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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'Élimination de la discrimination raciale examine le rapport du Mexique

15 février 2012

Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale

15 février 2012

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, les seizième et dix-septième rapports périodiques du Mexique sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, M. Alejandro Negrín Muñoz, Directeur général pour les droits de l'homme et la démocratie au Secrétariat d'État chargé des relations extérieures du Mexique, a déclaré que depuis que la présentation du précédent rapport en 2006, des progrès significatifs ont été accomplis au Mexique; mais des difficultés de taille subsistent, a-t-il admis. Au chapitre des progrès, il a évoqué les réformes constitutionnelles en matière des droits de l'homme, amorcées en juin 2011. M. Negrín Muñoz a souligné l'importance de la loi fédérale sanctionnant toute forme de discrimination, de la loi générale sur l'accès des femmes à une vie exempte de violence et de la loi sur l'accès aux droits linguistiques. Il a en outre insisté sur la formalisation juridique d'un changement fondamental en matière de migration. Le dialogue entamé avec les personnes d'ascendance africaine dans le cadre du projet de création d'unités de statistiques sur ce groupe figure aussi parmi les nouvelles réalisations à porter au crédit de la lutte contre la discrimination raciale, a indiqué le Directeur général.

M. Muñoz a ensuite mis l'accent sur le rôle de la Commission nationale pour le développement des peuples autochtones, sous la houlette de laquelle les programmes et budgets consacrés aux prestations de services en faveur des autochtones ont été fortement améliorés, en particulier dans les secteurs de la santé et de l'éducation pour les populations vivant dans des situations de vulnérabilité. Il a attiré l'attention sur le système de consultation des autochtones mis en place en 2005. La lutte en vue d'atteindre l'égalité de fait en termes de protection contre la discrimination raciale se heurte à de grands obstacles, à des préjugés et à des résistances et barrières culturelles, ancrés dans la perception et les pratiques sociales dans tout le pays, ce qui constitue le défi majeur pour l'État mexicain, a indiqué M. Muñoz. L'État mexicain a toutefois avancé dans la lutte contre la discrimination, même si beaucoup reste à faire dans le pays à cet égard, a-t-il ajouté.

La délégation mexicaine était également composée, entre autres, de représentants du Ministère des affaires étrangères; du Ministère de la justice; de la Cour suprême; du Bureau du Procureur général; du Conseil national pour la prévention de la discrimination; de la Commission nationale pour le développement des peuples autochtones; et de la Mission permanente du Mexique auprès des Nations Unies à Genève. Elle a fourni aux membres du Comité des informations complémentaires s'agissant, notamment, de la situation des peuples autochtones, de celle des personnes d'ascendance africaine et de celle des migrants.

Présentant des observations préliminaires en fin de séance, Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mexique, M. Pastor Elias Murillo Martinez, a salué l'esprit autocritique dont a fait preuve la délégation mexicaine et s'est réjoui du « saut qualitatif » opéré dans le pays ces dernières années. Des affaires emblématiques, comme celle de M. Hugo Sanchez, illustrent les difficultés auxquelles se heurtent le pays, mais également la révolution juridique qui est en marche, a-t-il déclaré. Le rapporteur a exprimé le souhait que les investissements menés dans les territoires autochtones, comme dans le Chiapas, s'opèrent en respectant les principes de consultation et de consentement éclairé des communautés et peuples concernés. Pour ce qui est des personnes d'ascendance africaine, M. Murillo Martinez a plaidé en faveur de la poursuite d'activités ciblant ce groupe de la population. Le rapporteur a évoqué la situation de violence due au narcotrafic et a formé le vœu qu'elle trouve une solution pacifique et durable. Il s'est par ailleurs inquiété de l'existence au Mexique de préjugés sociaux qui se manifestent par une «discrimination de basse intensité mais à impact élevé» pour la personne qui en est victime. Malgré les politiques, programmes et lois en faveur de certains groupes stigmatisés, les résultats sont annihilés par les conséquences d'une autre série de politiques qui sont, elles, «paternalistes et autoritaires», a-t-il déclaré.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport d'Israël.

