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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme entame sa journée annuelle de débat sur les droits des femmes

Débat sur les droits des femmes

13 Juin 2017

MATIN

Il débat de la participation des hommes et des garçons dans la prévention et la réponse à la violence à l'égard des femmes

GENEVE (13 juin 2017) - Le Conseil des droits de l'homme a tenu ce matin, dans le cadre de sa journée annuelle sur les droits humains des femmes, une première table ronde consacrée au thème: «intensifier les efforts en vue de l'élimination de la violence à l'égard des femmes: engager les hommes et les garçons dans la prévention et la réponse à la violence à l'égard des femmes».  Se tiendra cet après-midi, de 15 heures à 18 heures, une deuxième table ronde consacrée au thème de l'application du Programme de développement durable à l'horizon 2030 dans la perspective de l'égalité en santé et entre les sexes. 

Ouvrant cette journée, la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, Mme Kate Gilmore, a rappelé qu'un tiers des filles et des femmes dans le monde sont victimes de violence au moins une fois dans leur vie, ce qui fait de la violence sexiste la violation des droits de l'homme la plus fréquente sur la planète.  Face à cette situation, les normes internationales des droits de l'homme garantissent l'égal exercice des droits pour tous, dont il reste à tenir la promesse pour des millions de personnes, a-t-elle souligné, ajoutant que la moitié de la population mondiale vit dans l'ombre de la crainte et de la menace.  Dans ces conditions, le moment est venu de revendiquer une place pour les hommes et les garçons dans la lutte pour l'égalité hommes-femmes et contre l'odieuse violence sexiste, a indiqué Mme Gilmore. 

La masculinité, toxique et positive; les normes sexospécifiques; la façon dont la société modèle nos comportements; le sexisme; la relation entre le genre et la réduction de la violence; le renforcement des capacités des décideurs et autres acteurs; l'implication du système éducatif; ou encore la manière dont les gouvernements, le secteur privé et la société civile peuvent travailler ensemble, sont autant de thèmes choisis pour étayer les discussions de ce matin, a pour sa part indiqué l'animatrice de la table ronde, Mme Lana Wells, titulaire de la chaire Brenda Strafford sur la prévention de la violence domestique à l'Université de Calgary (Canada).

Mme Karen Ellemann, Ministre de l'égalité des chances et de la coopération nordique du Danemark, a déclaré que la violence, qu'elle soit physique ou psychologique à l'encontre des femmes et des filles est une violation de leurs droits humains, de leur droit à vivre à l'abri de la violence et de la coercition.  Ces formes de violence empêchent les femmes et filles de toutes les régions du monde de vivre pleinement leur vie et d'exercer leurs droits, a-t-elle ajouté.  On sait que l'on ne peut éliminer cette violence si on exclut la moitié de l'humanité, à savoir les garçons et les hommes, a-t-elle poursuivi, ajoutant qu'il faut sensibiliser les hommes et les garçons aux conséquences de la violence mais aussi aux moyens d'éliminer les stéréotypes, les comportements patriarcaux, les notions de masculinité et les normes sociales négatives.

Parmi les quatre panélistes ayant pris part à la discussion, M. Dubravka Simonovic, Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes, ses causes et ses conséquences, a mis l'accent sur la nécessité d'une réponse à la fois multisectorielle et coordonnée avec la participation active des hommes, d'une part, et la mise en œuvre effective des instruments internationaux, en particulier la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, de l'autre. 

M. Abhijit Das, Coprésident de MenEngage Alliance et fondateur de Men's Action for Stopping Violence against Women, Inde, a incité à concevoir des modèles alternatifs qui ne partent pas du principe que «si les femmes y gagnent les hommes vont y perdre». 

M. Francis Oko Armah, militant auprès des jeunes, Curious Minds, Ghana, a observé que les garçons apprennent qu'ils doivent être durs, voire violents, pour être masculins, et que son association leur montre donc d'autres perspectives.  Il faut que les garçons comprennent en quoi consiste vraiment le fait d'être un homme, a-t-il souligné. 

M. Anthony Keedi, Conseiller technique sur les masculinités, Centre de ressources ABAAD pour l'égalité des sexes, Liban, s'est penché pour sa part sur la réalité des jeunes hommes en temps de guerre.  Beaucoup vont devenir la réalité qui les entoure, en commençant par un sexisme bienveillant, par exemple en justifiant les mariages précoces sous prétexte de protéger les filles du conflit, a-t-il expliqué, ajoutant que ces jeunes hommes apprennent la violence, la domination.

