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Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme : études sur le droit à l'alimentation des pauvres urbains et des femmes rurales

08 août 2012

8 août 2012

Le Comité consultatif du Conseil des droits de l'homme a consacré la journée à l'examen de deux études qu'il mène sur le droit à l'alimentation, à savoir, l'étude finale sur la promotion des droits de l'homme des populations urbaines pauvres et l'étude préliminaire sur les femmes rurales et le droit à l'alimentation.

Mme Chinsung Chung a présenté le projet sur les droits de l'homme des populations urbaines pauvres, qui retient trois causes majeures de pauvreté en milieu urbain: l'urbanisation, la dislocation des communautés rurales et les effets de la mondialisation. Le document traite aussi des problèmes de la mauvaise qualité de l'alimentation des populations urbaines pauvres et de la forte augmentation du prix des aliments, qui entraîne une importante instabilité dans le régime alimentaire. Sont également abordées les difficultés en matière d'accès à l'eau potable. L'étude s'intéresse aussi aux problèmes spécifiques des enfants et de la jeunesse en milieu urbain. Un ensemble de recommandations sont formulées à l'intention des États.

Le débat a porté en particulier sur la nécessité de judiciariser les droits économiques et sociaux, s'agissant notamment du droit à l'eau et à l'assainissement et du droit au logement. Une quatrième cause fondamentale de la pauvreté au milieu urbain: les catastrophes naturelles, y compris les événements climatiques extrêmes, qui perturbent grandement l'approvisionnement alimentaire et suscitent des maladies. Les experts ont souligné à quel point il est dangereux de faire des pauvres des clients plutôt que des acteurs de leur propre développement. L'Organisation mondiale de la santé s'est félicitée de la reconnaissance par l'étude du caractère multidimensionnel du problème de la pauvreté en milieu urbain.

Mme Mona Zulficar a présenté l'étude préliminaire sur les femmes rurales et le droit à l'alimentation. Elle a rappelé que les femmes rurales sont victimes de nombreuses discriminations croisées, dans un contexte de déséquilibre entre régions rurales et urbaines et d'inégalités dans l'accès à l'économie et à l'éducation. La solution aux problèmes des femmes rurales réside dans leur autonomisation. Or, la possibilité de développer leurs compétences est gravement limitée par une courte scolarité, par le mariage précoce, par la charge que représente le travail domestique. Le document examine de plus près la situation des femmes chefs de famille. Il souligne que les États doivent faire preuve de l'engagement politique nécessaire pour appliquer concrètement les engagements qu'ils ont pris au niveau international.

Au cours du débat, les experts ont souligné l'importance de la qualité des aliments, de même que la nécessité d'assurer la stabilité des prix des denrées, étant donné que les petits paysans doivent pouvoir s'approvisionner sur les marchés une partie de l'année. Par ailleurs, l'achat obligatoire, d'une année à l'autre, de semences auprès des grands fabricants pose des problèmes énormes qui entraînent, parfois, un risque pour la survie même des paysans. Un expert a estimé que, face à la réalité de la crise alimentaire, le travail du Comité doit consister à alerter et à alimenter la conscience collective.

Demain, à partir de 10 heures, le Comité consultatif se penchera sur le suivi de rapports finaux qu'il a soumis récemment au Conseil des droits de l'homme qui portent sur la promotion du droit des peuples à la paix et le renforcement de la coopération internationale dans le domaine des droits de l'homme. Il portera également son attention sur son programme de travail annuel, y compris les nouvelles priorités.

