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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme tient un dialogue renforce sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo

Dialogue sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo

21 Mars 2018

Conseil des droits de l'homme
APRES MIDI 

20 mars 2018

Il entend pour la première fois un membre de l’Équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï

Le Conseil des droits de l’homme a tenu, dans la soirée, un dialogue renforcé sur la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo, à l’occasion duquel il a entendu des mises à jour orales du Sous-secrétaire général aux droits de l’homme et Chef du Bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies à New York, M. Andrew Gilmour ; de la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU en République démocratique du Congo et cheffe de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO), Mme Leïla Zerrougui ; et de M. Bacre Waly Ndiaye, membre de l’Équipe d’Experts internationaux sur la situation au Kasaï, dépêchée en vertu de la résolution 35/33 du Conseil.

Ce dernier a fourni au Conseil les premiers éléments de l’enquête menée par son Équipe sur le terrain en précisant que l’Équipe avait pu conduire plus de 300 entretiens avec des témoins et victimes et avait reçu des nombreuses informations provenant d’un large éventail de sources.  M. Ndiaye a expliqué que l’on est en présence de plusieurs conflits avec l’implication de multiples acteurs.  La vague de violence a commencé en mai 2016, avec la constitution d’une milice par le chef Kamuina Nsapu, dans laquelle étaient recrutés des enfants et qui a conduit des attaques ciblant les représentants et symboles de l’autorité publique.  Le phénomène Kamuina Nsapu s’est rapidement propagé dans les cinq provinces du Kasaï.  Les forces de défense et de sécurité ont alors fait un usage excessif de la force dans la répression des milices Kamuina Nsapu, causant de nombreuses victimes civiles.  De chaque côté, on relève un nombre très important d’actes de violence et de violations des droits de l’homme, a indiqué M. Ndiaye.  En février 2017, sur le territoire de Kamonia, dans la province du Kasaï, les violences ont pris une dimension ethnique avec la création de milices dites Bana Mura, par des membres des ethnies Tshokwe et Pende.  Ces milices ont conduit des attaques visant les membres de la communauté Luba et Lulua.  Bien que la situation sécuritaire au Kasaï se soit améliorée depuis le milieu de l’année 2017, des actes de violence et des tensions intercommunautaires persistent : ce serait un leurre de croire que les violations des droits de l'homme au Kasaï ont cessé, a mis en garde M. Ndiaye, précisant que l’Équipe d’experts présenterait un rapport complet à la prochaine session du Conseil des droits de l'homme, en juin.

M. Gilmour a quant à lui souligné que depuis sa dernière mise à jour, en septembre dernier, la situation a continué à se détériorer dans le pays, le Haut-Commissariat ayant documenté une augmentation de 25% des violations des droits de l’homme pour l’année 2017.  Cette année-là a été particulièrement meurtrière dans les provinces du Kasaï.  a-t-il insisté.  Il a exhorté les autorités à appliquer les recommandations de la Commission nationale d’enquête sur les incidents de décembre 2017 et janvier/février 2018, en particulier la levée de l’interdiction des manifestations, la poursuite des auteurs de violations et l’octroi de réparations aux victimes.  M. Gilmour a ensuite fait part de l’inquiétude du Haut-Commissariat devant la situation à Tanganyika, Maniema, au nord et sud du Kivu et dans les Kasaï, où la violence intercommunautaire et ethnique s’est intensifiée, avec également l’implication de milices ethniques et de groupes armés.

Après sa première visite sur le terrain, Mme Zerrougui s’est quant à elle dite « frappée par l’ampleur des traumatismes et des souffrances subis ».  Si des progrès ont été accomplis dans le sens d’un retour progressif à la paix, « d’énormes défis demeurent pour mettre fin aux violations et restaurer la confiance », a-t-elle déclaré.  Dans le cadre de ses bons offices, elle a indiqué « s’être engagée à aider les parties prenantes au processus politique et électoral, à renouer le dialogue pour rétablir la confiance à travers la mise en œuvre intégrale et de bonne foi de l’Accord du 31 décembre 2016 qui reste la seule voie viable de sortir de la crise politique et sécuritaire actuelle ». 

