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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme est saisi de rapports sur les exécutions sommaires et sur la discrimination à l'égard des femmes

19 Juin 2015

Conseil des droits de l'homme

MI JOURNÉE 

19 juin 2015

Le Conseil des droits de l'homme a examiné, à la mi-journée, des rapports sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et sur la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique.  Le Conseil a conclu en début de séance le débat interactif entamé hier avec le Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation et l'Experte indépendante sur les droits de l'homme et la solidarité internationale.

Le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, M. Christof Heyns, a expliqué que son rapport portait sur la manière dont les technologies de l'information et de la communication pouvaient être utilisées pour préserver le droit à la vie.  L'âge numérique apporte son lot de nouvelles menaces mais ces technologies permettent aussi de protéger les défenseurs des droits de l'homme.  M. Heyns a toutefois estimé que cet outil puissant devait être couplé à des techniques plus anciennes de défense des droits de l'homme.  Le rôle que peuvent jouer les preuves numériques dépend ainsi de l'acceptation de ce type d'information par les organes traditionnels qui assurent l'efficacité de l'obligation redditionnelle en matière de droits de l'homme, comme le Conseil des droits de l'homme ou le Conseil de sécurité des Nations Unies.  Le Rapporteur spécial a rendu compte de ses visites en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Gambie.

Au cours du débat avec le Rapporteur spécial, des délégations* ont souligné que le contenu numérique produit par des témoins civils pose d'importants problèmes de vérification des sources et preuves numériques – sans compter que des terroristes peuvent se servir de ces moyens pour diffuser de fausses informations ou des appels à la haine.  Elles ont donc insisté sur la nécessité d'établir des mécanismes de reddition des comptes appropriés et méticuleux à tous les niveaux.  D'autres délégations ont constaté, pour leur part, que le recours aux moyens techniques modernes permet de mettre au jour des violations des droits de l'homme qui passeraient autrement inaperçues.

La Présidente-rapporteuse du Groupe de travail chargé de la question de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique, Mme Emna Aouij, a présenté un rapport thématique portant sur la discrimination à l'égard des femmes et des filles dans la vie culturelle et familiale.  Mme Aouij a constaté que «malgré des développements normatifs importants au niveau international, régional et national, cette discrimination contre les femmes et les filles persiste dans la loi et dans la pratique».  Le Groupe rappelle que la culture ou la religion ne peuvent justifier la discrimination fondée sur le genre non plus que la limitation des droits des femmes.  Il estime aussi que «toutes les formes de mariage ne méritent pas d'être légitimement reconnues», notamment les mariages discriminatoires à l'égard des femmes.  Mme Aouij a rendu compte des visites de travail effectuées par le Groupe au Chili, au Pérou et en Espagne.  Ces trois pays ont fait des déclarations.

Nombre de délégations** ont rejoint le Groupe de travail pour dire que les traditions ne sauraient justifier la discrimination ni les pratiques déshumanisantes à l'encontre des femmes; elles ont aussi salué la conception large de la famille adoptée par le Groupe de travail et condamné tout relativisme culturel.  D'autres intervenants, au contraire, ont regretté que le Groupe de travail utilise des concepts et des droits, et entérine des modes de vie, qui ne font pas du tout l'unanimité au sein de la communauté internationale. 

Le Conseil reprendra lundi 22 juin au matin l'examen des rapports sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et sur la discrimination à l'égard des femmes.

Au début de la séance, la Bolivie, le Ghana et la République démocratique du Congo ont été les trois dernières délégations à s'exprimer en conclusion du débat entamé hier sur le droit à l'éducation et sur les droits de l'homme et la solidarité internationale.  Plusieurs organisations non gouvernementales*** ont aussi pris la parole, certaines d'entre elles dénonçant les atteintes au droit à l'éducation dans plusieurs pays.

 

À 15 heures cet après-midi, le Conseil tient, dans le cadre de sa journée annuelle de débat consacré aux droits fondamentaux des femmes, une réunion-débat qui portera sur la participation des femmes dans les processus de prise de décision.