Droits de l'homme des populations urbaines pauvres

Présentation du projet

MME CHINSUNG CHUNG, rapporteuse du groupe de rédaction sur le droit à l'alimentation, présentant l'étude sur les droits de l'homme des populations urbaines pauvres (A/HRC/AC/9/3), a indiqué que le document insiste sur trois causes majeures de pauvreté en milieu urbain: l'urbanisation et la mauvaise qualité des infrastructures, la dislocation des communautés rurales et les effets de la mondialisation. La planification urbaine et la gouvernance défaillante des villes aggravent les risques de pauvreté, surtout quand les États n'assument pas leur responsabilité de répondre, dans la transparence, aux besoins locaux. Le document traite aussi des problèmes de la mauvaise qualité de l'alimentation des populations urbaines pauvres et de la forte augmentation du prix des aliments, laquelle entraîne une importante instabilité dans le régime alimentaire. La perte d'habitudes alimentaires saines rend ces populations vulnérables à la pauvreté. Le document aborde également les difficultés en matière d'accès à l'eau potable. L'étude s'intéresse particulièrement aux problèmes spécifiques des enfants et de la jeunesse en milieu urbain, notamment les orphelins et les enfants des rues. La pauvreté est aggravée par la violence, elle-même favorisée par la consommation de drogues. La dernière partie de l'étude contient un ensemble de recommandations.

Débat

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI aurait souhaité que les deux études mettent davantage l'accent sur la délinquance préoccupante du fait d'une jeunesse désœuvrée. Le sentiment d'impuissance à cet égard n'est pas irréversible et la crise actuelle doit être l'occasion de repenser les politiques publiques dans le sens d'un développement humain et d'une croissance partagée. Les décideurs disposent d'options pour ce faire, même dans les pays pauvres. Mme Warzazi a regretté par ailleurs que les gouvernements signent de nombreux instruments internationaux qu'ils n'appliquent pas toujours, notamment en ce qui concerne la lutte contre la discrimination à l'égard des femmes rurales, qui vivent dans des conditions inacceptables.

M. JOSÉ BENGOA a observé que le Conseil des droits de l'homme a adopté, à sa session de mars dernier, une http://www.un.org/ga/search/view_doc.asp?symbol=A/HRC/RES/19/7&referer=/english/&Lang=Frésolution quelque peu contradictoire relative à l'insécurité alimentaire et nutritionnelle au niveau mondial. Le texte de la résolution contient une très longue liste catastrophiste sur ce qui se passe dans le monde, ayant recours à un vocabulaire terrible, comme «la faim est un scandale». La résolution déplore que les engagements pris lors du Sommet mondial de l'alimentation ne soient pas respectés, sans parler des objectifs du Millénaire pour le développement, qui seraient hors d'atteinte. M. Bengoa a regretté ces formulations, estimant qu'elles suscitent le fatalisme et donc l'inaction. La résolution ne propose d'ailleurs aucune piste concrète pour améliorer la situation, hormis la demande adressée au Rapporteur spécial de maintenir sa surveillance. M. Bengoa a aussi déploré que la Présidente du Conseil des droits de l'homme ait oublié, dans son allocution au début de la présente session, de mentionner le projet élaboré par le Comité consultatif au sujet de la sécurité alimentaire des paysans, un projet pourtant rédigé avec la participation active des personnes concernées.

M. Bengoa a salué l'accent qui est mis par l'étude des populations urbaines pauvres sur la fragmentation brutale des sociétés contemporaines, avec ses conséquences en termes de pauvreté dans les villes. Il a souligné l'inefficacité, en termes de réduction définitive de la pauvreté, des mesures de transferts monétaires directs, notamment les bons d'achat octroyés en échange d'exigences spécifiques, comme la scolarisation des enfants. L'expert a par la suite rappelé le proverbe selon lequel il vaut mieux apprendre à quelqu'un à pêcher plutôt que lui donner du poisson. L'octroi de ces bons répond à des besoins statistiques et politiques, en même temps qu'il perpétue la situation de pauvreté et «clientélise» en quelque sorte les bénéficiaires. La recherche d'une solution à une situation de pauvreté implique le renforcement de la capacité des personnes concernées d'améliorer elles-mêmes leur sort. Pour sortir d'une approche paternaliste de la lutte contre la pauvreté, l'expert a jugé très important que les États adoptent des mécanismes de plainte et de recours accessibles aux personnes vivant dans la pauvreté dont les droits fondamentaux sont bafoués. Il est possible de surmonter la pauvreté, qui n'est pas le fruit du destin. L'élimination de ce problème passe par la garantie et l'application des droits de l'homme.