De très nombreux intervenants* ont pris part à la table ronde.  L'accent a été mis sur la nécessité d'associer les hommes et les garçons à la lutte contre la violence faite aux femmes et aux filles et contre les inégalités dont celles-ci pâtissent.  Il ne s'agit en effet pas seulement d'une affaire de femmes car les effets de ces violences et inégalités se font ressentir sur les personnes des deux sexes.  Par ailleurs, il ne suffit pas seulement de promulguer des lois; encore faut-il trouver des méthodes innovantes pour les faire appliquer, a-t-il été souligné.  Plusieurs intervenants ont insisté sur la nécessité d'interroger la définition et la perception de la masculinité et de lutter contre les préjugés et les stéréotypes patriarcaux.  Les choix de chaque société, en fonction de ses spécificités,  doivent être respectés, a pour sa part souligné la délégation égyptienne, au nom du Groupe arabe.

 

À la mi-journée, le Conseil doit poursuivre son débat interactif, entamé hier après-midi, avec le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection de la liberté d'expression et d'opinion, M. David Kaye. 

 

Journée annuelle de discussion sur les droits humains des femmes

Table ronde 1: Accélérer les efforts pour éliminer la violence faite aux femmes en faisant participer les garçons et les hommes à la prévention et à la lutte

Déclarations liminaires

MME KATE GILMORE, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a ouvert la journée annuelle de discussion sur les droits humains des femmes en rappelant qu'un tiers des filles et des femmes sont victimes de violence au moins une fois dans leur vie.  Cette statistique montre que la violence sexiste contre les femmes et les filles est la violation des droits de l'homme la plus fréquente sur la planète, a-t-elle souligné, précisant qu'il ne s'agit pas seulement de violence physique, mais aussi de la manifestation du pouvoir et de l'intimidation.  La crainte de la violence influence la capacité des femmes à faire des choix, que cela concerne le mariage ou l'emploi, a-t-elle indiqué.

Les femmes et les filles sont les cibles de violences publiques aussi bien que privées, a poursuivi Mme Gilmore.  Les normes internationales de droits de l'homme garantissent l'égal exercice des droits pour tous; or, c'est une promesse qui reste à tenir pour des millions de personnes.  La moitié de la population vit dans l'ombre de la crainte et de la menace, a insisté la Haut-Commissaire adjointe.  Toute pratique qui dépend d'une violation de l'intégrité physique ou mentale du plus fort par le plus faible n'est pas une tradition; ce n'est pas une culture qui rendrait cette violation acceptable, a-t-elle souligné.  Exiger la mutilation d'une fillette est indigne et le mariage ne peut pas exiger la seule dignité de l'homme, a-t-elle ajouté.  Nous pouvons empêcher la violence sexiste à condition d'avoir la volonté de transformer les normes sociales préjudiciables, a affirmé Mme Gilmore.  Il ne faut pas gaspiller le talent et la capacité humaine sur la base de préjugés et de l'exclusion. 

Pour défendre les droits de l'homme de tous, il faut que les femmes et les filles soient à l'abri de la violence, y compris du mariage forcé, des mutilations génitales et de la maternité obligatoire, a souligné la Haut-Commissaire adjointe.  Pour changer la situation, il faut sortir des schémas classiques et «genrés», a-t-elle conseillé, ajoutant que la dignité est la condition qui doit prévaloir.  Selon Mme Gilmore, il est temps de revendiquer une place pour les hommes et les garçons dans la lutte pour l'égalité hommes-femmes et contre l'odieuse violence sexiste; ils doivent être impliqués, mais cela doit reposer sur une éducation sexuelle générale.  Il ne peut y avoir de compassion sans justice; une obligation redditionnelle est nécessaire, a conclu la Haut-Commissaire adjointe.

