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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'homme examine le rapport de Madagascar

11 Juillet 2017

Comité des droits de l'homme

11 juillet 2017

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le quatrième rapport périodique de Madagascar concernant les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. 

Présentant ce rapport, M. Charles Andriamiseza, Garde des Sceaux, Ministre de la justice de Madagascar, a souligné que, depuis 2003, le Gouvernement malgache avait mis en place un Comité interministériel chargé de la collecte des données et de la rédaction de tous les rapports sur les droits de l'homme.  Le présent rapport n'a pu être entrepris qu'en 2011, compte tenu de la crise socio-politique qu'a traversée Madagascar, a expliqué le Garde des Sceaux.  Madagascar s'est entretemps dotée d'une loi sur l'adoption visant au renforcement de la protection de l'enfance; d'une loi relative aux mesures et à la procédure applicables aux enfants en conflit avec la loi; ainsi que d'une loi portant réforme du Code de la nationalité, a relevé le chef de la délégation. 

Concernant l'administration pénitentiaire, un projet de loi sur les travaux d'intérêt général consacrant les peines alternatives à l'emprisonnement a été élaboré en partenariat avec le Comité international de la Croix-Rouge, a expliqué le Ministre de la justice.  Un projet de loi spécifique sur la violence basée sur le genre est en cours d'adoption.  M. Andriamiseza a expliqué enfin que la pleine réalisation des droits de l'homme à Madagascar avait été considérablement affectée par les impacts de la crise socio-politique de 2009.  De plus, les effets des changements climatiques et les phénomènes imputables à El Niño – cyclones, épisodes de sécheresse et inondations – ont encore aggravé cette situation. 

La délégation malgache était également composée de représentants des Ministères des affaires étrangères; de la justice; de l'intérieur et de la décentralisation; de la sécurité publique; de la fonction publique et de la réforme de l'administration; des affaires sociales; de la santé publique; de l'emploi; et de la jeunesse et des sports. 

La délégation a répondu aux questions et observations du Comité au sujet, notamment, de l'invocation du Pacte devant les tribunaux; de la justice traditionnelle; de la politique carcérale et de la surpopulation carcérale; des discriminations à l'encontre des femmes; de la liberté de la presse; du système électoral; de la protection des journalistes et des défenseurs des droits de l'homme; de la nationalité; de la poursuite des auteurs de graves violations des droits de l'homme durant la crise politique entre 2009 et 2013; et de la lutte contre la torture.

Un membre du Comité a souligné que Madagascar avait traversé cinq ans de crise qui y ont mis à mal la protection des droits de l'homme.  L'expert a souligné que le pays était cependant sur la bonne voie après des élections qui ont été jugées, par les observateurs internationaux, comme fiables et grâce à un certain retour à l'état de droit.  Un autre expert a regretté le manque d'information concernant les enquêtes sur les violations des droits de l'homme commises durant la période 2009-2013, qui n'ont donné lieu à aucune poursuite à ce jour.  Il a souhaité savoir si cette situation était à mettre en parallèle avec une volonté de réconciliation.  Dans ce contexte, l'expert a demandé si la loi d'amnistie était appliquée, quel était son champ d'application et si des victimes avaient déjà été indemnisées. 

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de Madagascar, qu'il rendra publiques à l'issue de la session, le 28 juillet prochain.

Le Comité entame cet après-midi, à 15 heures, l'examen du rapport initial du Pakistan

Examen du rapport

Présentation

Le Comité était saisi du quatrième rapport périodique de Madagascar (CCPR/C/MDG/4), ainsi que de ses réponses (CCPR/C/MDG/Q/4/Add.1) à une liste de points à traiter (CCPR/C/MDG/Q/4) que lui avait adressée le Comité.

M. CHARLES ANDRIAMISEZA, Garde des Sceaux, Ministre de la justice de Madagascar et chef de la délégation, a souligné que, depuis 2003, le Gouvernement malgache avait mis en place un Comité interministériel de rédaction des rapports, chargé de la collecte des données et de la rédaction de tous les rapports sur les droits de l'homme.  Le présent rapport n'a pu être entrepris qu'en 2011, compte tenu de la crise socio-politique qu'a traversée Madagascar, a expliqué le Garde des Sceaux.  

