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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport du Monténégro

06 Février 2014

6 février 2014

Le Monténégro est clairement sur la bonne voie, affirme le rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport de ce pays

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport présenté par le Monténégro sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, M. Suad Numanović, Ministre des droits de l’homme et des droits des minorités du Monténégro, a indiqué que durant la période couverte par ce rapport (soit depuis 2009) son pays a réalisé de grands progrès en termes de renforcement du système démocratique, de l’état de droit et des normes dans tous les domaines. Les dernières modifications apportées au Code pénal introduisent la circonstance aggravante de motivation haineuse d'un délit, de manière à améliorer la protection juridique de certains groupes sociaux vulnérables, a-t-il précisé.

M. Numanović a ensuite attiré l'attention sur l’adoption, en 2010, de la Loi portant interdiction de la discrimination et, en 2011, de la Loi sur le Protecteur des droits de l’homme et des libertés. Il a également informé le Comité de mesures prises par son Gouvernement pour améliorer la situation des Roms et des Gitans, dans le cadre d’une stratégie quinquennale dont une partie est consacrée à la lutte contre la violence faite aux femmes.

La délégation monténégrine était également composée, entre autres, de représentants des Ministères des affaires étrangères, de l’intérieur, de la justice, des droits de l’homme et des droits des minorités, de l’éducation et du travail, ainsi que de représentants de l’Agence pour l’emploi et de l’Agence pour les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur. Elle a répondu aux questions des experts portant, notamment, sur la formation aux droits de l'homme; les personnes réfugiées, déplacées ou déplacées internes; les droits des minorités et leur représentation; la situation particulière des Roms et des Tziganes; les questions linguistiques; le Bureau du Protecteur des droits; ou encore la participation des femmes.

La délégation a assuré que les autorités monténégrines n’ont enregistré, à ce jour, aucune tendance ouvertement raciste ou haineuse contre une quelconque ethnie en particulier. On ne trouve même pas de graffiti racistes sur les murs des villes, a-t-elle fait valoir. Il existe par contre – et c’est indéniable – une certaine «distance ethnique» entre communautés, a toutefois reconnu la délégation.

Le Monténégro est clairement sur la bonne voie et semble être «une sorte de paradis cerné par des turbulences», a déclaré à l'issue du dialogue le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport monténégrin, M. Anwar Kemal. La volonté du pays de faire cohabiter harmonieusement les ethnies qui le composent ne peut être que louée, a-t-il insisté. M. Kemal a néanmoins jugé nécessaire que les autorités monténégrines investissent davantage dans l’éducation et la formation professionnelle des Roms, des Ashkali et des Tziganes.

Le Comité adoptera ultérieurement à huis-clos ses observations finales concernant le rapport du Monténégro et les rendra publiques à l'issue de la session, qui doit se clore le vendredi 21 février prochain.

À 15 heures, cet après-midi, le Comité entamera l'examen du rapport de la Belgique (CERD/C/BEL/16-19).

Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays (CERD/C/MNE/2-3), M. SUAD NUMANOVIĆ, Ministre des droits de l’homme et des droits des minorités du Monténégro, a souligné que ce rapport couvre une période pendant laquelle son pays a réalisé de grands progrès en termes de renforcement du système démocratique, de l’état de droit et des normes dans tous les domaines. Les progrès sont particulièrement sensibles dans la promotion de l’indépendance et de l’efficacité de la justice, dans la durée des procédures et dans la coopération avec les organisations non gouvernementales et les institutions internationales, notamment la Cour européenne des droits de l’homme, a-t-il précisé. Le Monténégro – qui est membre du Conseil des droits de l’homme depuis le 1er janvier 2013 – a également procédé à trois séries d’amendements de son Code pénal entre 2010 et 2013, a-t-il fait valoir. Les dernières modifications introduisent la circonstance aggravante de motivation haineuse d'un délit, de manière à améliorer la protection juridique de certains groupes sociaux vulnérables, a-t-il précisé. De même, l’infraction au principe d’égalité mentionnée à l'article 159 du Code pénal a été modifiée pour inclure deux motifs supplémentaires de discrimination.

