Skip to main content

Communiqués de presse Conseil des droits de l’homme

Le Conseil des droits de l'homme porte son attention sur les droits des peuples autochtones et sur la préservation des langues autochtones

20 Septembre 2011

Conseil des droits de l'homme

APRES-MIDI  

20 septembre 2011

Le Conseil des droits de l'homme a consacré ses travaux, cet après-midi, à l'examen des droits de l'homme des peuples autochtones.  Il a d'abord porté son attention sur des rapports qui lui sont soumis à sa demande sur les droits de l'homme des populations autochtones, avant de tenir une réunion-débat consacrée au rôle des langues et de la culture dans la protection du bien-être et de l'identité des peuples autochtones.

M. James Anaya, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme et des libertés fondamentales des populations autochtones, a présenté son rapport annuel en soulignant les importantes difficultés qui persistent s'agissant de la mise en œuvre au quotidien des droits contenus dans la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.  Il a indiqué que son rapport porte cette année en particulier sur les sociétés minières opérant en territoire autochtone ou à proximité, ainsi que sur les mission qu'il a menées dans la région Sápmi de la Norvège, de la Suède et de la Finlande, ainsi qu'au Guatemala, en Nouvelle-Zélande, en République du Congo et en Nouvelle-Calédonie.

Pour sa part, le Président du Mécanisme d'experts sur les peuples autochtones, M. Vital Bambanze a présenté l'étude menée par cette instance sur la participation des peuples autochtones aux processus de prises de décisions.  M. Shankar Limbu, Président du Conseil d'administration du Fonds volontaire des populations autochtones, a pour sa part présenté les travaux du Conseil d'administration du Fonds, soulignant les difficultés financières auxquelles il est confronté. 

Plusieurs délégations ont fait des déclarations, à titre de pays concernés par le rapport du Rapporteur spécial ou dans le cadre du débat interactif avec les experts: Guatemala, Nouvelle-Zélande, Congo, France, Costa Rica, Norvège, Finlande, Suède, Guatemala, Bolivie, Union européenne, Mexique, Pérou et Danemark.  Les institutions des droits de l'homme du Guatemala, de la Nouvelle-Zélande et de la Norvège - pays concernés par le rapport du Rapporteur spécial - ont également fait des déclarations.

Ouvrant la réunion-débat consacrée au rôle des langues et de la culture dans la protection du bien-être et de l'identité des peuples autochtones, Mme Kyung-wha Kang, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a observé que 45% des 6000 langues parlées dans le monde sont menacées de disparition: or, lorsqu'une langue autochtone disparaît, c'est une partie du patrimoine mondial qui s'efface.  Il est urgent de mobiliser toutes les ressources nécessaires pour éviter la disparition de ces langues.

Les quatre panélistes de la réunion-débat étaient, outre M. Anaya et M. Bambanze, le Coordinateur principal dans le domaine de la santé aborigène de l'Australie, M. Lester Coyne, et le Directeur général de l'Institut national pour les langues autochtones du Mexique, M. Javier López Sánchez.

Les délégations des pays suivants ont participé à la réunion-débat: Mexique, Australie, Guatemala, Norvège, Canada, Bolivie, Népal, Chili, Union européenne, Pérou, Brésil, Nouvelle Zélande, Paraguay, Finlande, Fédération de Russie, Danemark et Honduras.  Les organisations non gouvernementales suivantes ont également pris la parole: European Bureau for Lesser Used Languages, International Work Group for Indigenous Affairs, International Committee for the Indians of the Americas et Mouvement contre le racisme et pour l'amitié des peuples.


Demain à 9 heures, le Conseil examinera les rapports concernant l'Examen périodique universel s'agissant de la Belgique, du Danemark et des Palaos.


Débat interactif sur les droits de l'homme des populations autochtones

Présentation de rapports

M. JAMES ANAYA, Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme et des libertés fondamentales des populations autochtones, a présenté son rapport annuel en faisant part de ses quatre objectifs fondamentaux.  Au chapitre d'abord de la promotion des bonnes pratiques, le Rapporteur spécial a fait savoir que d'importantes difficultés demeurent s'agissant de la mise en œuvre au quotidien des droits contenus dans la déclaration sur les droits des peuples autochtones.  À cet égard, le Rapporteur spécial s'est attelé à la rédaction de recommandations et d'observations relatives à l'activité législative régissant les droits fonciers et à la jouissance des ressources naturelles des populations autochtones du Suriname. 

