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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'Élimination de la discrimination raciale examine le rapport de L'Uruguay

Le rapport de l'Uruguay

25 novembre 2016

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

25 novembre 2016

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique présenté par l’Uruguay sur les mesures prises par ce pays pour donner effet aux dispositions de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Engageant la présentation de ce rapport, Mme Alejandra Costa, Directrice des droits de l’homme et du droit international au Ministère des relations extérieures de l’Uruguay, a reconnu que la population d’ascendance africaine du pays avait constitué un groupe historiquement vulnérable et, en dépit de son importance dans le développement de la culture nationale, un groupe discriminé de fait.  L’inégalité structurelle qui affecte ce groupe perdure en dépit des politiques positives et d’action affirmative qui ont été prises en sa faveur, a-t-elle ajouté.

M. Federico Graña, Directeur national de la promotion socioculturelle au Ministère du développement social de l’Uruguay, a quant à lui reconnu que depuis l’indépendance du pays et jusqu’à une période récente, les populations d’ascendance africaine et autochtones étaient demeurées invisibles.  Les choses ont commencé à changer avec, notamment, l’adoption de la loi contre le racisme, la xénophobie et la discrimination, la reconnaissance de la culture afro-uruguayenne, ainsi que celle de la nation autochtone charrúa. Toutefois, l’amélioration de la matrice juridique de la République ne s’étant pas révélée suffisante pour modifier la réalité vécue des personnes d’ascendance africaine, et à la suite des recommandations du Comité et de la société civile, a été adoptée une loi historique d’actions affirmatives, a expliqué M. Graña.  Ce texte impose notamment de réserver 8% des postes de fonctionnaires à des personnes d’ascendance africaine, a-t-il précisé.  En outre, un plan d’action pour l’exercice 2015-2020 a été élaboré (en faveur de ces personnes) de concert avec la société civile. Dans le domaine éducatif, le nombre de bourses accordées à des étudiants d’ascendance africaine a fortement augmenté depuis 2011, pour représenter 13% du total des bourses. 

Le recensement national de la population de 2011 ayant incorporé la variable ethno-raciale, il est apparu que 8,1% des 3,2 millions d’habitants du pays se sont déclarés d’ascendance africaine et 5% autochtones.   Les chiffres ont été affinés ces cinq dernières années, 11,5% des Uruguayens se considérant en fait d’ascendance africaine. 

La délégation uruguayenne était également composée, entre autres, de M. Ricardo González Arenas, Représentant permanent de l’Uruguay auprès des Nations Unies à Genève ; ainsi que de représentants du Ministère du développement social, du Bureau national du Service civil de la Présidence de la République et du Département des femmes d’ascendance africaine de l’Institut national des femmes. 

La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité en ce qui concerne, notamment, le rôle pionnier historique joué par l’Uruguay dans le domaine social ; la situation des employées domestiques ; les migrants ; la politique et la législation pénales relativement au racisme et à la discrimination raciale ; les plaintes déposées pour discrimination raciale ; la traite de personnes ; la contribution historique des peuples autochtones et des personnes d’ascendance africaine ; et surtout la situation actuelle des personnes d’ascendance africaine, en particulier pour ce qui est des abandons scolaires et des grossesses précoces.

M. Alexei Avtonomov, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l’Uruguay, a fait observer que si, historiquement, le XIXème siècle avait été une période de génocide culturel des autochtones, on peut néanmoins se féliciter de la reconnaissance, bien que tardive, de l’existence de populations autochtones et d’ascendance africaine.  Il est nécessaire de créer des conditions propices à l’éducation des personnes d’ascendance africaine, a-t-il néanmoins souligné par la suite.  Le rapporteur a par ailleurs attiré l’attention sur la précarité de la situation vécue par les migrants, notamment ceux qui sont d’origine bolivienne, dans le secteur des emplois domestiques.    

Le Comité adoptera ultérieurement, lors de séances à huis clos, ses observations finales sur le rapport de l’Uruguay et les rendra publiques à l’issue de la session, qui doit clore ses travaux le 9 décembre. 

Ce matin, la salle du Comité était décorée de motifs de couleur orange, dans le cadre de la commémoration de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Le Comité a entendu ainsi s’associer à la campagne de 16 jours intitulée #orangetheworld appelant à l’unité pour contribuer à mettre un terme à ce type de violence, a précisé la Présidente du Comité, Mme Anastasia Crickley, avant de souligner l’importance de comprendre le lien entre la violence et la discrimination raciale, la violence faite aux femmes aggravant encore la discrimination raciale.