De son côté, la Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo, Mme Marie-Ange Mushobekwa a assuré que son pays se montrerait digne de la confiance que lui ont accordée 152 États membres de l’ONU en l’élisant comme membre du Conseil.  Elle a affirmé que le Gouvernement avait fait beaucoup d’efforts pour améliorer la situation des droits de l’homme et corriger ses erreurs.  La Ministre a ensuite dit profondément regretter que plusieurs personnes aient trouvé la mort au cours de manifestations et a assuré que les auteurs de ces crimes répondraient de leurs actes devant la justice.  Le processus électoral se poursuit en toute transparence et la Commission électorale nationale indépendante a encore une fois confirmé la date de la tenue des élections présidentielles, législatives et provinciales, le 23 décembre prochain, a-t-elle ajouté, précisant que son Gouvernement avait levé la mesure de suspension des manifestations politiques sur la place publique, afin de permettre à tous les partis et regroupements politiques de se préparer aux élections.  Elle a également mentionné la mise en place de la Commission d’enquête sur les événements de décembre 2017 et janvier 2018, composée du Gouvernement, de la société civile, du Bureau conjoint de l’ONU et du Bureau de liaison de l’Union africaine.  La Commission a rendu ses conclusions et les instances judiciaires ont ouvert des dossiers pour des enquêtes plus approfondies contre des présumés coupables, a-t-elle indiqué.

De nombreux intervenants* ont ensuite pris part au débat interactif.  Ils ont systématiquement insisté sur la nécessité d’assurer l’obligation redditionnelle pour les crimes graves et les violations des droits de l’homme commis en République démocratique du Congo, en particulier dans les provinces du Kasaï.  A en outre maintes fois été dénoncé l’usage excessif de la force à l’encontre de manifestants pacifiques.

Le Conseil se réunira demain matin, à partir de 9 heures, pour tenir un dialogue interactif avec l’Expert indépendant sur a situation des droits de l’homme au Mali. 

Assistance technique et renforcement des capacités en matière de droits de l’homme en République démocratique du Congo

En application de sa résolution 36/30, le Conseil organise un dialogue renforcé autour du compte rendu oral présenté par le Haut-Commissariat au sujet de la situation des droits de l’homme en République démocratique du Congo.

Mises à jour

M. ANDREW GILMOUR, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme et Chef du Bureau du Haut-Commissaire aux droits de l’homme à New York, a fait remarquer d’emblée que, pour la première fois, ce dialogue se tenait alors que la République démocratique du Congo est membre du Conseil.  Il a espéré que cette élection serait l’occasion pour le Gouvernement de renouveler ses engagements en faveur des droits de l’homme.  Depuis la dernière mise à jour, en septembre dernier, a poursuivi M. Gilmour, la situation a continué à se détériorer dans le pays, le Haut-Commissariat ayant documenté une augmentation de 25% des violations des droits de l’homme pour l’année 2017.  Cette année-là a été particulièrement meurtrière dans les provinces du Kasaï, en particulier du fait des assassinats extrajudiciaires perpétrés par les agents étatiques.  Cela avait conduit le Conseil à demander que trois experts enquêtent sur les allégations de violations des droits de l’homme dans ces provinces, a rappelé M. Gilmour.

D’autre part, entre janvier 2017 et janvier 2018, le Haut-Commissariat a documenté 47 assassinats dans le contexte de manifestations dans l’ensemble de la République démocratique du Congo.  M. Gilmour a mis l’accent sur l’usage excessif à la force contre les manifestants pacifiques, qui constitue un sujet de grande préoccupation, et sur l’impunité dont bénéficient les responsables.  En outre, 406 manifestants ont été arrêtés puis relâchés : ces arrestations ont créé une atmosphère de peur, ce qui du reste semblait être le but recherché.  Le Sous-Secrétaire général a aussi signalé que le personnel du Haut-Commissariat avait été empêché de s’acquitter de son mandat par les forces de sécurité : en particulier, deux membres de son personnel ont été agressés dans l’exercice de leur fonction de surveillance.  Hier, a ajouté M. Gilmour, la Mission de l'Organisation des Nations unies pour la stabilisation en république démocratique du Congo (MONUSCO) et le Haut-Commissariat ont publié un rapport sur l’usage disproportionné de la force par les services de sécurité et les forces de défense.  Il décrit les violations graves des droits de l’homme perpétrées par les éléments de ces deux corps entre janvier 2017 et janvier 2018.

