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Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le conseil des droits de l'homme examine des rapports sur la traite et sur les droits de l'homme et la solidarité internationale

13 Juin 2014

MATIN

13 juin 2014

Le Ministre des affaires étrangères des Seychelles s'adresse au Conseil

Le Conseil des droits de l'homme a examiné ce matin des rapports sur la traite des êtres humains et sur les droits de l'homme et la solidarité internationale. Le Conseil a en outre conclu son débat interactif sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires et les droits de l'homme des personnes déplacées. Le Ministre des affaires étrangères des Seychelles, M. Jean-Baptiste Adam, s'est adressé au Conseil au cours de la séance de ce matin.

M. Adam s'est dit convaincu que la garantie des droits de l'homme suppose la participation de chacun, et qu'un équilibre est essentiel pour préserver les droits et les devoirs de chacun. Le Gouvernement des Seychelles demande à tous les Seychellois de connaître leurs droits, de les respecter et de s'en tenir à leurs devoirs. Bien que confrontées à des défis particulier liés notamment au changement climatique ou à la menace de la piraterie, jamais les Seychelles n'ont laissé ces difficultés constituer un obstacle à la volonté du pays de faire en sorte que chaque Seychellois puisse exercer tous ses droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels, a encore affirmé le Ministre, qui a insisté sur l'attachement de son pays à assurer à sa population un cadre de développement qui prenne en compte sa dignité.

Mme Joy Ngozi Ezeilo, qui présentait son dernier rapport en tant que Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, a constaté que, si le monde était nettement plus sensibilisé aujourd'hui à la traite et aux différents droits et obligations, cette situation n'avait pas résulté en une amélioration importante sur le terrain et ce crime fait rarement l'objet de poursuites. Elle a aussi relevé que la communauté internationale a limité son attention à l'exploitation sexuelle aux dépens d'autres formes de traite, notamment celle lié à l'exploitation par le travail, qui représente aujourd'hui une part importante du phénomène. La Rapporteuse spéciale a présenté au Conseil les conclusions des missions qu'elle a effectuées au Maroc, en Italie, aux Bahamas, au Belize et aux Seychelles. Ces pays ont ensuite pris la parole, ainsi que le Conseil national de droits de l'homme du Maroc. La déclaration des Seychelles a été faite par son Ministre des affaires étrangères.

Dans le cadre du débat interactif qui a suivi, les délégations ont présenté les mécanismes et mesures prises pour lutter contre le fléau de la traite des êtres humains, notamment par la lutte contre l'impunité pour les trafiquants et la protection des victimes. Certains ont mis en avant le rôle que peut jouer la société civile dans le combat contre la traite. Face à la gravité du phénomène, de nombreux pays ont insisté sur l'importance de la coopération internationale, la traite des êtres humains étant un domaine auquel devait s'appliquer pleinement le principe de solidarité internationale.

L'Experte indépendante sur les droits de l'homme et la solidarité internationale, Mme Virginia Dandan, a présenté au Conseil une version préliminaire d'un projet de «déclaration sur le droit de peuples et des individus à la solidarité internationale», qui devrait être un pas vers la traduction du concept de solidarité internationale en un droit effectif, dont la reconnaissance faciliterait l'application des instruments internationaux de droits de l'homme et consoliderait l'assise des partenariats mondiaux pour le développement.

La solidarité internationale a été considérée par plusieurs délégations comme moyen de redistribution juste et équitable des fruits de la mondialisation. Certaines délégations ont vu dans la version préliminaire du projet de déclaration une bonne base de travail. D'autres ont fait part de leur scepticisme sur la possibilité de traduire en normes juridiques internationales une notion jugée trop vague et sujette à interprétation, ou ont objecté que les droits de l'homme devaient être avant tout considérés comme des droits individuels.

Les délégations suivantes sont intervenues au cours des échanges avec les deux expertes: Belarus (Amis unis contre le trafic des êtres humains), Union européenne, Pakistan (Organisation de la coopération islamique), Costa Rica (Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes), Égypte (Groupe arabe), Éthiopie (Groupe africain), Belgique, Autriche, Maroc, Qatar, Venezuela, Cuba, Slovénie, République de Moldova, Émirats arabes unis, Équateur, Armenia, États Unis, Maldives, Australie, Malaisie, El Salvador, Israël, Uruguay, Japon, Philippines, Inde, Bolivia, Indonésie, Allemagne, Algérie, Suisse, Iran, Chine, Islande, Bahreïn, Saint Siège, Mongolie, Sri Lanka, Iraq, Égypte, Arabie saoudite, Bangladesh, Myanmar, Burkina Faso, Brésil, Viet Nam, Botswana, Espagne, Thaïlande, Éthiopie et Sierra Leone.

La Commission de l'égalité et des droits de l'homme du Royaume-Uni et la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord ont également pris la parole, ainsi que les organisations non gouvernementale suivantes*.

En conclusion du débat interactif entamé hier avec le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, M. Christof Heyns a suggéré que le Conseil mette en place un groupe d'experts chargé d'examiner plus précisément les conditions de recours aux armes dites non létales afin de fixer des normes strictes à leur utilisation. Le Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des personnes déplacées, M. Chaloka Beyani, qui a également présenté son rapport hier, a répondu aux réactions à son rapport par les pays dans lesquels il s'est rendu dans le cadre de son mandat.

Les délégations suivantes ont participé aux derniers échanges avec MM. Heyns et Beyani: Équateur, Soudan, Iraq, Ordre souverain militaire de Malte et Australie. Ont également pris la parole le Défenseur du peuple de Colombie et les organisations non gouvernementales suivantes: BADIL Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights, Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS) Asociación Civil, International Educational Development,Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté, Commission internationale de juristes (au nom également de Human Rights Commission of Pakistan),, American Civil Liberties Union, au nom également du Centro de Estudios Legales y Sociales, Women's Human Rights International Association, Lawyers for Lawyers, World Barua Organization, Centre for Human Rights and Peace Advocacy,Défense des enfants – international.

Le Conseil aborde cet après-midi, à 15 heures, l'examen de rapports sur l'indépendance des juges et des avocats et sur les droits de l'homme des migrants.

Déclaration du Ministre des affaires étrangères des Seychelles

M. JEAN-PAUL ADAM, Ministre des affaires étrangères des Seychelles, est intervenu devant le Conseil des droits de l'homme sur le processus de l'examen à mi-parcours de l'Examen périodique universel, comme son pays s'y était engagé volontairement. Réaffirmant l'engagement fondamental des Seychelles en faveur des droits de l'homme, le ministre a exprimé sa conviction que la garantie des droits de l'homme n'est pas seulement un concept de changement radical, mais doit être partie intégrante de la vie quotidienne. Elle suppose la participation de chacun, et un équilibre est essentiel pour préserver les droits et les devoirs de chacun. Le Gouvernement seychellois n'a pas l'intention d'être le seul à assurer la protection des droits de l'homme dans e pays. Il demande à tous les Seychellois de connaître leurs droits, de les respecter et de s'en tenir à leurs devoirs.

