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Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels examine le rapport du Guyana
29 septembre 2015
29 septembre 2015
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné aujourd'hui le rapport du Guyana sur les mesures prises par le pays pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Le rapport a été présenté par le Ministre de la gouvernance de la République coopérative du Guyana, M. Raphael Trotman, qui a attiré l'attention sur le processus de réforme constitutionnelle entamé en 1999 afin d'améliorer la protection d'un certain nombre de droits pour les Guyaniens, s'agissant de questions telles que le droit au travail, le droit à un développement économique, social et culturel progressif, le droit à un niveau de vie adéquat, ou encore le droit à une alimentation adéquate ainsi que le droit au logement. Un nouveau cycle de réformes constitutionnelles sera engagé avec la pleine participation du peuple, qui mettra l'accent notamment sur une réduction des pouvoirs du Président, un approfondissement de la démocratie inclusive et une meilleure représentativité du pouvoir législatif. La primauté du droit, la lutte contre la corruption et une plus meilleure transparence au sein des mécanismes de gouvernance figurent au nombre des priorités du nouveau Gouvernement. Le ministre a aussi insisté sur les efforts constants déployés par le Guyana pour améliorer le sort des peuples autochtones, attirant en particulier l'attention sur la reconnaissance des droits fonciers des Amérindiens. M. Trotman s'est dit conscient des menaces et difficultés que représentent pour le pays la criminalité violente, le niveau élevé de chômage, les cas de corruption et la persistance de divisions ethniques, ajoutant que ces fléaux ont entraîné l'un des plus forts taux de migration de main-d'œuvre, qualifiée comme non qualifiée, au monde; le Gouvernement ne ménagera aucun effort pour régler ces problèmes.
La délégation du Guyana était aussi composée d'autres représentants du Ministère de la gouvernance, ainsi que de diplomates de l'ambassade du Guyana à Bruxelles. Elle a répondu aux questions qui lui étaient posées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, du statut du Pacte en droit interne; des relations interethniques; des questions foncières, en particulier en ce qui concerne les Amérindiens; de la législation antidiscriminatoire; de la situation des lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres; du travail des enfants; des dispositions relatives à l'emploi et notamment du salaire minimum; des questions d'éducation et de santé.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Guyana, M. Zdzisław Kędzia, a relevé que de graves tensions interethniques semblaient avoir ralenti le développement du pays, depuis au moins les années 1960, attirant notamment l'attention sur les discriminations dont ont souffert les Afro-Guyaniens et les Indo-Guyaniens. À l'issue du dialogue avec la délégation, M. Kędzia a fait observer que bon nombre des préoccupations exprimées par les experts touchaient au principe de non-discrimination et au respect de ce principe pour l'ensemble des droits économiques, sociaux et culturels sur tout le territoire guyanien. D'autres membres du Comité se sont notamment inquiétés des forts taux de pauvreté au Guyana, faisant observer que l'extrême pauvreté touchait surtout l'écrasante majorité des Amérindiens. Des préoccupations ont également été exprimées au sujet des discriminations dont semblent être victimes les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres en matière d'emploi, de logement et de santé, ainsi que de la stigmatisation sociale dont elles font l'objet. Plusieurs experts se sont inquiétés des indicateurs de santé relevés par l'Organisation mondiale de la Santé tels que le taux de mortalité maternelle ou le taux de prévalence de la tuberculose et du paludisme.
Le rapport du Guyana fera l'objet d'observations finales que le Comité adoptera dans le cadre de séances privées avant la fin de la session, le vendredi 9 octobre prochain.
Le Comité examinera le rapport de l'Iraq (E/C.12/IRQ/4) à partir de cet après-midi, 15 heures.
Présentation du rapport
Le Comité est saisi du rapport du Guyana (E/C.12/GUY/2-4), ainsi que de ses réponses (E/C.12/GUY/Q/2-4/Add.1 à paraître en français) à la liste de points à traiter que lui a adressée le Comité (E/C.12/GUY/Q/2-4).