MME COCO QUISUMBING a souhaité que le groupe de rédaction n'oublie pas de mentionner les effets de la pauvreté sur la dignité humaine. L'experte a souligné par ailleurs l'extrême fragilité des femmes urbaines pauvres à l'exploitation sexuelle et au chômage, et leur dénuement en termes de couverture sociale du fait qu'elles sont très souvent employées dans l'économie informelle. Un paragraphe général pourrait en outre traiter des problèmes des jeunes, victimes de violations de leurs droits fondamentaux, mais aussi, parfois, auteurs de délits. Le fait que ces jeunes tombent dans la criminalité est aussi la manifestation d'un échec des parents et de la société.

MME ANANTONIA REYES PRADO a déclaré qu'il faut s'interroger sur les répercussions de la pauvreté sur la liberté, au-delà même de la dignité évoquée précédemment à juste titre. L'experte a insisté sur la nécessité d'une approche préventive de la lutte contre la criminalité de la jeunesse. Elle a déploré les pratiques politiques antidémocratiques qui aggravent la pauvreté.

M. DHEERUJALL SEETULSINGH a souligné la nécessité de judiciariser les droits économiques et sociaux, s'agissant notamment du droit à l'eau et à l'assainissement et du droit au logement. En Afrique du Sud par exemple, ces droits sont garantis par la Constitution, sans que le pays n'ait ratifié le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Les citoyens doivent donc agir en justice pour jouir concrètement de ces droits. La loi de l'Inde accorde quant à elle au public le droit de vivre dans la dignité, autre exemple de la justiciabilité des droits de «deuxième génération». L'étude pourrait insister avec profit sur le nécessaire ancrage de ces droits dans la loi.

Pour M. CHEN SHIQIU, il existe une quatrième cause fondamentale de la pauvreté en milieu urbain: les catastrophes naturelles, y compris les événements climatiques extrêmes, qui perturbent grandement l'approvisionnement alimentaire et suscitent des maladies. Le problème de la faim doit être complètement résolu, en même temps que doit être assurée une alimentation saine, exempte de résidus de pesticides ou d'engrais.

MME REYES PRADO a confirmé qu'il est dangereux de faire des pauvres des clients plutôt que des acteurs de leur développement. L'experte a pointé en outre le danger du consumérisme qui guette les pauvres, qui consacrent une grande partie des sommes tirées des transferts à l'achat de biens de consommation tels que téléphones portables.

M. OBIORA CHINEDU OKAFOR a souligné que l'argumentation de M. Bengoa trouve sa limite dans le contexte dans lequel s'opère le transfert direct: on sait, en effet, que le succès des systèmes redistributifs de nombreux pays repose, précisément, sur des transferts de richesses.

MME LAURENCE BOISSON DE CHAZOURNES a relevé que les organes conventionnels et les titulaires de mandats des procédures thématiques du Conseil des droits de l'homme ont mené des travaux importants sur les droits économiques, sociaux et culturels, le droit à l'eau en particulier. Le groupe de rédaction dispose ainsi d'une source de renseignements très utile.

MME WARZAZI a insisté sur la nécessité de mieux contrôler la qualité des aliments auxquels ont accès les populations pauvres. Les États devraient organiser des campagnes d'information et de sensibilisation à cet égard.

M. VLADIMIR KARTASHKIN a rappelé que le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels pose que les pays ayant un potentiel économique limité «peuvent déterminer dans quelle mesure ils garantiront les droits économiques (…) à des non-ressortissants» (art. 2). On voit par là que la situation des non-ressortissants risque toujours d'être plus précaire. L'expert a estimé qu'une étude pourrait être réalisée sur les droits des non-citoyens dans le domaine social et économique.

