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Communiqués de presse Haut-Commissariat aux droits de l’homme

Une action d’urgence s’impose pour réunir des familles coréennes qui ont été séparées – Rapport de l’ONU

Des familles déchirées

07 décembre 2016

GENEVA / SEOUL  (7 décembre 2016) - Le sort tragique et la souffrance sans fin des familles déchirées dans la péninsule coréenne, dont certaines depuis plus de 60 ans, devraient être abordés d'urgence, compte tenu notamment de l'âge avancé de nombreuses victimes, a martelé un rapport du Bureau des Nations Unies pour les droits de l’homme.

" A ce jour, le lourd tribut émotionnel, psychologique, social et économique de la séparation involontaire continue à peser sur les familles, au moment où les gens cherchent toujours la vérité et à établir le contact avec leurs proches ", a déclaré le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein.

Le rapport, publié mercredi, examine les manières toutes aussi différentes que complexes dont les familles ont été séparées depuis la guerre de Corée de 1950 - 1953: à travers le déplacement, la disparition forcée et l'enlèvement, mais aussi en raison des personnes ayant fui la République populaire démocratique de Corée (RPDC), souvent appelée Corée du Nord.

" Ce rapport passe en revue les formes passées et actuelles de séparation involontaire et décrit une approche pratique et humaine de la réunification des familles. Ces personnes ne représentent pas simplement des chiffres et données statistiques; elles ne sont pas non plus une masse de victimes sans visage malencontreusement emprisonnées dans un évènement historique. Ce sont des individus qui ont chacun leur propre histoire remplie de peines inimaginables – des souffrances qui demeurent aussi persistantes que jamais malgré les années qui s’écoulent ", a souligné le Haut-Commissaire.

Le rapport documenté par le Bureau des droits de l'homme des Nations Unies, contient des témoignages bouleversants relatés par des victimes qui sont pour la plupart des personnes âgées. Il indique que la séparation involontaire dans les deux Corées n'est pas uniquement la conséquence inévitable d'une situation de guerre, mais elle résulte également des formes structurelles d'exclusion, d’impunité et de perte d’autonomie que le conflit a mis en évidence.

Les impacts à long terme des préjugés à l’égard des femmes font l'objet d'une attention particulière dans le rapport, comme en témoigne le récit de Park Dong-yeol*, âgée maintenant de 85 ans, qui a fui sa ville natale en Corée du Nord en 1950, mais à qui l’accès à un bateau à destination de la ville sud-coréenne de Busan avait été refusé, à cause d'une superstition selon laquelle avoir une femme à bord maudirait le navire.

Elle a finalement pu se rendre à pied en République de Corée (ROK), souvent appelée Corée du Sud, où elle s’est rendu compte que son statut de femme célibataire soulevait des soupçons comme quoi elle pourrait être une espionne, raison pour laquelle elle a été maintenue sous haute surveillance policière. Pour remédier à cela, elle s'est mariée, " après avoir perdu tout espoir de retourner parmi les miens restés en Corée du Nord, " a-t-elle déclaré.

Depuis 1953, environ 129.616 personnes se sont inscrites sur la liste devant leur permettre de se retrouver avec leur famille en RPDC, mais plus de la moitié d’entre elles sont mortes sans être réunies. Pour celles qui figurent encore sur la liste, environ 55 pour cent ont plus de 80 ans.

Depuis 2000, il y a eu des retrouvailles occasionnelles contrôlées de près, au cours desquelles 100 familles de chaque côté ont été autorisées à se réunir brièvement, cependant, " même pour cette minorité, les réunions semblent souvent susciter plus de détresse que de tranquillité d'esprit ", révèle le rapport.

" Nous pouvions à peine parler dans la salle. Il y avait des journalistes d'un côté et des gardiens de l'autre. Ensuite, nous avons eu deux heures où nous pouvions nous entretenir en privé. C’est seulement à ce moment que ma fille a pu pleurer ", a déclaré Ji Eungyeong *, âgée de 88 ans, évoquant sa rencontre en 2015 avec la fille qu'elle avait laissée en Corée du Nord 64 ans plus tôt.

Les expériences vécues par les personnes dont les parents ont été enlevés en Corée du Sud sont également relatées dans le rapport. Le père de Jeong Sun-ui a fait l’objet d’une disparition forcée en 1950. Pour les autres membres de la famille restés en Corée du Sud, cela signifiait qu'ils étaient traités avec suspicion, comme étant d’éventuels espions. "  Il y avait toujours un sentiment de culpabilité par association ", a-t-il déclaré.

Le nombre de personnes qui se sont enfuies de la RPDC et qui sont finalement arrivées en République de Corée a diminué depuis 2008, en raison des contrôles frontaliers qui sont assez strictes, indique le rapport. Pour les individus qui tentent de s’échapper, parmi lesquels on compte beaucoup de femmes, la prise de décision de passer à l’acte requiert mûre réflexion.

" Les personnes risquent leur vie et s'exposent à la maltraitance, y compris des peines de travaux forcés, si toutefois elles se font prendre. Celles qui réussissent à s’échapper exposent leurs proches à des actes de représailles et de harcèlement de la part des autorités ", dévoile le rapport.

De nombreux évadés restent hautement vulnérables aux abus et à l'exploitation. Leur insécurité est accentuée par la peur du rapatriement forcé, et de nombreuses femmes qui accouchent en Chine, par exemple, ne déclarent pas la naissance de leurs enfants pour ne pas attirer l'attention sur elles-mêmes.

Le rapport expose clairement que la responsabilité principale de résoudre le problème de la séparation des familles incombe aux deux pays. Les recommandations clés consistent à permettre des contacts directs entre les personnes concernées et sans aucune entrave des deux pays; finaliser et publier la liste de toutes les personnes portées disparues depuis la guerre de Corée et savoir où elles se trouvent; protéger les personnes qui quittent la RPDC, y compris les femmes et les enfants, contre la traite et d'autres violations des droits de l'homme qui rompent leurs liens familiaux.

Le rapport souligne également que la RPDC devrait prendre des mesures concrètes pour localiser et assurer le retour des personnes enlevées. De la même façon, elle devrait également lever les restrictions qui empêchent ses citoyens de voyager et de communiquer avec le monde extérieur.

Le principal obstacle à la mise en œuvre des recommandations du rapport est l’intensification des tensions politiques et militaires dans la région qui a mis un terme au regroupement familial et au dialogue bilatéral.

" Vu que les tensions croissantes réduisent les chances de résoudre le problème de la séparation des familles de façon proactive et comme étant une priorité commune, les victimes risquent d'être davantage marginalisées ", avertit le rapport.

FIN

Lire le rapport intégral: http://www.ohchr.org/Documents/Publications/Report_TORN_APART.pdf

*Les noms ont été changés pour protéger les victimes et leurs proches

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