M. RAPHAEL TROTMAN, Ministre de la gouvernance de la République coopérative du Guyana, a rappelé que le présent rapport portait sur une période de 18 ans allant de 1995 à 2012. Il a par ailleurs réaffirmé l'engagement de son pays en faveur des obligations conventionnelles qu'il a souscrites.
Des élections générales ont eu lieu en mai dernier qui ont vu émerger un parti de coalition l'APNU+AFC, déclaré vainqueur, a ensuite rappelé M. Trotman. Ce changement intervient après 23 ans d'un gouvernement d'un seul parti, le PPP/C, qui avait soumis le présent rapport en 2012. Le ministre a ensuite attiré l'attention sur le principal changement intervenu durant la période concernée par le rapport, à savoir l'adoption en 1999 de la loi portant création de la Commission de réforme constitutionnelle. Cette commission a rendu son rapport en juillet 1999, faisant 171 recommandations d'amendements constitutionnels qui ont été traduites en lois par le Parlement afin d'améliorer la protection d'un certain nombre de droits pour les Guyaniens, s'agissant de questions telles que le droit au travail, le droit à un développement économique, social et culturel progressif, le droit à un niveau de vie adéquat, ou encore le droit à une alimentation adéquate ainsi que le droit au logement. Ayant pu constater les limites de ces modifications constitutionnelles du point de vue de leur capacité à servir les intérêts plus larges du pays, le Gouvernement actuel a décidé de nommer une nouvelle Commission chargée de préparer un nouveau cycle de réformes constitutionnelles, avec la pleine participation du peuple. L'accent sera mis sur la réduction des pouvoirs du Président, l'approfondissement de la démocratie inclusive et la représentativité accrue du pouvoir législatif, a précisé M. Trotman. La primauté du droit, la lutte contre la corruption et une plus grande transparence des mécanismes de gouvernance figurent au nombre des priorités du nouveau gouvernement, a-t-il indiqué. Ce gouvernement entend créer une économie verte qui se fonde sur le respect et la préservation de l'environnement en utilisant les ressources naturelles de manière durable, a ajouté le ministre; le but est d'assurer une distribution équitable des bénéfices et de sauvegarder le patrimoine du pays pour les générations futures.
Ces dernières décennies, le Guyana s'est efforcé d'institutionnaliser la protection des droits économiques, sociaux et culturels et de nombreux textes de loi, politiques et programmes ont été adoptés à cette fin, a poursuivi M. Trotman, attirant notamment l'attention sur la mise sur pied de la Commission pour l'égalité des femmes. Le Gouvernement reconnaît que davantage d'égalité et d'autonomisation pour les femmes sont nécessaires pour parvenir à éradiquer la pauvreté au Guyana, a-t-il indiqué.
Le ministre guyanien a insisté sur les efforts constants déployés par le Guyana pour améliorer le sort des peuples autochtones, attirant en particulier l'attention sur la reconnaissance des droits fonciers des Amérindiens, sur la décision de désigner le mois de septembre pour célébrer la culture des neuf tribus et sur la revitalisation des efforts déployés dans le secteur éducatif afin de préserver les langues autochtones et de veiller à ce que le contenu de l'enseignement soit culturellement pertinent et bénéfique. Le modèle guyanien de gouvernance inclusive facilite la participation des leaders et du peuple autochtones sur la scène politique, a poursuivi le Ministre. La promotion et la protection des droits de l'homme des minorités, des peuples autochtones, des femmes et des enfants continuent d'être un impératif des programmes gouvernementaux, conformément à la Constitution, aux lois, aux politiques et aux obligations conventionnelles du pays.
Le Bureau du Médiateur, la Commission des relations ethniques, la Commission pour l'égalité des femmes, la Commission des peuples autochtones ou encore le Comité sectoriel parlementaire sur les services sociaux établissent un cadre juridique pour la protection et la promotion des droits de l'homme assorti d'un mécanisme de plaintes auquel peuvent recourir les citoyens pour faire valoir leurs droits tels qu'énoncés dans la Constitution, les lois nationales et les conventions ratifiées par le pays, a poursuivi le Ministre. En 2012, le Directeur général de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a reconnu le Guyana comme faisant partie des 38 pays qui ont atteint l'objectif de lutte contre la faim fixé au niveau international et ce, avant la date-butoir de 2015, a-t-il en outre fait valoir.