Lors de sa prochaine réunion publique, lundi après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l’examen du rapport du Togo, qu’il achèvera mardi matin.  Aucune organisation ne s’étant inscrite, le Comité ne tiendra pas lundi matin, comme cela était initialement prévu, de réunion informelle publique visant à auditionner des organisations de la société civile au sujet de la mise en œuvre de la Convention dans les pays dont les rapports seront examinés durant cette deuxième semaine de session, à savoir le Togo, le Portugal, le Turkménistan et l’Italie. 


Présentation du rapport de l’Uruguay


Le présent dialogue entre les membres du Comité et la délégation uruguayenne se fonde sur le rapport de l’Uruguay et la liste de points à traiter adressée au pays préalablement à l’examen de son rapport. Le Comité est également saisi du document de base de l’Uruguay (en espagnol).

MME ALEJANDRA COSTA, Directrice des droits de l’homme et du droit international au Ministère des relations extérieures de l’Uruguay, a reconnu d’emblée que la population d’ascendance africaine du pays avait constitué un groupe historiquement vulnérable et, en dépit de son importance dans le développement de la culture nationale, un groupe discriminé de fait.  L’inégalité structurelle qui affecte ce groupe perdure en dépit des politiques positives et d’action affirmative qui ont été prises en sa faveur, a-t-elle ajouté.

M. FEDERICO GRAÑA, Directeur national de la promotion socioculturelle au Ministère du développement social de l’Uruguay, a reconnu que depuis l’indépendance du pays et jusqu’à une période récente, les populations d’ascendance africaine et autochtones étaient demeurées invisibles.  Les choses ont commencé à changer avec, notamment, l’adoption de la loi contre le racisme, la xénophobie et la discrimination, la reconnaissance de la culture afro-uruguayenne, ainsi que celle de la nation autochtone charrúa. Toutefois, l’amélioration de la matrice juridique de la République ne s’étant pas révélée suffisante pour modifier la réalité vécue des personnes d’ascendance africaine, et à la suite des recommandations du Comité et de la société civile, a été adoptée une loi historique d’actions affirmatives, a expliqué M. Graña.  Ce texte impose notamment de réserver 8% des postes de fonctionnaires à des personnes d’ascendance africaine, a-t-il précisé.  En outre, un plan d’action pour l’exercice 2015-2020 a été élaboré (en faveur de ces personnes) de concert avec la société civile. Dans le domaine éducatif, le nombre de bourses accordées à des étudiants d’ascendance africaine a fortement augmenté depuis 2011, pour représenter 13% du total des bourses. 

L’absence de reconnaissance de la réalité autochtone et d’ascendance africaine avait eu pour conséquence une absence concomitante de données statistiques jusqu’à une date récente, a poursuivi M. Graña.  C’est la raison pour laquelle le recensement national de la population de 2011 a incorporé la variable ethno-raciale: 8,1% des 3,2 millions d’habitants du pays se sont déclarés d’ascendance africaine et 5% autochtones.  Les chiffres ont été affinés ces cinq dernières années, 11,5% des Uruguayens se considérant en fait d’ascendance africaine. 

Les programmes sociaux, notamment les transferts monétaires en direction des personnes en situation de vulnérabilité, ont bénéficié aux foyers d’ascendance africaine, a en outre fait valoir M. Graña.  Ainsi, 82% de ces foyers reçoivent des allocations, contre une moyenne de 76% pour les autres foyers.  Des actions de soutien scolaire ont aussi été mises en place, a-t-il ajouté.

Enfin, M. Graña a mentionné le fait que son pays s’était associé à la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine, juillet ayant été proclamé Mois des personnes d’ascendance africaine avec divers événements organisés dans ce cadre.