 

Fin du débat interactif sur le droit à l'éducation

La République démocratique du Congo a souligné que le développement d'un pays se mesurait à la qualité de son éducation, raison pour laquelle ce Gouvernement en a fait une de ses priorités, l'éducation représentant actuellement environ le cinquième du budget national.  La Bolivie a souligné l'universalité du droit à l'éducation, celle-ci devant être plurilingue.  La privatisation a un effet délétère sur ce droit, contrevenant à l'égalité des chances.  À long terme, celle-ci ne fait que réduire le niveau d'instruction.  Pour sa part, le Ghana consacre le droit à l'éducation et rejette les affirmations du rapport sur le droits à l'éducation, apportées sans aucun élément concret, selon lesquelles il s'est engagé dans une privatisation de l'éducation; il s'agit d'allégations infondées.

Parmi les organisations non gouvernementales, la Global initiative for Economic and Social Rights a salué la recommandation du Rapporteur spécial visant la mise sous contrôle des fournisseurs privés d'éducation.  Ces derniers doivent constituer un complément au service public de l'éducation et non le saper.  Cette organisation est en train d'élaborer des principes directeurs en matière de droit à l'éducation, a-t-elle indiqué. 

L'Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement (OIDEL), au nom également de plusieurs organisations non gouvernementales1, a déclaré que la privatisation est un échec de l'État et certainement pas une exception économique.  L'État doit en effet coopérer avec le secteur privé et non lui reléguer la gestion du droit à l'éducation.  Il doit aussi s'assurer que les programmes scolaires privés soient en accord avec les programmes publics, a dit Plan international, au nom également de Myochikai - Arigatou Foundation.  Mais pour Alliance Defending Freedom, les parents doivent avoir la liberté de choisir le modèle scolaire qu'ils veulent pour leur enfant.  Le droit à l'éducation est menacé dans de nombreuses régions du monde et les conditions et les valeurs capitalistes prennent le pouvoir, notamment en Afrique, où seuls les enfants des plus riches peuvent aller à l'école, a dit la Commission arabe des droits de l'homme

Al Salam Foundation et Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture ont accusé le Gouvernement de Bahreïn de priver certains de ses prisonniers de leur droit à l'éducation, en particulier dans la prison de Jau.  En République islamique d'Iran, les écoles privées sont mieux dotées que celles du public, qui parfois n'ont même pas de toit, a dit Verein Südwind Entwicklungspolitik, appelant le Rapporteur spécial à s'y rendre pour s'en rendre compte lui-même.  Près de neuf millions et demi d'enfants yéménites ont besoin d'aide, notamment en raison des bombardements et de la situation humanitaire dans laquelle ils se trouvent, a déclaré l'Al-Khoei Foundation.

Jubilee Campaign a déclaré que les discours de haine religieuse se sont immiscés dans les programmes scolaires en Inde et au Pakistan, tandis qu'au Myanmar les restrictions sont faites aux minorités ethniques et religieuses.  Le droit à l'éducation est également refusé à certaines couches minoritaires en Inde, en particulier s'agissant des Dalits, a poursuivi World Barua OrganizationInternational Muslim Women's Union a pour sa part dénoncé la situation dans la région du Jammu-et-Cachemire à cause de l'occupation de ce territoire par l'armée indienne, a dit

En conclusion, le Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation, M. KISHORE SINGH, s'est félicité du soutien exprimé par les délégations à la protection de l'éducation contre le risque de commercialisation.  L'expert a remercié l'Algérie de ses compléments d'information au sujet de la formation professionnelle.  Il s'est dit fier de voir que les États accordent la plus grande importance à l'éducation, l'un des objectifs du Millénaire pour le développement.  De même, M. Singh a salué les interventions qui montrent une volonté de défendre le statut de l'éducation en tant que bien public.  L'éducation privée est peut-être complémentaire de l'éducation publique, comme l'a affirmé la délégation du Royaume-Uni, mais elle doit être solidement encadrée par les pouvoirs publics, a aussi mis en garde le Rapporteur spécial.  M. Singh a dit partager, en outre, les préoccupations de l'Union européenne s'agissant de l'éducation dans les zones de conflit. 

Il est clair que l'éducation de qualité et gratuite doit être disponible jusqu'au niveau du secondaire; il est clair aussi que les États n'arrivent pas à faire respecter ce principe, a noté le Rapporteur spécial.  Les États devront adopter des cibles précises à ce sujet dans le cadre des objectifs du développement durable.  «Comment en effet éliminer la pauvreté sans reconnaître le rôle clé de l'éducation pour ce faire?», s'est interrogé M. Singh.  Enfin, le concept de responsabilité sociale des entreprises exige qu'elles investissent pour le bien commun: or, la privatisation de l'éducation va directement à l'encontre de ce principe, a conclu M. Singh.