La démarche la plus importante du Monténégro en vue d’affermir les bases de la lutte contre la discrimination reste l’adoption, en 2010, de la Loi portant interdiction de la discrimination et, en 2011, de la Loi sur le Protecteur des droits de l’homme et des libertés, a souligné M. Numanović. Le plan d’application de la première de ces deux lois a été élaboré en collaboration avec l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et prévoit des mesures de formation à l'intention des magistrats et avocats ainsi que des campagnes médiatiques de sensibilisation à la lutte contre la discrimination, a-t-il précisé. La création du Conseil pour la protection contre la discrimination est très importante aux yeux des autorités monténégrines, a poursuivi le Ministre des droits de l'homme et des droits des minorités; présidé par le Premier Ministre, les membres de ce Conseil sont les Ministres des droits de l’homme et des droits des minorités, du travail et des affaires sociales, de l’éducation et de la santé, ainsi que des représentants de grandes organisations de la société civile, a-t-il précisé. L’objectif de cette institution est de contrôler et de surveiller les activités de tous les organes administratifs et autres institutions compétentes dans l’application des mécanismes de protection contre toutes les formes de discrimination au Monténégro.

Les autorités ont réalisé, en 2011 et 2013, deux grandes enquêtes pour mesurer les progrès réalisés au sein de la société monténégrine et s’assurer que les mesures prises contre la discrimination ethnique portent leurs fruits, a indiqué M. Numanović. Ces enquêtes ont montré que les activités menées pour éliminer toute forme de discrimination et pour promouvoir les droits de l’homme et les libertés fondamentales ont eu des effets positifs, a-t-il assuré. La lutte contre la discrimination étant une activité permanente, les autorités ont proposé au Parlement d’amender les lois sur l’interdiction de la discrimination et sur les activités du Protecteur des droits de l’homme et des libertés afin d'assurer la prise en compte des formes de discrimination indirecte. La loi réprime désormais des formes spéciales de discrimination : harcèlement, harcèlement sexuel et discrimination raciale, a fait valoir le Ministre.

En 2012 et 2013, la question des droits des lesbiennes, gays, bisexuels et transsexuels (LGBT) au Monténégro a été beaucoup discutée, a poursuivi M. Numanović. Les autorités ont pris des mesures concrètes pour lutter contre la discrimination envers ces personnes, accompagnées d’une stratégie d’amélioration de leur qualité de vie. Par ailleurs, les autorités ont agi pour donner effet au principe d’égalité entre les sexes, en particulier sous l’angle de la participation des femmes à la vie politique et de la lutte contre la violence à l'égard des femmes.

Le Ministre monténégrin a également informé le Comité de mesures prises par son Gouvernement pour améliorer la situation des Roms et des Gitans, dans le cadre d’une stratégie quinquennale dont une partie est consacrée à la lutte contre la violence faite aux femmes. Les autorités ont également adopté des mesures très concrètes pour l’intégration des personnes handicapées, a-t-il ajouté.

M. Numanović a indiqué que le Monténégro s’était doté d’un cadre juridique destiné à améliorer les relations interethniques et la protection des droits des minorités nationales ainsi que des autres groupes ethniques minoritaires. Dans ce contexte, le pays a également mis sur pied des institutions spécialisées, au nombre desquelles figurent le Fonds pour la protection et l’exercice des droits des minorités, le Centre pour la préservation des cultures minoritaires ainsi que les «conseils des minorités».

Les autorités sont toujours confrontées à la difficulté de réinsérer les personnes déplacées suite aux conflits armés dans la région des Balkans, a poursuivi M. Numanović, précisant que le Gouvernement avait adopté à cette fin une Stratégie quinquennale dont l’objectif est de trouver des solutions durables qui soient conformes aux normes internationales. Au plan régional, le Monténégro fait partie, avec ses voisins, du processus de Sarajevo qui cherche à proposer des solutions à long terme aux personnes réfugiées et déplacées de force, a rappelé le Ministre. Dans ce contexte, le Programme national de logement du Monténégro a prévu des financements suffisants visant à loger plus de six mille personnes parmi les plus vulnérables.