M. Adam a rappelé qu'en tant que petit État insulaire en développement, les Seychelles ont des ressources limitées et sont soumises à des défis particuliers liés par exemple au changement climatique, ou à la menace de la piraterie et autres défis transfrontaliers. Toutefois, jamais ces défis ne se sont posés en obstacle devant la volonté du pays de faire en sorte que chaque Seychellois puisse exercer tous ses droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

Le Ministre a ensuite présenté une série de mesures adoptées par son pays depuis 2011 en conformité avec les recommandations issues de l'Examen périodique universel. Il a ainsi cité la mise en place en 2012 d'un comité seychellois des traités de droits de l'homme chargé de préparer les rapports aux organes de droits de l'homme, de faire connaître les traités pertinents et de promouvoir la conformité des lois nationales avec leurs dispositions. Le Comité doit aussi superviser la mise en place d'un plan d'action quinquennal sur les droits de l'homme. Les Seychelles sont déterminées à renforcer la Commission nationale des droits de l'homme et à veiller à sa conformité avec les Principes de Paris.

Le ministre seychellois a en outre fait valoir que les Seychelles ont adressé en 2012 une invitation permanente aux titulaires de mandat de procédures spéciales. La visite de la Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains s'est rendue cette année aux Seychelles et le ministre a réaffirmé l'engagement du pays à lutter contre la traite sous toutes ses formes. Dans ce cadre, il a fait état de l'adoption, en avril dernier, d'une loi interdisant la traite et prévoyant la protection des victimes.

Le ministre a également réitéré l'engagement de son pays à lutter contre la violence contre les femmes sous toutes ses formes et s'est dit fier que le pays compte un des parlements les plus paritaires du monde, avec 43,8% de femmes, proportion obtenue sans recourir à un système de quota. M. Adam a aussi attiré l'attention sur les mesures prises, dans le cadre d'un plan stratégique quinquennal, pour veiller à la dignité des personnes privées de libertés. Faisant observer que le pays est engagé en faveur de normes de droits de l'homme modernes, le ministre a précisé que c'est dans cet esprit que les réformes sont effectuées, comme celle, en cours, du code civil ou encore l'examen de la loi de 1982 sur les enfants, la loi électorale de 1995 ou encore de nouvelles lois comme celle sur la violence domestique.

M. Adam a déclaré que le bien-être de la population des Seychelles ne dépend pas seulement d'une garantie contre les actes pouvant porter préjudice à ses citoyens, mais aussi d'un cadre de développement qui prenne en compte leur dignité. En tant que petit état insulaire en développement, les Seychelles sont préoccupées par les défis lancés par les menaces que représente le changement climatique pour les droits de l'homme de sa population. Le ministre a souligné le lien entre les droits des personnes et le changement climatique et ses conséquences prévisibles; son gouvernement souhaite des échanges constructifs avec les autres pays dans ce domaine.

Exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires; personnes déplacées

Fin du débat interactif sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires

L'Équateur a approuvé le principe d'élaboration d'un cadre juridique pour l'utilisation des drones. L'Équateur dénonce par ailleurs l'absence de contrôle sur le recours à des armes létales par certaines forces de police; le pays s'est pour sa part engagé à former ses policiers à l'utilisation d'armes non létales et aux principes des droits de l'homme. L'Australie a estimé que la question du recours aux armes autonomes relève des questions de désarmement.

L'Iraq a assuré que toutes les procédures de justice dans le pays sont régies par la loi et que les peines sont toujours proportionnées aux crimes commis. Le pays condamne tous les actes terroristes commis contre le peuple iraquien. Enfin, l'Iraq a indiqué être disposé à recevoir la visite du Rapporteur spécial.

Parmi les organisations non gouvernementales, qui ont participé au débat, l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a souhaité la mise en place de mesures concrètes de vérification pour s'assurer que les États respectent leur engagement en matière de recours à la force par les forces de l'ordre. L'ONG a notamment estimé que le Mexique devrait prendre des mesures structurelles, telles que la création d'un institut médicolégal national indépendant, pour s'assurer du respect de la vie par les forces de l'ordre et a demandé au Rapporteur spécial quelles mesures pouvaient être prises pour s'assurer que le pays respecte ses engagements. Le Centro de Estudios Legales y Sociales (CELS) Asociación Civil, a attiré l'attention sur le massacre commis le 15 juin 2012 au Paraguay, accusant la police d'avoir exécuté plusieurs personnes. Or, à ce jour, la seule procédure judiciaire engagée sur cette affaire s'en prend aux paysans qui demandent la restauration de leurs droits alors que des témoins ont été assassinés et des menaces exercées sur les familles. L'ONG demande au Rapporteur spécial de redoubler d'efforts pour que le Paraguay respecte ses obligations internationales. L'ONG Lawyers for lawyers s'est dite très préoccupée par la situation des avocats en Colombie, dont plusieurs sont victimes de violence, voire de meurtres, sans qu'aucune enquête ne soit menée. Elle a demandé la fin de l'impunité pour les auteurs de ces crimes.

International Educational Développement a rappelé que le recours excessif à la force et les exécutions arbitraires se poursuivent en République islamique d'Iran, notamment à l'encontre des minorités ethniques, y compris depuis l'élection du président Rohani. L'ONG a demandé comment le Rapporteur spécial comptait agir face à l'intransigeance de la République islamique d'Iran, qui n'a toujours pas répondu à sa demande de visite. La Commission internationale de juristes, au nom également de Human Rights Commission of Pakistan, a estimé que les récents projets de lois sur la sécurité au Pakistan donnent trop de pouvoir aux forces de l'ordre quant aux possibilités de recours aux armes à feu; cette extension est incompatible avec le droit international. Défense des enfants – international a alerté le Conseil sur la situation d'enfants palestiniens tués dans les territoires occupés ou emprisonnés en Israël. Il faut déterminer s'il s'agit d'exécutions extrajudiciaires et Israël doit mener des enquêtes. La World Barua Organization a exposé au Conseil le cas du meurtre de sa sœur, accusée d'être une insurgée, arrêtée en juillet 2004 chez elle par les forces de sécurité indiennes et retrouvée morte le lendemain au bord d'une route. Ce crime n'est à ce jour toujours pas résolu, car aucune enquête n'a été menée.

La Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté a demandé la mise en place d'un moratoire sur les armes létales autonomes, en raison des menaces qu'elles font peser sur la paix et la sécurité et de leur caractère contraire au droit international. Partageant le même avis, American Civil Liberties Union a estimé que le Haut-Commissariat devrait encourager les États à envisager de ne pas utiliser de telles armes.

Fin du débat interactif sur les personnes déplacées

Le Soudan a indiqué avoir élaboré un plan stratégique visant à assurer la protection des personnes déplacées et le respect de leurs droits de l'homme. Le Soudan se félicite des recommandations contenues dans le rapport du Rapporteur spécial.

L'Ordre militaire souverain de Malte a fait part de sa vive préoccupation devant le phénomène des attaques et des menaces d'attaques pour des motifs religieux, qui forcent des centaines de milliers de personnes à se déplacer à l'intérieur de leur propre pays. L'Australie a recommandé la mise au point de politiques de soutien aux personnes déplacées vivant hors des camps de réfugiés.

Le Défenseur du peuple de Colombie a fait état de 6,5 millions de victimes du conflit interne dans ce pays, dont 90% de déplacés internes. L'institution colombienne des droits de l'homme a remercié la communauté internationale de son appui, qui permet de rendre cette crise plus visible, et l'a invitée à poursuivre son soutien.

S'agissant des organisations non gouvernementales, BADIL Resource Center for Palestinian Residency and Refugee Rights, rappelant que la quatrième Convention de Genève interdit les transferts de civils, a dénoncé comme crimes de guerre les pratiques israéliennes de déplacement et de transferts forcés des populations palestiniennes, les destructions de logements de Palestiniens, notamment à Jérusalem-Est, et la construction du mur de séparation. L'ONG a demandé aux États de prendre des mesures pratiques pour s'assurer qu'Israël respecte ses obligations internationales, notamment en matière de droits de l'homme. Women's Human Rights International Association a pour sa part alerté le Conseil sur la situation des droits de l'homme dans le camp d'Ashraf, accusant le Gouvernement de l'Iraq, qui de fait contrôle ce camp, de ne rien faire pour améliorer la situation, en particulier celle des migrants.

Conclusions des Rapporteurs spéciaux

M. CHRISTOF HEYNS, Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, a estimé que les questions de sécurité et le respect des droits de l'homme ne sont pas opposés. Le cadre des droits de l'homme est le plus largement accepté dans la lutte contre le terrorisme et tuer lorsque ce n'est pas nécessaire doit susciter la préoccupation de la communauté internationale. Les armes moins létales sont en principe à saluer car elles permettent un recours gradué à la force; malheureusement, on assiste à une tendance à les utiliser plus souvent et ces techniques dites non létales peuvent parfois s'avérer meurtrières. Le Rapporteur spécial propose donc que le Conseil des droits de l'homme mette en place un groupe d'experts qui examine plus précisément les conditions de recours à ces armes dites non létales afin de fixer des normes strictes. Dans les cas de manifestations pacifiques, il est démontré que le plus souvent la communication entre policiers et manifestants et organisateurs permet d'éviter ou limiter le recours à la force, en intervenant bien en amont.

S'agissant du problème posé par les drones, le Rapporteur spécial estime que la question a été si souvent soulevée au cours du débat que le Conseil devrait s'y intéresser de plus près. Le Rapporteur spécial a exprimé son désaccord avec le Royaume-Uni, rappelant que le droit international des droits de l'homme régit les activités militaires et peut porter par conséquent sur les systèmes d'armes. Le Rapporteur spécial ne pense pas que le Conseil des droits de l'homme soit le lieu adéquat pour discuter ou adopter un protocole sur les armes autonomes, mais il peut en revanche évoquer l'incidence pour les droits de l'homme de l'utilisation de telles armes. À propos du Mexique, le Rapporteur spécial a rappelé que l'usage est de présenter un rapport de suivi complet deux ans après une visite de pays, ce qui sera le cas concernant la mise en œuvre des 29 recommandations qu'il a formulée après sa visite dans le pays. Le Rapporteur spécial s'est par ailleurs dit très préoccupé par le recours fréquent aux exécutions en République islamique d'Iran.

M. CHALOKA BEYANI, Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des personnes déplacées, a pris note des déclarations faites la veille par les pays auxquels il a rendu visite dans le cadre de son mandat. Il s'est félicité de l'accord de paix et de l'accord-cadre signés au Soudan du Sud mais s'est dit inquiet du fonctionnement défaillant de son gouvernement. Concernant le Sri Lanka, il a jugé cruciale la question de la terre, a rappelé qu'il avait mentionné publiquement la question des disparitions forcées et a réaffirmé l'indépendance de son mandat et son respect du code de conduite des titulaires de mandats de procédures spéciales du Conseil. Concernant le programme de développement pour l'après-2015, le Rapporteur spécial a souhaité qu'il y soit tenu compte de la question des déplacements de populations. Il a estimé que les acteurs du développement devaient jouer un rôle dès le début de la crise en collaboration avec les acteurs humanitaires. Face à la situation en République centrafricaine, il a noté avec satisfaction le futur déploiement, prévu en septembre, des casques bleus et a estimé qu'il aura un impact positif sur les déplacements. Il s'est par ailleurs félicité de l'approche durable adoptée par la Géorgie face à ses populations déplacées. Il a annoncé une mission en Côte d'Ivoire dès la semaine prochaine, puis notamment en Haïti et en République centrafricaine.

Traite des êtres humains; droits de l'homme et solidarité internationale

Présentation de rapports

MME VIRGINIA DANDAN, Experte indépendante sur les droits de l'homme et la solidarité internationale, a indiqué que son rapport contenait une synthèse des activités du mandat depuis mai 2013, ainsi qu'une description du tout premier rapport soumis à l'Assemblée générale au sujet des droits de l'homme et de la solidarité internationale. Le rapport contient surtout, en annexe, la version préliminaire d'un projet de «déclaration sur le droit de peuples et des individus à la solidarité internationale». Dans son préambule, le projet de déclaration affirme notamment que la solidarité internationale ne se limite pas à l'aide et à la coopération internationales: il s'agit d'un concept plus large, englobant la durabilité des relations internationales, surtout au plan économique, la coexistence pacifique de tous les membres de la communauté internationale ainsi que la répartition équitable des obligations et des bénéfices. Le projet réitère l'engagement des États exprimé dans la Déclaration du Millénaire et selon lequel «l'Organisation des Nations Unies est le lieu de rassemblement indispensable de l'humanité tout entière où nous nous efforçons de concrétiser nos aspirations universelles à la paix, à la coopération et au développement». La déclaration donne une définition du concept de solidarité internationale et du droit à la solidarité internationale, affirmant que ce droit permet aux peuples et aux individus de jouir des avantages d'une société internationale harmonieuse dans un cadre politique économique juste et équitable. Les articles suivants définissent quels sont les titulaires des droits, les porteurs d'obligations et la teneur de ces obligations.