Fin du débat interactif sur la solidarité internationale

Le Ghana est d'accord avec l'experte indépendante lorsque celle-ci estime que la solidarité et la coopération internationales se renforcent mutuellement.  Il serait erroné de les distinguer car il s'agit de concepts qui bien souvent se chevauchent.  La Bolivie a souligné la nécessité de continuer à œuvrer en faveur de la concrétisation de la solidarité internationale.  Elle est favorable à la recommandation visant à tenir une réflexion au niveau régional à ce sujet.  Il est important que ce concept soit intégré dans le programme de développement pour l'après-2015. 

En ce qui concerne les organisations non gouvernementales, le Conseil indien d'Amérique du Sud a déclaré que les nouvelles dynamiques mondiales ne doivent pas reléguer au second plan l'obligation internationale à la solidarité.  C'est une obligation morale, a renchéri Associazione Communita Papa Giovanni XXIII, au nom également de plusieurs organisations non gouvernementales2, se félicitant par ailleurs du projet de déclaration sur le droit des peuples et des individus à la solidarité internationale.  Dans le même ordre d'idées, l'Association mondiale pour l'école instrument de paix a déclaré que tous les droits sont inaliénables et que tout doit être fait pour leur mise en œuvre. 

Présentation du rapport sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires

M. CHRISTOF HEYNS, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a expliqué que son rapport examine cette année principalement la manière dont les technologies de l'information et de la communication peuvent être utilisées pour préserver le droit à la vie, ainsi que les compte-rendu de ses visites en Papouasie-Nouvelle-Guinée et en Gambie et le suivi de ses missions en Inde et en Turquie ainsi que ses observations sur les communications envoyées l'année passée.

Il est clair que le technologies de l'information et de la communication –matériel et logiciel - peuvent jouer un rôle de plus en plus important dans la protection des droits de l'homme, a déclaré le Rapporteur spécial.  L'information peut être utilisée pour contribuer aux enquêtes et garantir la redevabilité, mais la technologie peut aussi garantir la visibilité et mobiliser les soutiens en faveur de personnes en danger.

Concernant la protection, M. Heyns a rappelé que l'âge numérique apporte son lot de nouvelles menaces avec la surveillance cachée des populations ou encore le ciblage des activités.  Mais les technologies de l'information et de la communication permettent aussi, avec des systèmes d'alerte, de protéger les défenseurs des droits de l'homme.  Le Rapporteur spécial a cité en exemple une application cachée créée par Amnesty international qui permet d'envoyer en urgence des informations en appuyant très rapidement sur un bouton, y compris en cas d'arrestation du détenteur de l'appareil. 

De même, le nombre d'informations disponibles dans l'espace numérique permet d'assurer un suivi des droits de l'homme d'une manière comparable à ce qui se fait en cas de crise.  Cela va du recours aux medias sociaux par les chercheurs à des machines qui évaluent les sources issues et métadonnées, par exemple dans le cadre des discours de haine.  De même, dans la mesure où de nombreuses violations des droits de l'homme sont commises parce que leurs auteurs pensent qu'ils ne seront jamais découverts, le fait que les technologies de l'information et de la communication permettent de faciliter les enquêtes va dans le bon sens.  Ainsi, le fait que de nombreux téléphones mobiles soient équipés de caméras et appareils photo sophistiqués permet potentiellement de multiplier les témoignages et autres informations sur les violations des droits de l'homme.  En outre, l'enregistrement de nos actions influence notre comportement, a rappelé M. Heyns, qui a estimé que le fait que des policiers disposent de mini-caméras dans leur propre équipement a permis d'améliorer les comportements.  S'il est bien sur nécessaire d'établir un équilibre entre le droit à la vie privée et le fait d'agir dans la sécurité mais les premières indications semblent indiquer que les caméras ainsi emportées ont un effet important sur la violence illégale. 