Le Ministre des droits de l'homme et des droits des minorités a par ailleurs fourni des informations concernant la réforme des lieux de détention, la législation applicable aux médias, la liberté religieuse et la liberté d’expression. Il a conclu en soulignant que toutes les réformes engagées bénéficient de la participation des citoyens, de la société civile et du secteur des médias et que tous les fonctionnaires – notamment les policiers, les magistrats et les gardiens de prison – reçoivent une formation continue aux normes nationales et internationales de protection des droits fondamentaux.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. ANWAR KEMAL, rapporteur du Comité pour l’examen du rapport du Monténégro, a observé avec satisfaction que le Monténégro, pays jeune, n’avait ménagé aucun effort pour lutter contre la discrimination raciale et préserver les droits de l’homme. Le rapporteur s’est félicité de l’adoption, en 2010, de la loi interdisant la discrimination et de la création, en 2011, de l’institution du Protecteur des droits de l’homme et des libertés. Il a souhaité savoir pour quelles raisons le Protecteur des droits de l’homme et des libertés est saisi d’un nombre très limité de plaintes pour faits de discrimination. Il a également voulu savoir si le Protecteur dispose réellement des moyens d’agir comme un organe de prévention de la torture, au sens du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

S’agissant du suivi par le Monténégro des recommandations qui lui avaient été faites par le Comité en 2009, M. Kemal a demandé à la délégation de donner davantage de précisions sur l’éducation, sur les niveaux de développement social et économique et sur les taux d’emploi des différents groupes ethniques vivant dans le pays. Quelles mesures ont-elles été prises pour accélérer l’harmonisation de la loi sur les minorités avec les dispositions progressistes de la Constitution monténégrine de 2007, a par ailleurs demandé le rapporteur?

M. Kemal s'est ensuite enquis de l'éventuelle évaluation faite de l’efficacité des formations dispensées aux différentes catégories de fonctionnaires impliqués dans la mise en œuvre les lois contre la discrimination. D’une manière générale, le rapporteur a recommandé que le Monténégro donne davantage de renseignements sur les effets concrets des lois pertinentes. Relevant que le principe de «l’action affirmative» n’est pas appliqué au Monténégro, il a souligné que le manque de statistiques fiables sur l’origine ethnique des habitants compromet la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles relatives à la représentation des minorités au Parlement. M. Kemal s'est en outre enquis du statut juridique des personnes déplacées et apatrides résidant au Monténégro.

La délégation a par ailleurs été priée de dire pourquoi les mesures de lutte contre l’analphabétisme profitent si peu aux Roms. À ce sujet, M. Kemal a jugé nécessaire que les autorités monténégrines investissent davantage dans l’éducation et la formation professionnelle des Roms, des Ashkali et des Tziganes. Il a néanmoins affirmé que le Monténégro constitue un bon exemple de tolérance envers les minorités nationales et ethniques.

Un autre membre du Comité a demandé des précisions sur les «musulmans» mentionnés dans le rapport aux côtés des Albanais et des Croates : ce groupe religieux est-il considéré au Monténégro comme un groupe ethnique? Cet expert s'est lui aussi dit intéressé de mieux connaître la composition ethnique de la population du Monténégro. Des statistiques seraient également bienvenues concernant la composition de la population carcérale, a souligné l'expert. Il a fait observer que les femmes roms sont victimes d’une double discrimination sur le marché monténégrin de l’emploi, du fait de leur origine et de leur analphabétisme.

Un expert a insisté sur l’importance que revêt la participation des minorités dans les instances locales, faute de quoi existe un risque de déséquilibre dans la représentation du corps social. Le Monténégro devrait peut-être s’inspirer de l’expérience d’autres pays dans ce domaine, afin de trouver une solution politique acceptable par tous les partis, a-t-il souligné.

Un autre membre du Comité s’est félicité des efforts des autorités monténégrines pour trouver une solution durable aux problèmes rencontrés par les personnes déplacées et réfugiées suite aux conflits dans la région. Cet expert a évalué à 10 000 le nombre de Roms officiellement installés dans le pays, dont 2500 apatrides, qui sont dans une situation particulièrement délicate. Il a par ailleurs regretté l’absence, dans les textes de loi monténégrins, de toute référence à l’égalité des droits dans la jouissance des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Concernant la ségrégation, il a été rappelé que le Comité souhaite simplement que les personnes appartenant à des minorités ne soient pas mises à l’écart des autres citoyens: ne saurait par exemple être admise l’ouverture de classes composées exclusivement d’enfants roms.