Le Guyana a l'un des taux de déforestation les plus faibles du monde, a poursuivi M. Trotman, soulignant que 90% de la forêt du pays reste intacte et que l'essentiel de la population autochtone du pays vit dans les forêts, dont dépend leur subsistance.
Pour autant, le Guyana accuse un ralentissement de la croissance du PIB, a fait observer le ministre, déplorant notamment une fluctuation des prix mondiaux des produits de base alors que les principaux produits d'exportation du Guyana sont le riz, le sucre, la bauxite et l'or. Il est de l'intention du Gouvernement de faire face à ces défis par le biais de politiques sociales et économiques judicieuses. Quant au pétrole, M. Trotman a souligné que le bassin du Guyana avait été identifié comme le deuxième bassin sous-exploré le plus attractif au monde avec un potentiel de 15,2 milliards de barils; les autorités ont l'intention d'établir un fonds souverain dans ce contexte. Le nouveau gouvernement a l'intention de faire en sorte que l'attention de la nouvelle économie se concentre sur la création d'emplois, afin de gouverner dans le meilleur intérêt du Guyana et de l'ensemble de son peuple.
Le Ministre de la gouvernance s'est dit conscient des menaces et défis que représentent, pour la croissance un développement global, la criminalité violente, le niveau élevé de chômage, les cas de corruption et les divisions ethniques prolongées. Ces fléaux sont à l'origine de l'un des plus forts taux de migration de main-d'œuvre, qualifiée comme non qualifiée, au monde, a-t-il indiqué, assurant que le Gouvernement ne ménagerait aucun effort pour répondre à ces défis.
Examen du rapport
M. ZDZISŁAW KĘDZIA, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Guyana, s'est réjoui de la soumission du présent rapport, tout en déplorant qu'il ait fallu attendre vingt ans depuis l'examen du précédent rapport. Il s'est enquis d'éventuels cas attestant que les tribunaux du Guyana invoquent directement le Pacte. Par ailleurs, «doit-on comprendre que, si un droit constitutionnel traite d'une question également couverte par le Pacte, ce dernier ne peut pas être invoqué par le justiciable – la Constitution prévalant donc sur le Pacte?», a par ailleurs demandé le rapporteur.
M. Kędzia a demandé quel était le statut des différentes institutions nationales en charge des droits de l'homme du Guyana, s'agissant notamment de la commission nationale des droits de l'homme, dont il a demandé si elle fonctionnait déjà. Le Bureau du Médiateur a-t-il été créé conformément à ce que prévoit la Constitution, a également demandé le rapporteur?
Évoquant ensuite les relations interethniques, M. Kędzia s'est enquis de la situation actuelle des Afro-Guyaniens et des Indo-Guyaniens en termes de réalisation de leurs droits économiques, sociaux et culturels. Il semble que de graves tensions interethniques aient ralenti le développement du pays, depuis au moins les années 1960, a-t-il fait observer. Il semble que les Afro-Guyaniens et les Indo-Guyaniens aient souffert de discriminations, a-t-il relevé. Il a demandé quelles mesures étaient prises pour lutter contre la discrimination ethnique, en particulier à l'encontre de ces populations.
M. Kędzia a ensuite souhaité savoir où en était l'enquête sur le meurtre de trois personnes en 2013, dont la motivation semble avoir été leur orientation sexuelle.
Parmi les autres membres du Comité, une experte s'est enquise du respect du droit au consentement libre et éclairé des peuples autochtones, en particulier dans le cadre des activités d'exploitation forestière et minière. Elle s'est par ailleurs inquiétée des discriminations dont semblent être victimes les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres en matière – notamment – d'emploi, de logement et de santé, ainsi que de la stigmatisation sociale dont elles font l'objet. Pour ce qui est des personnes handicapées, l'experte a souhaité savoir si la notion d'aménagement raisonnable était reprise dans la législation relative aux personnes handicapées.