De manière générale, l'augmentation des capacités numérique facile la participation des citoyens ordinaires au contrôle du respect des droits de l'homme, a encore estimé le Rapporteur spécial.  Ce contrôle citoyen permet de renforcer les obligations redditionnelles des États.  Pour M. Heyns, une première génération, celle des organes intergouvernementaux de droits de l'homme a vu son travail révolutionné par les méthodes de collecte d'informations issues d'une seconde génération, celle des organisations non gouvernementales des droits de l'homme.  Désormais, une troisième génération d'enquêteurs, assisté par les technologies de l'information et de la communication, sont en train de créer un nouveau cours potentiellement très puissant. 

M. Heyns a toutefois estimé que l'outil puissant que représentent les technologies de l'information et de la communication devait être couplé avec des techniques plus anciennes de défense des droits de l'homme.  Ainsi, le rôle que peuvent jouer les preuves numériques dépend de l'acceptation de ce type d'information par les organes traditionnels qui assurent l'efficacité de l'obligation redditionnelle en matière de droits de l'homme, comme le Conseil des droits de l'homme, le Conseil de sécurité des Nations Unies, la Cour pénale internationale , les institutions de droits de l'homme ou les tribunaux nationaux.  Pour le Rapporteur spécial, la plupart des acteurs de la «deuxième génération» fait maintenant un large usage du potentiel de la troisième génération, mais les organes de la première génération, et notamment ce Conseil, ne sont pas encore prêts à en utiliser toutes les capacités.  M. Heyns a jugé fondamental de pouvoir vérifier les éléments de preuve obtenus par les technologies de l'information et de la communication mais il a estimé qu'on exagérait parfois la difficulté de cette vérification et l'utilisait comme excuse pour ne pas accepter de type de preuves. 

M. Heyns a ensuite présenté les conclusions de ses visites de terrain.  En Papouasie-Nouvelle-Guinée, de nombreuses mesures formelles ont été prises pour assurer la promotion et la protection des droits de l'homme mais elles ne sont pas mises en œuvre correctement.  Il faut donc un ensemble de réformes et le Rapporteur spécial a recommandé notamment que le pays mette en place une institution nationale de droits de l'homme conforme aux principes de paris qui pourrait faciliter l'introduction de cours et formations aux droits de l'homme dans les cursus scolaires et dans les écoles de police.  De même, le pays devrait encourager la création d'organisations non gouvernementales contrées sur la protection des droits de l'homme.   Concernant la Gambie, M. Heyns a rappelé qu'il s'y était rendu en compagnie du Rapporteur spécial sur la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.  Il a expliqué que son rapport présente ses principaux constats concernant de multiples violations des droits de l'homme et qu'il propose une série de recommandations au Gouvernement, à la communauté internationale et à la société civile afin de lutter contre les exécutions illégales et assurer une meilleure protection du droit à la vie.  M. Heyns a répété qu'il avait de graves préoccupations concernant la situation des droits de l'homme en Gambie, et en particulier en ce qui concerne la valeur qu'on y accorde à la vie humaine.  Il a ajouté que la visite des deux Rapporteurs spéciaux s'était déroulée dans des conditions très difficiles et qu'ils s'étaient vu interdire d'accéder librement aux prisons du pays malgré des assurances écrites fournies à l'avance par le Gouvernement que cet accès serait autorisé. 

M. Heyns a présenté rapidement son rapport sur les 114 communications qu'il a adressées à 52 États et autres acteurs depuis le début de son mandat.  Il a expliqué avoir reçu 36 réponses, dont 28 complètes et a invité une nouvelle fois les Gouvernements à prendre le temps de lui fournir des réponses substantielles en temps utile. 

Le Conseil était saisi du rapport sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires (A/HRC/29/37), ainsi que des comptes rendus des missions du Rapporteur spécial en Papouasie-Nouvelle-Guinée (A/HRC/29/37/Add.1, en anglais avec résumé en français – voir également les réponses du pays: A/HRC/29/37/Add.6 disponible en anglais) et en Gambie (A/HRC/29/37/Add.2, en anglais avec résumé en français – voir également les réponses du pays: A/HRC/29/37/Add.7, disponible en anglais).  Des additifs concernent par ailleurs le suivi des précédentes recommandations du Rapporteur spécial concernant l'Inde (A/HRC/29/37/Add.3, en anglais avec résumé en français) et la Turquie (A/HRC/29/37/Add.4, en anglais avec résumé en français), ainsi que des observations sur les communications (A/HRC/29/37/Add.5, disponible en anglais).