Au chapitre des rapports de pays, le Rapporteur spécial a fait savoir que ses travaux sur la situation du peuple sâme, qui vit à cheval sur les frontières de la Norvège, de la Suède et de la Finlande, reposent sur des informations communiquées par les parlements sâmes de ces trois pays, en collaboration avec les gouvernements concernés.  Le Rapporteur spécial s'est félicité de constater que les autorités nationales accordent un intérêt soutenu à ces questions: à bien des égards, les initiatives prises dans ces trois pays sont exemplaires, notamment la rédaction d'une «Convention sâme nordique».  Reste que des efforts supplémentaires devront être consentis pour que le peuple sâme soit en mesure d'exercer pleinement son droit à l'autodétermination entre et au sein des États concernés.  M. Anaya a aussi fait état de ses travaux sur la situation des peuples maoris en Nouvelle-Zélande, des Kanaks en Nouvelle-Calédonie et des peuples autochtones en République du Congo.

Depuis la présentation de son dernier rapport, le Rapporteur spécial a poursuivi la collecte d'informations et la formulation de recommandations relatives à des cas spécifiques de violations des droits de l'homme de populations autochtones.  Le rapport contient ainsi des renseignements sur les recommandations du Rapporteur spécial portant, entre autres, sur la situation du projet hydroélectrique Gibe III en Éthiopie; des villages bédouins non-reconnus du désert du Néguev; des droits coutumiers au Sarawak; ou encore la situation des peuples autochtones américains devant la question de la fabrication de neige artificielle à partir d'eaux usées des San Francisco Peaks, aux États-Unis.  Toujours dans le cadre de l'examen des cas individuels, le Rapporteur spécial a effectué des visites au Costa Rica et au Guatemala.  Enfin, dernier axe de son rapport, le Rapporteur spécial a fait état de l'avancement d'une étude thématique dont il est chargé, portant sur le respect des droits des populations autochtones dans le cadre des projets d'extraction minière à grande échelle sur des terres appartenant à ces populations.  Le rapport contient à ce sujet un résumé des réponses des États au questionnaire que le Rapporteur spécial a préparé sur ce problème.  Ces réponses témoignent de la nécessité de changer l'état des choses, faute de quoi les droits des peuples autochtones ne seront pas vraiment respectés par les États et les entreprises concernés.  La première étape d'un tel changement serait de rassembler les peuples autochtones, les États et les entreprises autour d'un consensus de base: à défaut, les peuples autochtones sont condamnés à subir encore des violations de leurs droits collectifs et individuels, tandis que les entreprises d'extraction et d'exploitation des ressources naturelles resteront confrontées à de graves problèmes sociaux et économiques.

Le rapport du Rapporteur spécial sur les sociétés minières opérant en territoire autochtone ou à proximité (A/HRC/18/35), résume les activités menées pendant la troisième année du mandat du Rapporteur spécial.  Il analyse l'impact des activités des sociétés minières opérant en territoire autochtone ou à proximité, sur la base des réponses à un questionnaire distribué aux gouvernements et à des représentants des peuples autochtones, des entreprises et de la société civile. 

Un additif au rapport (A/HRC/18/35/Add.3 en espagnol) contient des observations sur la situation des droits des peuples autochtones du Guatemala en rapport avec des projets d'exploitation minière et d'autres types de projets sur leurs territoires traditionnels.  D'autres additifs au rapport rendent compte des missions effectuées par le Rapporteur spécial dans la région Sápmi de la Norvège, de la Suède et de la Finlande (A/HRC/18/35/Add.2) ainsi qu'en Nouvelle-Zélande (A/HRC/18/35/Add.4), en République du Congo (A/HRC/18/35/Add.5) et en Nouvelle-Calédonie (France) (A/HRC/18/35/Add.6).  Le document A/HRC/18/35/Add.1 concerne les communications entre le Rapporteur spécial et les gouvernements.

M. SHANKAR LIMBU, Président du Conseil d'administration du Fonds volontaire des populations autochtones, a rappelé que le mandat du Fonds consiste à aider les représentants d'organisations et de communautés autochtones à participer aux délibérations de l'Instance permanente sur les questions autochtones.  Depuis sa création, le Fonds a soutenu plus de 1400 bénéficiaires, et un grand nombre d'entre eux ont directement participé à des négociations avec des États membres et des experts des Nations Unies au sujet de la Déclaration des Nations Unies sur les droits de peuples autochtones. 