Concernant le respect des obligations internationales, la loi autorisant la ratification de la Convention internationale sur l'entraide judiciaire et l'extradition a été promulguée en 2016.  Le processus de dépôt des instruments de ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture (concernant les visites de lieux de détention) et du second Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (sur la peine de mort) est en cours, a fait savoir M. Andriamiseza. 

Madagascar s'est par ailleurs dotée d'une loi sur l'adoption visant au renforcement de la protection de l'enfance; d'une loi relative aux mesures et à la procédure applicables aux enfants en conflit avec la loi; ainsi que d'une loi portant réforme du Code de la nationalité, a relevé le chef de la délégation.  Au plan judiciaire, la plupart des membres de la Haute Cour de justice et du Haut Conseil pour la défense de la démocratie et de l'état de droit ont été élus, a-t-il fait savoir.

Concernant l'administration pénitentiaire, un projet de loi sur les travaux d'intérêt général consacrant les peines alternatives à l'emprisonnement a été élaboré en partenariat avec le Comité international de la Croix-Rouge, a expliqué le Ministre de la justice.  Un projet de loi spécifique sur la violence basée sur le genre est en cours d'adoption. 

Le plan d'action national de lutte contre la traite des personnes se poursuit: un manuel des procédures judiciaires et de prise en charge des victimes est en cours d'élaboration, parallèlement à l'intensification des campagnes de sensibilisation. 

Le Ministre de la justice a souligné également que des mesures avaient été prises en vue d'éradiquer le problème d'apatridie à Madagascar.  D'autres mesures ont été prises dans le domaine de l'éducation et de la fonction publique.  Pour assurer la protection et la gestion durable des ressources naturelles, le Gouvernement malgache a renforcé son arsenal juridique relatif à l'environnement. 

En application de la nouvelle loi sur les Pôles anti-corruption, le Gouvernement a lancé un appel à candidatures ouvert aux magistrats et aux personnels administratif et technique, en avril 2017.  Le Pôle anti-corruption d'Antananarivo ouvrira à la fin de ce mois.  

Le chef de la délégation a expliqué enfin que la pleine réalisation des droits de l'homme à Madagascar avait été considérablement affectée par les impacts de la crise socio-politique de 2009.  De plus, les effets des changements climatiques et les phénomènes imputables à El Niño – cyclones, épisodes de sécheresse dans le sud et  inondations – ont encore aggravé cette situation. 

Questions et observations des membres du Comité

Un membre du Comité a souligné que Madagascar avait traversé cinq ans de crise qui y ont mis à mal la protection des droits de l'homme.  L'expert a souligné que le pays était sur la bonne voie après des élections qui ont été jugées, par les observateurs internationaux, comme fiables et grâce à un certain retour à l'état de droit.

Cet expert a souligné que le Pacte pouvait être invoqué directement par les tribunaux malgaches.  Le Constitution donne au Pacte une autorité supérieure à celle des lois.  L'expert a demandé quel était le contenu de la loi d'application des dispositions du Pacte et quelle était la position de la Haute Cour constitutionnelle, de la Cour suprême, de la Cour d'appel et de la Haute Cour de justice concernant le Pacte.  Ce même expert a souhaité avoir des exemples de mise en application des recommandations du Comité par les autorités malgaches. 

L'expert a demandé où en était la création de la Commission nationale des droits de l'homme.  Il a souhaité savoir comment avaient été organisées les élections des membres de cette institution issus de la société civile, quand la procédure d'accréditation de l'institution serait terminée et  quels étaient les objectifs du Haut Conseil pour la défense de la démocratie et l'état de droit. 

Ce même expert a demandé ce qu'il en était de la révision de la loi sur l'état d'urgence, notamment s'il était possible de déroger à certaines dispositions du Pacte en cas d'état d'urgence. 