M. Gilmour a exhorté les autorités de la République démocratique du Congo à respecter la liberté de réunion et d’assemblée pacifique ainsi que la liberté d’expression et d’association, qui sont des conditions préalables à la tenue d’élections inclusives, pacifiques et crédibles.  Ces libertés font aussi partie des mesures de mise en confiance prévues dans l’accord du 31 décembre 2016.  M. Gilmour a dès lors demandé aux autorités d’accélérer la mise en œuvre dudit accord, pour instaurer un climat politique propice à la conduite d’élections pacifiques et crédibles.

Le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme a salué, par ailleurs, les efforts du Gouvernement visant à faire comparaître devant la justice certains auteurs de violations des droits de l’homme.  Il a estimé que la Commission nationale d’enquête sur les incidents de décembre 2017 et janvier/février 2018, établie le 1er février par le Ministère des droits de l’homme, constituait un pas dans la bonne direction.  M. Gilmour a exhorté les autorités à appliquer les recommandations de la Commission, en particulier la levée de l’interdiction des manifestations, la poursuite des auteurs de violations et l’octroi de réparations aux victimes.

M. Gilmour a fait part de l’inquiétude du Haut-Commissariat devant la situation à Tanganyika, Maniema, au nord et sud du Kivu et dans les Kasaï, où la violence intercommunautaire et ethnique s’est intensifiée, avec également l’implication de milices ethniques et de groupes armés.  Il a signalé qu’une grande majorité des violations des droits de l’homme recensées en 2017 (74% contre 64% en 2016) avaient été perpétrées dans l’est de la République démocratique du Congo et dans les Kasaï.

La violence et l’instabilité ont occasionné de nouveaux déplacements, le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays ayant atteint 4,9 millions en décembre dernier, soit une augmentation de 100% en douze mois.  M. Gilmour a enfin observé que la violence sexuelle était toujours plus inquiétante, la MONUSCO ayant vérifié les cas d’au moins 507 femmes, 265 filles, trente hommes et de deux garçons victimes dans les zones affectées par le conflit.

MME LEILA ZERROUGUI, Représentante spéciale du Secrétaire général en République démocratique du Congo et cheffe de la Mission de l’ONU pour la stabilisation en République démocratique du Congo, a estimé que le dialogue intervenait à « un moment crucial » de l’histoire du pays.  Après sa première visite sur le terrain, elle s’est dite « frappée par l’ampleur des traumatismes et des souffrances subis ».  Elle a dit avoir « rencontré des hommes, des femmes et des enfants qui portent les stigmates de la violence sur leurs corps et dans leurs cœurs mais qui font montre de capacités impressionnantes de résilience ».  Si des progrès ont été accomplis dans le sens d’un retour progressif à la paix, « d’énormes défis demeurent pour mettre fin aux violations et restaurer la confiance », a dit Mme Zerrougui.

Dans le cadre de ses bons offices, elle a dit « s’être engagée à aider les parties prenantes au processus politique et électoral, à renouer le dialogue pour rétablir la confiance à travers la mise en œuvre intégrale et de bonne foi de l’Accord du 31 décembre 2016 qui reste la seule voie viable de sortir de la crise politique et sécuritaire actuelle ».  Mme Zerrougui a salué la mise en place de la Commission d’enquête mixte sur les violences qui ont marqué les manifestations de décembre et janvier derniers.  Parmi les priorités, elle a cité la professionnalisation de la police nationale, l’appui aux enquêtes judiciaires ainsi qu’aux poursuites pénales et à la tenue des procès ».  Elle a aussi salué la recommandation faite au Parlement congolais d’adopter en urgence la loi portant fixation des modalités pratiques de l’exercice de la liberté des manifestations publiques.

