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Communiqués de presse Procédures spéciales

Canada : Des pratiques positives mais de sérieuses préoccupations persistent concernant la détention de populations marginalisées

24 mai 2024

OTTAWA (24 mai 2024) – Les experts de l’ONU ont déclaré aujourd’hui que le Canada dispose de systèmes positifs pour éviter la détention arbitraire. Cependant, des préoccupations sérieuses persistent, particulièrement concernant les peuples autochtones, les groupes victimes de discrimination raciale et les autres populations à risque.

« Malgré des efforts pour remédier à leur surreprésentation dans le système de justice pénale, ces populations continuent d’être détenues à des taux alarmants » a relevé le Groupe de travail sur la détention arbitraire dans une déclaration au terme de sa visite de douze jours au Canada.

Le Groupe de travail a noté une évolution positive, avec notamment la baisse considérable du nombre de jeunes personnes en détention et la pratique usuelle de comparution des individus arrêtés devant un juge dans un délai de 24 heures suivant leur arrestation. Les arrestations sont généralement réalisées dans le respect de la loi et les détenus sont informés de leurs droits. Néanmoins, le système de libération sous caution présente des défaillances telles que des conditions de liberté sous caution onéreuses pouvant affecter les populations marginalisées de manière excessive.

« Les conditions de mise en liberté sous caution doivent être davantage adaptées aux circonstances individuelles et la criminalisation inutile des violations des conditions de mise en liberté doit être évitée, » ont observé les experts.

Le Groupe de travail a été informé que le pourcentage disproportionnellement élevé de personnes autochtones dans le système de détention criminelle est lié au racisme systémique. Les experts ont aussi été informés d’interventions policières, de poursuites et d’incarcérations excessives. Le Groupe de travail est conscient des initiatives prises par le Gouvernement pour remédier à cette situation, mais note les facteurs systémiques enracinés dans le colonialisme qui continuent d’exacerber la surreprésentation des peuples autochtones dans le cycle d’incarcération et de marginalisation socio-économique.

Les experts ont souligné que ces facteurs affectent aussi les personnes d’ascendance africaine, surreprésentées en détention. Ils ont appelé le Gouvernement du Canada à redoubler d’efforts pour lutter contre toutes les formes de discrimination.

Le Groupe a également insisté sur le besoin de mesures exhaustives de réhabilitation des personnes détenues, particulièrement des communautés marginalisées, pour réduire le taux de récidive. Les experts ont aussi souligné « qu’un soutien effectif au logement, à la santé, à l’éducation et à l’emploi est primordial pour une réintégration réussie. »

Les experts ont noté que, bien que l’isolement cellulaire ait officiellement pris fin, l’utilisation de régimes de détention tels que les unités d’intervention structurée prive les détenus d’interactions humaines suffisantes et, dans certains cas, signifie leur maintien en cellule seuls pendant plusieurs jours. En outre, de nombreuses personnes détenues souffrent d’handicaps psychosociaux sévères, lesquels contribuent souvent à leur incarcération et sont exacerbés par celle-ci. Dans certains cas, la prise en charge dans les établissements pénitenciers est inadéquate. Les problèmes d’abus de substances sont également très répandus parmi la population carcérale et les possibilités de traitement sont variables et souvent inadaptés.

Le sort des personnes détenues dans le cadre de la migration, qui n’ont été reconnues coupables d’aucun crime, est profondément préoccupant. Un mécanisme de contrôle indépendant de l’Agence des services frontaliers du Canada, en charge de gérer la détention des migrants, fait défaut et l’absence de durée maximale concernant la détention des migrants augmente également le risque de détention arbitraire. De nombreux migrants sont privés de leur liberté pendant des mois, voire des années. Bien que les experts aient salué la cessation des détentions de migrants dans les prisons provinciales, ils se sont dit alarmés par des informations faisant état de projets visant à détenir des migrants dans des établissements correctionnels fédéraux uniquement sur la base de leur statut migratoire.

La délégation du Groupe de travail, composée de Matthew Gillett, Ganna Yudkivska et Priya Gopalan, a visité l’Ontario, l’Alberta, la Colombie Britannique et le Québec. Ils ont rencontré les autorités fédérales et provinciales, des membres du parlement, des avocats, des représentants de la société civile et d’autres parties prenantes. La délégation a visité 17 lieux de privation de liberté et s’est entretenue avec environ 103 personnes privées de leur liberté.

Le rapport final de la visite sera présenté au Conseil des droits de l’homme en septembre 2025.

Pour plus d’informations ou demandes presse, veuillez contacter : Levon Sevunts (sevunts@unhcr.org).

Le Groupe de travail sur la détention arbitraire a été créé par la Commission des droits de l’homme dans sa résolution 1991/42. Son mandat a été précisé et renouvelé par la Commission pour couvrir la question de la détention administrative des demandeurs d’asile et des migrants. En septembre 2019, le Conseil des droits de l’homme a confirmé l’étendue du mandat du Groupe de travail et l’a prolongé pour une durée de trois ans. En octobre 2022, le mandat du Groupe de travail a de nouveau été prorogé pour une période de trois ans. Le Groupe de travail est composé de cinq membres experts indépendants, de diverses régions du monde : M. Matthew Gillett (Nouvelle Zélande ; Président-Rapporteur), Mme Ganna Yudkivska (Ukraine ; Vice-présidente chargée des communications); Mme Priya Gopalan (Malaisie ; Vice-présidente chargée du suivi), Mme Miriam Estrada-Castillo (Équateur), M. Mumba Malila (Zambie)

Base de données du Groupe de travail sur la détention arbitraire.

Le Groupe de travail fait partie des Procédures Spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les Procédures Spéciales, le plus grand corps d’experts indépendants du système des droits de l’homme des Nations Unies, désigne les mécanismes indépendants d’enquête et de suivi du Conseil qui traitent soit de situations nationales spécifiques, soit de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des Procédures Spéciales travaillent de manière bénévole ; ils ne font pas partie du personnel de l'ONU et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et servent à titre individuel.

ONU Droits de l’homme, Page de pays — Canada

Pour les demandes de presse liées au groupe de travail, veuillez contacter Mme Clara Angélica García (garcia61@un.org) ; Mme Loana Benjamin (loana.benjamin@un.org) ou écrire à hrc-wg-ad@un.org.

Pour les demandes des médias concernant d’autres experts indépendants de l’ONU, veuillez contacter : Dharisha Indraguptha (dharisha.indraguptha@un.org) ou John Newland (john.newland@un.org)

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