Présentation du rapport du Mexique

Présentant le rapport de son pays (CERD/C/MEX/16-17), M. ALEJANDRO NEGRÍN MUÑOZ, Directeur général pour les droits de l'homme et la démocratie au Secrétariat d'État chargé des relations extérieures du Mexique, a déclaré que depuis que la présentation du précédent rapport en 2006, des progrès significatifs ont été accomplis au Mexique; mais des difficultés de taille subsistent, a-t-il admis. Au chapitre des progrès, il a évoqué les réformes constitutionnelles en matière des droits de l'homme, amorcées en juin 2011, qui comprennent la reconnaissance de tous les droits de l'homme, ainsi que l'élargissement de la portée de cette notion et de son application, y compris l'obligation faite à toutes les autorités de prévenir, d'enquêter, de punir et de dédommager en cas de violations des droits de l'homme. Dans le même sens, des mécanismes d'application des droits de l'homme ont été mis sur pied, a-t-il précisé.

M. Negrín Muñoz a souligné l'importance de la loi fédérale sanctionnant toute forme de discrimination, de la loi générale sur l'accès des femmes à une vie exempte de violence et de la loi sur l'accès aux droits linguistiques. Il a en outre insisté sur la formalisation juridique d'un changement fondamental en matière de migration. Le dialogue entamé avec les personnes d'ascendance africaine dans le cadre du projet de création d'unités de statistiques sur ce groupe figure aussi parmi les nouvelles réalisations à porter au crédit de la lutte contre la discrimination raciale, a indiqué le Directeur général. Au niveau international, il a mentionné la création, sur proposition du Mexique en 2007, du réseau ibéro-américain des organismes et organisations contre la discrimination, en tant qu'espace de coopération internationale en vue de combattre la discrimination raciale, la xénophobie et l'homophobie, notamment. M. Muñoz a ensuite mis l'accent sur le rôle de la Commission nationale pour le développement des peuples autochtones, sous la houlette de laquelle les programmes et budgets consacrés aux prestations de services en faveur des autochtones ont été fortement améliorés, en particulier dans les secteurs de la santé et de l'éducation pour les populations vivant dans des situations de vulnérabilité. D'autre part, le découpage électoral a également été amélioré pour favoriser la participation politique des peuples et communautés autochtones.

Soulignant que cette présentation était la première faite devant un organe conventionnel des Nations Unies depuis l'entrée en vigueur des réformes constitutionnelles nationales, le Directeur général a rappelé que son pays s'était doté d'un certain nombre d'instances et d'organismes chargés de divers aspects intéressant les droits de l'homme. Ces institutions sont dotées de différents programmes pour rattraper le retard en matière d'éducation ; améliorer l'accès aux soins de santé ; faciliter les échanges culturels et prévenir et lutter contre toutes formes d'abus et de discriminations. Ces dernières années, la Haute Cour de justice a rendu un certain nombre d'arrêts dans cette optique, en particulier en ce qui concerne les droits des autochtones, a ajouté M. Negrín Muñoz.

M. Negrín Muñoz a indiqué que le recensement de 2010 a révélé que la population mexicaine s'élevait à 112,3 millions d'habitants, dont 52 % de femmes, 5,7 millions de personnes handicapées, 30 millions de jeunes de moins de 18 ans et plus de 11 millions de personnes âgées de plus de soixante ans. L'Etat fédéral du Mexique, qui a signé la Convention en 1966 et l'a ratifiée en 1975, est composé de 32 entités fédérales disposant d'une législation et d'un système politique propres ainsi que de plus de 2 450 municipalités, dont plus de 18 % sont régies par le système coutumier.