La législation guyanienne protège-t-elle les couples homosexuels, notamment, pour ce qui est d'un certain nombre de droits, en cas de décès d'un des deux membres du couple, a-t-il par ailleurs été demandé?
Une autre experte s'est enquise du nombre de plaintes déposées par des personnes handicapées ces dernières années.
La corruption semble être un problème épineux au Guyana, a fait observer un expert, avant de s'enquérir des efforts actuellement déployés par les autorités pour lutter contre ce phénomène. Un autre expert s'est enquis de la législation existante en matière de lutte contre le blanchiment d'argent.
Un autre expert s'est enquis de ce qu'il en était du droit à l'autodétermination des Amérindiens du Guyana, faisant observer que le Guyana n'avait pas ratifié la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail relative aux droits des peuples indigènes et tribaux, qui pose le principe du consentement libre et éclairé des peuples autochtones.
Évoquant la question de l'accaparement des terres au Guyana, un expert a souhaité savoir ce qui est prévu pour s'assurer que les chefs autochtones qui peuvent décider de la vente de terres communautaires au nom de leur communauté expriment bien le point de vue de leur communauté.
Un autre membre du Comité s'est enquis de ce qui était fait par les autorités pour autonomiser les femmes pauvres et vulnérables, notamment dans le contexte du programme d'aide aux foyers monoparentaux. Comment le Guyana garantit-il des conditions de vie décentes pour les travailleurs et les membres de leur famille et est-il prévu à court terme de fixer un salaire minimum pour tous dans ce pays, a en outre demandé cet expert? Quelle est la proportion de salariés couverte par le salaire minimum, a demandé un autre expert? Les prestations chômage existent-elles au Guyana et, le cas échéant, quelle proportion de chômeurs bénéficie-t-elle de ces prestations?
Relevant que, selon un rapport de 2009, les deux tiers des femmes sont employées dans le secteur agricole, une experte a souhaité savoir si ces femmes bénéficiaient d'une protection sociale.
Un expert s'est enquis de l'évolution des taux d'emploi pour les femmes et les jeunes sur les cinq dernières années. Qu'en est-il en outre la situation des personnes handicapées en matière d'emploi, a-t-il demandé?
Comment est réglementé le travail des enfants au Guyana, en particulier dans le secteur informel, a demandé un membre du Comité?
Un expert s'est inquiété des taux élevés de pauvreté au Guyana, un autre demandant des précisions sur les crédits alloués à la lutte contre la pauvreté, eu égard à la gravité de la situation en la matière. La pauvreté atteignait 36% de la population en 2013 et l'extrême pauvreté, qui atteignait 18% en 2011, touche surtout l'écrasante majorité des Amérindiens, un autre membre du Comité ajoutant que le taux d'extrême pauvreté dépassait les 70% parmi les Amérindiens. L'expert s'est enquis des mesures prises pour veiller à ce que les peuples autochtones aient accès, entre autres, à l'eau potable et à des titres fonciers. Qu'advient-il des personnes expulsées de leur logement; obtiennent-elles une compensation?
Plusieurs experts ont constaté un décalage entre les chiffres officiels du Gouvernement et ceux de l'Organisation mondiale de la santé concernant certains indicateurs de santé tels que le taux de mortalité maternelle ou encore le taux de prévalence de la tuberculose et du paludisme. Femmes et fillettes ne semblent pas avoir accès aux services de santé génésique, s'est inquiété un expert.
Une experte s'est inquiétée de la stigmatisation dont sont victimes au Guyana les personnes vivant avec le VIH/sida, lesquelles sont en fait souvent abandonnées à leur sort dans les hôpitaux. Elle s'est en outre enquise de la santé des Amérindiens, s'inquiétant d'informations qui font état d'écarts importants entre groupes ethniques en termes de situation de santé.
Qu'en est-il de la législation en vigueur au Guyana en matière d'avortement, a-t-il par ailleurs été demandé ?
Les autorités guyaniennes ont-elles l'intention de porter à 18 ans, comme le voudrait la norme internationale, l'âge minimum du mariage, qui reste actuellement fixé à 16 ans dans le pays, a demandé une experte ?