L'Organisation mondiale de la santé s'est félicitée que l'étude ait mis l'accent sur la nutrition. Le droit à l'alimentation couvre non seulement l'accès à un apport calorique suffisant, mais aussi à des aliments de qualité nutritionnelle suffisante. Or, on constate actuellement que de nombreuses femmes et jeunes filles sont prises dans un cycle de malnutrition qui a des conséquences néfastes pour leur santé et celle de leurs enfants. L'Organisation mondiale de la santé constate aussi que les enfants sont particulièrement vulnérables à la malnutrition, source d'une forte mortalité, de retards dans leur croissance et de maladies telles que diabète ou obésité. L'OMS se félicite de la reconnaissance dans l'étude du caractère multidimensionnel du problème de la pauvreté en milieu urbain.

Conclusion

MME CHUNG a indiqué qu'elle tiendrait compte des remarques de ses collègues s'agissant notamment de l'influence du climat sur la pauvreté en zone urbaine ou encore de la qualité nutritionnelle de l'alimentation des personnes pauvres. L'étude n'omettra pas non plus de mentionner l'importance du respect de la dignité et de la liberté de ces personnes. La responsabilité de l'État de protéger la jeunesse sera également soulignée. Le groupe de rédaction réfléchira à la manière d'indiquer quelles «mauvaises pratiques» sont à éviter, comme l'a suggéré M. Bengoa. Une réflexion sera en outre menée sur les droits des non-ressortissants.

Les femmes rurales et le droit à l'alimentation.

Présentation du projet

MME MONA ZULFICAR a présenté, au nom du groupe de rédaction, l'étude préliminaire sur les femmes rurales et le droit à l'alimentation (A/HRC/AC/9/5). Elle a souligné que les femmes rurales sont victimes de nombreuses discriminations croisées, dans un contexte de déséquilibre entre régions rurales et urbaines et d'inégalités dans l'accès à l'économie et à l'éducation. Il faut aussi relever que les femmes rurales constituent 70 % de la population victime d'insécurité alimentaire. Le rapport 2011 de l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture note que l'accès équitable des femmes aux moyens de production permettrait d'augmenter la productivité agricole dans une mesure suffisante pour tirer 100 à 150 millions de personnes de la précarité alimentaire. Il existe pourtant des instruments internationaux, notamment le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui imposent aux États l'obligation de faire respecter le droit de bénéficier d'une alimentation adéquate et d'accéder aux moyens de production. D'autres instruments obligent les États à éradiquer la discrimination à l'égard des femmes.

Les femmes en région rurale sont l'objet d'une discrimination d'abord dans l'accès aux biens fonciers et aux ressources hydriques. La tradition et les pratiques coutumières s'opposent dans ce contexte aux dispositions du droit, tandis que le patriarcat dominant accorde aux hommes tout le pouvoir et une grande partie des ressources. Les femmes souffrent en outre des conséquences de la polygamie, sans pouvoir bénéficier d'éventuels bienfaits. N'étant pas propriétaires de leur terre, les femmes rurales n'ont pas accès au crédit; elles sont aussi désavantagées en termes d'emploi indépendant. La discrimination opère de manière très visible sur les marchés locaux, dont la privatisation compromet généralement la pérennité des ressources des femmes rurales. Autre forme de discrimination, l'incapacité des femmes à accéder aux marchés du travail et du crédit. On sait que les femmes sont plus économes et plus respectueuses de leurs obligations financières que les hommes: et pourtant, elles ne trouvent pas de formes de crédit adaptées à leurs besoins. Enfin, les femmes rurales, employées majoritairement dans le secteur informel, ne bénéficient pas des prestations sociales et de retraite.