M. BACRE WALY NDIAYE, membre de l’Équipe d’experts internationaux sur la situation au Kasaï, a rappelé que la résolution 35/33 du Conseil des droits de l'homme, adoptée à l’unanimité en juin 2017, avait confié mission à l’équipe d’experts d’établir l’ensemble des faits et circonstances sur les violations des droits de l'homme commises au Kasaï depuis 2016.  À ce jour, l’équipe s’est concentrée sur les allégations les plus graves telles que les atteintes au droit à la vie et à l’intégrité physique, les violences sexuelles ou encore les crimes contre les enfants.  L’équipe a pu conduire plus de 300 entretiens avec des témoins et victimes et a reçu des nombreuses informations provenant d’un large éventail de sources.  Pour l’heure, il serait prématuré de tirer des conclusions sur les éléments de preuve que l’équipe est toujours en train de collecter, a précisé M. Ndiaye.

M. Ndiaye a ensuite expliqué que l’on est en présence de plusieurs conflits avec l’implication de multiples acteurs.  La vague de violence a commencé en mai 2016, avec la constitution d’une milice par le chef Kamuina Nsapu, dans laquelle étaient recrutés des enfants et qui a conduit des attaques ciblant les représentants et symboles de l’autorité publique.  Le phénomène Kamuina Nsapu s’est rapidement propagé dans les cinq provinces du Kasaï (Kasaï, Kasaï central, Kasaï oriental, Lomani et Sankuru).  Les forces de défense et de sécurité ont fait un usage excessif de la force dans la répression des milices Kamuina Nsapu, causant de nombreuses victimes civiles.  De chaque côté, on relève un nombre très important d’actes de violence et de violations des droits de l’homme, telles que des atteintes au droit à la vie et de nombreuses violences sexuelles.  Les enfants ont été à la fois instruments de la violence et ciblés comme victimes, a souligné M. Ndiaye.

En février 2017, sur le territoire de Kamonia, dans la province du Kasaï, les violences ont pris une dimension ethnique avec la création de milices dites Bana Mura, par des membres des ethnies Tshokwe et Pende.  Ces milices ont conduit des attaques visant les membres de la communauté Luba et Lulua.  Selon des informations parvenues à l’équipe, des femmes des ethnies Luba et Lulua ont été réduites en esclavage, notamment sexuel, et certaines sont encore détenues avec leurs enfants.  Le fait que des crimes d’une telle gravité se poursuivent préoccupe les experts, tout comme l’apparente faible réaction des autorités pour y mettre un terme.

M. Ndiaye a observé que bien que la situation sécuritaire au Kasaï se soit améliorée depuis le milieu de l’année 2017, des actes de violence et des tensions intercommunautaires persistent : ce serait un leurre de croire que les violations des droits de l'homme au Kasaï ont cessé, a mis en garde M. Ndiaye.  Les experts sont aussi alarmés par la situation humanitaire : la situation précaire, la détresse et parfois le péril dans lesquels se trouvent des centaines de milliers de déplacés en raison des violences sont extrêmement préoccupants et requièrent une assistance urgente et adéquate, a demandé M. Ndiaye.  Il a fait savoir que l’équipe d’experts présenterait un rapport complet à la prochaine session du Conseil des droits de l'homme, en juin.

MME MARIE-ANGE MUSHOBEKWA, Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo, a déclaré que son Gouvernement était conscient que certains pays membres de l’ONU s’étaient opposés à son entrée au Conseil.  Chacun d’entre eux avait avancé différentes raisons, certaines soutenables, d’autres vraiment discutables.  Mme Mushobekwa a assuré que son pays se montrerait digne de la confiance de 152 États membres de l’ONU.  Elle a en outre affirmé que le Gouvernement avait fait beaucoup d’efforts pour améliorer la situation des droits de l’homme et corriger ses erreurs.  La Ministre a salué les échanges francs et constructifs avec Mme Zerrougui et le Bureau conjoint des Nations Unies aux droits de l’homme en République démocratique du Congo, échanges qui permettent au Gouvernement de mieux affronter les problèmes et de trouver des remèdes appropriés.