Outre les difficultés d'ordre géographique et démographique et celles liées aux structures politiques, a poursuivi le Directeur général, la lutte en vue d'atteindre l'égalité de fait en termes de protection contre la discrimination raciale se heurte à de grands obstacles, à des préjugés et à des résistances et barrières culturelles, ancrés dans la perception et les pratiques sociales dans tout le pays, ce qui constitue le défi majeur pour l'État mexicain. A cet égard, M. Negrín Muñoz a renvoyé aux conclusions de la deuxième Enquête nationale sur la discrimination au Mexique, menée en 2010, qui a permis de recueillir un grand nombre d'informations sur la manière dont ce phénomène affectait les personnes selon leurs conditions spécifiques et les caractéristiques de leur identité.

Selon M. Negrín Muñoz, l'État mexicain a toutefois avancé dans la lutte contre la discrimination, même si beaucoup reste à faire dans le pays à cet égard. Le Directeur général pour les droits de l'homme et la démocratie a insisté sur l'importance vitale de la stratégie de prévention et d'élimination de la discrimination raciale, qui vise au renforcement et à une mise à jour constante des moyens de combattre toutes les manifestations de discrimination raciale. Par son caractère pluridimensionnel, ce phénomène doit être abordé sous toutes ses facettes, en particulier en trouvant des moyens de contourner les difficultés engendrées par l'articulation des visions et politiques à trois niveaux de gouvernement: le niveau fédéral, celui des États fédérés et celui des municipalités.

Enfin, en ce qui concerne les peuples autochtones, M. Negrín Muñoz a attiré l'attention sur les progrès enregistrés en matière normative et plus particulièrement sur le système de consultation des autochtones mis en place en 2005.

Examen du rapport

Questions et commentaires des membres du Comité

M. PASTOR ELIAS MURILLO MARTINEZ, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Mexique, a indiqué qu'il s'était rendu récemment, à l'invitation des autorités mexicaines, dans ce grand et extraordinaire pays qu'est le Mexique, ce qui lui a permis de constater de visu les efforts qui y sont consentis dans la lutte contre la discrimination raciale. Il a regretté que le rapport ne reflète pas assez les résultats obtenus par les plans et programmes nationaux dans ce contexte.

M. Murillo Martinez a estimé à 450 000 le nombre de personnes d'ascendance africaine au Mexique et a relevé l'existence d'une importante minorité juive dans ce pays. Le rapporteur a ensuite salué le courage du Gouvernement mexicain dans sa détermination à faire face et à mettre fin à la violence qui prévaut dans certaines régions du pays du fait d'une « connivence présumée » devant le phénomène du trafic de stupéfiants. Le recours à l'armée dans certaines parties du territoire a provoqué des réactions variées et impose un coût non négligeable à l'État, a-t-il ajouté.

Une autre question sensible, a poursuivi M. Murillo Martinez, est celle de la situation des peuples autochtones. Il a rappelé qu'au moment de son indépendance, le Mexique avait eu un président d'origine autochtone, ce qui « n'a pas été suffisant pour garantir l'intégration des autochtones et de tous les autres groupes ethniques et culturels du pays ». L'application de la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail (OIT) relative aux peuples indigènes et tribaux ne nécessite pas de structures spécifiques ni une législation qui la réglemente expressément, a souligné le rapporteur, avant de s'enquérir de la mise en œuvre de cet instrument dans la pratique au Mexique.

L'État du Chiapas est celui qui à l'indice de développement le moins élevé, ce qui pourrait expliquer le soulèvement de 2004 dans cet État à forte population autochtone, a poursuivi M. Murillo Martinez, avant de recommander aux organismes gouvernementaux et aux entreprises d'établir un quota pour remédier à l'inégalité entre les sexes en matière d'emploi et d'accès aux services.

Plus de onze articles de la Constitution mexicaine ont été amendés récemment, ce qui témoigne, une fois de plus, de l'engagement des autorités à lutter contre toutes les manifestations de racisme ou de discrimination raciale, a par ailleurs relevé le rapporteur.