Présentation du rapport sur la discrimination à l'égard des femmes

MME EMNA AOUIJ, Présidente-rapporteuse du Groupe de travail chargé de la question de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique, a déclaré que le rapport présenté examine la discrimination à l'égard des femmes et des filles dans la vie culturelle et familiale.  Les États sont tenus de prendre toutes les mesures appropriées pour éliminer toute forme de discrimination dans toutes les sphères, y compris dans la vie culturelle et familiale, que cette discrimination soit perpétrée par des agents étatiques ou des acteurs privés.  Or, a constaté Mme Aouij, «malgré des développements normatifs importants au niveau international, régional et national, cette discrimination contre les femmes et les filles persiste dans la loi et dans la pratique».  Le manque d'égalité dans la famille rend les femmes et les filles vulnérables à la violence domestique, tandis que le patriarcat culturel et religieux dans le même contexte est une source majeure d'inégalités économiques au détriment du sexe féminin.  À cet égard, tout en reconnaissant l'importance de la diversité culturelle et de la liberté de religion, le Groupe rappelle que la culture ni la religion ne peuvent justifier la discrimination fondée sur le genre, ni la limitation des droits des femmes.  Le Groupe estime aussi que «toutes les formes de mariage ne méritent pas d'être légitimement reconnues», notamment les mariages discriminatoires à l'égard des femmes: mariages précoces ou forcés, polygames et temporaires, notamment.

Mme Aouij a rendu compte de plus des visites de travail effectuées par le Groupe au Chili, au Pérou et en Espagne.  En Espagne, le Groupe a constaté que malgré des progrès remarquables pour intégrer les femmes dans la vie publique, politique et économique, «la menace d'une régression plane toujours» sous l'influence d'une culture machiste et d'institutions religieuses patriarcales.  La violence conjugale se poursuit «à un niveau intolérablement élevé», a ajouté Mme Aouij.  Le Groupe recommande aux autorités espagnoles d'investir dans l'éducation, y compris dans l'enseignement obligatoire aux droits des femmes dans toutes les écoles.  La participation des femmes à la vie politique au Chili est «faible et inférieure à la moyenne régionale et internationale», a constaté le Groupe, en dépit du fait que le pays a élu une femme à sa présidence.  Il a aussi relevé une faible participation des femmes dans le monde du travail et la persistance d'un fort écart salarial entre les deux sexes.  Cela étant, Mme Aouij a salué la volonté politique du Gouvernement de marquer un profond changement dans la vie des femmes et de les faire sortir d'une société patriarcale conservatrice, qui n'a pas su jusqu'à présent les inclure de manière égalitaire.  S'agissant enfin de la visite au Pérou, le Groupe a constaté dans ce pays «un niveau alarmant de violence à l'égard des femmes qui nécessite une action urgente à tous les niveaux».  Il regrette en outre profondément la décision de 2009 de la Cour constitutionnelle interdisant la distribution gratuite de contraception d'urgence, de même que le rejet, le 25 mai dernier, de la loi proposant la décriminalisation de l'avortement en cas de viol.  Le Groupe salue par contre les mesures prises par l'État pour remédier au taux beaucoup trop élevé du travail informel parmi les femmes et surtout la réouverture des enquêtes concernant les cas de stérilisation forcée dans les années 1990.

Le Conseil est saisi du rapport annuel sur la question de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique (A/HRC/29/40) et des comptes rendus de ses visites au Chili (A/HRC/29/40/Add.1 à paraître en français - et réponses du Gouvernement à paraître en français), au Pérou (A/HRC/29/40/Add.2 à paraître et réponses du Gouvernement,) et en Espagne (A/HRC/29/40/Add.3 et réponses du Gouvernement, à paraître).

Pays concernés

La Chili a rappelé qu'il collaborait avec tous les titulaires de mandat de procédures spéciales.  Il a fait valoir les efforts réalisés dans le pays pour lutter contre les violences à l'encontre des femmes, et les différentes formes de discrimination, notamment en autorisant l'interruption volontaire de grossesse dans certaines circonstances.  La création d'un ministère des droits des femmes a permis de lutter contre les discriminations.  La pleine participation de millions de femmes à tous les processus de production et décision est un élément fondamental de la lutte contre la discrimination.  Il existe ainsi désormais un système de quotas qui permet de garantir une égalité de représentation homme-femme au Parlement, entre autres mesures.  Le Chili espère pouvoir continuer de bénéficier de l'assistance du Groupe de travail.