M. Limbu a rappelé que la résolution 12/13 du Conseil des droits de l'homme datée du 12 octobre 2009 demandait au Haut-Commissariat de produire un rapport sur les implications pratiques d'une modification du mandat du Fonds volontaire (document A/HRC/15/38).  À la suite de ce rapport, l'Assemblée générale a décidé, par sa résolution 65/198, d'étendre le mandat du Fonds volontaire pour lui permettre d'aider les représentants des populations autochtones à participer aux sessions du Conseil des droits de l'homme et des organes de traités relatifs aux droits de l'homme. 

La participation directe des représentants des populations autochtones de toutes les régions du monde aux travaux du Conseil des droits de l'homme est cruciale, a souligné M. Limbu.  Elle permet de poursuivre le dialogue constructif établi depuis des décennies entre les États membres des Nations Unies, les titulaires de mandat au titre des Procédures spéciales et les populations autochtones.  Ce dialogue a pour but de concrétiser au niveau local les principes contenus dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des populations autochtones, les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et les recommandations issues des organes de traités et de l'Examen périodique universel, a-t-il souligné.

Lors de sa session de février 2011, en raison de ses capacités financières limitées, le Conseil d'administration n'a été en mesure de financer que 54 voyages sur les 564 demandes reçues.  Au nom du Conseil d'administration, M. Limbu a exprimé sa gratitude aux pays qui ont généreusement contribué au Fonds volontaire et appelé tous les gouvernements et entités privées à considérer de contribuer au Fonds volontaire, si possible cette année encore, afin de permettre au Fonds de remplir son mandat l'année prochaine.  Bien que le Conseil d'administration se soit assuré de l'utilisation la plus efficace possible des fonds disponibles, il doit reconnaître que les contributions baissent dramatiquement tandis que les demandes augmentent chaque année.  Au cours des quatre dernières années, le Fonds a connu une baisse de 70% des contributions reçues, ce qui représente un défi extraordinaire, a-t-il noté.  M. Limbu a rappelé au Conseil que le Fonds n'existe que grâce aux contributions volontaires faites par les gouvernements.

Les communautés autochtones continuent d'être à la marge de la société, sans voix et constituant le groupe le plus pauvre et le plus vulnérable.  Tout en rappelant que le mandat du Fonds a été établi pour permettre aux populations autochtones de faire entendre leur voix dans les processus des Nations Unies, M. Limbu a déclaré que toute contribution, petite ou grande, peut faire la différence pour les populations autochtones et peut les aider à faire respecter leurs droits de l'homme et leurs libertés fondamentales.

M. VITAL BAMBANZE, Président du mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones, a affirmé que le dialogue interactif est une excellente occasion de faire connaître le travail du mécanisme d'experts et de mettre en lumière la situation des peuples autochtones.  Il a rappelé que le mécanisme d'experts à d'ores et déjà conduit deux études sur les droits de ces peuples, l'une sur l'éducation et l'autre sur la participation aux processus de prises de décisions.  Les deux études se penchent en particulier sur les obligations qu'ont les États dans la promotion et la protection des langues et des droits culturels des peuples autochtones.  Le mécanisme a fondé son analyse sur la Déclaration relative aux droits des peuples autochtones, adoptée en 2007, qui applique à ces peuples les normes juridiquement contraignantes relatives aux droits de l'homme.  Le rapport se penche également sur la participation des peuples autochtones aux prises de décisions au niveau des pays où ils vivent et analysé l'interprétation de leurs droits dans ce contexte, du devoir de les consulter et d'obtenir leur consentement éclairé.  Le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones et le représentant de l'Instance permanente de l'ONU sur les questions autochtones ont également participé à certaines réunions du mécanisme d'experts.  Le mécanisme se propose de poursuivre ses activités, à la demande du Conseil, et entend communiquer les conclusions de ses travaux et échanger ses bonnes pratiques avec d'autres mécanismes et avec les entreprises.  Une étude portant sur le droit des peuples autochtones dans le secteur d'extraction minière a aussi été menée.  M. Bambanze a indiqué que le mécanisme travaille sur des activités visant à disséminer les informations sur son travail.

Le Conseil est saisi du rapport du Mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones (A/HRC/18/43, à paraître en français) sur les travaux de sa quatrième session.