Le projet de déclaration est un pas vers la traduction du concept de solidarité internationale en un droit effectif, a relevé Mme Dandan. Pour l'Experte indépendante, la reconnaissance de ce droit faciliterait l'application des instruments internationaux dans le domaine des droits de l'homme et consoliderait l'assise des partenariats mondiaux pour le développement. La reconnaissance du droit à la solidarité internationale faciliterait, en particulier, la réalisation des objectifs de développement durable après 2015. L'Experte indépendante a précisé que le projet de déclaration, tel que présenté dans son rapport, a bénéficié de l'apport de nombreux experts, organisations non gouvernementales, institutions des Nations Unies, mais de deux États seulement. Il s'agit donc d'une version préliminaire, qui n'est pas encore prête à être soumise à l'examen du Conseil. Le texte doit encore être examiné de manière approfondie lors de consultations régionales afin de recueillir davantage de contributions d'États.

Le Conseil est saisi du rapport sur les droits de l'homme et la solidarité internationale (A/HRC/26/34). La Rapporteuse spéciale soumet également une version préliminaire d'un projet de déclaration sur le droit des peuples et des individus à la solidarité internationale (A/HRC/26/34/Add.1)

MME JOY NGOZI EZEILO, Rapporteuse spéciale sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants, qui présentait son dernier rapport, a estimé que la décision prise en 2004 par la Commission des droits de l'homme de nommer un Rapporteur spécial chargé de se concentrer sur «les aspect des droits de l'homme des victimes de la traite des personnes, en particulier les femmes et les enfants» avait constitué une étape importante par laquelle la communauté internationale affirmait deux principes. D'abord, les droits de l'homme des victimes de la traite devaient être au centre des efforts visant à combattre celle-ci. Ensuite, les mesures prises pour lutter contre la traite ne devaient pas avoir de conséquences négatives pour les droits de l'homme et la dignité des personnes concernées. Mme Ngozi a expliqué qu'au long de ces six ans de mandats, elle avait travaillé dans cet esprit, dans le cadre du mandat qui lui avait confié le Conseil en 2008, et qui a été élargi en 2009 pour compter 11 piliers, dont les 5 P - protéger, poursuivre, prévenir, punir et promouvoir la coopération internationale; les trois R axés sur les victimes - recours, réadaptation et réinsertion; et les trois C - capacité, coordination et coopération.

La Rapporteuse spéciale a rappelé le rôle central joué par la définition juridique internationale de la traite, qui a permis de fournir des réponses claires à ce fléau. À cet égard, l'adoption du Protocole de Palerme visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants a joué un rôle important et contribué à ancrer les normes en la matière dans les cadres normatifs internationaux, régionaux et nationaux. Toutefois, la Rapporteuse spéciale a constaté que, si le monde était nettement plus sensibilisé aujourd'hui à la traite et aux différents droits et obligations, cette situation n'avait pas résulté en une amélioration importante sur le terrain: de nombreux hommes, femmes et enfants restent exploités, peu reçoivent assistance ou réparation et le nombre des personnes arrêtées pour leur participation à la traite et poursuivies reste extrêmement bas.

Mme Ngozi a expliqué qu'elle avait dans son travail adopté une approche participative, en invitant les États et autres interlocuteurs à «plaider, écouter, apprendre et partager les bonnes pratiques dans le monde», par le biais notamment de la participation à de nombreuses réunions et conférences. Elle a précisé avoir accordé beaucoup d'attention à la dimension juridique du droit des victimes à l'assistance, à la protection et au soutien et au respect de ces droits dans la pratique.

Parmi les difficultés rencontrées, Mme Ngozi a cité en particulier l'identification des victimes, fondamentale pour la réalisation de leurs droits. Une autre difficulté est venue de déséquilibre entre les genres dans les efforts consentis par les États en matière de traite. De nombreux pays ont mis du temps à s'occuper de la traite des hommes, ce que la Rapporteuse spéciale attribue à une attention limitée à l'exploitation sexuelle aux dépens d'autres formes de traite, notamment celle lié à l'exploitation par le travail, qui représente aujourd'hui une part importante du phénomène. À partir de ce constat, Mme Ngozi a recommandé au Conseil de modifier l'intitulé du mandat du prochain Rapporteur spécial, en supprimant la référence spécifique aux femmes et enfants.

Mme Ngozi a mis en avant son plaidoyer en faveur du droit des victimes à obtenir compensation, en faisant observer que les nombreuses lacunes dans la pratique augmentent encore le risque de nouvelles violations des droits de l'homme des victimes. Elle a rappelé que plusieurs instruments internationaux fixent les obligations et responsabilités des États en la matière. Mme Ngozi a notamment mis l'accent sur le renforcement des procédures de demande de réparation, allant de l'accès à l'information à l'assistance juridique et la régularisation du statut de résident. Elle a dit avoir noté pendant son mandat une importante évolution dans l'approche pénale de la lutte contre la traite, davantage orientée sur le contrôle de la criminalité, et a fait part du risque de nuire à celle fondée sur les droits des victimes.

En matière de prévention, Mme Ngozi a rappelé que la traite s'exerce dans le cadre d'un marché mondialisé à la recherche d'une main d'œuvre bon marché et exploitable. Elle a plaidé pour que les États prennent des mesures pour mieux comprendre la nature de cette demande et mettent en place des mesures pour la décourager. Elle a aussi rappelé qu'elle avait accordé beaucoup d'attention au rôle des acteurs non étatiques. Mme Ngozi a aussi fait observer la nature endémique de la traite dans toutes les parties du monde et son caractère évolutif. Elle a rappelé à cet égard avoir également porté son attention à la traite liée au trafic d'organes.

Mme Ngozi s'est prononcée pour une clarification des paramètres de la définition juridique de la traite et pour un renforcement de la responsabilisation des acteurs non étatiques et de la société civile. Elle a par ailleurs préconisé des recherches sur le modes de recrutement illicites, la traite des hommes dans la cadre de l'exploitation par le travail ou du travail forcé, la traite à des fins de mendicité et d'activités criminelles, la traite liée aux mariages forcés, et le retour des victimes en toute sécurité, ainsi que pour un suivi du dossier de la traite aux fin de trafic d'organes. Elle s'est prononcée pour une plus grande implication de la société civile et une plus grande coopération des différents mécanismes de lutte contre la traite, mentionnant son rapport sur une réunion consultative consacrée au renforcement des partenariats avec les rapporteurs nationaux sur la traite des personnes et mécanismes équivalents tenue en mai 2013 à Berlin.