Un autre expert a mentionné le fait que les autorités malgaches reconnaissent qu'il reste beaucoup d'efforts à faire concernant la participation des femmes à la vie politique.  À cet égard, l't expert a demandé quelles actions avaient été mises en œuvre dans le cadre de la stratégie «Genre et élections» (2015-2020).  Il a demandé à la délégation si des mesures temporaires spéciales seraient prises pour renforcer la position des femmes dans la vie politique et publique et si un système de quota pouvait être envisagé.  L'expert a demandé davantage de détails sur les mesures prises pour favoriser la présence des femmes dans le vie économique de Madagascar et pour concrétiser l'égalité salariale entre hommes et femmes.

Le même expert a souligné que les nouvelles dispositions concernant la transmission de la nationalité semblaient avoir effacé la plupart des mesures discriminatoires dans la transmission de la nationalité par le père ou la mère malgache.  Il a demandé si cette réforme était rétroactive, ce qui permettrait de régulariser certaines situations d'apatridie. 

Ce même expert a souligné qu'il restait des problèmes de discrimination concernant l'accès à la propriété foncière.  En matière de succession, l'expert a demandé si la loi autorise toujours les héritières à recevoir la succession foncière sous forme d'argent et si le conjoint femme était toujours relégué au huitième rang des héritiers.  L'expert a demandé si Madagascar comptait adopter une législation exhaustive en matière de discrimination au motif de l'orientation sexuelle, comme l'a recommandé le Comité pour l'élimination des discriminations à l'égard des femmes.  L'expert a prié la délégation de donner davantage d'informations sur les mesures prises pour lutter contre les discriminations fondées sur l'appartenance ethnique et à une caste dite «de descendants d'esclaves».  L'expert a souligné que le rapport malgache contenait peu de renseignements sur la lutte contre la stigmatisation des personnes vivant avec le VIH/sida et par les personnes  lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres.

De même, l'expert a regretté le manque d'information concernant les enquêtes sur les violations des droits de l'homme commises durant la période 2009-2013, qui n'ont donné lieu à aucune poursuite à ce jour.  Il a souhaité savoir si cette situation était à mettre en parallèle avec une volonté de réconciliation.  Dans ce contexte, l'expert a demandé si la loi d'amnistie était appliquée, quel était son champ d'application et si des victimes avaient déjà été indemnisées. 

Une experte a demandé où en était le projet de loi concernant les peines substitutives à la peine de mort et ce qu'il en était de la ratification du deuxième Protocole facultatif au Pacte, concernant la peine de mort.  Cette même experte a demandé davantage d'informations sur les exécutions sommaires et extrajudiciaires commises par des policiers: certains d'entre eux auraient incendié des villages dans le sud de Madagascar, selon certaines allégations, provoquant la mort de personnes âgées et de personnes handicapées, a-t-elle relevé.  Cette experte a demandé si les victimes avaient reçu des compensations.  Elle s'est interrogée sur les mesures adoptées pour faire cesser les violences et traduire leurs auteurs en justice.  L'experte a aussi prié la délégation de dire ce qui était fait pour combattre les superstitions qui entraînent des violations des droits de l'homme.

L'experte a demandé d'autre part davantage d'informations sur l'accès aux méthodes de contraception à Madagascar et sur le bilan des formations en matière de santé sexuelle et procréative.  Elle a regretté le vide juridique au sujet de l'accès à l'interruption volontaire de grossesse, même lorsqu'il y a risque pour la vie ou la santé physique ou mentale de la femme enceinte, ou si la grossesse est la conséquence d'un viol ou de l'inceste.  L'experte a demandé si une étude avait été réalisée sur les causes de l'avortement illégal et sur ses conséquences pour la mortalité maternelle. 

Un autre expert a souligné que, selon certaines enquêtes, 65% des femmes malgaches interrogées ont déclaré avoir subi un acte de violence basée sur le genre.  Il semble établi que la violence familiale et la violence sexuelle sont socialement acceptées et restent entourées d'une culture de silence et d'impunité à Madagascar, a observé cet expert.  Il a dès lors demandé à la délégation si le Gouvernement envisageait d'adopter une loi incriminant le viol conjugal, notamment à l'encontre des époux vivant avec le VIH/sida; et de prendre des dispositions légales clarifiant la définition des violences basées sur le genre.  Ce même expert a demandé à la délégation d'expliquer les défis à relever pour une mise en œuvre de la recommandation précédente du Comité au sujet de la polygamie.  Il a demandé des précisions sur les programmes éducatifs destinés aux chefs traditionnels, aux parents et aux enfants afin de lutter contre les coutumes et les traditions discriminatoires à l'égard des femmes et des filles, dans la famille et dans la société. 