Plusieurs membres du Comité se sont interrogés sur la langue utilisée pour l’éducation des jeunes Roms et tziganes.

Un expert a fait observer que le problème des Roms, en tant que peuple nomade, a une dimension continentale qui exclut d’en rendre responsable un État en particulier et impose une action concertée de l’Union européenne.

Pourquoi le Monténégro fait-il encore une distinction entre les «personnes déplacées» et les «personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays», puisque le Monténégro ne fait plus partie de la Serbie, a demandé un expert? La fermeture des deux camps pour personnes déplacées de Konik exigera une volonté politique beaucoup plus ferme, notamment en ce qui concerne la résolution des problèmes de logement des personnes concernées, a-t-il souligné.

Quelles sont les raisons pour lesquelles l'institution nationale des droits de l'homme du Monténégro ne bénéficie pas de l'accréditation du Comité international de coordination (CIC) des institutions nationales de droits de l'homme, conformément aux Principes de Paris, a-t-il également été demandé?

Un expert a constaté que le rapport monténégrin mentionne tantôt cinq, tantôt dix ou quinze motifs officiels de discrimination, ce qui prête à confusion. Cet expert a par ailleurs souhaité savoir quelles langues peuvent être utilisées par les citoyens dans leurs relations avec les autorités. Il s'est en outre interrogé sur les modalités d’accueil des étrangers et requérants d'asile au Monténégro et sur les modalités de naturalisation des ressortissants des autres États nés de l’ancienne Yougoslavie.

Qu'en est-il de l’efficacité de l’action du Protecteur des droits de l’homme et des libertés, a-t-il en outre été demandé? Qu'en est-il par ailleurs du bilan des formations dispensées par le Ministère des droits de l’homme et des droits des minorités?

Plusieurs experts ont regretté que les résultats du dernier recensement national, pourtant réalisé en 2011, ne soient toujours pas disponibles. A également été déploré le manque d'informations, dans le rapport, concernant les activités et capacités du centre d’accueil pour requérants d’asile ouvert il y a également trois ans.

Des précisions ont par ailleurs été demandées s'agissant d'un important arrêt de la Cour constitutionnelle portant sur la légalité de certains aspects de la loi électorale ayant trait à la participation des minorités.

Le Monténégro a-t-il procédé à une évaluation de ses politiques d’intégration des minorités, notamment pour ce qui est des Roms, des Tziganes et des Ashkali, a-t-il également été demandé?

Réponses de la délégation

La délégation monténégrine a déclaré que les relations entre minorités ethnique sont moins tendues au Monténégro que dans d’autres États de la région. Dès le départ, les minorités ethniques ont toutes, sans exception, été favorables à la revendication d’indépendance du Monténégro, a-t-elle souligné. La délégation a tenu à préciser que le Monténégro n’était pas à proprement parler un «pays jeune», mais qu’il n’avait recouvré sa pleine indépendance que récemment.

L’objectif des autorités est de faire en sorte que les forces de police agissent dans le respect de normes élevées de comportement professionnel et éthique, a poursuivi la délégation. Depuis 2011, les fonctionnaires de la police, de la justice et des institutions chargées de faire respecter les droits de l’homme – y compris le bureau du Protecteur – sont formés aux droits de l’homme et aux problèmes de la discrimination, a-t-elle souligné. Aussi, les magistrats sont-ils bien informés des dispositions du droit international relatives aux droits de l’homme. Le contrôle externe de la police est assuré par le Parlement et par une commission composée de membres du barreau, de la société civile et du monde académique – sans oublier le contrôle quotidien exercé par les citoyens, a précisé la délégation.

La délégation a ensuite rappelé que le Monténégro a ouvert ses frontières à environ 120 000 personnes déplacées, dont 16 000 réfugiées, de l’ex-Yougoslavie, ce qui est beaucoup pour une population totale de 650 000 habitants. Les personnes originaires de pays reconnus au plan international sont considérées comme «déplacées» et celles venant du Kosovo, soit de l’ancienne Serbie-et-Monténégro, sont, par habitude, qualifiées de «déplacées de l’intérieur», a expliqué la délégation. La répartition ethnique des personnes déplacées est très variée, a-t-elle poursuivi. Le statut juridique des personnes déplacées ou apatrides est régi par la Loi sur les étrangers de 2009, qui leur accorde un droit de résidence temporaire ou permanent, a-t-elle précisé, ajoutant que le Monténégro a pris plusieurs mesures en vue de la régularisation des personnes qui résident de façon permanente sur le territoire. Les personnes déplacées originaires de Bosnie-Herzégovine et de Croatie peuvent déposer une demande de régularisation dans leur pays d’origine, a d'autre part indiqué la délégation.