La solution aux problèmes des femmes rurales réside dans leur autonomisation. Or, leur possibilité de développer leurs compétences est gravement limitée par une scolarité interrompue, par le mariage précoce, par la charge que représente le travail domestique ou encore par l'obligation de soins de membres de leur famille. Le rapport examine de plus près la situation des femmes chefs de famille. L'État devrait adopter des mesures de soutien à leur intention ainsi qu'au profit de leurs enfants. Le rapport s'intéresse aussi aux femmes travailleuses saisonnières et temporaires et aux femmes migrantes, lesquelles occupent souvent des emplois peu qualifiés et mal rétribués dans les villes. Le rapport préconise, à l'intention des États, des stratégies juridiques de lutte contre toutes ces formes de discrimination. D'autres recommandations visent la protection des femmes des effets négatifs de la libéralisation du commerce, notamment en termes d'achat de denrées alimentaires. L'étude relève enfin que les États doivent faire preuve de l'engagement politique nécessaire pour appliquer concrètement les engagements qu'ils ont pris au niveau international.

Débat

M. JEAN ZIEGLER a observé que les femmes rurales et les populations urbaines pauvres sont confrontées à des discriminations et difficultés de même nature. Toutes sont contraintes de s'approvisionner, pendant la période intermédiaire entre deux récoltes, sur les marchés. Or, la fluctuation des prix suscite une forte insécurité alimentaire. Autre problème qui touche les femmes rurales et leurs enfants: la malnutrition. M. Ziegler a épinglé à cet égard la «schizophrénie» de la communauté internationale. Le dernier rapport du G20 préconise ainsi une augmentation de la productivité agricole, alors que l'on sait que le problème ne réside pas dans la production mais bien dans l'accès aux denrées alimentaires, comme l'ont montré nombre de rapports d'organes des Nations Unies. Le G20, qui domine des Nations Unies et ses organisations spécialisées, tient ainsi un double discours. Les décisions prises lors de ses sommets contredisent les prises de position des Nations Unies, avec pour conséquence la poursuite du massacre de la faim, autre nom de la crise alimentaire. L'expert a déploré la spéculation sur les denrées alimentaires de base, l'utilisation de grandes quantités de maïs pour la production de biocarburants et la mainmise de sociétés privées sur le transport, le stockage et la commercialisation des denrées alimentaires.

Exprimant un certain scepticisme vis-à-vis de l'approche juridique de l'étude, M. Ziegler a estimé que, face à ces réalités, le travail du Comité doit consister à alerter et à alimenter la conscience collective. Il a su très bien le faire, par le passé, s'agissant de l'action urgente contre le noma. Il doit susciter, de même, un mouvement social contre la double discrimination dont souffrent les femmes rurales, afin d'obliger les États à changer radicalement de politique en renonçant, en particulier, aux agrocarburants et en luttant contre la spéculation sur les denrées alimentaires.

MME QUISUMBING a insisté sur le rôle des femmes dans l'accès à l'eau potable, un facteur crucial de la vie quotidienne et de la qualité de vie. L'accès aux ressources est intimement lié à l'accès à la justice. Les femmes rurales ne comprennent pas toujours le système juridique et les voies de droit qui leur sont ouvertes, de même qu'elles n'ont pas forcément le temps ni l'argent de déposer des recours. Le problème de la priorité accordée aux garçons et aux hommes dans la distribution des ressources alimentaires, au détriment des femmes et de filles, devrait être souligné. L'étude pourrait enfin mentionner que la plupart des conflits armés interviennent dans des zones rurales. Elle doit aussi mettre en valeur les bonnes pratiques en matière d'accès à la terre.

M. BENGOA a jugé remarquable le document présenté par Mme Zulficar. La double fonction des femmes rurales, agricultrices et travailleuses, y est très bien expliquée. On ne saurait insister suffisamment sur l'importance de la qualité des aliments, de même que sur la nécessité d'assurer la stabilité des prix des denrées, vu l'obligation pour les petits paysans de s'approvisionner sur les marchés une partie de l'année. Dans le même ordre d'idée, l'achat obligatoire, d'une année à l'autre, de semences auprès des grands fabricants pose des problèmes énormes qui entraînent, parfois, un risque pour la survie même des paysans. Enfin, il importe de garantir et de défendre les droits des femmes rurales au niveau collectif, c'est-à-dire par l'intermédiaire de l'action d'organisations de femmes. C'est la seule manière d'obliger les États à assumer leurs obligations en matière de contrôle de la qualité des denrées alimentaires. Cet aspect oblige à une réflexion sur le droit de réunion et d'association des femmes en général, a conclu M. Bengoa.