MME KAREN ELLEMANN, Ministre de l'égalité des chances et de la coopération nordique du Danemark, a déclaré que la violence, qu'elle soit physique ou psychologique à l'encontre des femmes et des filles est une violation de leurs droits humains, de leur droit à vivre à l'abri de la violence et de la coercition.  Ces formes de violence empêchent les femmes et filles de toutes les régions du monde de vivre pleinement leur vie et d'exercer leurs droits, a-t-elle ajouté.  Dans ce contexte, comment prévenir cette violence, s'est-elle alors demandé, observant que si la question parait simple, la réponse ne l'est pas?   On sait que l'on ne peut éliminer cette violence si on exclut la moitié de l'humanité, à savoir les garçons et les hommes, a-t-elle poursuivi, ajoutant qu'il faut sensibiliser les hommes et les garçons aux conséquences de la violence mais aussi aux moyens d'éliminer les stéréotypes, les comportements patriarcaux, les notions de masculinité et les normes sociales négatives.

Se tournant vers l'expérience de son pays, Mme Ellemann a ensuite reconnu qu'en dépit des nombreux plans d'action déployés dans son pays, la violence faite aux femmes et aux filles continue d'être un problème au Danemark, même si le nombre de cas avérés est en baisse.  Cela est certainement lié à la prévention, qui elle, est en hausse, a-t-elle affirmé.  Non seulement le Danemark est un l'un des pays en Europe où les gens peuvent facilement se confier à quelqu'un, mais le Gouvernement a également initié à un grand nombre d'activités visant à promouvoir le respect mutuel entre les filles et les garçons, hommes et femmes.  Ces activités transversales, incluant par exemple des compétition scolaires, des centres de traitement pour les auteurs de violences ou des campagnes de sensibilisation sont axées sur les normes sociales et les stéréotypes, a-t-elle indiqué, ajoutant que tout un chacun a une responsabilité dans ce combat contre la violence faite aux femmes et aux filles.  

En tant que modératrice du débat, MME LANA WELLS, titulaire de la chaire Brenda Strafford sur la prévention de la violence domestique à l'Université de Calgary (Canada), a présenté les thèmes qui seront débattus au cours de cette journée de discussion, à savoir la masculinité, toxique et positive; les normes de genre; la façon dont la société modèle nos comportements; le sexisme; la relation entre le genre et la réduction de la violence; la manière dont on peut renforcer les capacités des décideurs et autres acteurs; la façon dont on peut impliquer le système éducatif, ou encore comment les gouvernements, le secteur privé et la société civile peuvent travailler ensemble, notamment pour la prévention de la violence. 

Exposés des panélistes

Répondant à une question préalablement posée à la table ronde sur les stratégies ayant positivement contribué à l'égalité des sexes et à la lutte contre les normes sociales préjudiciables, MME DUBRAVKA SIMONOVIC, Rapporteuse spéciale sur la violence à l'égard des femmes, ses causes et ses conséquences, a mis l'accent sur la nécessité d'une réponse à la fois multisectorielle et coordonnée avec la participation active des hommes.  S'agissant de l'ONU, le rôle des hommes et des garçons dans la promotion et la réalisation effective de l'égalité des sexes n'a commencé à jouir d'une sérieuse attention qu'au cours des dernières décennies à travers des instruments et organes tels que le Programme d'action du Caire (1994) et son examen en 1999, la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et la Convention d'Istanbul, la Déclaration et le Programme d'action de Beijing (1995) et la Commission de la condition de la femme. 

Dans toutes discussions sur le rôle des hommes et des garçons en tant qu'acteurs de changement, il convient de prendre comme point de départ la notion selon laquelle aussi bien les hommes que les femmes, les garçons que les filles sont assujettis à des stéréotypes sexospécifiques et à des formes corrompues de pouvoir qui leur sont nuisibles et qu'en conséquence, les deux sexes gagneraient à démanteler ces stéréotypes, a expliqué Mme Simonovic.  Les hommes et les femmes, a-t-elle insisté, souffrent tous les deux de l'ordre en vigueur fondé sur le sexe.  Dans ce sens, l'un des aspects clés du mandat de la Rapporteuse spéciale consiste en l'inclusion des hommes et des garçons dans la prévention de toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des filles comme mesure susceptible de contribuer à modifier les stéréotypes préjudiciables sur les rôles des deux sexes conduisant à la violence.  Étant donné que les hommes représentent la vaste majorité des auteurs de la violence à l'endroit des femmes, il est indispensable de les approcher pour discuter, de les éduquer à résister et à rejeter la nature et les conséquences de l'hyper-masculinité et de la misogynie et à se défaire de la tendance à la violence, a conseillé Mme Simonovic . 