Le Monténégro contribue au processus régional de Sarajevo afin de trouver des solutions durables aux problèmes des personnes déplacées, a en outre souligné la délégation, attirant notamment l'attention sur le programme de construction de 900 logements, auquel le Monténégro participera à hauteur de 15%; 120 de ces logements seront construits dans le camp de Konik pour personnes déplacées, dans lequel ou autour duquel résident quelque 600 à 700 Roms.

En 2013, 3500 personnes ont demandé l’asile au Monténégro, a ensuite indiqué la délégation. Pour faire face à cet afflux, le Monténégro a adopté ou modifié des lois importantes concernant l’asile et la nationalité monténégrine, a-t-elle souligné. Le pays a ouvert son premier centre d’accueil pour requérants d’asile, d’une capacité de 65 places, a-t-elle par ailleurs fait valoir. Le Monténégro coopère avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et avec l’Union européenne aux fins de la gestion des demandes d’asile au niveau régional.

Les personnes originaires de Bosnie-Herzégovine et de Croatie qui ont choisi de rester au Monténégro y vivent sans subir de discrimination et au bénéfice d’un certain statut lié à leur qualité de ressortissants étrangers, a d'autre part assuré la délégation. Au Monténégro, la liberté de mouvement n’est limitée pour personne, a-t-elle ajouté, rappelant en outre que le Monténégro a ratifié les conventions internationales relatives à l'apatridie.

Répondant à une question sur la durée de séjour des étrangers, la délégation a indiqué que les personnes déplacées s’installent en général pour vivre au Monténégro. Les requérants d’asile constituent, en revanche, un groupe beaucoup plus mobile, a-t-elle affirmé.

Le nombre d’enfants roms et tziganes vivant dans les camps Konik I et II qui sont scolarisés est en augmentation, a par ailleurs indiqué la délégation, soulignant que les activités pédagogiques engagées depuis six ans ont pour objectif non seulement l’intégration mais aussi l’inclusion de ces enfants. Le Monténégro a travaillé initialement avec la Croix-Rouge à l’organisation des classes dans les camps, a ajouté la délégation. Les élèves ont progressivement été scolarisés dans les établissements des villes avoisinantes, plus aucune inscription n’étant prise à Konik, a-t-elle alors expliqué. Les autorités distribuent des manuels scolaires gratuits, organisent le ramassage scolaire quotidien et font appel à des médiateurs roms chargés de surveiller la régularité des progrès des enfants et de les aider dans leurs devoirs, a-t-elle en outre fait valoir. Dans le secondaire, les autorités appliquent les principes de l’action affirmative pour faire en sorte que les adolescents roms et tziganes jouissent de chances égales en matière de formation. Le Monténégro a également pris des mesures d’insertion sociale par le biais de la prise en charge préscolaire de petits enfants roms, dans des «jardins d’enfants préparatoires» organisés pendant l’été.

Les autorités veillent, par ailleurs, à l’insertion professionnelle des Roms et des Tziganes par le biais de mesures d’aide aux employeurs. Plusieurs dizaines de personnes trouvent ainsi un emploi chaque année, en général sous forme de contrat à durée déterminée, a précisé la délégation.

Le Monténégro, qui préside cette année les activités organisées dans le cadre de la Décennie de l’inclusion des Roms, est bien conscient du fait que la solution aux problèmes de cette population est à rechercher au niveau de l’Europe, étant donné la complexité du problème. Les pays les plus concernés ont besoin de l’aide financière de la communauté internationale, a affirmé la délégation.

Si toutes les personnes sont traitées sur un pied d’égalité au Monténégro, les Roms bénéficient, en tant que groupe particulièrement défavorisé, d’une attention plus soutenue de la part des autorités, a insisté la délégation. Pour donner l’exemple, plusieurs ministères ont embauché des collaborateurs roms très compétents, a-t-elle fait valoir.