La Ministre a aussi dit apprécier la collaboration avec les organisations de défense des droits de l’homme, reconnaissant toutefois que la tâche est ici moins facile.  Cela étant, a ajouté Mme Mushobekwa, ces organisations, qui alertent à chaque fois que les choses ne vont pas comme il se doit, peuvent travailler sans être inquiétées par qui que ce soit.  La Ministre a ensuite profondément regretté que plusieurs personnes aient trouvé la mort au cours de manifestations et assuré que les auteurs de ces crimes répondraient de leurs actes devant la justice.

Constatant que « tout n’est pas rose mais que tout n’est pas non plus sombre » dans son pays, la Ministre en a voulu pour exemple le fait que le processus électoral se poursuit en toute transparence.  La Commission électorale nationale indépendante a encore une fois confirmé la date de la tenue des élections présidentielles, législatives et provinciales, le 23 décembre prochain.

Mme Mushobekwa a aussi fait valoir que son Gouvernement avait levé la mesure de suspension des manifestations politiques sur la place publique, afin de permettre à tous les partis et regroupements politiques de se préparer aux élections.  Elle a également mentionné la mise en place de la Commission d’enquête sur les événements de décembre 2017 et janvier 2018, composée du Gouvernement, de la société civile, du Bureau conjoint de l’ONU et du Bureau de liaison de l’Union africaine.  La Commission a rendu ses conclusions et les instances judiciaires ont ouvert des dossiers pour des enquêtes plus approfondies contre des présumés coupables.  Dans ce contexte, plusieurs personnes ont déjà été libérées de prison, ces derniers mois, et d’autres les seront dans les mois à venir, a assuré la Ministre.  Enfin, a-t-elle conclu, plusieurs personnes civiles et militaires, soupçonnées d’implication dans les atrocités du Kasaï, ont été condamnées par la justice nationale, tandis que les enquêtes se poursuivent.

Débat interactif

L’Union européenne a fait part de sa préoccupation face à la situation humanitaire en République démocratique du Congo, notamment dans la province de l’Ituri.  Elle déplore en outre l’usage excessif de la force dans la répression des manifestations, ainsi que les restrictions imposées aux activités de la société civile.  L’Union européenne souhaite que le Gouvernement de la République démocratique du Congo respecte les termes de l’Accord de la Saint-Sylvestre.  La Belgique appelle pour sa part les autorités de la République démocratique du Congo à poursuivre en justice les auteurs de violations des droits de l'homme, à libérer les prisonniers politiques, à ouvrir l’espace démocratique et à assurer la libre circulation de l’information.  Elle demande également un accès sans entrave aux mécanismes des droits de l'homme pour que puissent être collectées des informations sur les crimes commis dans le pays.  La Suisse s’est elle aussi inquiété de ces restrictions, alors que la République démocratique du Congo s’apprête à la tenue d’élection dans neuf mois.  Le non-respect de l’accord de la Saint-Sylvestre et la détention de prisonniers politique ne sont pas propices à la tenue d’élections crédibles, a souligné la Suisse.  Les États-Unis appellent eux aussi le Gouvernement de la République démocratique du Congo à libérer les prisonniers politiques et à ouvrir les enquêtes sur les faits de violence, de manière à permettre la tenue d’élections démocratiques.  Les États-Unis déplorent que la République démocratique du Congo, bien que membre de ce Conseil, n’en respecte pas les principes.

L’Allemagne regrette elle aussi le climat délétère qui prévaut en République démocratique du Congo, avec la détention de 94 militants politiques dont 4 du mouvement des jeunes de Filimbi arrêtés le 30 décembre dernier alors qu’ils manifestaient pacifiquement.  La délégation allemande demande leur libération immédiate, à moins qu’il n’y ait de bonnes raisons de les retenir.  L’Australie est d’avis que le respect des droits civils et politiques et le respect de l’accord politique sont des prérequis au retour de la démocratie et de stabilité en République démocratique du Congo.  La France partage la même analyse et recommande au Gouvernement de faciliter le travail de l’équipe d’experts afin qu’elle puisse poursuivre son œuvre de collecte d’informations sur les crimes commis en République démocratique du Congo.