La Rapporteuse spéciale a cité comme exemple l'initiative onusienne Réseau des hommes pour l'égalité, qui a émergé en 2015 en Argentine en tant qu'espace de promotion de l'égalité des sexes, de prévention de la violence à l'égard des femmes et d'engagement en vue d'agir dans leur domaine d'influence et sur le lieu de travail.  La Rapporteuse spéciale a également cité Sonke Gender Justice, une organisation non gouvernementale sud-africaine présente sur tout le continent africain pour renforcer les capacités publiques et celles de la société civile et des citoyens en matière d'appui aux hommes et aux garçons pour qu'ils participent à la promotion de l'égalité des genres, prévenir la violence domestique et sexuelle et réduire la prévalence et l'impact du VIH/sida.  Mme Simonovic a enfin érigé en priorité la réforme des législations et dispositions constitutionnelles discriminatoires.  

M. DAS ABHIJIT, Coprésident de MenEngage Alliance et fondateur de Men's Action for Stopping Violence against Women, Inde, a indiqué qu'en Asie du Sud, l'inégalité entre les sexes n'est pas la seule inégalité car il y a celle des castes, ainsi que les inégalités sociales, économiques et bien d'autres.  Il faut donc concevoir des modèles alternatifs qui ne partent pas du principe que «si les femmes y gagnent, les hommes vont y perdre».  Il s'agit alors d'avoir une approche incluant une compréhension entre la masculinité et le respect des relations entre hommes et femmes, tant dans la famille qu'au sein de la communauté.  Cela permettrait de réduire la violence sexuelle et favoriserait toute une série d'autres changements comportementaux, comme un surcroît de disposition au partage de la propriété foncière, comme cela a été constaté a souligné M. Abhijit.  Cette approche a donné lieu à une relation plus chaleureuse et positive et si l'homme gagne du point de vue émotionnel, alors il va appuyer sa femme et sa fille. 

Rejoignant Mme Simonovic, M. Abhijit a souligné que les changements individuels ne suffisent pas car il existe d'autres individus qui font de la résistance et ne veulent pas de changement des normes sociales discriminatoires.  Le paternalisme est le doux visage du patriarcat qui impose des limites aux femmes, a-t-il ajouté.  Le mariage entre personnes de différentes castes a brisé des tabous, de même que le partage de la propriété ou l'utilisation des préservatifs par les hommes ont changé les valeurs.  Tous ces changements permettront de retrouver notre humanité fondamentale, a conclu M. Abhijit. 

M. FRANCIS OKO ARMAH, militant auprès des jeunes, Curious Minds, Ghana, a partagé son expérience de travail avec les jeunes sur de nombreux programmes.  Il a précisé qu'il organise par exemple des débats sur la masculinité et la féminité qui permettent de comprendre que les garçons ont leur propre conception fondée sur l'éducation qu'ils ont reçue et qui détermine la relation qu'ils ont avec les femmes.  Le militant a observé que les garçons apprennent qu'ils doivent être durs, voire violents, pour être masculins, et l'association leur montre donc d'autres perspectives.  Il faut que les garçons comprennent en quoi consiste vraiment le fait d'être un homme, a dit M. Oko Armah.  Par exemple, dans les écoles, la question de la violence revient souvent et des jeunes filles peuvent être victimes de viol sans oser le dénoncer.  Plus les garçons comprendront que c'est mal, plus cela changera; de même plus les filles le comprendront, moins elles accepteront cette violence. 

M. ANTHONY KEEDI, conseiller technique sur les masculinités au Centre de ressources pour l'égalité de genre ABAAD, Liban, a évoqué la réalité des jeunes hommes en temps de guerre.  Beaucoup vont devenir la réalité qui les entoure, en commençant par un sexisme bienveillant, par exemple en justifiant les mariages précoces sous prétexte de protéger les filles du conflit, a-t-il expliqué, ajoutant que ces jeunes hommes apprennent la violence, la domination.  Le problème est de laisser un jeune reproduire son environnement patriarcal et/ou violent et les associations sont là pour les aider à changer de valeur de masculinité, a indiqué M. Keedi. 