Examen du rapport
 

Questions et observations des membres du Comité

M. ALEXEI AVTONOMOV, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l’Uruguay, a observé que si ce pays n’était pas très vaste, il n’en était pas moins fort visible.  Ainsi, ce pays est-il très en avance en matière de développement de l’Internet, a-t-il notamment souligné.  Il a ajouté que si, historiquement, le XIXème siècle avait été une période de génocide culturel des autochtones, on peut néanmoins se féliciter de la reconnaissance, bien que tardive, de l’existence de populations autochtones et d’ascendance africaine. Le rapporteur a ensuite relevé que si l’Uruguay avait connu une immigration massive dans son histoire moderne, il avait aussi été un pays de forte émigration à certaines périodes; il s’est interrogé sur ce phénomène, avant de faire observer que si des Espagnols, des Français et des Italiens ont contribué à peupler le pays, cela a aussi été le cas d’Africains et de Brésiliens.  

Le rapporteur a souhaité savoir si l’Uruguay avait mis en place des mesures de soutien à l’éducation, en particulier en faveur des femmes d’ascendance africaine, alors que l’on sait qu’elles sont plus précocement mères que le reste de la population féminine.  Il est nécessaire que l’État prenne des mesures pour répondre à ce phénomène, par des cours du soir notamment, afin que les jeunes mères puissent poursuivre leurs études ou bénéficier d’une formation, a-t-il souligné.  Il est nécessaire de créer des conditions propices à l’éducation des personnes d’ascendance africaine, a-t-il insisté.

M. Avtonomov s’est dit quelque peu perdu face à l’abondance de chiffres fournis par la délégation dans sa présentation (NDLR : nous n’en avons repris que quelques-uns dans la présentation ci-dessus) et a suggéré une clarification et une simplification des données fournies.  Il a souhaité en savoir davantage sur la situation des peuples autochtones, s’agissant notamment de la reconnaissance de leurs territoires ancestraux.  Certes, le fait qu’ils vivent désormais majoritairement en ville ne simplifie pas les choses, mais il s’agit d’une question élémentaire de justice historique, a-t-il souligné. Le rapporteur a par ailleurs attiré l’attention sur la précarité de la situation vécue par les migrants, notamment ceux qui sont d’origine bolivienne, dans le secteur des emplois domestiques.    

Le rapporteur a par la suite relevé que, selon certaines informations, la commission interinstitutionnelle chargé du suivi, avec la société civile, des recommandations des organes de traité ne fonctionnait pas vraiment.  Existe-t-il un espace de dialogue entre les autorités et les organisations autochtones, a-t-il en outre demandé, estimant que cela pourrait être bénéfique pour les deux parties?  La délégation dispose-t-elle de données sur la situation des Roms et des Gitans qui peuvent être victimes de discrimination, comme cela le cas en Argentine voisine, a-t-il également demandé?

Un autre membre du Comité a souhaité savoir quels peuples autochtones précisément l’Uruguay reconnaissait ou pourrait être amené à reconnaître.  Qu’en est-il de la volonté politique, s’agissant notamment de l’éventuelle adhésion du pays à la Convention n°169 de l’Organisation internationale du travail (OIT) relative aux peuples indigènes et tribaux. 

Tout en se félicitant des mesures prises en faveur de la promotion sociale des personnes d’ascendance africaine, en matière de bourses étudiantes par exemple, un autre membre du Comité a souhaité savoir ce qu’il en était des mesures prises en direction des autochtones. Il a aussi souhaité savoir si la délégation disposait de statistiques sur la proportion d’autochtones et de personnes d’ascendance africaine confrontés à la justice.  Si le pays dispose d’un bel arsenal législatif, celui n’est pas mis en œuvre de la meilleure façon qui soit, a estimé l’expert.

Tout en se félicitant des mesures positives prises en faveur des travailleurs d’ascendance africaine dans la fonction publique, un autre membre du Comité a souhaité savoir ce qu’il en était dans le secteur privé et dans le domaine de l’éducation.  Il s’est en outre enquis des suites données aux plaintes pour discrimination. 

Un expert a estimé que l’application imparfaite de la loi était illustrée par le fait que la justice n’était guère saisie de plaintes pour discrimination. 

Une experte a pour sa part regretté que la délégation se soit essentiellement concentrée sur les personnes d’ascendance africaine en omettant d’évoquer la situation des peuples autochtones. Elle a souhaité savoir comment l’histoire était enseignée: parle-t-on du génocide des Amérindiens aux élèves? Mentionne-t-on la richesse de l’apport des autochtones et des personnes d’ascendance africaine à la nation uruguayenne? 