La délégation a expliqué que l’enseignement dans toute classe doit se faire dans une langue comprise par tous les enfants de cette classe, ce qui exclut les différents dialectes de la langue rom parlés au Monténégro, pour lesquels aucun enseignant, d'ailleurs, n’est disponible. Un expert du Comité est alors intervenu à ce stade de la discussion pour juger regrettable que les vingt enseignants roms récemment recrutés ne soient pas en mesure d’enseigner la langue romani. La délégation a alors souligné qu’il est très difficile pour les autorités d’organiser un enseignement sur mesure pour les écoliers concernés. Des cours de langue et de civilisation roms sont cependant proposés pendant l’été, qui sont ouverts à tous les écoliers, a-t-elle toutefois fait valoir.

Il est vrai que le rapport du Monténégro ne tient pas compte du recensement réalisé au printemps 2011, eu égard aux difficultés rencontrées dans le traitement des données, a poursuivi la délégation. Mais les chiffres sont désormais disponibles, a-t-elle indiqué. Le Monténégro est chrétien (orthodoxe) à 72 %, a-t-elle précisé, avant de rappeler que les citoyens ne sont pas obligés de répondre aux questions du recensement portant sur la religion et sur la langue ; ils se déclarent eux-mêmes en fonction de leur conviction. D’une manière générale, les citoyens du Monténégro ont la possibilité d’affirmer ou au contraire de taire leur affiliation ethnique, a également souligné la délégation. Le classement des musulmans en tant que groupe ethnique est le fruit d’une décision datant de 1971, a-t-elle rappelé.

Jusqu’en 2010, la protection contre la discrimination était assurée par les dispositions de la Constitution et par des lois ad hoc, a d'autre part expliqué la délégation. En 2010, le Monténégro s’est doté d’une loi spécifique contre la discrimination puis, en 2011, d’une institution de prévention de la discrimination: le Protecteur des droits, a-t-elle indiqué. Elle a précisé que le Bureau du Protecteur des droits, qui est indépendant, ne fait pas partie de la délégation gouvernementale monténégrine mais qu'il pourrait transmettre directement au Comité les informations que celui souhaite recevoir. Les moyens financiers de ce Bureau sont certes modestes, mais ne cessent cependant d’augmenter depuis sa création, a fait valoir la délégation. Ce Bureau peut avoir recours à des compétences extérieures – de psychologues ou de juristes, par exemple – pour l’aider dans son travail. La délégation s'est dite consciente de la nécessité pour le Monténégro de renforcer l’autonomie du Bureau du Protecteur des droits.

Le Protecteur des droits joue un rôle de prévention de la discrimination: les amendements à la loi portant création de cette institution visent à renforcer son rôle, à élargir ses compétences et à stabiliser son financement, a ensuite indiqué la délégation.

Dans sa nouvelle Constitution de 2010, le Monténégro a procédé à une révision des articles relatifs aux droits des minorités qui a été rejetée par la Cour constitutionnelle, au motif que ces modifications risquaient d’introduire des inégalités au détriment de la représentation de certaines minorités au niveau local, a indiqué la délégation.

Au titre des mesures d’action positive prise par l'Etat, des partis obtenant, dans une liste conjointe, 0,17 % des voix exprimées sont autorisés à être représentés au Parlement, lequel compte 81 sièges. Trois partis au bénéfice de ce régime sont ainsi représentés par une députée, a fait valoir la délégation. Il est ainsi possible d’améliorer la représentation des minorités au Parlement national, a-t-elle insisté. D'autre part, trois ministres appartenant à des minorités figurent au Gouvernement. Reste néanmoins encore à améliorer la représentation des minorités dans les services publics, a admis la délégation. Le Monténégro compte environ 2000 Tziganes et quelques dizaines seulement de personnes se réclamant de l’identité ashkalie, a-t-elle précisé.

Les enfants issus de mariages mixtes sont recensés dans la mesure où les parents choisissent de les déclarer comme tels, ce qui est facultatif, a par ailleurs expliqué la délégation. C'est aux parents de signaler aux établissements scolaires la langue dans laquelle leurs enfants doivent être instruits, a-t-elle ajouté, avant de rappeler que les écoles ne dispensent pas de cours de religion.

