justice de toutes les personnes soumises à des sanctions unilatérales, notamment les restrictions en matière de représentation et de défense juridiques, l'accès à l'information et aux preuves, les incohérences ou l'absence totale de processus d'examen de ces désignations, et l'absence de cadre juridique clair sur lequel ces mesures sont décidées et mises en œuvre »

L'experte a noté que les obstacles à l'examen des sanctions unilatérales imposées peuvent contrevenir non seulement aux dispositions du droit international susmentionnées, mais aussi aux lignes directrices du Conseil de l'UE sur la mise en œuvre et l'évaluation des mesures restrictives dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne.

L'experte a déjà fait part de ses préoccupations à l'Union européenne et au gouvernement suisse.

* Alena Douhan, Rapporteuse spéciale sur les effets négatifs des mesures coercitives unilatérales sur l’exercice des droits de l’homme

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