Une autre experte a souligné que la législation de 2008 introduisait une définition de la torture reposant sur celle de la Convention contre la torture.  Cette loi ne prévoit pas pour autant une échelle des peines pour les autres traitements inhumains.  Une réforme de cette loi est en cours, a-t-elle observé, demandant où en était cette réforme.  L'experte a regretté que le droit malgache ne prévoie pas l'imprescriptibilité du crime de torture et a demandé quelles mesures avaient été prises pour lutter contre les aveux obtenus sous la torture devant les tribunaux.  L'experte a déploré ne pas avoir trouvé dans le rapport d'informations sur d'éventuelles plaintes, poursuites, peines et sanctions infligées; ni sur les réparations accordées aux victimes et aux familles dans le cadre des allégations de traitements inhumains en garde à vue ou durant une arrestation. 

Enfin, l'experte a demandé quelles mesures avaient été prises pour lutter contre les châtiments corporels à l'encontre des enfants, dans les familles ou les établissements de placement ou pénitentiaires.

Un expert a demandé ce qu'il en était des auteurs de violations graves des droits de l'homme qui ne peuvent pas bénéficier de l'amnistie.  Ce même expert a demandé en quoi le fait de faire de l'avortement une contravention, et non plus un crime, allait apporter une solution dans ce domaine.

Une experte a souligné certaines difficultés en matière de garantie des droits des personnes en détention.  Des informations en possession du Comité font état de carences dans l'accès à un avocat ainsi que dans l'information des détenus quant à leurs droits lors des placements en garde à vue.  Cette experte a demandé quelle est la limite de la garde à vue et les raisons pouvant être invoquées pour son prolongement.  L'experte a demandé quelles mesures étaient prises pour conserver le caractère exceptionnel de la détention préventive, et souligné que plus de 50% des détenus malgaches sont en détention préventive. 

Une autre experte s'est dite inquiète que le Ministre de la justice fasse partie de la direction du Conseil de la magistrature et que le ministère public dépende du Ministère de la justice: cela peut jeter des doutes sur l'indépendance des juges.  L'experte a demandé si des réformes avaient été envisagées pour renforcer la confiance du citoyen en la justice malgache.  Cette experte a demandé davantage d'informations sur l'aide juridictionnelle gratuite et ses bénéficiaires. 

Cette même experte a demandé comment fonctionnait le système des Dina par rapport à la justice classique et quelles mesures étaient prises pour faire des enquêtes sur le recours abusif à cette modalité de convention collective typiquement malgache. 

Un membre du Comité a salué l'effort consenti par les autorités malgaches pour ouvrir le milieu carcéral aux observateurs.  Il a relevé que les 82 prisons de Madagascar ont une capacité d'accueil officielle de 10 000 détenus: or, ces prisons accueillent plus de 20 000 détenus, a relevé l'expert.  Outre la surpopulation carcérale, l'expert a relevé des problèmes de malnutrition dans les centres de détention.  Il a voulu savoir si le Gouvernement comptait faire preuve de davantage de volonté politique pour améliorer les conditions de vie dans les prisons. 

Ce même expert a demandé si les autorités malgaches comptaient adopter une législation sur l'asile conforme aux exigences internationales.  L'expert a regretté qu'il n'y ait pas d'initiative pour créer un bureau pour les réfugiés et les apatrides.  Des migrants se trouvant sur le territoire malgache depuis des générations sont tenus à l'écart en raison des dispositions concernant la nationalité, a-t-il regretté. 

Cet expert a salué les efforts des autorités malgaches pour lutter contre la corruption, notamment avec la mise en place d'un pôle anti-corruption.  Il reste cependant des résistances, a souligné l'expert: les mécanismes n'arrivent pas à travailler concrètement et il y a des interventions politiques pour faire cesser certaines poursuites.  L'expert a demandé ce que pouvait faire le Gouvernement pour lutter contre les résistances à la lutte contre la corruption. 