Le Centre de ressources essaie d'aborder les problèmes de masculinité rencontrés dans la vie quotidienne, fait des campagnes dans les médias, organise des ateliers, a poursuivi le conseiller technique.  L'objectif pour les hommes comme pour les femmes est de devenir un être humain authentique, a-t-il souligné.  Dans une époque décisive et en période de terrorisme et de violences, ce travail est essentiel et, avec l'aide du Conseil, le Centre peut aider à changer les jeunes hommes pour qu'ils deviennent des agents de la paix et de l'égalité de genre, a conclu M. Keedi.

Débat

Le Royaume Uni a rappelé qu'une femme sur trois dans le monde est battue ou victime de violence une fois dans sa vie.  Cette violence est le fruit du déséquilibre de pouvoir dans la société entre hommes et femmes, a affirmé la délégation britannique, avant de demander comment l'on peut prévenir cette violence dès l'enfance.  C'est en effet une honte collective qu'aucun pays ne soit exempt de cette violence, a poursuivi l'Australie, avant d'insister sur la nécessité de faire participer les hommes aux programmes de prévention de la violence.  En effet, l'égalité entre les hommes et les femmes n'est pas seulement une préoccupation de femmes, d'autant que les conséquences négatives de cette inégalité touchent autant les hommes que les femmes, a pour sa part souligné l'Union européenne, avant de demander quelles sont les difficultés à faire participer hommes et femmes en tant qu'agents du changement et ce que peuvent faire les institutions des Nations Unies pour faciliter cette participation.

On se saurait en effet se passer de la participation des hommes et des femmes en tant qu'agents de changement, ont également souligné les Bahamas au nom d'un groupe de pays, soutenant la campagne «He for She».  Le Brésil au nom de la Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) a lui aussi insisté sur l'importance de la participation des deux sexes dans le processus d'élimination des discriminations et de déconstruction des normes de masculinité.  Quel rôle les parlementaires peuvent jouer pour impliquer les hommes et les garçons, a demandé le Brésil?

La Norvège, au nom d'un groupe de pays, a pour sa part plaidé pour des  mesures ciblées, car il n'y a pas qu'une seule manière de rompre ce cycle.  Tant que l'oppression des femmes est présente dans nos sociétés, les femmes et filles ne seront pas à l'abri de la violence, a rappelé la délégation norvégienne.  Au nom d'un autre groupe de pays, qui appliquent une politique de tolérance zéro en matière de de violence à l'égard des femmes et des filles, la Slovénie a déclaré que contester les stéréotypes sur la masculinité et la féminité est très important dans le cadre des politiques de prévention.  Cette approche a été partagée par le Canada, au nom d'un groupe de pays, pour qui le devoir des États est de faire en sorte que la violence faite aux femmes appartienne au passé.  Compte tenu de l'expérience des uns et des autres, comment faire participer les hommes et garçon à l'élimination de cette  violence, a demandé le Canada?  Les pays de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes (CELAC), par la voix d'El Salvador, ont pour leur part souligné la nécessité de garantir aux femmes l'accès à la justice et le droit à un procès équitable afin de mieux défendre leurs droits.

Si d'autres acteurs peuvent en effet intervenir, la responsabilité première pour faire cesser cette violence (contre les femmes et les filles) incombe néanmoins aux États, a pour sa part déclaré l'Égypte, au nom du Groupe arabe.  Mais les choix de chaque société, en fonction de ses spécificités,  doivent être respectés, a-t-elle ajouté.  La Tunisie, au nom du Groupe africain, a rappelé que dans la déclaration d'Addis-Abeba, il a été demandé aux États africains de prendre toutes les mesures pour éliminer cette violence (contre les femmes et les filles) et qu'à cet égard, ils ont pris de nombreuses initiatives à cette fin. 

Les États-Unis ont indiqué que le plan national d'action pour les femmes, la paix et la sécurité, de même que le programme «Voix contre la violence» font partie des mesures adoptées par le pays, en plus de ses nombreux soutiens aux dirigeants communautaires en Afrique, dans des pays ayant par exemple à lutter contre les mutilations génitales féminines. 

Le Venezuela a indiqué disposer d'une loi spécifique pour le droit des femmes à une vie exempte de toute violence, assortie d'une juridiction spécialisée.  Dans le système éducatif, le pays a intégré des programmes sur la santé et les droits sexuels et reproductifs, jugeant nécessaire un changement de paradigme pour parvenir à une véritable égalité entre les sexes.  L'élimination de la violence contre les femmes et les filles fait également partie des priorités de l'Italie, qui estime qu'il est nécessaire que les garçons et les hommes participent aux efforts et reconnaissent leur propre responsabilité dans l'élimination de ce fléau.  L'Italie a indiqué avoir lancé, notamment dans les écoles, une campagne de sensibilisation sur les comportements incorrects des garçons et des hommes. 