Rendant compte des missions qu'elle a effectuées dans plusieurs pays, la Rapporteuse spéciale a notamment pointé l'absence de cadre juridique adapté et d'institution nationale spécifique pour lutter contre la traite au Maroc, ainsi que le manque de données disponibles sur la question, tout en se félicitant des mesures annoncées par ce pays depuis sa visite en juin 2013. Concernant l'Italie, elle a salué l'engagement du Gouvernement à lutter contre la traite et sa coopération avec la société civile mais a constaté une focalisation sur la lutte contre la traite à fin d'exploitation sexuelle au détriment des autres formes de traite, ainsi que l'absence de plan national de lutte et de ressources adéquates. Mme Ngozi s'est félicitée des mesures positives et de la volonté des Gouvernements du Belize, des Bahamas et des Seychelles, tout en regrettant le manque de statistiques fiables au Belize, l'absence d'une évaluation complète du phénomène et une faible sensibilisation au phénomène de la traite aux Bahamas et l'absence de cadre légal de lutte contre la traite et de mécanisme de soutien aux victimes aux Seychelles. La Rapporteuse spéciale s'est également inquiétée d'une criminalisation indiscriminée des migrants illégaux aux Bahamas et au Belize, qui peut aboutir à l'incarcération ou l'expulsion de victimes potentielles.

Le Conseil est saisi du rapport annuel sur la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants (A/HRC/26/37) ainsi que de rapports sur ses mission au Maroc (A/HRC/26/37/Add.3), en Italie (A/HRC/26/37/Add.4), aux Bahamas (A/HRC/26/37/Add.5 à paraître en français), à Belize (A/HRC/26/37/Add.6 à paraître - une version préliminaire est disponible en anglais ainsi que les observations du Gouvernement) et aux Seychelles (A/HRC/26/37/Add.7 à paraître en français).

La Rapporteuse spéciale soumet en outre un bilan des dix premières années de son mandat (A/HRC/26/37/Add.2) et rend compte d'une réunion consultative consacrée au renforcement des partenariats avec les rapporteurs nationaux sur la traite des personnes et mécanismes équivalents (A/HRC/26/37/Add.1)

Le Conseil est également saisi du rapport du Haut-Commissariat sur les consultations menées sur le Projet de principes de base relatifs au droit des victimes de la traite à un recours effectif (A/HRC/26/18).

Parties concernées par le rapport sur la traite des êtres humains

Les Bahamas ont déclaré que la visite de Mme Ngozei Eizelo a permis au gouvernement d'identifier les défis et lacunes en matière de lutte contre ce phénomène. Ce rapport sera donc utilisé à bon escient en dépit des analyses trop générales qui ne correspondent pas à la situation spécifique des Bahamas, pays en développement aux frontières poreuses. Cependant le pays s'est doté en 2010 d'un plan contre la lutte la traite des êtres humains, axée sur la prévention, et l'assistance aux victimes. Il a également un volet répressif contre les auteurs de ces actes, le gouvernement s'est à ce sujet doté de neuf nouveaux bateaux pour lutter contre ce trafic aux larges des côtes bahamiennes.

L'Italie, également concernée par le rapport, a assuré le Conseil de son ferme engagement à mettre en œuvre tous les instruments internationaux en matière de lutte contre le phénomène de la traite des personne, qualifié d'un des pires fléaux au monde. Au niveau national, l'Italie a ainsi mis en place des législations pour l'assistance aux victimes, offrant des possibilités de protection sociale et de régularisation. Une ligne téléphonique gratuite a en outre été ouverte pour permettre anonymement aux victimes de se signaler. Entre 2010 et 2012, pas moins de 25.000 victimes, dont 2.000 enfants ont ainsi reçu une assistance des autorités, a encore assuré la délégation. Depuis la visite de Mme Ngozi Eizelo, l'Italie a par ailleurs transcrit dans son droit national, la directive européenne 2011/36/EU sur le trafic des êtres humains, a-t-elle enfin indiqué.

Le Maroc a fait savoir que le roi avait lancé, en septembre 2013, une nouvelle politique migratoire fondée sur les engagements internationaux du pays et des partenariats rénovés. Plusieurs mesures ont été prises dans ce cadre en vue de la prévention de la traite des êtres humains, notamment la reconnaissance de 537 réfugiés reconnus par la représentation du Haut-Commissariat des Nations Unies aux réfugiés, ainsi que la régularisation exceptionnelle des étrangers en situation administrative irrégulière. Un projet de loi sur la lutte contre la traite des êtres humains a été également élaboré, fondé notamment sur les recommandations du rapport de Mme Ezeilo. Le projet prévoit des mesures de protection des victimes et plusieurs mesures administratives, notamment la création de services centraux et territoriaux auprès des départements gouvernementaux concernés.

Le Conseil national de droits de l'homme (CNDH) du Maroc a décrit les modalités de sa participation au dialogue national sur les droits de l'homme, qui consistent notamment dans l'offre de conseils et de recommandations au sujet des instruments internationaux et des stratégies nationales de droits de l'homme. Le CNDH a donné en particulier son avis consultatif sur le projet de loi sur les travailleurs domestiques et a participé, en février, à des échanges avec des institutions de l'Union européenne. Le CNDH appelle le gouvernement à répondre de manière positive aux recommandations de la Rapporteuse spéciale.

Le Ministre des affaires étrangères des Seychelles, M. JEAN-PAUL ADAM, a informé le Conseil de la promulgation, en avril de cette année, d'une loi interdisant la traite des êtres humains. La loi met en œuvre les dispositions des instruments des Nations Unies contre la traite, inscrit ce délit au code pénal et prévoit des mesures en faveur des victimes. La loi crée un comité de coordination de l'action du Gouvernement contre la traite des êtres humains. Le Gouvernement confirme la constatation de la Rapporteuse spéciale qu'aucune victime de la traite des êtres humains n'a été identifiée à ce jour aux Seychelles. Le Gouvernement prendra néanmoins les mesures nécessaires pour améliorer ses capacités d'identification des victimes.

Débat interactif sur le trafic des êtres humains

Le Bélarus, au nom des 22 États du groupe des amis unis contre le trafic des êtres humains, s'est félicité de l'adoption de la résolution 68/192 de l'Assemblée générale proclamant le 30 juillet Journée mondiale de la dignité des victimes de la traite d'êtres humains, et a appelé les États à célébrer cette journée.