Un autre expert a déploré qu'un nombre important de femmes et d'enfants soient victimes de trafic entre Madagascar et plusieurs autres pays, à des fins de travaux forcés, de servitude domestique et de prostitution.  Cet expert a souhaité connaître les causes de cette situation et pourquoi la loi contre la traite était si difficile à appliquer.  Il a demandé à la délégation quels étaient les progrès réalisés dans la mise en œuvre des stratégies et plans d'action nationaux contre le travail forcé et l'exploitation des enfants. 

De nombreux enfants ne sont pas inscrits dans les registres de l'état civil, en particulier dans certaines communautés rurales, a relevé le même expert.  Il a demandé les causes de cette situation, les mesures prises pour y remédier et les progrès dans la mise en œuvre du Programme national de réhabilitation de l'enregistrement des naissances.

Ce même expert a demandé quelles étaient les raisons du retard de la mise en place du Conseil pour la réconciliation nationale et, le cas échéant, de donner une date qui tiendrait compte du respect du calendrier des élections régionales de 2017 et présidentielles de 2018.  Cet expert a par ailleurs savoir quelles garanties d'indépendance, d'autonomie et d'efficacité le Gouvernement pourrait octroyer à la Commission électorale nationale indépendante en tant qu'organe chargé d'organiser et de gérer les opérations électorales, ainsi que d'arrêter et de publier les résultats provisoires des scrutins. 

Cet expert a souligné que le niveau de participation des femmes à la vie politique malgache restait très faible en raison, notamment, de l'absence de cadre législatif incitatif et de la réticence des partis politiques à accorder davantage d'intérêt aux candidatures féminines.  L'expert a demandé quels étaient les progrès enregistrés et les défis à relever en vue de l'adoption et de la mise en œuvre de la loi sur la parité entre les sexes.  L'expert a demandé si le Gouvernement pouvait réformer le code électoral en y introduisant des dispositifs spécifiques qui faciliteraient la pleine participation des personnes handicapées. 

Un autre expert a demandé des informations sur le cas d'un opposant politique qui, le 23 juillet 2013, a été arrêté par les forces de l'ordre et inculpé pour avoir organisé des rassemblements publics non autorisés.  Cet opposant a été condamné à deux mois de prison avec sursis mais les auteurs de violence qui ont participé à son arrestation n'ont pas été poursuivis.  L'expert a cité plusieurs cas de journalistes ayant subi des violences de la part des forces de l'ordre ou ayant été arrêtés pour divers chefs d'inculpation, comme la diffamation.  L'expert a aussi demandé des informations sur un activiste écologiste poursuivi pour des motifs liés à la liberté d'expression.  Le «code de la communication» est dénoncé par un certain nombre d'associations de défense des droits de l'homme, a poursuivi cet expert.  Il prévoit notamment des amendes disproportionnées au regard des faits reprochés.  Le même problème se pose s'agissant de la loi sur la lutte contre la cybercriminalité, a dit l'expert.  L'expert a souligné enfin qu'il restait beaucoup de difficultés pour manifester à Madagascar.  Le 6 juillet dernier, la manifestation du chef d'un parti politique a été interdite et dispersée par les forces de l'ordre. 

Réponses de la délégation

La délégation a expliqué que le Pacte pouvait être directement invoqué par les tribunaux.  Le système malgache est moniste.  Pour se conformer au Pacte, ainsi qu'aux exigences du Protocole facultatif, le Gouvernement entend élaborer un projet de loi pour faire en sorte que toutes les dispositions prévues dans ces deux instruments soient appliquées au niveau national.

La Constitution prévoit des dérogations à l'application de certaines dispositions en cas d'état d'urgence, d'état de nécessité nationale ou de loi martiale.  Cette proclamation est conditionnée par l'approbation et l'avis des Présidents de l'Assemblée nationale, du Sénat et de la Haute Cour constitutionnelle.  L'étendue et la durée des mesures d'exception sont conditionnées dans une loi organique votée par les deux assemblées.  Dans ce cas, le Président de la République peut gouverner par ordonnances.  Cette dérogation ne veut pas dire que le Président fait ce qu'il veut: le Parlement et la Haute Cour constitutionnelle gardent le contrôle, a précisé la délégation. 