L'Égypte a affirmé que la violence faite aux femmes est une humiliation pour leur dignité et qu'il convient de mettre en place des mesures dissuasives face à ce phénomène.  Les hommes doivent prendre conscience que l'autonomisation des femmes ne diminue pas leur position mais est au contraire bénéfique pour toute la société.  Pour ce faire, l'Égypte veut faire changer les stéréotypes et le discours religieux.

Pour l'Espagne, la perpétuation de cette violence envers les femmes et les filles tient en grande partie à des normes sociales et culturelles qu'il faut donc éliminer avec la participation pleine et entière des garçons et des hommes.  Pour ce faire, l'Espagne mène des campagnes de sensibilisation.  L'Espagne a demandé aux panélistes quel rôle peut jouer la diffusion de statistiques sur la violence sexiste dans les programmes pour une participation des garçons et des hommes dans la lutte pour l'élimination de cette violence. 

Au plan national, l'Inde a adopté une politique d'autonomisation des femmes en 2001 et a fait évoluer sa législation pour élargir la définition d'agression et de harcèlement sexuels et pour durcir les peines encourues par les agresseurs. 

Pour sa part, l'Allemagne souhaite offrir davantage de perspectives en ce qui concerne la famille et le travail aussi bien aux filles et aux femmes qu'aux garçons et aux hommes, ce qui comprend la possibilité de partager les responsabilités et la prise de décision de façon égalitaire.  L'Allemagne a par ailleurs souligné qu'il faut encourager, éduquer et soutenir les garçons et les hommes pour qu'ils assument leurs responsabilités, deviennent des agents de changement et jouent un rôle actif contre la discrimination et la violence fondée sur le genre.  Elle a demandé aux panélistes comment les acteurs publics peuvent changer les normes culturelles sexistes et comment améliorer l'accès universel à une éducation sexuelle globale et de qualité.

La Sierra Leone a indiqué qu'elle avait élaboré un programme de formation d'éducateurs volontaires pour qu'ils enseignent aux hommes les conséquences préjudiciables du viol, de la violence sexiste, de la grossesse précoce et des mutilations génitales féminines.  Ce programme vise à modifier les comportements des hommes en redéfinissant la masculinité et les croyances patriarcales et à leur faire comprendre qu'il faut protéger plutôt que nuire.  Dans les villages où travaillent ces volontaires, la violence sexuelle a chuté de 60%, a fait valoir la délégation sierra-léonaise.  Estimant que la prévention est de la responsabilité de tous, El Salvador a indiqué avoir adopté plusieurs lois contre la violence sexiste et la violence au sein de la famille; les autorités du pays mènent des campagnes de sensibilisation auprès de l'opinion publique et du secteur privé.  La Malaisie souhaite faire davantage pour mobiliser les garçons et les hommes.  Pour l'instant, les mesures prises par le pays comprennent des campagnes de sensibilisation soulignant le rôle des garçons et des hommes et les encourageant à jouer un rôle actif (contre la violence faite aux femmes).  La Malaisie a demandé aux panélistes de préciser le lien entre prolifération de la violence et faible implication des garçons et des hommes. 

Le Bangladesh a estimé que le rôle des hommes est essentiel pour prévenir la violence contre les femmes et qu'ils doivent comprendre que l'inégalité a un effet négatif sur leurs familles.  Le pays a ajouté que la prévention doit être renforcée et intégrer la contestation des normes culturelles, dans laquelle les garçons et les hommes peuvent jouer un rôle important.  Sao Tomé-et-Principe a reconnu que le rôle des femmes a longtemps été déterminé par une culture patriarcale, mais a souligné que des progrès en matière d'accès à l'éducation et au travail ont été enregistrés; le Gouvernement a en outre renforcé ses programmes de lutte contre la violence domestique et sensibilisé à la nécessité de garantir les droits inaliénables des femmes. 

La Bosnie-Herzégovine a souligné combien intégrer les garçons et les hommes dans la prévention était essentiel.  Elle a indiqué avoir pour sa part adopté un plan d'action où le rôle des hommes est stratégique.  Elle a demandé aux panélistes comment créer une culture de responsabilité au sein du système éducatif. 