Le Pakistan, au nom de l'Organisation de la coopération islamique, a invité la Rapporteuse spéciale à se garder de ne pas trop englober d'éléments dans ce qu'elle considère comme traite des personnes, afin de ne pas nuire à la crédibilité de cette définition. Les Maldives estiment, comme la Rapporteuse spéciale, que la lutte contre la traite doit être centrée sur la protection des victimes, en particulier les femmes et les enfants. Les Maldives ont aussi souligné que les migrants sont particulièrement vulnérables et doivent bénéficier de mesures particulières de protection. La Malaisie a constaté que les États n'appliquent pas une définition unique de la traite des êtres humains. Pour leur part, les autorités malaisiennes ont élargi la définition de ce fléau pour y intégrer le travail forcé. Pour sa part, la Slovénie a félicité la Rapporteuse spéciale pour avoir attiré l'attention sur d'autres formes de traite des êtres humains. L'Algérie a également insisté sur l'importance de la prévention de l'exploitation des êtres humains sous toutes ses formes.

L'Union européenne a condamné la traite des êtres humains et souligné qu'elle disposait de mécanismes et instruments de lutte; elle a souligné le rôle que peut jouer la société civile dans le combat contre ce phénomène. L'Égypte au nom du Groupe arabe a indiqué que les pays du groupe ont suivi un certain nombre de recommandations et mis en place des mécanismes d'aide aux victimes, tout en reconnaissant que de nombreuses lacunes persistent.

L'Éthiopie, au nom du Groupe africain, a estimé que toute initiative ou campagne à venir contre la traite des êtres humains doit inclure une bonne compréhension de ses causes. L'Afrique, par le biais de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADEC) ou de l'Union africaine, a adopté des plans spécifiques pour lutter contre ce phénomène; la communauté internationale doit appuyer le continent dans sa lutte.

L'Autriche a souligné la transversalité de cette question et insisté sur le rôle que peut jouer la coopération régionale dans la lutte contre la traite. La République de Moldova a estimé que le phénomène est tel qu'il faut coordonner tous les efforts et à tous les niveaux, tant nationaux, régionaux, qu'internationaux. La Belgique qui dispose depuis 1995 d'un plan de lutte contre la traite, a souhaité savoir en quoi la coopération régionale avait aidé dans la lutte contre ce phénomène. L'Australie a indiqué collaborer étroitement avec ses partenaires régionaux contre la traite des êtres humains, par exemple en organisant des ateliers de formation et en participant à la rédaction d'un guide pratique de la lutte contre la traite.

Le Qatar a assuré avoir pris des mesures législatives pour lutter contre la traite et pour intensifier les efforts déjà existants, s'agissant notamment de l'identification des victimes, de leur réinsertion ou encore de la formation des forces de l'ordre ou de la protection des témoins. Les Émirats-arabes-unis ont pour leur part renforcé leur cadre répressif, qui a abouti à douze condamnations l'an dernier. Le Venezuela, également touché par le phénomène, a quant à lui mis en place des programmes de prévention, de répression ou de réinsertion des victimes. En Arménie, une coopération étroite entre tous les acteurs pertinents, y compris la société civile, appuyé par des mécanismes nationaux renforcés a donné de bons résultats, a assuré sa représentante.

Pour les États-Unis, l'administration de la justice doit se concentrer sur la lutte contre l'impunité dont bénéficient les trafiquants et sur le soutien aux victimes de la traite des êtres humains. Israël a déclaré n'avoir ménagé aucun effort pour traduire en justice les responsables de la traite des êtres humains et a désigné un coordonnateur de son action dans ce domaine, chargé également des relations avec les initiatives internationales. Israël poursuivra sa coopération avec le Rapporteur spécial et les autres institutions internationales chargées de lutter contre la traite.

L'Uruguay a indiqué pour sa part entretenir des relations suivies avec le mandat du Rapporteur spécial. En 2013, le Gouvernement uruguayen a créé un mécanisme chargé de défendre les intérêts des victimes de la traite ; il prépare actuellement un projet de loi sur l'aide aux victimes. Les efforts du gouvernement sont axés notamment sur la prévention et la protection des victimes.

L'Allemagne a demandé à Mme Ezeilo de dire comment les États peuvent garantir l'application effective des droits des victimes, dans un contexte où les lois y afférentes sont mal appliquées. La Suisse lui a demandé de dire dans quels domaines et à quels niveaux il serait possible d'améliorer la collaboration entre les mécanismes du Conseil des droits de l'homme et de l'ONU, et dans quels domaines les États seraient, de l'avis de Mme Ezeilo, les plus enclins à collaborer. Le Botswana a souhaité savoir si la Rapporteuse spéciale s'était penchée sur la situation des pays qui manquent des ressources et des capacités nécessaires pour faire face à ce fléau.

Les Philippines ont félicité Mme Ezeilo de son dévouement dans l'accomplissement de son mandat. Le Japon a insisté sur le rôle central de la coopération internationale dans la lutte contre la traite des êtres humains, pour accompagner les mesures prises au plan national. L'Inde a observé que le principe de solidarité internationale doit s'appliquer pleinement à la lutte mondiale contre la traite des êtres humains. La communauté internationale doit prendre conscience du rôle central de la pauvreté dans l'incidence de ce fléau. De même, l'Indonésie a souligné la nécessité de prendre en cause le contexte du recrutement des futures victimes, estimant que la lutte doit reposer sur une compréhension nuancée des causes multiples de la traite des êtres humains. L'Iran a estimé, de plus, qu'il ne faut pas négliger d'agir contre la demande qui explique la traite des êtres humains.

L'Iraq a adopté, en 2012, une loi contre la traite des êtres humains basée sur les dispositions du Protocole facultatif à la Convention de Palerme. La Chine a publié, en 2013, un plan d'action contre la traite des êtres humains accompagné d'un ensemble de mesures concrètes en vue de protéger les droits des victimes et de favoriser leur réinsertion. L'Iran a adopté une loi punissant les responsables de toutes les formes d'exploitation des êtres humains, notamment la traite, et accordant des dédommagements aux victimes. Bahreïn s'est doté d'un plan d'action national et d'un comité chargé d'évaluer la situation des victimes. Le comité supervise également des actions de sensibilisation. Au Bahreïn, plusieurs centres d'accueil hébergent désormais les femmes victimes de la traite des êtres humains. L'Islande a déclaré que son propre programme d'action contre la traite des êtres humains est basé sur la mise à disposition de recours aux victimes. La Mongolie a souligné l'importance de tirer parti de tous les moyens médiatiques possibles de sensibiliser les populations au problème de la traite et aux moyens d'y faire face.

Sri Lanka a insisté sur la nécessité de concevoir des mesures contre la traite qui soient basées sur les droits. Sri Lanka a encouragé le mandat à poursuivre les travaux de collaboration avec les parties prenantes au niveau régional. Le premier refuge pour femmes victimes de la traite géré par l'État sri-lankais entrera bientôt en fonction. Les autorités collaborent actuellement avec l'Organisation internationale des migrations à la collecte de statistiques.