Le rapport final sur l'étude sur les peuples autochtones et le droit de participer à la prise de décisions (A/HRC/18/42) complète le rapport d'étape du Mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones (A/HRC/EMRIP/2010/2) en fournissant des exemples de bonnes pratiques de participation des peuples autochtones à différents niveaux de la prise de décisions.  Elle comprend aussi l'avis no 2 (2011) du Mécanisme d'experts: Les peuples autochtones et le droit de participer à la prise de décisions.  La présente étude doit être lue parallèlement au rapport d'étape.

Le Conseil est par ailleurs saisi du rapport annuel du Haut-Commissaire sur les droits des peuples autochtones (A/HRC/18/26), qui porte sur les activités du Haut-Commissariat et des organes et mécanismes des droits de l'homme dans ce domaine.

Pays concernés et institutions des droits de l'homme concernées

M. CARLOS RAMIRO MARTÍNEZ ALVARADO (Guatemala) a remercié le Rapporteur spécial, M. Anaya, de sa visite dans son pays et des recommandations qu'il a formulées à cette occasion.  Le développement des peuples autochtones est essentiel à tout effort de développement social plus général, a observé le représentant.  Il importe à cet égard que les populations concernées participent directement aux décisions les concernant.  Tous les gouvernements qui se sont succédés depuis le retour de la démocratie en 1986 ont légiféré en ce sens, a assuré le représentant.  Le gouvernement actuel a formulé pour sa part une proposition de consultations systématiques des organisations représentatives des populations concernées.  Cette proposition, pour l'instant bloquée par des recours juridiques, vise à assurer la participation de toutes les communautés autochtones au niveau des décisions politiques et administratives.  Le Gouvernement continuera de consentir tous les efforts nécessaires en vue d'une parfaite intégration des droits de l'homme.

Précisant une information contenue dans le rapport de M. Anaya, la délégation a indiqué que la Cour suprême a jugé inconstitutionnelles les consultations locales organisées par les municipalités de San Miguel, Ixtahuacan et Sipacapa au sujet de l'exploitation de la mine Marlin, du fait que les activités économiques en cause revêtent un intérêt national.

M. SERGIO FERNANDO MORALES ALVARADO, Défenseur du peuple et des droits de l'homme du Guatemala, a souscrit aux recommandations du Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, M. James Anaya, qui s'est penché sur les atteintes aux droits de l'homme des peuples autochtones, ainsi que sur les activités et mesures ayant eu un impact sur la vie et l'environnement des peuples autochtones.  Le Rapporteur souligne que le climat d'instabilité interne rend difficile la consultation de ces peuples, et recommande la mise en place d'un mécanisme spécial favorisant leur participation à la prise de décision, a relevé M. Morales.  M. Anaya a encouragé le gouvernement à trouver des solutions et à l'établissement d'un dialogue entre communautés et civilisations autochtones aux fins de favoriser la paix et le développement de ces peuples, a-t-il ajouté.  Le Rapporteur spécial a également exhorté le Gouvernement à mener une étude sur les conséquences de l'extraction pour les communautés autochtones afin d'éviter les violations des droits.  M. Morales a appelé la communauté internationale à aider le Gouvernement du Guatemala dans la mise en œuvre des recommandations formulées par le Rapporteur spécial, en particulier celles liées au dialogue et aux consultations sur l'importance de l'intégration des droits de l'homme, en particulier des peuples autochtones, dans le domaine du développement économique, social et culturel du pays.

MME DELL HIGGIE (Nouvelle-Zélande) s'est félicitée de la présentation du rapport du Rapporteur spécial relatif à sa mission en Nouvelle-Zélande en juillet dernier.  La Nouvelle-Zélande apprécie le travail du Rapporteur spécial, qui identifie les progrès et les problèmes qui doivent encore être traités.  Le Gouvernement travaille actuellement à la mise en œuvre de certaines recommandations contenues dans le rapport.  La représentante a indiqué que la relation entre le Gouvernement de la Nouvelle-Zélande et le peuple Maori était régie par le Traité de Waitangi, de 1840, qui affirme l'égalité en droit des Maoris et des Néo-Zélandais.  La Nouvelle-Zélande est fière du processus en cours visant à résoudre les conflits historiques liés aux violations dudit Traité, processus qui devrait être terminé d'ici à 2014.  Le Gouvernement néo-zélandais salue aussi l'opinion du Rapporteur spécial au sujet de la participation des Maoris aux décisions les concernant, en notant que 22 des 122 membres du Parlement s'identifient comme étant maoris.  En outre, les organes de gouvernance locale et nationale impliquent de plus en plus les Maoris, notamment dans la cogouvernance des ressources naturelles. 