Elle a indiqué d'autre part que la Commission nationale des droits de l'homme était opérationnelle depuis la prestation de serment de ses membres devant la Cour suprême, en octobre 2016.  Un problème d'ordre budgétaire empêche son fonctionnement aujourd'hui, faute d'adoption du décret nécessaire pour débloquer les budgets la concernant.  Ce devrait être bientôt chose faite, selon la délégation.  Le Gouvernement ne veut pas se mêler du fonctionnement de l'institution, dont les membres sont majoritairement issus de la société civile.  Leur élection s'est réalisée en partenariat avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme et l'Organisation internationale de la Francophonie. 

La délégation a précisé que le processus d'accréditation de la Commission nationale des droits de l'homme ne commencerait qu'à partir du moment où l'institution serait opérationnelle et effective.  La délégation a précisé également la différence entre le Commission nationale des droits de l'homme et le Haut Conseil pour la démocratie et l'état de droit.  Sur le plan fonctionnel, le Haut Conseil est un observatoire: il contrôle les pratiques dans l'administration et le secteur privé, y compris les violations des droits de l'homme.  La Commission assure quant à elle la promotion et la protection de tous les droits de l'homme sur le terrain.  Le Haut Conseil peut formuler des recommandations à toutes les institutions publiques et privées. 

L'État ne peut pas s'immiscer dans les affaires de la Commission électorale nationale indépendante.  Il ne fait qu'appuyer la sécurisation du système électoral.  Le code électoral dispose de tous les aspects liés au découpage des circonscriptions, a expliqué la délégation. 

Administration de la justice, La délégation a souligné que l'accès à un avocat était problématique en raison de leur faible nombre à Madagascar.  Le procès-verbal de police n'est valide que si la personne détenue a été informée de ses droits, a par ailleurs indiqué la délégation.  Toute décision du Dina doit être notifiée aux autorités administratives et judiciaires, a expliqué la délégation. 

Le budget alloué à la police nationale a augmenté de 8% par rapport à 2016, a expliqué la délégation.  Quatre-vingt-dix-sept commissariats de police sont ouverts aux usagers.  Néanmoins, 32 districts ne sont pas encore pourvus en commissariat.  L'objectif du Gouvernement est d'en créer deux à trois supplémentaires par an.  Des efforts ont été réalisés pour lutter contre la corruption lors des concours de recrutement des agents de police. 

Des mesures ont été prises pour réaliser des enquêtes sur les allégations de violences perpétrées par les forces de l'ordre dans le sud de Madagascar.  À la suite de ces opérations en 2013, une pacification a été effectuée par les trois ministères concernés par la sécurité.  Les auteurs d'exécutions extrajudiciaires ont été traduits en justice, a expliqué la délégation.  Dans le cas d'aveux obtenus par l'usage de la force ou la contrainte lors d'une garde à vue, le Ministère public peut prendre des mesures immédiates: écarter ces aveux, prononcer la nullité de la procédure et demander la reprise de l'enquête par une autre entité de police judiciaire.  Un service d'inspection de la police nationale peut ouvrir des enquêtes en cas d'allégations de mauvais traitements par les forces de l'ordre.

Pour régler le problème de la surpopulation carcérale, des projets d'aménagement des peines sont lancés: il est ainsi prévu de recourir davantage aux travaux d'intérêt général.  Il y a en effet plus de 50% de détenus en détention préventive, a reconnu la délégation.  Les détenus peuvent porter plainte.  Il y a des boîtes de doléances dans la plupart des centres de détention.  Une personne placée sous mandat de dépôt à des voies de recours et peut faire opposition à cette décision. 