Le Pérou a rappelé qu'il avait déjà accueilli les visites de douze titulaires de mandat de procédures spéciales et s'apprêtait à en accueillir un treizième.  Toutes ces visites se sont faites dans un esprit de coopération.  Mais la visite du Groupe de travail a été l'exception à cette règle.  Jamais encore le Pérou n'avait interagi avec des titulaires de mandat de procédures spéciales dont le rapport va bien au-delà de son mandat et contient des affirmations incorrectes, un grand nombre d'imprécisions et de généralisations abusives.  Malgré divers amendement, le rapport présenté ce jour contient encore des inexactitudes, ce qui a contraint pour la première fois le Pérou à présenter ses propres commentaires séparément.  Le Pérou a cité en exemple les éléments du rapport du Groupe de travail concernant les peuples autochtones.  Seule une vingtaine de pays ont ratifié la convention 169 de l'OIT sur les peuples autochtones, dont le Pérou, qui est le seul à avoir pris des mesures législatives concernant la consultation préalable de peuples autochtones.  Le Pérou a accusé le Groupe de travail de s'être limité à se faire l'écho des plaintes reçues sans approfondir et vérifier ces dires.  De même, le Pérou conteste que le Groupe de travail ait un mandat pour faire des recommandations dans le domaine de l'orientation sexuelle.  Toutefois, ces désaccords avec le Groupe de travail ne sapent en aucun cas la détermination du Pérou à renforcer la lutte contre les discriminations à l'égard des femmes et la promotion des droits de celles-ci.

L'Espagne s'est dite satisfaite du dialogue noué avec le Groupe de travail chargé de la question de la discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique.  Le rapport de cette instance reconnaît les progrès enregistrés par l'Espagne, laquelle est néanmoins consciente des efforts qu'elle doit consentir.  L'Espagne applique une politique d'information et de transformation sociale pour lutter contre la violence domestique envers les femmes.  Le pays est ainsi l'un des rares à publier des statistiques sur l'ampleur du problème.  L'Espagne est engagée à améliorer la participation des femmes à tous les aspects de la vie publique et économique.  L'Espagne n'est cependant pas d'accord avec les interprétations du Groupe de travail relatives à la «culture machiste» ou à certains aspects de la législation nationale. 

Débat interactif sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires

L'Union européenne et la Belgique ont salué la recommandation du Rapporteur spécial concernant la création par le Haut-Commissariat aux droits de l'homme d'un «responsable des preuves numériques».  L'Italie a demandé au Rapporteur spécial de dire quel rôle les entreprises du secteur technologique peuvent jouer dans le contrôle des preuves.  Les États-Unis ont constaté que le recours aux moyens techniques modernes, notamment les caméras embarquées, permet de mettre au jour des violations des droits de l'homme qui passeraient inaperçues sans cela.  L'Albanie a souligné les risques liés à l'utilisation de données technologiques et numériques, dans le contexte de violation du droit à la vie privée. 

Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique, a estimé que la vérification des contenus des technologies de l'information et des télécommunications est fondamentale: le contenu numérique produit par des témoins civils pose d'importants problèmes de vérification des sources et preuves numériques, sans compter que des terroristes peuvent se servir de ces moyens pour diffuser de fausses informations.  La Syrie a elle aussi souligné l'importance du contrôle des sources des informations diffusées par voie électronique.  L'Algérie, au nom du Groupe africain, a insisté sur la nécessité d'établir des mécanismes de reddition des comptes appropriés et méticuleux à tous les niveaux.

La Fédération de Russie a déploré que M. Heyns n'ait pas rendu compte dans son rapport de nombreuses exécutions sommaires, en particulier dans l'est de l'Ukraine.

Conclusions

M. HEYNS a relevé que plusieurs délégations avaient mis en garde contre l'utilisation par trop systématique des technologies de l'information et de la communication dans la collecte d'informations sur des violations des droits de l'homme.  Il a rappelé qu'il fallait toujours vérifier les sources.  Il s'agit d'un outil qui peut être utilisé à bon comme à mauvais escient comme n'importe quel outil, a-t-il ajouté.  Il faut être particulièrement prudent, ce qui implique des ressources humaines pour la vérification des données.  L'expert a par ailleurs souligné l'importance de la question de l'anonymat dans ces nouvelles technologies et celui du stockage de l'information.  Il a rappelé le caractère fondamental du droit à la vie privée en réponse à des observations sur l'utilisation de caméras de surveillance.  M. Heyns a fait part de sa perplexité face à la remarque d'une délégation sur le lien artificiel selon elle entre le droit à la vie et les nouvelles technologies.  Il a cité le cas des images prises par des possesseurs de téléphone portables qui, dans certains cas, aux États-Unis notamment, ont permis de faire la lumière sur certains drames.  