Un expert a déploré l’absence, dans le rapport, de statistiques sur les populations autochtones.

Seuls 38% des jeunes d’ascendance africaine ont achevé leur instruction élémentaire contre 77% pour le reste de la population, a-t-il par ailleurs été noté.

Abordant la question des réfugiés dans le contexte des guerres actuelles, un membre du Comité s’est enquis de la politique de l’Uruguay dans le domaine.  Il s’est interrogé sur la politique d’intégration du pays, généralement considérée comme généreuse.  

Un autre membre du Comité a déploré que l’Uruguay ne prévoie pas d’adopter un plan national de lutte contre le racisme et la discrimination, ainsi qu’il le reconnaît explicitement dans son rapport, et s’est interrogé sur ce choix.  Un de ses collègues a appelé à ne plus utiliser l’expression «discrimination positive» lorsque l’on mentionne l’instauration de «mesures temporaires spéciales» dites d’action affirmative. 

Les travailleurs domestiques étant majoritairement des personnes d’ascendance africaine ou des migrants originaires de ce continent, ne peut-on considérer qu’il s’agit d’un cas de fait de discrimination raciale, a demandé une experte?

Plusieurs experts ont par ailleurs déploré que le document de base de l’Uruguay, récemment mis à jour, ne soit disponible qu’en espagnol et n’ait pas été traduit. 

Un autre expert a demandé si un certain degré de racisme transparaissait à travers les médias uruguayens, ainsi qu’on le constate dans d’autres pays.

Un expert s’est réjoui que l’Uruguay ait fait part de sa disponibilité à participer à une éventuelle force de paix des Nations Unies au Burundi, notant par ailleurs que l’Uruguay avait été élu au Conseil de sécurité avec une majorité de plus des deux tiers des voix des membres de l’Assemblée générale des Nations Unies.

Un expert a estimé nécessaire que des fonds soient consacrés à la sauvegarde des langues et cultures autochtones.  Il a noté que, bien souvent, en Amérique latine on se plaisait à célébrer les cultures autochtones, leur expression musicale notamment, tout en entretenant un sentiment négatif à l’égard des personnes autochtones elles-mêmes. On a le sentiment qu’il en va de même à l’égard des Afro-Uruguayens.  


Réponses de la délégation

Les rapports aux organes conventionnels sont coordonnés par le Ministère des relations extérieures, en concertation avec les organisations des droits de l’homme et de la société civile, a indiqué la délégation. 

La délégation a ensuite rappelé qu’historiquement, l’Uruguay avait joué un rôle pionnier dans le domaine social en limitant la journée de travail à huit heures.  

S’agissant des abus envers des employées domestiques boliviennes, relativement à une affaire qui a fait scandale dans le pays et qu’a mentionnée un membre du Comité – la délégation a assuré que l’inspection du travail était intervenue aussitôt les faits connus, en se faisant accompagner par la police étant donné que l’employeuse refusait d’ouvrir sa porte comme elle était sommée de le faire.  L’enquête a prouvé que l’on était face à un cas de traite des personnes et la propriétaire de la résidence concernée a été condamnée, a précisé la délégation.     

Les femmes d’ascendance africaine sont surreprésentés dans les emplois domestiques, a par la suite reconnu la délégation.  Est prévue une régularisation du système de sécurité sociale en leur faveur, de manière à remédier à la profonde inégalité qui les affecte par rapport aux autres travailleurs, a-t-elle expliqué.

La politique pénale de l’Uruguay se veut d’abord préventive, a ensuite souligné la délégation.  Il n’en demeure pas moins que de nombreuses sentences sanctionnent l’employeur, par exemple, lorsque le caractère raciste d’un licenciement est avéré.  Naturellement, est également sanctionné le harcèlement sexuel sur le lieu de travail, a ajouté la délégation.  

Des circonstances aggravantes sont invoquées lorsque la victime est particulièrement fragile ou vulnérable, a d’autre part souligné la délégation. 

S’agissant de la criminalisation du racisme, l’État veille au respect absolu de l’article 4 de la Convention qui implique qu’il doive déclarer illégales et qu’il interdise les organisations ainsi que les activités de propagande incitant à la discrimination raciale, a expliqué la délégation.