M. Murillo Martinez s'est toutefois inquiété de l'existence au Mexique de préjugés sociaux qui se manifestent par une « discrimination de basse intensité mais à impact élevé » pour la personne qui en est victime. Malgré les politiques, programmes et lois en faveur de certains groupes stigmatisés, les résultats sont annihilés par les conséquences d'une autre série de politiques qui sont, elles, « paternalistes et autoritaires », a déclaré le rapporteur. Il a ensuite cité des chiffres indiquant que les municipalités à forte présence autochtone sont celles qui souffrent le plus de marginalisation.

S'agissant de lutte contre les stéréotypes historiques et la discrimination, M. Murillo Martinez a fait observer que les personnes d'ascendance africaine commençaient à peine à être visibles. Le Musée de la tolérance à Mexico est une œuvre monumentale qui permet à la population juive de refléter son histoire dans le pays et il serait opportun que les personnes d'ascendance africaine puissent disposer d'une œuvre semblable, a affirmé le rapporteur. Les personnes d'ascendance africaine et les autochtones figurent encore parmi les groupes les plus menacés, victimes d'assassinats, de brimades et de marginalisation à travers le pays, a-t-il poursuivi. L'insuffisance de matériels linguistiques et d'interprètes dans les langues autochtones contribue aux difficultés que rencontrent les peuples autochtones pour défendre leurs droits devant la justice mexicaine. Le problème linguistique constitue sans aucun doute l'une des causes profondes de la discrimination à l'encontre des communautés autochtones, a insisté M. Murillo Martinez. Il s'est par ailleurs inquiété de l'intention de suicide collectif de toute une communauté autochtone, qui se trouve dans une situation de vulnérabilité extrême à cause de la sécheresse et de la famine. Le rapporteur a d'autre part déploré qu'un grand nombre de communautés autochtones ne soient pas consultées préalablement à l'approbation de « méga-projets » d'exploitation ou d'infrastructures. La mortalité maternelle demeure élevée parmi les femmes autochtones, s'est-il en outre inquiété.

Le rapporteur a aussi fait état de « la maladie de la pauvreté » qui affecte les autochtones, dont l'état de santé laisse à désirer et ne fait l'objet d'aucun suivi de la part des autorités. Alors que l'industrie minière génère des emplois et des revenus substantiels, il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles les communautés autochtones vivant sur les territoires des concessions minières, en particulier à Oaxaca, ne jouissent pas de leurs droits ni d'un mode de vie décent. Se penchant sur les mesures prises dans le contexte des conflits environnementaux, il a évoqué le non-respect par les autorités mexicaines de leurs obligations internationales relativement aux droits fondamentaux des Yaqui, s'agissant notamment de leurs droits fonciers, économiques et culturels et de leurs droits à la vie, à la liberté et à la sécurité. Selon certaines organisations non gouvernementales, il faudrait principalement mettre sur pied des mécanismes de reconnaissance et de protection des titres et droits fonciers autochtones au Mexique et plus particulièrement assurer une démarcation des terres yaqui et le droit des Yaqui à l'eau. Il faudrait adopter des lois reconnaissant la personnalité juridique du gouvernement exercé par les autorités traditionnelles yaqui et mettre un terme à tout projet de développement jusqu'à obtention d'un consentement libre, préalable et éclairé des populations concernées. Enfin, le rapporteur a évoqué l'affaire Méndez Vázquez.

Relevant que le rapport présenté par le Mexique rend compte des efforts déployés par le pays pour répondre aux problématiques diverses et variées liées aux migrants, M. Murrillo Martinez a souhaité obtenir des informations détaillées sur la participation de membres des forces nationales et autres autorités à des trafics liés à la migration.

Un autre membre du Comité a estimé que le rapport du Mexique, qui fait 101 pages, fournit beaucoup d'informations générales, notamment pour ce qui a trait à la promotion des droits des peuples autochtones, mais manque de données concrètes d'ordre pratique. Cet expert a en outre relevé que les observations de la délégation mexicaine sont marquées par la franchise; elles reconnaissent les stéréotypes et préjugés existant au sein de la population à l'égard des peuples autochtones. Néanmoins, a poursuivi l'expert, la non-présentation de plaintes pourrait être révélatrice d'une peur de représailles ou d'un manque de confiance dans les autorités de police et de justice, voire d'un manque d'intérêt de ces mêmes autorités relativement aux plaintes déposées pour discrimination raciale.