Débat interactif sur la discrimination à l'égard des femmes

Les États-Unis et l'Union européenne se sont dits d'accord avec le Groupe de travail pour dire que les traditions ne sauraient justifier la discrimination ni les pratiques déshumanisantes à l'encontre des femmes. 

L'Algérie, au nom du Groupe africain, a dit ne pas souscrire à la démarche qui consiste à évoquer la culture et la religion pour justifier la discrimination et les pratiques violentes à l'égard des femmes et des filles.  Le Groupe africain exhorte toutefois la communauté internationale à respecter la diversité culturelle et les normes qui visent à protéger les droits des femmes en tant que groupe vulnérable, reconnaissant le rôle essentiel de la famille à cet égard.  L'Égypte a regretté que le Groupe de travail établisse des comparaisons sortant du cadre de son mandat et qu'il continue d'utiliser des concepts qui ne font pas l'unanimité, renvoyant à des modes de vie qu'elle rejette.

L'Équateur, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes, a réaffirmé l'importance de l'autonomisation des femmes pour permettre aux sociétés de tirer le meilleur parti possible de leurs capacités et contributions.  L'égalité des droits au foyer est liée étroitement aux libertés dont les femmes jouissent en général au sein de la société.  Le Brésil a félicité le Groupe de travail d'avoir reconnu les différentes formes que prend la famille de nos jours.  Le Brésil recommande l'adoption de mécanismes efficaces de lutte contre les formes de discrimination multiples dont sont victimes de nombreuses femmes.  Le Mexique a dit avoir mis en place des communautés de jeunes pour lutter contre les stéréotypes visant les femmes.  Il a demandé au Groupe de travail de donner des exemples sur les méthodes visant à valoriser les contributions des femmes à la vie culturelle.

Prenant exemple de son expérience, notamment en ce qui concerne les discriminations et violence subies par les femmes maories, la Nouvelle Zélande a déclaré que pour qu'un programme fonctionne il faut qu'il soit ancré dans les cadres culturels.  Mais la culture et la tradition ne peuvent être invoquées pour justifier des discriminations ont redit les Pays-Bas, ajoutant que la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes reste le meilleur instrument de lutte contre les discriminations.  La Suisse condamne également le relativisme culturel et met en garde contre toute tentative de saper les progrès réalisés en matière de protection des droits de l'homme.  L'Irlande n'accepte pas non plus que la culture ou la religion servent de justifications.  La délégation a souhaité avoir des informations sur les discriminations subies par les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres.  Pour l'Albanie, si on ne peut invoquer une culture ou religion pour exercer une discrimination, la famille reste le lieu de protection privilégiée de la protection des femmes.  

La Fédération de Russie pour sa part a reproché au Groupe de travail de commenter les décisions adoptées par le Conseil des droits de l'homme, alors que cela ne relève pas de son mandat et est contraire au code de conduite des procédures spéciales.  Sur la même ligne, L'Organisation pour la coopération islamique a déploré cette approche, mais aussi la promotion de concepts, de droits et catégories non acceptées sur le plan international. 

La définition de la notion de famille doit bien évoluer et intégrer d'autres types de familles et de couples, a dit la délégation de la Norvège, avant de demander au Groupe de travail comment lutter contre le relativisme culturel.  La Slovénie a souligné que la discrimination envers les femmes et les filles ne saurait jamais être justifié par des pratiques culturelles ou religieux, ni pour tout autre motif.  Elle appelle les États à criminaliser toute forme de violence domestique.

Le grand défi au Paraguay consiste à renforcer la participation politique des femmes, notamment en raison de pratiques et de stéréotypes existants, les femmes étant souvent reléguées aux tâches domestiques.  Pour combattre ces stéréotypes, le Gouvernement a lancé des campagnes de sensibilisation de grande ampleur.  Pour le Botswana, les États doivent agir en tant qu'agents du changement des mentalités.  Le Conseil de l'Europe appuie pleinement le Groupe de travail dans sa recommandation d'un plein accès des femmes à la justice, indiquant qu'une conférence sur ce sujet sera organisée en juillet prochain par la Suisse à Berne.