Le Monténégro entend renforcer la participation des femmes dans tous les domaines de la vie publique et professionnelle, a poursuivi la délégation. Pour ce faire, les autorités s’efforcent de donner aux femmes les moyens d’assumer des rôles plus actifs. Les femmes roms sont confrontées à des difficultés supplémentaires et spécifiques, notamment aux mariages précoces qui compromettent davantage encore leurs chances de participation, a fait observer la délégation.

La délégation a ensuite précisé que la stratégie de l’État en matière d’égalité entre les sexes comporte trois volets: participation des femmes à la vie politique nationale, autonomisation des femmes sur le plan économique et répression de la violence faite aux femmes. Les femmes roms, victimes de discriminations multiples, bénéficient de mesures particulières, a précisé la délégation.

Le monténégrin, langue officielle, est aussi la langue utilisée dans les tribunaux; mais au niveau local, les tribunaux peuvent se servir d’autres langues reconnues comme l’albanais, le bosnien ou encore le croate. Quoi qu'il en soit, toute personne privée de liberté doit pouvoir suivre la procédure dans une langue qu’elle comprend; des interprètes sont donc à la disposition des justiciables.

Actuellement 1106 personnes sont privées de liberté au Monténégro, dont 892 citoyens monténégrins, a précisé la délégation.

La délégation a indiqué que, depuis 2010, les tribunaux monténégrins ont statué, à quelques reprises seulement, sur des affaires pénales relevant de la haine raciale. On constate que les victimes potentielles craignent encore de porter plainte et que la population n’est pas pleinement consciente des moyens de faire valoir ses droits de l’homme, a reconnu la délégation. Le Procureur peut poursuivre ex officio les délits relevant de la discrimination raciale, a-t-elle souligné. Les tribunaux monténégrins ont été saisis, en 2013, de seize cas de traite des êtres humains, a en outre précisé la délégation. Lors de la procédure judiciaire, il y a renversement de la charge de la preuve, laquelle incombe à la personne soupçonnée d’un acte discriminatoire.

Un expert du Comité ayant voulu savoir si les discours politiques et les campagnes électorales au Monténégro étaient entachés de propos racistes, la délégation a assuré que le discours de haine est absent de la vie politique du pays, ce qui reflète la tolérance qui règne au sein de la société monténégrine. Les partis politiques appelant à la haine raciale sont interdits, a-t-elle précisé. Un expert du Comité ayant alors fait observer qu'il est peu probable que les Roms n’aient jamais fait l’objet d’attaques racistes au Monténégro, la délégation a assuré que les autorités n’ont enregistré, à ce jour, aucune tendance ouvertement raciste ou haineuse contre une quelconque ethnie en particulier. On ne trouve même pas de graffiti racistes sur les murs des villes, a insisté la délégation. Il existe par contre – et c’est indéniable – une certaine «distance ethnique» entre communautés, a reconnu la délégation.

En conclusion, la délégation, par la voix du Ministre des droits de l'homme et des droits des minorités du Monténégro, a fait valoir que le Monténégro est un État jeune mais de civilisation ancienne, qui a su préserver la liberté et la tolérance au milieu d’une région troublée. Le pays est un modèle et un facteur d’intégration dans les Balkans et espère continuer à jouer ce rôle après qu’il aura rejoint l’Union européenne. À cet égard, le processus de rapprochement avec l’Union européenne est appréhendé, en tout premier lieu, comme un moyen d’améliorer les conditions de vie et le respect des droits des citoyens monténégrins, a indiqué M. Numanović.


Observations préliminaires

Présentant des observations finales à l'issue de ce dialogue, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport monténégrin, M. KEMAL, a salué l’excellente prestation de la délégation et sa capacité à faire ressortir les faits importants. Le Monténégro est clairement sur la bonne voie et semble être «une sorte de paradis cerné par des turbulences», a déclaré le rapporteur. La volonté du pays de faire cohabiter harmonieusement les ethnies qui le composent ne peut être que louée, a-t-il souligné. M. Kemal a fait observer que si les organisations non gouvernementales monténégrines ont été absentes de ce débat, certaines de leurs idées et recommandations n'en restent pas moins présentes à l’esprit des membres du Comité.

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