Tous les programmes élaborés pour lutter contre la discrimination à l'égard des peuples autochtones ne sauraient occulter le fait que 80 % des autochtones du Mexique sont analphabètes, a fait observer un autre expert. Pays féru de football, le Mexique a-t-il constaté des discriminations dans le domaine du sport, a-t-il demandé? Un autre membre du Comité a déploré les arrestations d'individus innocents, s'agissant en particulier d'autochtones.

Un expert a insisté sur la nécessité d'harmoniser les lois en vigueur aux différents niveaux de gouvernement (fédéral, étatique et municipal). Cet expert a en outre soulevé la question des droits linguistiques des peuples autochtones. Par ailleurs, a-t-il poursuivi, seuls une quinzaine d'Etats s'expriment sur les droits des peuples autochtones à la terre. Cet expert a en outre souhaité savoir si le nouveau découpage électoral avait débouché sur l'élection de davantage de représentants issus des communautés autochtones.

Dès 2002, le Mexique a accepté la procédure de communications prévue en vertu de l'article 14 de la Convention, mais, à ce jour, aucune plainte n'a été reçue, alors même que l'État mexicain admet qu'il y a discrimination, a relevé, perplexe, un expert.

Une experte a recommandé au Mexique d'édicter des mesures spécifiques pour les travailleurs migrants, de les traiter avec dignité et d'enregistrer les enfants de ces travailleurs à la naissance. Elle a également recommandé au pays de renoncer à faire appel à l'intervention de l'armée dans des situations de sécurité civile et de lutter contre l'impunité dont les militaires semblent jouir.

Réponses de la délégation mexicaine

La délégation mexicaine a indiqué que le Gouvernement est pleinement engagé dans une politique qui vise à enquêter sur toutes les atteintes aux droits de l'homme et à les sanctionner. Elle a rappelé que le Gouvernement affronte aujourd'hui « la barbarie de la criminalité transnationale organisée » et a souligné que le Congrès a adopté une législation capitale en matière de promotion et de protection des droits de l'homme. Des programmes de formation sont obligatoires pour tous les agents de la fonction publique, a-t-elle insisté. La délégation a reconnu l'existence de problèmes de différentes natures dans le pays quant au respect des droits de l'homme, admettant notamment l'existence de lacunes législatives auxquelles le Gouvernement s'efforce de remédier.

La délégation a par ailleurs souligné que les dispositions constitutionnelles sont d'application directe au Mexique et que la mise en œuvre des traités n'est pas soumise à l'approbation d'une loi secondaire; ils s'appliquent ex officio. Le pays a aligné son texte constitutionnel sur les traités internationaux auxquels il a souscrit, a-t-elle ajouté. Les jugements découlant d'un recours en amparo constituent une procédure simple et rapide, a par ailleurs rappelé la délégation.

Depuis 2007, année d'adoption de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, plusieurs lois ont été adoptées au Mexique en vue de favoriser la consultation des communautés autochtones ainsi que la participation accrue des femmes autochtones aux processus de prise de décision, a poursuivi la délégation. En 2004, dix critères ont été adoptés pour définir les districts pouvant être considérés comme districts autochtones. Actuellement, a par ailleurs indiqué la délégation, neuf députés fédéraux s'identifient comme autochtones. D'autre part, 418 municipalités mexicaines sont régies par le droit coutumier autochtone. C'est aux partis politiques qu'il incombe d'établir des quotas pour les femmes et les autochtones sur leurs listes de candidats, a en outre expliqué la délégation. Pour les élections, il est désormais obligatoire de garantir un quota aux femmes, a-t-elle précisé, insistant sur le souci constant du Gouvernement de faire de la parité entre les sexes une réalité dans tous les domaines.