La Lettonie a souligné le rôle clé de l'État, notamment afin d'encourager les femmes et les filles à porter plainte, compte tenu du fait que le nombre de cas officiellement enregistrés est nettement inférieur au nombre réel de cas. 

La Tunisie a souligné que les craintes du Groupe de travail d'un retour en arrière de la condition féminine dans son pays s'étaient révélées infondées, les droits des femmes ayant au contraire été élargis.  La Tunisie prévoit de continuer à coopérer avec le Groupe de travail.  Bahreïn, qui a dit son attachement au principe d'égalité hommes-femmes, a assuré que les femmes du pays étaient des partenaires clés dans le développement. 

Conclusions

MME AOUIJ a rappelé que toutes les personnes sans exception, y compris les homosexuels, avaient le droit de jouir de tous les droits fondamentaux de l'homme.  Par ailleurs, la diversité familiale doit être reconnue, l'État devant protéger toutes les différentes formes de famille, a conclu le Groupe de travail lors d'une récente table-ronde.  Le Groupe de travail s'associe et soutient la position de l'ensemble des titulaires de mandat du Conseil des droits de l'homme sur l'absolue égalité des sexes.  Le Groupe de travail estime que la diversité culturelle ne saurait justifier la discrimination, et encore moins la violence envers les femmes.  On ne saurait invoquer la liberté de pensée, de conscience ou de religion pour justifier des violations des droits des femmes et des filles, a-t-elle ajouté.  Le discours sur le relativisme culturel constitue un sérieux problème, a souligné la Présidente du Groupe de travail.  La primauté du droit international des droits de l'homme est incontournable face au droit coutumier. 

__________

*Déclarations faites dans le cadre du débat sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires: Union européenne, Belgique, Italie, États-Unis, Albanie, Pakistan (au nom de l'Organisation de la coopération islamique), Algérie (au nom du Groupe africain), Syrie, Fédération de Russie.

**Déclarations faites dans le cadre du débat sur discrimination à l'égard des femmes dans la législation et dans la pratique: Union européenne, États-Unis, Algérie (au nom du Groupe africain), Égypte, Équateur (au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes), Brésil, Mexique, Nouvelle Zélande, Pays-Bas, Suisse, Irlande, Albanie, Fédération de Russie, Organisation pour la coopération islamique, Norvège, Slovénie, Paraguay, Conseil de l'Europe, Lettonie, Tunisie.

***Organisations non gouvernementales ayant pris la parole dans le cadre du débat sur le droit à l'éducation et sur les droits de l'homme et la solidarité internationale: Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement - OIDEL (au nom également de plusieurs organisations non gouvernementales1), Plan international (au nom également de Myochikai - Arigatou Foundation), Alliance Defending Freedom,Commission arabe des droits de l'homme, l Salam Foundation, Khiam Rehabilitation Center for Victims of Torture, Verein Südwind Entwicklungspolitik, Al-Khoei Foundation, Jubilee Campaign, World Barua OrganizationInternational Muslim Women's Union, Conseil indien d'Amérique du Sud, Associazione Communita Papa Giovanni XXIII, et l'Association mondiale pour l'école instrument de paix.

1Déclaration conjointe: Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement (OIDEL), Bureau international catholique de l'enfance, Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, Women’s Board Educational Cooperative Society, Institut pour une synthèse planétaire, New Humanity, Catholic International Education Office, Planetary Association for Clean Energy Inc., Dominicains pour justice et paix - Ordre des frères prêcheurs, Congrégation de Notre Dame de charité du bon pasteur, Servas International, Foundation for GAIA, Association Points-Cœur, Associazione Communita Papa Giovanni XXIII, et Fondazione Marista per la Solidarieta Internazionale.

2Déclaration conjointe: Associazione Communita Papa Giovanni XXIII, Pax Christi International, International Catholic Peace Movement, Foundation for GAIA, Planetary Association for Clean Energy Inc, Edmund Rice International Limited, Congregation of our Lady of Charity of the Good Sherpherd, Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement  (OIDEL), et Pax Romana.

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