Aucune victime ne saurait pour des raisons matérielles renoncer à demander réparation, a poursuivi la délégation, avant de faire valoir que l’Uruguay étant un pays fortement syndicalisé, il est aisé d’obtenir un soutien et des conseils juridiques

Entre 2011 et 2015, quelque 72 plaintes pour discrimination raciale ont été déposées, a en outre indiqué la délégation. L’an dernier, sur 314 plaintes, 26 étaient relatives à la discrimination, sept pour motif ethnique ou racial.  Ces plaintes provenaient très majoritairement de personnes d’ascendance africaine et 14% de personnes de confession juive, a précisé la délégation.  Précédemment, la Commission honoraire de lutte contre le racisme, la xénophobie et toutes les formes de discrimination, qui est rattachée au Ministère de l’éducation et de la culture, avait reçu pour sa part, entre 2008 et 2015, quelque 200 plaintes pour différentes formes de discrimination. Les plaintes pour discrimination raciale formaient 41% du total et étaient liées, plus de neuf fois sur dix, à une ascendance africaine; pour 5% d’entre elles, à une ascendance juive; et pour 4%, à une ascendance autochtone, a ajouté la délégation.

Le taux d’abandon scolaire étant élevé en Uruguay, les autorités cherchent à y remédier par un programme spécifique, a d’autre part indiqué la délégation.  Un certain quota de bourses et d’autres formes d’aide aux élèves sont réservés aux jeunes d’ascendance africaine, a-t-elle fait valoir.  Un premier projet pilote a été lancé cette année dans une vingtaine d’établissements scolaires et une quarantaine de plus seront touchés l’an prochain par ce projet, qui devra faire l’objet d’une évaluation. Le taux d’illettrisme est de 3% parmi les personnes d’ascendance africaine et moitié moins dans le reste de la population, a ajouté la délégation.

Le phénomène des grossesses précoces – prégnant dans toute l’Amérique latine – affecte particulièrement les jeunes filles d’ascendance africaine, qui n’ont pas les mêmes chances que les garçons en matière d’éducation et de formation, a poursuivi la délégation.  De fait, elles ont des enfants très tôt, s’identifiant à un modèle prévalant dans leur milieu, a-t-elle expliqué.  Elles ont aussi plus d’enfants que la moyenne et, de ce fait, sont contraintes d’abandonner l’école, a-t-elle ajouté.  Elles sont aussi plus souvent victimes de violences, que ce soit au sein de la famille, à l’école ou sur le lieu de travail.  Les pouvoirs publics sont confrontés aux défis multiples à relever pour remédier à une telle situation, a reconnu la délégation. 

Une experte ayant souhaité savoir si les adolescentes qui se retrouvent enceintes bénéficiaient d’un appui pour pouvoir poursuivre leur scolarité, la délégation a répondu que si des programmes de soutien existaient bien, ils ne prenaient pas en compte le problème spécifique des grossesses chez les jeunes filles d’ascendance africaine.

Le Plan d’action 2016-2019 contre la violence sexiste prend en compte la dimension ethnique et raciale du problème, a ensuite indiqué la délégation. 

Un programme d’accompagnement des adolescents a été mis en place pour les jeunes délinquantscondamnés lorsqu’ils recouvrent la liberté après avoir purgé leur peine, a d’autre part indiqué la délégation.  Au total, a-t-elle par la suite précisé, 35 adolescents sur 709 adolescents placés en détention sont d’ascendance africaine, soit environ 7% du total. 

La contribution historique des peuples autochtones et des personnes d’ascendance africaine a été longtemps sous-estimée, l’État ayant eu pour priorité de rectifier les choses, a ensuite déclaré la délégation. S’agissant plus précisément de l’enseignement de l’histoire du pays, elle a souligné qu’au niveau primaire, la question ethnique et raciale est abordée, en traitant à la fois de l’esclavage et de la réalité autochtone.  La participation des personnes d’ascendance africaine aux processus révolutionnaires qu’a connus le pays figure aussi dans les thèmes enseignés.

La délégation a indiqué par ailleurs que l’Uruguay ne prévoyait pas de ratifier la Convention n°169 de l’Organisation internationale du travail.

Pour ce qui concerne les migrants, des permis temporaires peuvent être délivrés dans un délai extrêmement court, de l’ordre de 48 heures, les pouvoirs publics veillant à ce qu’aucune personne ne soit en situation irrégulière dans le pays, a expliqué la délégation.  Les migrants bénéficient de l’éducation gratuite, le problème principal ayant trait à la cherté des logements, qui concerne toute la population, a ajouté la délégation.  Le taux de chômage des migrants tourne autour de 9% et atteint le double pour les femmes migrantes.