La délégation a expliqué que le projet de loi concernant la torture introduit une échelle de peines et impose l'ouverture d'une enquête dès que des éléments indiquent une possibilité d'acte de torture.  Le Gouvernement envisage soit de créer un mécanisme indépendant de prévention de la torture, soit de renforcer les mandats de la Commission nationale des droits de l'homme en y intégrant les dispositions du Protocole facultatif à la Convention contre la torture.  Il n'y a pas d'amnistie en matière de torture, a par ailleurs relevé la délégation, et sa répression est réelle: par exemple, une policière a été poursuivie pour acte de torture et condamnée par un tribunal à cinq ans d'emprisonnement.

La délégation a confirmé que le Président de la République et le Ministre de la justice étaient respectivement Président et Vice-Président du Conseil de la magistrature, et indiqué que la grande majorité des autres membres étaient élus.  La délégation a par ailleurs souligné que les magistrats devaient motiver leur décision de placement sous mandat de dépôt avec des motifs très précis depuis l'année dernière. 

Concernant les faits survenus entre 2009 et 2013, les tribunaux ont prononcé des amnisties pour les affaires déjà jugées.  Les indemnisations aux victimes et les affaires qui n'ont pas été jugées seront réglées par le Conseil pour la réconciliation nationale, a expliqué la délégation. 

Le Ministère de la justice a fait réaliser une étude par un expert sur les peines qui doivent remplacer la peine de mort dans le code pénal.  La peine de mort existe encore dans le code pénal mais les magistrats ne la prononcent plus.  En l'absence de texte législatif, ils prononcent une peine de travaux à perpétuité ou à temps.

La délégation a expliqué que s'il y avait peu de plaintes concernant les violences basées sur le genre, c'est peut-être que le phénomène n'était pas très courant au sein de la population.  La délégation a néanmoins souligné que le nombre de plaintes avait augmenté ces dernières années.  Des difficultés persistent pour obtenir des données ventilées sur les violences basées sur le genre, a reconnu la délégation.  Des centres d'écoute et de conseil juridique ont été ouverts par le Ministère de la population.  Il y a trois centres de prise en charge intégrée des enfants et des victimes de violences sexuelles à Madagascar et un quatrième est en construction.

En application des dispositions du code pénal sur la répression du viol, les services de police judiciaire prennent en charge de manière plus spécifique les victimes de viol conjugal.  Il s'agit d'une circonstance considérée comme aggravante. 

La Constitution prévoit que tous les hommes sont égaux et interdit toute discrimination fondée sur la race, le sexe, la fortune et autres.  Cependant, de nombreuses lois ne tiennent pas encore compte de ce principe, a reconnu la délégation.  Dès lors le Gouvernement entend légiférer pour faire respecter le principe de non-discrimination.  Le Gouvernement continue ses efforts en matière de sensibilisation par l'intermédiaire de campagnes dans les zones reculées ou d'émissions télévisées afin d'améliorer la promotion et la protection des droits des femmes.  La loi sur la fonction publique stipule que tous les fonctionnaires perçoivent des salaires égaux, selon le principe «à travail égal, salaire égal».  

La délégation a expliqué que le code de la nationalité avait été réformé en 2016.  Depuis, la femme peut transmettre immédiatement sa nationalité, quel que soit son régime matrimonial.  Certains problèmes se posent encore concernant la discrimination, a reconnu la délégation.  La femme malgache ne peut pas encore transmettre à son mari étranger ou apatride sa nationalité, contrairement au mari qui peut transmettre sa nationalité à sa femme étrangère ou apatride.  Les nouvelles dispositions relatives au code de la nationalité sont rétroactives, a relevé la délégation. 

La délégation a souligné que la loi prévoit toujours que le conjoint survivant est au huitième rang de succession s'il n'y a pas de testament.  Cette disposition est valable pour le conjoint homme ou le conjoint femme, il n'y a pas de distinction entre hommes et femmes.

La délégation a expliqué qu'il n'y avait pas de mesures particulières concernant la population LGBTI.  Il y a cependant de plus en plus de tolérance dans le pays concernant la communauté LGBTI, a relevé la délégation.

La polygamie est une coutume à Madagascar: elle est considérée commune union libre acceptée par la société.  Il en est de même pour le mariage précoce.  Cependant ces «mariages» ne sont pas reconnus.  Selon la délégation, il n'y a pratiquement plus de mariages précoces d'enfants à Madagascar.  La délégation a assuré d'autre part qu'aucune loi n'interdisait le mariage entre membres de certaines castes.  Il n'y a plus de «descendants d'esclaves» à Madagascar, a expliqué la délégation. 