Du point de vue de la Fédération de Russie, la priorité de la République démocratique du Congo est la tenue d’élections, selon les termes de l’Accord de la Saint-Sylvestre.  Alors qu’il y a des préalables techniques à la tenue de ces élections, la Fédération de Russie rejette néanmoins toute tentative d’imposer une recette de l’extérieur.  La Chine estime pour sa part que la République démocratique du Congo déploie tous les efforts et que la communauté internationale devrait respecter la souveraineté de ce pays.  Il revient aux pays de la région de mettre en œuvre l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, a affirmé la Chine.

Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) s’est pour sa part alarmé des violences subies par les enfants, dont les violences sexuelles, mais aussi de la destruction d’écoles et du nombre important d’enfants dans les milices.  Le Fonds tient à rappeler que l’utilisation d’enfants dans les conflits armés est un crime passible de la Cour pénale internationale.  L’Angola, qui accueille des réfugiés de la République démocratique du Congo, a demandé à la communauté internationale de continuer à mobiliser les ressources nécessaires pour apporter une assistance humanitaire à la République démocratique du Congo.

Le Congo s’est félicité des avancées enregistrées dans la pacification de l’espace Kasaï grâce aux efforts du Gouvernement de la République démocratique du Congo, laquelle permettra sans aucun doute le retour progressif des personnes déplacées et réfugiées dans leur zone de résidence.  Le Congo, en tant que Président du Mécanisme régional de suivi de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région, « entend tout mettre en œuvre pour accompagner ce peuple frère dans la recherche de solutions appropriées ».

Le Botswana, tout en se félicitant des progrès enregistrés s’agissant de la mise en place d’un cadre pour l’organisation d’élections, a appelé les autorités de Kinshasa à tout mettre en œuvre en faveur d’un scrutin transparent, crédible et inclusif.  L’Algérie a estimé que la République démocratique du Congo traversait une phase sensible de son histoire et l’a encouragée à lutter contre l’impunité.  Elle s’est dite convaincue que la justice de la République démocratique du Congo avait la capacité de prendre en charge les poursuites en matière de violations des droits de l’homme, avec l’assistance du Haut-Commissariat aux droits de l’homme.  Le Haut-Commissariat pour les réfugiés doit aussi être mis à contribution pour porter assistance aux personnes déplacées.  Quant au Soudan, il a appelé le Gouvernement de Kinshasa à poursuivre ses efforts pour assurer la paix et la stabilité dans le pays.  Il a en outre souligné l’importance de la mise sur pied d’une institution nationale des droits de l’homme dans la perspective du scrutin de décembre prochain.

Le Royaume-Uni a estimé que les tendances actuelles en République démocratique du Congo étaient préoccupantes, dénotant une érosion des droits de l’homme dans un pays dont la population a déjà trop souffert.  Le Royaume-Uni a appelé la République démocratique du Congo à être à la hauteur de ses responsabilités en tant que membre du Conseil.  Le rétrécissement de l’espace politique dans ce pays est préoccupant, a insisté la délégation britannique ; il est impératif que le Gouvernement remplisse ses engagements envers son peuple en mettant en œuvre des mesures de confiance, dont la libération des prisonniers politiques.  L’Irlande, qui s’est félicitée de l’engagement à tenir des élections en décembre, a enjoint le Gouvernement de la République démocratique du Congo à mettre en place les conditions nécessaires à un scrutin libre et équitable conforme à l’Accord de la Saint-Sylvestre.  Les Pays-Bas ont jugé alarmant le fait que la majorité des exactions soient commises par des acteurs étatiques et ont insisté sur l’importance de lutter contre l’impunité.  Les Pays-Bas se félicitent par conséquent que le Ministère des droits de l’homme ait annoncé l’ouverture d’une enquête sur la répression des manifestations de décembre et janvier.  En outre, l’organisation d’élections démocratiques demeure fondamentale pour parvenir à une paix durable et relancer les perspectives de développement.  Les Pays-Bas appellent la République démocratique du Congo à coopérer avec le mécanisme de suivi afin que les auteurs du meurtre de deux experts de l’ONU il y a un an au Kasaï soient traduits en justice.