La question de la traite de personnes a fait l’objet en Uruguay d’une législation d’avant-garde qui permet de prendre en compte plusieurs aspects du problème, qu’il s’agisse des questions de refuge (accueil et prise en charge des victimes), de droit d’asile ou d’extradition, a par ailleurs fait valoir la délégation.

Le projet de plan national contre la discrimination n’a pas bénéficié du soutien de la société civile, raison pour laquelle il est resté lettre morte, a reconnu la délégation. Une remise à plat complète est nécessaire, a-t-elle affirmé. 

Un texte de loi a été élaboré sur les questions relatives au racisme et aux discours de haine dans les médias, qui est actuellement passé au crible par la Cour constitutionnelle pour en examiner la constitutionnalité, a d’autre part indiqué la délégation.

S’agissant des relations de l’Uruguay avec l’Afrique, la délégation a indiqué que l’Uruguay avait notamment ouvert des ambassades en Angola et en Éthiopie et renforcé les compétences de celle qui se trouve en Afrique du Sud.  La représentation uruguayenne à Addis-Abeba permet d’entretenir des liens avec l’Union africaine, qui a son siège dans la capitale éthiopienne, et par conséquent avec tous les pays du continent.  Des centres de coopération et d’échanges ont été créés dans un certain nombre de pays d’Afrique subsaharienne. Par ailleurs, l’Uruguay participe activement à la Zone de paix et de coopération de l’Atlantique-Sud réunissant un certain nombre de pays africains et sud-américains.

En réponse à une question relative à la participation de l’armée uruguayenne aux opérations de maintien de la paix de l’ONU, la délégation a souligné que le pays se classait parmi les douze ou treize premiers contributeurs en Casques bleus.  Les Casques bleus uruguayens sont actuellement déployés en Haïti, où ils constituent le second contingent après celui des Brésiliens, et en République démocratique du Congo, où ils sont le contingent le plus nombreux.

Un membre du Comité ayant déploré l’absence de représentants de la commission des droits de l’homme de l’Uruguay, tout en reconnaissant ignorer quel était précisément son statut, la délégation a répondu que celle-ci - dont l’appellation officielle est Institution nationale des droits de l’homme et bureau du Défenseur du peuple (INDDHH) - est un organe public indépendant relevant du pouvoir législatif.  Créée en 2008, en application des Principes de Paris, elle a été mise en place et a commencé à fonctionner en 2012, a précisé la délégation. 

L’INDDHH a pour vocation de défendre, promouvoir et protéger l’ensemble des droits de l’homme consacrés par la Constitution et par le droit international, a indiqué la délégation.  Complémentaire d’autres mécanismes, elle s’emploie à mieux garantir aux personnes la jouissance de leurs droits et veille à ce que les lois, les pratiques administratives et les politiques publiques soient conformes aux normes internationales de protection des droits de l’homme.  Elle exerce les fonctions du mécanisme national de prévention prévu dans le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.  Le déménagement en cours de son siège pourrait expliquer l’absence d’un représentant de cette institution devant le Comité aujourd’hui, a ajouté la délégation. 


Remarques de conclusion


M. AVTONOMOV, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l’Uruguay, a rappelé que les communautés autochtones avaient été expulsées, quand elles n’avaient pas été tout simplement exterminées.  Si ce n’est certes pas le fait du Gouvernement actuel, il convient de recréer la «cosmovision» du pays, a-t-il souligné.  Il a reconnu qu’il était difficile de redonner vie à la culture des descendants de ces communautés, qui sont désormais majoritairement des citadins; beaucoup ont en outre dû changer de nom, ce qui ne facilite pas cette revitalisation, a-t-il fait observer.   

MME COSTA, Directrice des droits de l’homme et du droit international au Ministère des relations extérieures de l’Uruguay, a expliqué que la politique gouvernementale visait à en finir avec la discrimination, particulièrement celle affectant les personnes d’ascendance africaine.  Des politiques spécifiques s’avèrent nécessaires à cette fin et elles seront effectivement mises en œuvre à court et moyen terme, a-t-elle assuré.


Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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