Israël a appelé à accorder davantage de moyens à la sensibilisation et à la mobilisation des hommes et des garçons.  Les autorités compétentes en Israël ont adopté une approche axée sur l'élimination de la violence, la facilitation de la dynamique des couples, la formation du personnel et des groupes d'appui aux hommes désirant une réadaptation. 

Le Sénégal est à l'avant-garde de la lutte contre la violence à l'égard des femmes par un renforcement des sanctions prévues dans le Code pénal, en particulier à travers une loi qui réprime les mutilations génitales féminines, aggrave la répression du viol, des coups et blessures et de l'inceste et érige le harcèlement sexuel en infraction.  Cette même loi interdit également l'octroi du sursis en cas de coups et blessures dans le foyer.  Le programme de scolarisation et de lutte contre l'abandon scolaire des filles et l'institution de la parité absolue entre hommes et femmes figurent parmi les autres politiques déterminantes prises par le Gouvernement sénégalais pour mettre un terme à l'inégalité entre les sexes. 

La Dominique a indiqué avoir mis au point des programmes qui cherchent à lutter contre les comportements sexistes.  Ces programmes visent entre autres à réunir les pratiquants de différentes religions lors de séminaires portant sur différentes formes de stéréotypes fondés sur le sexe. 

Au nombre des organisations non gouvernementales (ONG) qui ont pris part à la discussion, Plan international, au nom également de la Fédération internationale Terre des hommes, ECPAT International et Défense des enfants – international, a déclaré qu'il faut qu'hommes et femmes luttent contre les stéréotypes et interrogent la définition et la perception de la masculinité.  Les politiques idoines doivent avoir pour but de transformer ces perceptions, a insisté l'ONG.  Selon la Commission internationale de juristes, les lois ne suffisent pas, d'autant que certaines d'entre elles sont basées sur des stéréotypes et des modèles patriarcaux et discriminatoires à l'égard des femmes.  United Nations Watch a fait observer que des lois et pratiques des États renforcent parfois cette violence contre les femmes et les filles, soulignant que cela est le cas dans des pays où les lois autorisent le viol marital, le mariage précoce ou la violence domestique, comme au Nigéria, en Égypte ou au Yémen. 

Make Mothers Matter (MMM) a insisté sur le partage des responsabilités pour les deux sexes.  La prise en charge des enfants par l'homme modifie ses dispositions et sa perception de la vie; le père développe son côté affectif et réduit l'anxiété de la mère.  Par conséquent, les gouvernements sont appelés à adopter des politiques encourageant le modèle d'égalité dans le partage des charges au sein du foyer. 

Le Conseil international pour le soutien à des procès équitables et aux droits de l'homme a dénoncé la persécution des femmes en Arabie saoudite.  Les femmes sont parmi les groupes les plus marginalisés et vulnérables au monde, d'où la nécessité que cessent les inégalités et que les auteurs des violations à leur encontre ne demeurent pas éternellement impunis, a ajouté l'ONG. 

L'éducation est à même d'inverser la tendance à la violence actuelle, a souligné Swedish Association for Sexualité Education, s'insurgeant contre les normes coutumières négatives.  World Young Women's  Christian Association a rappelé que la violence sous toutes ses formes constitue un obstacle à la réalisation et à la jouissance des droits de l'homme par tous.  Seule la participation effective des hommes et des garçons favorisera un véritable changement, a affirmé l'ONG, encourageant chacun à rechercher les moyens de mettre fin à la violence à l'égard des femmes et des filles. 

Réponses et conclusions des panélistes

MME SIMONOVIC a rappelé qu'il existe des problèmes systémiques que seuls les États sont en mesure de résoudre, car le travail de lutte contre les stéréotypes se fait à plusieurs niveaux.  Elle a par ailleurs critiqué le fait de placer (dans ce débat) les hommes et les garçons dans une même catégorie.  La Haut-Commissaire adjointe a en outre souligné le rôle fondamental des parlements et a insisté sur la nécessité d'appuyer les États dans l'application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. 