Une experte s'est enquise des mesures prises par les autorités pour s'assurer que tous les Guyaniens et toutes les Guyaniennes aient accès au droit à l'éducation, y compris les personnes handicapées et les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués. Elle a déploré que trop souvent, les enseignants qui sont envoyés dans les écoles où sont scolarisés les enfants amérindiens à l'intérieur du pays, n'ont aucune sensibilité à l'égard de la culture amérindienne.
De nombreux experts ont insisté sur l'importance qu'il y aurait pour le Guyana de disposer de statistiques fiables et indépendantes. Un membre du Comité s'est étonné que les statistiques relatives à l'éducation fournies par l'État guyanien datent de 2002 et s'est demandé si la perception de la situation qu'ont aujourd'hui les autorités du pays concernant la situation de l'éducation repose sur des projections basées sur ces données de 2002.
S'agissant de l'âge minimum du mariage, une experte a reconnu qu'il s'agit d'une question éminemment culturelle mais a estimé que le Gouvernement devrait davantage travailler en amont, auprès des communautés dont les pratiques culturelles mènent à des mariages précoces. De tels mariages peuvent avoir de graves conséquences sur la santé de l'enfant, mais aussi sur sa capacité à trouver un emploi, a souligné l'experte.
Il semblerait que si une concession minière a été accordée avant l'adoption de la loi de 2006, il ne soit pas nécessaire de consulter les communautés concernées, s'est inquiété un membre du Comité, faisant observer que beaucoup de concessions minières ont été accordées avant 2006, de sorte que, dans tous ces cas, il n'est pas tenu compte des peuples autochtones.
Réponses de la délégation
La délégation a souligné que l'article 3 de la Constitution guyanienne prévoyait que les traités internationaux ratifiés par le Guyana devenaient partie intégrante du droit interne; c'est le cas du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Pour l'heure, la Commission nationale des droits de l'homme ne fonctionne pas encore au Guyana car il reste à nommer son président, ce qui devrait être fait dans les mois à venir, a poursuivi la délégation. Quant au Médiateur, il a été désigné en janvier 2014; son bureau est opérationnel et on envisage déjà de renforcer ses capacités. Les plaintes sont déposées auprès du Bureau du Médiateur, lequel présente ensuite des rapports.
Les autorités guyaniennes sont bien conscientes que les relations interethniques demeurent un problème dans le pays, a poursuivi la délégation; ces relations se tendent en période électorale ou lorsque le pays traverse des périodes de difficultés économiques, a-t-elle fait observer.
La délégation a ensuite indiqué qu'une commission foncière serait convoquée prochainement pour examiner la question des terres en général et plus particulièrement celles des Amérindiens. Le Gouvernement précédent semble avoir distribué des titres fonciers qui ne sont pas valides, des leaders autochtones s'étant rendu compte qu'ils avaient été dupés et que les titres qui leur avaient été délivrés ne servaient à rien puisque des entreprises minières se sont vu accorder des terres associées à ces terres. Un audit est en cours concernant l'enregistrement des terres, a ensuite indiqué la délégation. Elle a par ailleurs fait part de l'intention du Gouvernement actuel de réviser la loi relative aux Amérindiens. Pour faire valoir leurs droits, les Amérindiens peuvent se tourner vers les tribunaux ordinaires; il n'existe pas de tribunaux qui leur soient spécifiquement destinés, a en outre précisé la délégation.
Le Guyana dispose bien d'une loi contre la discrimination mais il est vrai qu'elle ne couvre pas tous les motifs de discrimination, ce à quoi les autorités actuelles ont bien l'intention de remédier, a d'autre part déclaré la délégation. Une disposition légale au Guyana prévoit que pour être élu au Parlement, une personne doit pouvoir lire et écrire en anglais; il s'agit là d'une clause discriminatoire qu'il faudra abolir, a reconnu la délégation.