L'Arabie saoudite a fait une priorité de la lutte contre le crime que constitue la traite des personne, lui consacrant une loi spécifique, qui a pour objectif d'intégrer les stratégies sous-régionales, définit la traite des personnes et la sanctionne sévèrement. La traite et l'esclavage sont contraires à la nature humaine, a estimé le Burkina Faso, qui a présenté les mesures qu'il a prises, dont la ratification de la convention 182 de l'OIT ou l'adoption d'une loi spécifique contre la traite des enfants. La lutte contre la pauvreté, qui fait partie des causes de traite, fait également partie des priorités du Burkina Faso. Le Brésil quant à lui encourage le renforcement de la capacité à se protéger des groupes vulnérables, qui sont le plus souvent victimes de traite.

Il faudrait mettre en place des mécanismes de prévention et des échanges d'information à un niveau bilatéral, a dit le Myanmar, qui a également présenté les mesures prises par son gouvernement au niveau national et régional. Le Viet Nam participe pour sa part à l'initiative du Mékong contre la traite et coopère avec l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime.

L'Espagne a mis en place un groupe de travail pour élaborer un outil pour identifier les enfants en difficulté. En tant que pays d'origine, de transit et de destination de la traite, la Thaïlande a dit mettre l'accent sur la prévention, l'assistance aux victimes, mais aussi la répression, à travers ses lois nationales mais aussi les instruments régionaux et internationaux. Cela est en effet de la responsabilité des États, a ajouté l'Éthiopie. Mais c'est également de la responsabilité de la communauté internationale a souligné la Sierra Leone, constatant l'ampleur du phénomène et son caractère transversal. Il faut qu'elle envoie un message fort aux auteurs de cette traite pour qu'ils comprennent que leurs actes ne resteront pas impunis. Le gouvernement sierra-léonais a pour sa part pris des mesures, dont la création d'unités spécifiques.

Dans une déclaration vidéo conjointe, la Commission britannique de l'égalité et des droits de l'homme et la Commission des droits de l'homme de l'Irlande du Nord ont insisté sur la nécessité d'harmoniser la définition qu'applique le Royaume-Uni à la traite des êtres humains et la définition acceptée au niveau international. Les Commissions britanniques estiment d'autre part que la fonction de commissaire à la lutte contre l'esclavage, que les autorités du Royaume-Uni envisagent de créer conformément aux directives européennes, devrait être dotée des pouvoirs et des ressources nécessaires pour remplir sa mission. Les Commissions estiment enfin que la loi sur l'esclavage moderne devrait inclure des dispositions supplémentaires relatives à la protection des enfants victimes de la traite des êtres humains, par exemple le placement des mineurs non accompagnés sous la protection de tuteurs. Les Commissions sont en outre d'avis qu'il est nécessaire d'améliorer la collecte et l'analyse des données pour permettre aux autorités de mesurer l'ampleur réelle du problème de la traite des êtres humains au Royaume-Uni.

S'agissant des organisations non gouvernementales, la World Barua Organization a affirmé que de plus en plus de femmes et d'enfants étaient enlevés dans l'Inde du nord-est et emportés dans d'autres régions plus développées, sous prétexte de fournir une meilleure éducation. L'ONG a lié le trafic d'enfants au trafic d'organes ainsi qu'au recrutement d'enfants soldats par différents groupes armés non étatiques. L'ONG a invité la Rapporteuse spéciale à visiter l'Inde pour mieux apprécier l'importance de la traite des enfants, notamment au sein des communautés pauvres.

Libération a déclaré que l'Inde représente 16% de la population mondiale mais 50% de la traite des femmes et filles, ajoutant que 44 000 enfants sont enlevées tous les ans, surtout parmi les dalits, parmi lesquels 11 000 seulement réapparaissent. L'ONG a dénoncé la prostitution infantile, ainsi que la corruption, malgré l'existence formelle d'excellentes lois. Elle demande que le Gouvernement de l'Inde fournisse les ressources nécessaires et les structures de polices adaptées pour mettre pleinement en œuvre son plan national de lutte contre la traite adopté en 1998.

Le Centre for Human Rights and Peace Advocacy a dénoncé la traite comme une maladie contagieuse qui se répand malgré toutes les mesures prises et dont les victimes sont surtout des personnes pauvres. Tous les États devraient créer des conditions de vie meilleures et assurer des salaires décents

Le Mouvement international contre toutes les formes de discrimination (au nom également de Women's Consortium of Nigeria), a déclaré que la traite des femmes et des enfants connaissait une croissance sans précédent au Nigéria, où le gouvernement est confronté à un énorme problème de protection et de réintégration de centaines de personnes.

International Educational Développement a mis l'accent sur le droit à l'autodétermination et regretté que de nombreux États le dénier pour des raisons géopolitiques, en citant le cas des Sikhs du Penjab, souvent traités comme des terroristes alors que la communauté internationale devrait lui accorder toute son attention. IED souhaite savoir sur la Rapporteur spécial sur la solidarité internationale compte prendre en considération les revendications des sikhs.

L'Union de l'action féminine a rappelé que le Maroc est un pays d'origine, de transit et de destination de la traite, notamment des femmes. Elle a estimé que des progrès évidents avaient été fait dans le domaine législatif et réglementaire, mais que les mesures concrètes se faisaient attendre, y compris pour la mise en œuvre concrète du Protocole de Palerme que le Maroc a ratifié. L'ONG a demandé l'adoption d'une stratégie nationale cohérente, la réécriture du code pénal avec des dispositions précises conformes au Protocole de Palerme, et la fourniture de moyens adaptés pour identifier les victimes, ainsi qu'une stratégie nationale de sensibilisation et le renforcement de la coopération régionale et avec la société civile.

Le Bureau international catholique de l'enfance a affirmé que la traite des femmes et des enfants était très grave en Ukraine que de nombreux jeunes fuir pour tenter de trouver des conditions de vie meilleure, en particulier dans les pays proches. Les victimes ont peur du harcèlement ou des représailles contre leurs familles et n'osent pas parler. La loi ukrainienne de 2013 sur la lutte contre la traite prévoit le versement d'aide aux victimes mais le Gouvernement refuse souvent d'accorder le statut de victimes et ne poursuit pas les auteurs. L'ONG a demandé une meilleure coopération internationale et un plus grand soutien du Gouvernement aux ONG qui s'occupent des victimes de la traite.

Débat interactif sur les droits de l'homme et la solidarité internationale

Le Costa Rica, au nom de la Communauté des États d'Amérique latine et des Caraïbes a dit que la solidarité internationale, comme la coopération internationale, doit être un objectif commun pour parvenir aux objectifs du Millénaire de développement. C'est un moyen de redistribution juste et équitable des fruits de la mondialisation, a renchérit le Pakistan au nom de l'Organisation de la coopération islamique.