Evoquant les conflits dans les régions minières, en particulier celui concernant la communauté yaqui, la délégation a déclaré que le droit à l'eau est une garantie fondamentale pour tous les Mexicains; la Constitution a été amendée pour garantir à chaque citoyen l'accès à l'eau pour sa consommation de façon saine, équitable et continue. Les concessions minières accordées par le Gouvernement doivent toujours répondre aux critères établis par la législation et ne par porter préjudice à des tiers. Dans le cas de la communauté yaqui, a expliqué la délégation, il y a eu un conflit suivi d'une négociation autour d'un problème relatif à l'eau. Il y a des particularités dans ce contexte précis, car le territoire revendiqué par les Yaqui est historiquement revendiqué par d'autres autochtones, a-t-elle affirmé. Les plaintes relatives au conflit de l'eau sont étudiées par des organismes spécialisées et des groupes de travail, a poursuivi la délégation, ajoutant que la solution au problème est ralentie par des problèmes internes à la communauté yaqui.

S'agissant du consentement préalable (des communautés autochtones avant l'exécution de tout projet les affectant), la délégation a rappelé qu'il s'agit d'un droit constitutionnel. Tout ce qui concerne les autochtones doit obligatoirement faire l'objet d'une consultation avec eux, a-t-elle insisté, assurant que la consultation était une pratique quotidienne dans le pays. Depuis la mise en place, en 2005, d'un tel système de consultation, plus de trente consultations ont été menées avec des peuples autochtones concernant les politiques publiques en matière de développement, les sites sacrés de ces peuples ou encore des questions sociales et économiques. La consultation est une pratique appelée à s'étendre, conformément à la Convention n°169 de l'OIT, a insisté la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que les autochtones ont le droit d'appliquer leurs propres normes sous réserve qu'elles respectent les droits fondamentaux de l'homme et de la femme. Il existe plusieurs mécanismes d'accès des autochtones à la justice, a-t-elle poursuivi. En octobre 2006, les juges autochtones ont tenu un congrès sur les institutions chargées de régler les litiges au sein de leurs communautés et entre communautés.

Au Mexique, a précisé la délégation, tout juge a l'obligation d'accorder à l'autochtone, qu'il parle ou non l'espagnol, un interprète.

En réponse aux préoccupations exprimées au sujet du caractère structurel que revêtirait la discrimination raciale au Mexique, la délégation a indiqué que l'ancienne conception très homogène de la « mexicanité » - métisse, hétérosexuelle, religieuse et reposant sur l'importance de la masculinité – est progressivement remplacée par des concepts d'égalité, de reconnaissance de la nature plurielle de la nation et de prise en compte transversale des droits de la femme.

S'agissant des droits des migrants, la délégation a mis en exergue les programmes de formation et de professionnalisation mis en place à l'intention des fonctionnaires intervenant dans ce domaine. La législation concernant ces questions a aussi été réformée et l'Institut national de la migration met en œuvre, depuis 2003, un programme axé sur la dignité des migrants. Concernant les migrants victimes ou témoins d'un délit commis sur le territoire national, l'État mexicain a prévu une série de mesures de protection en leur faveur, notamment à travers la mise à disposition de centres d'accueil dits refuges humanitaires. Des mesures à court, moyen et long termes sont aussi prises pour prévenir les enlèvements de migrants, a ajouté la délégation.

Questions complémentaires de membres du Comité

Un expert a déploré le caractère par trop général du rapport, faisant observer que cela empêche le Comité de saisir s'il y a eu des résultats tangibles, une évolution positive, sur le terrain suite aux réformes législatives entreprises. Les compagnies pétrolières et le Gouvernement mexicain comptent-ils octroyer des compensations financières aux communautés autochtones qui en solliciteraient, a-t-il demandé? Qu'en est-il de l'aide financière aux organisations non gouvernementales qui se consacrent à la lutte contre la discrimination raciale et à la protection des minorités? Ce même expert a regretté l'absence d'informations sur la communauté musulmane au Mexique. Dans quelle mesure cette communauté vit en osmose avec d'autres communautés religieuses et quels sont ses rapports avec l'État mexicain, a-t-il demandé?.