La stigmatisation sociale reste encore forte au Guyana, en particulier à l'égard des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués, a ensuite reconnu la délégation. Il n'en demeure pas moins que les choses changent et évoluent et que l'on devrait pouvoir, dans un prochain cycle législatif, se pencher sur l'ensemble des questions de discrimination, y compris celles qui concernent les personnes handicapées et LGBTI, a indiqué la délégation. La question de la dépénalisation des relations homosexuelles sera soumise au Parlement, très probablement au début de l'an prochain, a ajouté la délégation. Quant à l'affaire mentionnée par un membre du Comité concernant un triple meurtre, la délégation a indiqué qu'il s'agissait en fait d'un crime passionnel et non d'un assassinat homophobe puisque l'auteur du crime était lui-même homosexuel et, après avoir assassiné deux personnes, s'est suicidé.
Au Guyana, un salaire minimum est prévu pour différents secteurs, a en outre indiqué la délégation. Il y a des cas où ce salaire minimum n'est pas respecté mais des inspections sont maintenant menées pour détecter de telles situations, a-t-elle ajouté.
Le travail des enfants existe au Guyana, a admis la délégation. Les autorités ont donc créé une institution de protection de l'enfance, composée en particulier de membres de la police et du Ministère de l'éducation, dont les agents se déplacent à travers le pays et qui, lorsqu'elle constate une fraude, renvoie l'affaire à la justice. Des campagnes de sensibilisation à cette problématique sont également menées, a ajouté la délégation.
Un certain nombre d'enfants ne vont effectivement pas à l'école, mais leur nombre ne peut pas être qualifié d'important, a déclaré la délégation; selon le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), le Guyana a atteint son objectif en matière d'éducation primaire universelle, avec 83% des enfants allant à l'école primaire. L'abandon scolaire est plus important chez les garçons que chez les filles, ce qui constitue une tendance propre à la région caraïbe, les garçons souhaitant plus rapidement entrer dans la vie professionnelle et gagner de l'argent, a ajouté la délégation. Le Guyana consacre près de 15% de son budget à l'éducation, a-t-elle précisé.
La délégation a reconnu que les enfants autochtones étaient confrontés à des difficultés d'accès à l'école, certains devant se déplacer en canoë ou devant parcourir de longues distances à pied pour aller à l'école; mais les autorités ne ménagent aucun effort pour améliorer les taux de fréquentation scolaire de ces enfants, a assuré la délégation.
Si le Guyana n'a pas adhéré à la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail relative aux droits des peuples indigènes et tribaux, la délégation a indiqué ne percevoir a priori aucun obstacle à ce que le pays adhère à cet instrument et les autorités vont se pencher sur la possibilité de le faire. Quoi qu'il en soit, tant de jure que de facto, le Guyana respecte les principes de cet instrument, en particulier pour ce qui est du consentement préalable libre et éclairé des populations concernées, a assuré la délégation.
Le Guyana n'a pas non plus ratifié la Convention interaméricaine des droits de l'homme. Mais ici encore, la délégation a indiqué ne percevoir a priori aucun obstacle en vue de l'accession du pays à cet instrument régional. Aussi, les autorités guyaniennes vont-elles se pencher sur les raisons pour lesquelles cela n'a pas encore été fait.
Selon les données de l'UNICEF sur le Guyana, le taux de mortalité infantile des enfants de moins de cinq ans s'élevait à 16,2 pour mille naissances vivantes en 2012, à 15,7 pour mille en 2013 et, étrangement, à 23,9 pour mille en 2014, a indiqué la délégation, précisant ne pas être en mesure de dire les raisons de cette hausse subite pour l'année 2014.
La délégation a par ailleurs indiqué qu'en 2014, 856 personnes vivaient avec le VIH/sida au Guyana.
Certains Guyaniens sont parfois réticents à se rendre dans un hôpital et préfèrent alors se tourner vers la médecine traditionnelle, a fait observer la délégation. Les autorités s'efforcent de convaincre les femmes de ne pas accoucher chez elles, sans chercher à abolir cette pratique, a-t-elle ajouté.