La représentante néo-zélandaise a affirmé que son pays était conscient des défis majeurs qui restaient à relever au sujet de la situation des Maoris.  Comme l'a noté le Rapporteur spécial, les Maoris ont généralement un statut socio-économique plus bas et souffrent conditions sanitaires relativement mauvaises.  Le Gouvernement néo-zélandais salue l'attention portée par le Rapporteur spécial sur les forces et les faiblesses des efforts de la Nouvelle-Zélande pour aplanir ces écarts grâce au dialogue et au partage des valeurs d'équité, d'égalité et de respect, dans le cadre du Traité de Waitangi. 

MME ROSSLYN NOONAN, de la Commission des droits de l'homme de la Nouvelle-Zélande,  s'est félicitée du rapport de M. Anaya sur la situation des Maoris en Nouvelle-Zélande.  Elle a salué la capacité du Rapporteur spécial de prendre compte des difficultés les plus subtiles.  La représentante a demandé au Gouvernement de prendre un certain nombre de mesures pour améliorer la situation sociale, politique et économique des Maoris: faciliter leur participation à la gouvernance locale; renforcer les effectifs d'enseignants en langue maori et améliorer le contenu pédagogique des enseignements dans cette langue; combler les lacunes en matière sanitaire, d'une manière culturellement acceptable; et résoudre au problème des taux élevés d'incarcération des Maoris.  La Commission a lancé pour sa part une campagne de sensibilisation à la participation politique des Maoris.  Elle préconisera la mise en œuvre des recommandations du Rapporteur spécial. 

M. LUC-JOSEPH OKIO (République du Congo) s'est félicité de la visite dans son pays du Rapporteur spécial M. Anaya et son équipe, et souligné que son pays s'est historiquement soucié de prendre en compte et de protéger les droits des peuples autochtones.  L'ère de colonisation est venue avec son lot de discriminations forcées, que le gouvernement de l'indépendance s'est employé à supprimer, a déclaré le représentant.  Les populations autochtones sont victimes de la dureté des conditions économiques au même titre que les autres couches de la population, dont plus de 50 % vit avec moins d'un dollar par jour.  C'est pourquoi l'amélioration de la situation socioéconomique des autochtones est étroitement liée au développement général du pays.  Le Gouvernement a déployé des efforts au plan normatif pour la promotion et la protection des droits des peuples autochtones, notamment un «plan d'action 2009-2025».  Il prend note des recommandations faites par M. Anaya.  Le représentant a souhaité que son pays bénéficie d'un appui constant de tous ses partenaires en vue de la mise en œuvre de la loi portant promotion et protection des peuples autochtones

M. JEAN-BAPTISTE MATTÉI (France) a salué la visite du Rapporteur spécial en Nouvelle-Calédonie et à Paris en juin dernier.  La France reste attachée aux principes d'effectivité des droits de l'homme et mène une politique internationale active en faveur de la reconnaissance des peuples autochtones et de leur pleine jouissance des droits fondamentaux.  Le représentant a indiqué que son pays a su intégrer depuis longtemps les pratiques, les usages et les savoirs locaux des communautés qui vivent outre-mer.  Actuellement en phase active de mise en œuvre, l'Accord de Nouméa fait écho aux dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les populations autochtones, a-t-il souligné.  Le représentant a en outre indiqué que le déséquilibre affectant le développement économique et social des trois provinces néo-calédoniennes est un sujet de préoccupation majeure pour le Gouvernement français, qui s'efforce de rééquilibrer les infrastructures, les services sociaux et les possibilités d'emploi dans les trois provinces.  En conclusion, le représentant français a affirmé que son gouvernement sera très attentif aux recommandations du Rapporteur spécial.