Pour faciliter l'accès à la terre, le Gouvernement malgache a élaboré une lettre de politique foncière qui sécurise la propriété foncière à Madagascar.  Elle a pour objectif l'inclusion de tous, hommes et femmes, dans le processus d'accès à la terre. 

La délégation a dit manquer d'informations concernant les méthodes contraceptives au sein de la population.  Elle a expliqué que l'avortement était toujours illégal à Madagascar, mais qu'un projet de loi prévoit de le décriminaliser.  Les personnes qui pratiquent l'avortement ne sont pas toutes qualifiées pour le faire, vu son interdiction.  La délégation a souligné que la mortalité maternelle était principalement due à des accouchements qui tournent mal plutôt qu'aux avortements. 

Concernant les différentes affaires liées à la liberté d'expression et au droit de réunion soulevées par un expert, la délégation a expliqué que le Ministère de la justice n'intervenait pas dans les affaires de justice liées aux journalistes, aux médias ou aux activistes et que les libertés fondamentales étaient respectées à Madagascar.  L'exercice de ces droits civils et politiques est strictement règlementé par la loi et uniquement par la loi, a expliqué la délégation. 

Madagascar utilise un système de données informatisées en matière de traite des personnes au niveau de la région de l'Afrique australe.  Le Gouvernement a élaboré des outils destinés aux acteurs qui agissent dans le domaine de la lutte contre la traite.  Depuis l'application de la loi sur la traite, plusieurs cas ont été recensés et plusieurs dossiers ont été enregistrés au tribunal d'Antananarivo.  En 2017, 35 personnes ont été impliquées dans des dossiers liés à la traite: ces dossiers sont toujours en cours. 

Concernant la lutte contre le travail des enfants, la délégation a expliqué que le code du travail réprime ce phénomène et que le Gouvernement a pris un décret pour lutter contre les pires formes de travail des enfants.  La délégation a expliqué qu'il existait une ligne verte pour dénoncer les violences sexuelles à l'encontre des enfants.  Une division de cybercriminalité a été créée au sein de la police nationale pour lutter contre les sévices sexuels infligés aux enfants par le biais des réseaux sociaux. 

Concernant la reconnaissance de la personnalité juridique, le Programme national de réhabilitation de l'enregistrement des naissances existe depuis 2004.  Le Gouvernement malgache veut instaurer une administration de proximité afin de faciliter l'inscription à l'état civil. 

La délégation a expliqué qu'une partie de l'écart salarial entre hommes et femmes pouvait s'expliquer par la charge familiale des femmes, qui les empêche de travailler la nuit ou de faire des heures supplémentaires. 

Conclusion

M. CHARLES ANDRIAMISEZA, Garde des Sceaux, Ministre de la justice de Madagascar, a exprimé sa profonde reconnaissance aux membres du Comité pour ce dialogue enrichissant et constructif.  Il a permis de discuter des défis liés à l'application du Pacte à Madagascar.  Le Gouvernement s'engage à œuvrer pour la protection et la promotion des droits de l'homme pour l'ensemble des Malgaches. 

M. YUJI IWASAWA, Président du Comité, a estimé que la dialogue avait été très constructif.  Les membres du Comité ont constaté des avancées positives, comme l'ouverture les prisons aux observateurs internationaux et la lutte contre les discriminations à l'encontre des femmes.  Le Président du Comité a énuméré les nombreuses questions soulevées par les membres du Comité: l'indépendance de la Commission nationale des droits de l'homme, la discrimination à l'encontre des femmes, la transmission de la nationalité, la discrimination à l'égard des femmes dans l'héritage, le mariage et le droit foncier, les pratiques nuisibles telles que le mariage forcé et le mariage précoce, la polygamie, la torture, les violations des droits de l'homme durant les périodes de crise politique, ou la justice traditionnelle.  La délégation a fait de son mieux pour apporter des réponses à toutes les questions, s'est réjoui M. Iwasawa. 

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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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