S'agissant de la réduction de la pauvreté, la délégation a notamment indiqué que les autorités guyaniennes ont créé un Fonds de développement amérindien; 20% des royalties issues de l'exploitation pétrolière et minière sont versés dans ce fonds, a-t-elle précisé.
S'agissant de la sécurité alimentaire, la délégation a souligné que la FAO est très active au Guyana. Le Guyana a obtenu d'assez bon résultats en matière de sécurité alimentaire, les efforts déployés par le pays dans ce domaine ayant été maintes fois salués, notamment en 2013 et en 2015, au niveau international, y compris par la FAO.
Après avoir souligné que le Gouvernement actuel du Guyana ne souhaite pas avoir à répondre des actes du Gouvernement passé, la délégation a indiqué que, conscientes des lacunes en matière de statistiques, les autorités actuelles entendent améliorer la collecte de données.
La délégation a admis ne pas disposer de statistiques fiables concernant l'ensemble des personnes handicapées, en particulier pour ce qui est des enfants autochtones ou encore des enfants d'ascendance africaine.
En ce qui concerne l'accès à l'éducation pour les groupes marginalisés, notamment des autochtones, la délégation a indiqué avoir l'intention d'agir sur l'aspect linguistique. Les autorités ont pour objectif global d'assurer une bonne planification et une bonne transition entre l'école et le monde du travail pour les jeunes, a ajouté la délégation.
Pour ce qui est du placement d'enfants, la délégation a indiqué qu'il y aurait au Guyana environ 700 enfants placés dans des foyers d'accueil; il s'agit d'enfants qui ne sont pas orphelins mais qui sont des enfants de migrants ou de parents se trouvant dans l'incapacité de les prendre en charge, a-t-elle précisé. Les autorités s'efforcent de ne pas institutionnaliser d'enfants n'ayant pas atteint l'âge de trois ans; au total, ce sont donc moins de 30 enfants de moins de 3 ans qui bénéficient de soins de substitution.
Qu'il s'agisse des prestations pour les personnes de plus de 60 ans, des prestations de veuvage ou encore des prestations pour le handicap, les nombreuses prestations sociales existantes, sont fondées sur un système de contributions. Ces prestations sont ouvertes à tous les travailleurs, y compris ceux du secteur agricole et les autorités s'efforcent donc de faire en sorte que tous les travailleurs contribuent au régime.
S'agissant des questions de santé, la délégation a fait valoir que les préservatifs sont distribués gratuitement dans le pays. Pour ce qui est de l'avortement, les femmes ont pleinement le choix d'interrompre ou de poursuivre leur grossesse, a en outre souligné la délégation.
Le Guyana ne tolère pas le mariage précoce, ce qui n'empêche pas que cette pratique se perpétue, a déclaré la délégation. Pour autant, cette pratique n'est pas largement répandue et les contrevenants sont poursuivis en justice pour viol, a-t-elle assuré. Le Guyana ne tolère pas cette pratique, même si elle trouve son origine dans la culture et l'histoire de peuples autochtones, a insisté la délégation.
Le Guyana a ratifié 43 conventions de l'Organisation internationale du travail (OIT) et a bien l'intention d'en ratifier d'autres; mais quoi qu'il en soit, le Guyana est d'ores et déjà l'un des pays caraïbes ayant ratifié le plus de conventions de cette Organisation, a fait valoir la délégation.
Conclusion du rapporteur
M. KĘDZIA a remercié la délégation pour les réponses très franches qu'elle a apportées aux questions posées par les experts. Le rapporteur pour le Guyana s'est dit convaincu que ce dialogue a aidé les membres du Comité à comprendre les difficultés rencontrées par le pays et à reconnaître les progrès qu'il a d'ores et déjà réalisés. Il faut espérer que ce dialogue aura également aidé la délégation à mieux comprendre les préoccupations qui sont celles des membres du Comité s'agissant de la mise en œuvre du Pacte au Guyana, a poursuivi le rapporteur, soulignant que bon nombre des préoccupations exprimées par les experts touchaient au principe de non-discrimination et au respect de ce principe pour l'ensemble des droits économiques, sociaux et culturels sur tout le territoire guyanien.
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