Dans ce contexte, l'Égypte au nom du Groupe arabe, a salué le projet de déclaration élaboré par l'Expert indépendant, en conformité avec la résolution 23/12 du Conseil des droits de l'homme, rejointe en cela par le Groupe africain par la voix de l'Éthiopie. Le Maroc a pour sa part regretté le retard pris dans les négociations régionales comme le prévoit ladite résolution. Par ailleurs, et selon le Maroc, le titre donné au projet de déclaration est encore assez vague et mériterait d'aller directement à l'essentiel en faisant de ce concept, non un concept politique, mais un droit à part entière. Il faut de toute urgence ouvrir des négociations élargies sur ce projet de déclaration.

Il faut en effet poursuivre un débat constructif sur ce sujet, loin de la politisation ou de l'avidité capitaliste de certains, a poursuivi le Venezuela. Cuba a indiqué qu'elle présentera un projet de résolution pour le renouvellement du mandat de l'Experte indépendante.

L'Union européenne, premier contributeur en termes d'aide publique au développement, a émis des réserves quant à la possibilité de traduire la notion de solidarité internationale en normes juridiques internationales. Cette notion reste trop vague et sujette à interprétation. Les États-Unis ont observé que les droits de l'homme doivent être considérés d'abord comme des droits individuels, estimant en outre qu'il faut approfondir le concept de solidarité internationale. La déclaration n'est pas le meilleur moyen pour ce faire.

L'Inde a relevé que la mondialisation doit être un moteur de la solidarité internationale, que tous les États devraient la promouvoir dans le respect des principes de la Charte des Nations Unies. Les Maldives ont souligné l'importance de la collaboration internationale et appuyé les travaux de Mme Dandan. L'Indonésie, l'Algérie, la Malaisie et les Philippines ont accueilli avec satisfaction l'appel lancé par Mme Dandan en faveur de l'organisation de consultations régionales autour du projet de déclaration. El Salvador s'est félicité du projet, dont il estime qu'il est un bon point de départ pour les prochains débats; les pays en voie de développement et les pays à économie faible sont particulièrement vulnérables dans un contexte de crise économique, ce qui souligne l'importance du principe de solidarité internationale.

La Bolivie s'est félicitée du rapport détaillé de l'Experte indépendante et a plaidé pour la poursuite des travaux de sensibilisation à l'importance du principe de solidarité internationale, en particulier dans les domaines de l'éducation et de l'accès à l'eau. La Bolivie demande que la solidarité internationale soit inscrite au programme de développement pour l'après-2015.

Le Saint-Siège a dénoncé la cupidité qui explique la mise en esclavage, littéralement, de millions de femmes, d'enfants et d'hommes dans un monde troublé. Pour le Saint-Siège, l'application du principe de solidarité pourrait susciter un changement de cap salvateur. L'Égypte a regretté que les principes de la solidarité internationale ne soient pas suffisamment pris en compte et a espéré que le Conseil dégagerait les moyens financiers nécessaires aux activités du mandat sur la solidarité internationale.

La solidarité internationale ne devrait pas être considérée comme un acte de charité, mais un droit à part entière, a souligné le Bangladesh, ajoutant par ailleurs qu'il est temps que les consultations régionales débutent. Elles permettront aux délégations d'apporter leur contribution, a renchérit l'Éthiopie, appuyé en cela par le Brésil, pour qui la coopération et la solidarité internationales permettront de répondre à tous les défis, dont la lutte contre la pauvreté et la traite des êtres humains.

Pour ce qui concerne les organisations non gouvernementales, l'Associazione Comunità Papa Giovanni XXIII, (au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1), a estimé que la solidarité internationale devait être consacrée comme un droit de l'homme car cela est nécessaire à la survie du monde. Les droits de l'homme impliquent des responsabilités partagées et le droit au développement doit être réalisé progressivement pour tous. Le groupe d'ONG souhaite que le projet de déclaration sur la solidarité internationale progresse rapidement.

Le Conseil indien d'Amérique du Sud a estimé qu'il ne fallait pas hésiter à faire progresser, y compris au Conseil des droits de l'homme, la cause du droit à l'autodétermination, qui est un droit fondamental des peuples et des individus. La solidarité internationale implique que le droit à l'autodétermination soit appliqué de manière égalitaire à tous les peuples. L'ONG a rappelé la dimension collective du droit à l'autodétermination, notamment en ce qui concerne le contrôle des ressources.

Conclusions des experts

MME VIRGINIA DANDAN s'est félicitée du soutien exprimé au principe de consultations régionales au sujet du projet de déclaration. Elle a observé que ce projet porte sur l'application concrète du principe de solidarité internationale. Ces consultations permettront aux États membres et aux parties prenantes de préciser le contenu et les enjeux de ce concept fondamental.

MME JOY NGOZI EZEILO a répondu à des questions de l'Union européenne sur les meilleures pratiques, citant plusieurs initiatives lancées pour traiter des causes sous-jacentes à la traite. La Rapporteuse spéciale a jugé nécessaires de prendre en compte, dans ce contexte, des facteurs liés à la demande et de la corruption. L'experte a observé en outre que les médias doivent être sensibilisés à l'état psychologique des victimes de la traite, qui se trouvent dans une situation de souffrance très profonde. L'expérience a enseigné à la Rapporteuse spéciale qu'il est indispensable d'obtenir la participation des hommes aux efforts contre la traite des êtres humains. Mme Ezeilo a espéré que les États s'engageront sincèrement contre la traite des êtres humains et qu'ils contribueront au fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour le dédommagement des victimes.

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Organisations non gouvernementale suivantes*: Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII (au nom également de au nom de plusieurs autres organisations non gouvernementales1), World Barua Organization,Libération, Centre for Human Rights and Peace Advocacy, Mbororo Social and Cultural Development Association, Mouvement international contre toutes les formes de discrimination (au nom également de Women's Consortium of Nigeria), International Educational Development, International Buddhist Relief Organisation, Alsalam Foundation, Union de l'action féminine, Conseil indien d'Amérique du Sud, Bureau international catholique de l'enfance.

1Déclaration conjointe: Associazione Comunita Papa Giovanni XXIII, Edmund Rice International Limited, VIVAT International, Compagnie des filles de la charité de Saint Vincent de Paul, Volontariat international femmes éducation et développement, Istituto Internazionale Maria Ausiliatrice delle Salesiane di Don Bosco, Caritas Internationalis (Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale), New Humanity, Organisation internationale pour le droit à l'éducation et à la liberté d'enseignement - (OIDEL), et l'Association Points-Cœur.

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