M. CHRISTIAN GUILLERMET-FERNÁNDEZ (Costa Rica) a déclaré que c'est avec respect et optimisme que son pays a accueilli le rapport de M. Anaya.  Il a rappelé que le Costa Rica a ratifié la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail sur les droits des peuples autochtones et tribaux, un instrument qui encadre désormais la législation nationale dans la matière.  La loi costaricienne garantit notamment l'inviolabilité des «réserves» autochtones définies par une loi adoptée dès 1977.  S'agissant du projet hydroélectrique «El Diquis», mentionné dans le rapport du Rapporteur spécial, M. Anaya souligne que la procédure prévoit désormais une consultation des populations autochtones concernées, une procédure qui sera conforme tant aux recommandations du Rapporteur spécial qu'aux principes de la Convention n°169 de l'OIT.  Le Gouvernement costaricien espère pouvoir compter sur le soutien d'experts capables de renforcer la capacité – technique notamment ­– de négociation des populations autochtones qui prendront part à la consultation.  D'une manière générale, les autorités favorisent l'ouverture d'un espace de dialogue ouvert et franc avec les peuples autochtones, en vue de leur assurer une meilleure place dans les décisions les concernant. 

M. STEFFEN KONGSTAD (Norvège) a appuyé l'approche de M. Anaya s'agissant de la manière d'aborder les activités des industries extractives.  Cette approche est basée sur le cadre de «protection, respect et réparation», développé par le Représentant spécial du Secrétaire général chargé de la question des droits de l'homme et des sociétés transnationales et autres entreprises, M. John Ruggie, qui jette des bases d'une régulation des activités des entreprises, en coopération et consultation avec les peuples autochtones.  Le rapport de M. Anaya offre également des exemples de bonnes pratiques et de processus de consultation encadrés par les institutions en charge des questions autochtones.  Le représentant a salué les efforts visant à l'élaboration de directives et de principes, suggéré par le Professeur Anaya, qui seront soumis au Conseil des droits de l'homme en 2013.  Le représentant a également commenté le dernier rapport du mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones, se félicitant des exemples de bonnes pratiques qu'il comporte.  Il a enfin relevé que le rapport de M. Anaya relatif à sa visite dans les régions sâmes de Finlande, Suède et Norvège qualifie les procédures de consultation dans ce dernier pays, lancées en 2005, comme autant de bonnes pratiques. 

MME KATHARINA ROSE, du Centre norvégien des droits de l'homme, a rappelé la teneur du paragraphe 75 du rapport du Rapporteur spécial, qui traite du droit à l'autodétermination du peuple sâme et recommande à l'État norvégien de s'assurer que les décisions affectant les Sâmes ne soient pas prises sans leur consentement préalable, libre et informé.  Le Centre norvégien des droits de l'homme regrette que, malgré cette recommandation, le Gouvernement a réduit la participation des s dans les administrations locales.  En deuxième lieu, le paragraphe 80 du rapport recommande à la Norvège de prendre des mesures pour garantir les droits de pêche de la population sâme, a relevé la représentante.  À cet égard, il est positif de noter que le Gouvernement norvégien et le Parlement sâme ont abouti à un accord sur la régulation des droits de pêche des Sâmes dans les zones côtières.  Toutefois, la participation des Sâmes à la régulation de la pêche se limite à une représentation au sein d'un organe consultatif, ce qui, selon la représentante, n'est pas conforme aux recommandations du Rapporteur spécial.  Troisièmement, au paragraphe 88 du rapport, le Rapporteur spécial encourage les États nordiques à promouvoir la prise de conscience du public au sujet de la population sâme, que ce soit à travers les médias ou encore l'éducation.  Le Centre norvégien des droits de l'homme encourage le Gouvernement norvégien à mettre en œuvre effectivement des mesures pour lutter contre les attitudes et les pratiques discriminatoires à l'encontre des Sâmes.  En conclusion, la représentante a noté qu'une étape positive avait été franchie avec la réouverture des négociations sur la Convention sâme nordique. 

M. HANNU HIMANEN (Finlande) a assuré que les droits des peuples autochtones sont prioritaires dans les politiques nationales finlandaises.  Le représentant a observé certains signaux positifs dans le domaine de la protection des droits des Sâmes en général, saluant à cet égard le travail important de plusieurs mécanismes des Nations Unies.  Il a remercié le Rapporteur spécial pour son travail systématique en faveur des droits des peuples autochtones et pour son rapport qui présente des directives utiles pour améliorer la situation des Sâmes.  Les autorités finlandaises à tous les niveaux sont, de par la loi, tenues de négocier avec le Parlement sâme toutes les dispositions qui pourraient affecter directement les Sâmes, notamment l'exploitation des ressources naturelles, a indiqué le représentant.  Le représentant a aussi fait valoir que les négociations sur le contenu de la future Convention sâme nordique font intervenir, à parité, des représentants des gouvernements nationaux des trois pays nordiques concernés aussi bien que des trois parlements sâmes.  Le nouveau Gouvernement finlandais est en train de rédiger un nouveau plan d'action en matière des droits de l'homme: son volet relatif aux peuples autochtones tiendra pleinement compte des recommandations du Rapporteur spécial.  Le représentant s'est enfin félicité de l'étude thématique rédigée par le mécanisme d'experts au sujet de la participation politiques des peuples autochtones, estimant qu'elle contribuera à l'amélioration de la situation dans ce domaine.