Plusieurs organisations non gouvernementales sont ensuite intervenues. World Evangelical Alliance a déploré que les massacres se poursuivent en République démocratique du Congo, ce qui a conduit au déplacement de plus de 300 000 personnes récemment.  L’ONG a déploré l’engrenage de la violence et le sentiment d’injustice et de désespoir parmi la population.  Elle a réitéré sa demande pour qu’une commission d’enquête soit mandatée afin que la lumière soit faite sur ces atrocités et que leurs auteurs soient identifiés et en répondent devant la justice.

African Development Association a indiqué avoir documenté une moyenne de plus de 540 violations des droits de l'homme par mois en République démocratique du Congo.  Ce pays est devenu depuis une zone de non-droit, a souligné l’ONG, se demandant comment un tel État avait pu être admis au Conseil des droits de l'homme en tant que membre de cet organe.

Le Service international pour les droits de l'homme s’est inquiété de la détérioration de la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo, où les défenseurs des droits de l'homme sont particulièrement ciblés.  La violence encouragée par l’État est en hausse, à quoi s’ajoute qu’il est difficile pour les journalistes et les défenseurs des droits de l'homme d’obtenir un visa pour se rendre dans le pays afin de rendre compte de la situation qui y prévaut.  L’ONG a exhorté le Gouvernement de la République démocratique du Congo à mettre fin à la répression à l’encontre des militants des droits de l'homme.

La Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a dénoncé la répression violente contre des manifestants pacifiques en République démocratique du Congo, affirmant que les responsables doivent être poursuivis.  L’ONG a déploré la multiplication des poches d’instabilité dans le pays et a exhorté les autorités à coopérer avec les équipes d’experts internationaux.  Le Conseil doit rester saisi de la situation dans le pays.

La Fédération internationale de l'ACAT Action des chrétiens pour l'abolition de la torture - FIACAT a dénoncé la répression des manifestations pacifiques et a documenté des cas d’exécutions extrajudiciaires en République démocratique du Congo.  Dans ce pays, les pressions et les menaces s’exercent quotidiennement contre les défenseurs des droits de l'homme ; aussi, l’ONG demande-t-elle au Conseil de rester saisi de la situation.

Human Rights Watch a déploré les attaques contre des villages, indiquant avoir reçu des témoignages d’atrocités en République démocratique du Congo.  L’ONG a estimé que la réponse du Gouvernement et des forces de sécurité a été inadéquate, la milice et l’armée s’attaquant même aux civils dans certaines régions. Human Rights Watch a exhorté le Conseil à rester saisi de la situation.

Amnesty International a fait part de sa préoccupation face à l’impunité dont jouissent les auteurs d’attaques contre des manifestants pacifiques en République démocratique du Congo, y compris des membres des forces de sécurité qui ont lancé des tirs nourris sur ces manifestants.  L’ONG s’est félicitée de la création par le Gouvernement d’une commission d’enquête sur les événements du 31 décembre et du 21 janvier et a demandé au Conseil de veiller à ce que les auteurs de ces attaques, y compris les hauts responsables, soient traduits en justice.

L’Action internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs a dénoncé les propos d’une extrême gravité tenus par la Ministre des droits humains de la République démocratique du Congo lorsqu’elle a affirmé que le Gouvernement n’avait eu d’autre alternative que l’usage disproportionné de la violence à l’encontre des manifestants pacifiques.  L’ONG a relevé que cela démontrait « l’incapacité d’un régime répressif qui ignore le devoir de protéger ».