M. ALFRED KORAKORA a noté que tout le problème découle de la suprématie traditionnelle des maris au sein des foyers ruraux, alors que l'essentiel de la production est assurée par les femmes. L'argent de la vente des cultures commerciales est remis aux hommes, aucun recours n'étant ouvert aux femmes. Le Comité consultatif doit recommander aux États de prendre des mesures pour remédier à cette situation injuste. Il faut aussi trouver le moyen d'indemniser les femmes rurales de leur travail.

M. OKAFOR a déclaré qu'à court terme, avant une répartition mondiale plus équitable des ressources alimentaires, il est possible de prendre des mesures concrètes, au niveau des pays, pour améliorer le sort des familles paysannes pendant les périodes entre les récoltes. Il convient d'améliorer les infrastructures de stockage et de transport des denrées, ce qui permettra aux femmes rurales de commercialiser plus facilement leurs produits. Il faut également disposer des moyens de conférer localement une plus grande valeur ajoutée aux produits agricoles, afin d'en tirer un revenu suffisant, par exemple en commercialisant le manioc sous forme de chips. Il importe aussi que les femmes soient en mesure de participer aux décisions les concernant, car «les absents ont toujours tort».

M. SEETULSINGH a observé que les femmes rurales sont bien souvent astreintes aux travaux les plus durs et les plus dangereux, comme par exemple l'épandage des insecticides. C'est pourquoi il faut veiller à ce que les conventions pertinentes de l'Organisation internationale du travail, entre autres instruments, soient dûment appliquées.

M. CHEN a demandé des précisions sur les paragraphes du rapport relatifs à la participation politique et à la représentation équitable des femmes, deux aspects qui renvoient, peut-être, aux droits civils et politiques, alors que l'étude porte sur les discriminations contre les femmes au titre des droits économiques et sociaux. Il faut à cet égard favoriser l'accès des femmes rurales à la propriété foncière et aux technologies agricoles. M. Chen a estimé par ailleurs qu'il convient d'agir de manière résolue au niveau de la défense et de l'application du droit au développement: car comment éradiquer la pauvreté des femmes rurales sans régler, d'abord, le problème de la pauvreté en général?

M. KARTASHKIN a déclaré que pour garantir le droit à l'alimentation des femmes rurales, il faut inciter les États à respecter les droits économiques et sociaux. Il convient à cet égard d'adopter des systèmes équitables d'imposition et de répartition des richesses. Le rapport devrait donc comprendre un chapitre consacré aux politiques sociales des États.

MME WARZAZI a rappelé qu'à l'occasion du 8 mars - journée mondiale au cours de laquelle les problèmes de la femme sortent momentanément du réfrigérateur où ils reposent d'habitude -, l'ambassade d'Égypte au Maroc a fait circuler un film montrant des femmes condamnées à gravir, du matin au soir, une montagne pour aller chercher l'eau potable, tandis que leurs maris sont au café – jusqu'au jour où une femme décide de suivre l'exemple de Lysistrata et d'obliger ainsi les hommes à assumer leurs responsabilités.

Conclusion

MME ZULFICAR a déclaré que l'étude reflètera l'idée selon laquelle la solution aux difficultés des femmes rurales réside dans l'autonomisation des femmes aux plans économique et, comme l'a rappelé Mme Warzazi, familial. L'expérience montre que les discriminations contre les femmes peuvent être combattues avec succès, et que les comportements des hommes à cet égard sont susceptibles d'évoluer. L'étude intègrera par ailleurs des contributions d'organisations internationales. Le groupe de rédaction s'efforcera de produire un texte véritablement utile aux hommes et aux femmes sur le terrain, a assuré Mme Zulficar.

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