Un autre membre du Comité a relevé que le Mexique se trouvait au « croisement de trois grandes cultures » et qu'il s'efforçait d'embrasser harmonieusement toutes ses composantes. Il a toutefois relevé la perception négative dont fait l'objet la population autochtone.

Réponses complémentaires de la délégation

La délégation a rappelé que plusieurs procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme avaient effectué des visites au Mexique. Les violations dont font l'objet les droits des défenseurs des droits de l'homme et des journalistes demeurent préoccupantes dans le contexte actuel, a reconnu la délégation.

La délégation a par ailleurs assuré que le Gouvernement mexicain s'emploierait à prendre en compte chacune des observations et recommandations finales qui seront formulées par les membres du Comité, y compris celles afférentes aux droits des peuples autochtones.

Le profilage racial n'existe pas d'une façon systématique et les autorités ne prenent pas leur décision en fonction du « faciès » des individus, a par ailleurs assuré la délégation. Le Mexique était en train de procéder à une « révolution juridique » en matière de droits de l'homme, l'objectif étant d'éviter les excès de pouvoir et de promouvoir l'élargissement des droits à tout un chacun. A titre d'exemple, la délégation a souligné que ne sont plus admises comme preuves dans les procédures de justice les confessions obtenues sans avocat et sans procédure de défense.

La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur l'existence dans le pays d'une offre de formation multilingue et multiculturelle; il existe un baccalauréat et des universités interculturels qui concernent d'ores et déjà plus de 18 000 étudiants dans des régions autochtones sur l'ensemble du territoire.

De par son emplacement géographique, le Mexique est confronté à tous les aspects du phénomène migratoire, a d'autre part souligné la délégation. Le Gouvernement a mis en place un vaste réseau consulaire et développé des services variés d'aide aux détenus, d'assistance pour les affaires liées à la peine capitale, de refuges de transit et de guichets de santé. La délégation a néanmoins admis l'existence d'une tendance au durcissement de certaines lois locales par rapport aux migrants.

Selon le dernier recensement général de la population (2010), a en outre indiqué la délégation, la population est à 82% catholique. Environ 3800 personnes sont enregistrées comme musulmanes, a-t-elle ajouté, précisant que les membres de cette communauté sont représentés, sur une base paritaire, dans les conseils des espaces religieux. Un débat est en cours au Congrès pour une réforme des libertés religieuses, a par ailleurs indiqué la délégation.

Enfin, la délégation a assuré que le Gouvernement mexicain reconnaît pleinement le travail des organisations non gouvernementales et des associations et groupes de défenseurs des droits de l'homme. Plus de 12 000 organisations ont été répertoriées et nombre d'entre elles sont appuyées et bénéficient d'une aide financière, a-t-elle fait valoir.

La révolution juridique que vit le Mexique va établir un nouveau cadre juridique très positif qu'il faudra approfondir aux niveaux des États fédérés et des municipalités, a conclu la délégation.

Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires en fin de séance, M. PASTOR ELIAS MURILLO MARTINEZ, rapporteur du Comité chargé de l'examen du rapport du Mexique, a salué l'esprit autocritique dont a fait preuve la délégation mexicaine et s'est réjoui du « saut qualitatif » opéré dans le pays ces dernières années. Des affaires emblématiques, comme celle de M. Hugo Sanchez, illustrent les difficultés auxquelles se heurtent le pays, mais également la révolution juridique qui est en marche. Le rapporteur a exprimé le souhait que les investissements menés dans les territoires autochtones, comme dans le Chiapas, s'opèrent en respectant les principes de consultation et de consentement éclairé des communautés et peuples concernés. Pour ce qui est des personnes d'ascendance africaine, M. Murillo Martinez a plaidé en faveur de la poursuite d'activités ciblant ce groupe de la population. Enfin, le rapporteur a évoqué la situation de violence due au narcotrafic et a formé le vœu qu'elle trouve une solution pacifique et durable.

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