Réponses et conclusions

M. GILMOUR s’est félicité de l’engagement de la Ministre de la République démocratique du Congo en faveur de la libération de certains détenus, ainsi que de son engagement à ce que les prochaines manifestations se déroulent sans crainte d’une répression brutale.  La professionnalisation accrue des forces de sécurité doit être prioritaire, ce qui peut se faire par le biais de l’assistance technique du Haut-Commissariat, a ajouté M. Gilmour.  Quant à l’élargissement de l’espace de la société civile, le Sous-Secrétaire général aux droits de l'homme a rappelé que cela était clairement stipulé et défini dans l’Accord de la Saint-Silvestre.

MME ZERROUGUI a rappelé que la mise en place de conditions propices aux élections figuraient dans l’Accord du 31 décembre.  Il convient de mettre en œuvre le processus de paix de bonne foi, en faisant des concessions et sans s’accrocher à des interprétations juridiques, a-t-elle souligné.  Le Gouvernement doit faire davantage d’efforts, car la tenue des élections relève de sa responsabilité, a-t-elle insisté, soulignant que les figures emblématiques qui ont été emprisonnées doivent être libérées.  Pour éviter une nouvelle crise, a souligné Mme Zerrougui, il convient non seulement de permettre des élections crédibles en rassurant l’opposition à ce sujet, mais aussi de trouver une solution à ce qu’elle a appelé « la duplication des partis politiques ».  Le « déboursement » des fonds électoraux doit aussi être assuré.  Mme Zerrougui a par ailleurs rappelé le très lourd tribut payé par les femmes et les jeunes filles.  Elle a ainsi raconté que certains groupes armés mettaient en première ligne des jeunes vierges car elles sont censées empêcher les balles d’atteindre leur cible, ce qui explique en partie le nombre considérable de jeunes enfants tués.

M. NDIAYE a indiqué que la coopération avec le Gouvernement de la République démocratique du Congo s’effectue de façon tout à fait correcte jusqu’à présent et qu’il a pu travailler sans entrave, mais sans néanmoins pouvoir accéder en toute sécurité à toutes les zones.  M. Ndiaye a partagé les inquiétudes des intervenants concernant le niveau de violences dans le pays, y compris les violences sexuelles et celles contre les enfants, et s’agissant aussi de la question d’une dimension ethnique - contre laquelle il faut que des mesures soient prises rapidement.  Il a aussi attiré l’attention sur l’ampleur de la crise humanitaire et l’inadéquation de la réponse qui y est apportée.

MME MUSHOBEKWA a partagé l’opinion des experts sur le Kasaï et a assuré que le Gouvernement de la République démocratique du Congo reste disposé à coopérer avec les Nations Unies pour permettre de faire la vérité sur les massacres et pour transmettre les dossiers à la justice congolaise, qui poursuivra les présumés coupables et qui rendra justice à toutes les victimes.  Elle a répété qu’elle regrettait ce qui s’est passé dans le Kasaï, rappelant que des militaires avaient aussi perdu la vie, ainsi que deux accompagnateurs des Nations Unies dont les corps n’ont jamais été retrouvés.

La Ministre des droits humains a ensuite souligné que la liberté d’expression, la liberté de manifester et la liberté des cultes sont des droits garantis par la République démocratique du Congo et a rappelé que les mesures de suspension des manifestations ont été levées pour permettre à tous les partis politiques de faire campagne en vue des élections prévues pour la fin de l’année.  Mme Mushobekwa a en outre dit partager le point de vue du Sous-Secrétaire Général, qui a mis l’accent sur la professionnalisation des forces de sécurité, et a indiqué qu’elles seront sensibilisées au respect des droits de l'homme.
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* Délégations ayant participé au débat: Union européenne; Fonds des Nations Unies pour l'enfance; Fédération de Russie; Allemagne; Belgique; Suisse; États-Unis; Australie; France; Chine; Angola; Pays-Bas; Botswana; Algérie; Soudan; Royaume-Uni, Irlande; République du Congo; World Evangelical Alliance; African Development Association; Service international pour les droits de l'homme ; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH); Fédération internationale de l'ACAT Action des chrétiens pour l'abolition de la torture – FIACAT; Human Rights Watch; Amnesty International et Action internationale pour la paix et le développement dans la région des Grands Lacs.

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
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