Mme Simonovic a ensuite déclaré que des exemples de bonnes pratiques existent en ce qui concerne l'éducation des garçons dès l'école primaire.  Il y a aussi des normes contraignantes au plan international, notamment dans la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes ou la Convention d'Istanbul (du Conseil de l'Europe), qui imposent aux États de combattre les discriminations par le biais de l'éducation.  Mais l'un des défis reste la disponibilité des données sur la prévalence de la violence faite aux femmes, qui parfois sont inexistantes, alors qu'elles permettraient d'avoir une vue d'ensemble de la situation et de l'évolution du phénomène, a souligné Mme Simonovic. 

M. ABHIJIT a déclaré qu'il n'est pas possible d'appliquer des techniques standard de lutte contre la violence à l'égard des femmes.  Une condamnation des auteurs n'est pas suffisante, car elle ne prend pas en compte l'impunité sociale qui, elle, est généralisée, a-t-il en outre souligné.  Dans ce contexte, il importe de chercher les leaders qui sont prêts à se jeter dans cette bataille.  Beaucoup d'hommes gardent le silence, car en fait ils ne s'identifient pas avec l'ancien système de valeurs, a ajouté M. Abhijit. 

M. Abhijit a ensuite insisté, lui aussi, sur la nécessité de disposer de données.  La méthodologie seule ne suffit pas, car il ne faut pas appliquer de solution commune sans connaître le contexte, a-t-il de nouveau souligné.  Il existe des contextes égalitaires qu'il faut connaître et dont il faut tenir compte, a-t-il insisté, ajoutant que l'égalité n'a pas été découverte au XXème siècle.  Le panéliste a mis en garde contre certaines approches qui veulent une fois de plus imposer des solutions uniques, sans tenir compte des contextes.  Il a par exemple évoqué la question des congés paternels, par analogie aux congés maternels; au lieu d'aller dans ce sens, il faut s'assurer que les femmes sont autonomes, a-t-il déclaré.

M. OKO ARMAH a souligné que les jeunes ont une vision différente et a expliqué que, grâce à l'intervention des chefs communautaires dans son pays (le Ghana), il a été possible d'obtenir l'autorisation de préparer un manuel national sur les différentes formes de violence au sein de la société – un manuel qui soit facile à comprendre par tous.  Le panéliste a par ailleurs conseillé d'expliquer les choses aux enfants dès le plus jeune âge.  Enfin, les campagnes radiophoniques et télévisuelles dénonçant la violence à l'égard des femmes et des filles créent de véritables débats, a-t-il souligné. 

M. Oko Armah a ensuite souligné que c'est à la communauté internationale de rendre compte de ce qu'elle a promis. 

M. KEEDI a souligné que l'héritage de longs siècles de messages spécifiques sur la masculinité représente (face à la problématique ici débattue) le principal obstacle dans sa région (Proche-Orient).  Il est ardu d'introduire une nouvelle vision et il faut passer de la macro à la micro-perspective; il faut que les jeunes voient que la société change et qu'ils font partie de cette transformation.  La collaboration avec les organisations féminines et le soutien apporté par les hommes aux leaders féminines sont aussi des éléments clés pour faire cesser le cycle de la perpétuation de la violence.

M. Keedi a ensuite souligné que c'est à l'État de voir quels sont les privilèges des uns et des autres et de voir comment changer les choses. 

MME ELLEMAN a déclaré que comme tous les langages, celui de la violence a été appris; il s'agit donc de trouver les moyens de le faire «désapprendre».  

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* Les délégations suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat: Royaume Uni, Australie, Union européenne, Bahamas, Brésil (au nom de la Communauté des pays de langue portugaise), Norvège (au nom d’un groupe de pays), Slovénie (au nom d’un groupe de pays), Canada (au nom d’un groupe de pays), El Salvador (au nom des pays de la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes et en son nom propre), Égypte (au nom du Groupe arabe), Tunisie (au nom du Groupe africain), États-Unis, Venezuela, Italie, Égypte, Espagne, Inde, Allemagne, Sierra Leone, Malaisie, Bangladesh, Sao Tomé-et-Principe, Bosnie-Herzégovine, Israël, Sénégal, Dominique

** Les organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole dans le cadre du débat: Plan International (au nom également de la Fédération internationale Terre des hommes, ECPAT International et Défense des enfants – international); Commission internationale de juristes; United Nations Watch; Make Mothers Matter ; Conseil International pour le soutien à des procès équitables et aux Droits de l'Homme; Swedish Association for Sexuality Education; et World Young Women's Christian Association.

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