M. JAN KNUTSSON (Suède) a déclaré que son pays tient actuellement des négociations sur un projet de loi visant à l'autonomisation du peuple sâme.  Ainsi le Parlement sâme s'est-il vu octroyer de nouveaux droits, notamment en matière d'élevage de rennes.  La Constitution suédoise a récemment été amendée pour reconnaître les Sâmes comme «peuple» à part entière.  S'agissant de la recommandation visant la Convention sâme nordique, le représentant a indiqué que son pays avait toujours consenti des efforts pour l'adoption d'un tel instrument. 

Débat interactif

MME LUISA BONILLA DE GALVÃO DE QUEIROZ (Guatemala) s'est félicitée du travail exhaustif réalisé par le Rapporteur spécial sur la participation des autochtones aux processus de prise de décision.  À cet égard, l'engagement du système des Nation Unies et de tous les acteurs impliqués dans la réalisation des objectifs de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones est très encourageant.  La participation des populations autochtones à la vie publique est cruciale, a-t-elle souligné.  La représentante a fait valoir les efforts des autorités et de la société civile de son pays en faveur des populations autochtones.  Le Guatemala et le Mexique présenteront, au cours de cette session du Conseil, un projet de résolution sur les ressources naturelles des populations autochtones. 

MME MAYSA UREÑA MENACHO (Bolivie) a déclaré que son pays se félicite des rapports présentés ce jour.  La représentante a encouragé le Rapporteur spécial M. Anaya à œuvrer en vue de l'application universelle de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones.  Elle a prié les trois experts présents de participer à la Conférence mondiale sur les peuples autochtones qui se tiendra en 2014.  La représentante s'est félicitée que l'étude sur la participation des peuples autochtones aux décisions politiques mentionne les nombreuses mesures prises par le Gouvernement de la Bolivie dans ce domaine, s'agissant des droits civiques, du développement socioéconomique et de la protection des ressources naturelles en particulier.

MME ANNE KOISTINEN (Union européenne) a déclaré que les vingt-sept se sont engagés à défendre les droits de peuple autochtones, tout en saluant le travail du Rapporteur spécial, notamment en ce qui concerne la création d'un mécanisme de consultation tripartite: acteurs gouvernementaux, secteur privé et peuples autochtones.  Dans ce cadre, la représentante a demandé au Rapporteur spécial s'il avait des exemples concrets qui pourraient aider à trouver des solutions satisfaisantes pour tous les acteurs impliqués.  La représentante a ensuite estimé que les propositions du mécanisme d'experts sur les peuples autochtones sont d'une grande importance pour le Conseil.  Elle a demandé aux membres de ce mécanisme de dire comment ils envisagent leur participation à la prochaine Conférence mondiale sur les peuples autochtones.

MME LILIANA PADILLA RODRÍGUEZ (Mexique) a déclaré que le Gouvernement mexicain avait étudié avec intérêt le rapport final du Mécanisme d'experts concernant «les peuples autochtones et le droit de participer à la prise de décisions», avec un intérêt particulier pour les exemples de bonnes pratiques.  Le Mexique est convaincu qu'il est possible d'envisager l'adoption d'une norme internationale relative au droit des peuples autochtones à la prise de décision et à l'organisation de leur développement.  Au Mexique, un projet de loi envisage de conférer aux populations autochtones le droit à participer aux décisions les concernant.  Le Gouvernement du Mexique prend note des rapports présentés par le Rapporteur spécial et reconnaît que M. Anaya fait tout son possible pour promouvoir la réalisation des droits des peuples autochtones.

M. CARLOS ALBERTO CHOCANO BURGA (Pérou) a jugé important l'axe choisi par le Rapporteur spécial au sujet du renforcement de la participation des peuples autochtones à la prise de décisions les concernant.  Le représentant a dit appuyer en outre la proposition du Rapporteur spécial d'édicter des lignes directrices ou principes concrets facilitant l'adoption d'un consensus relatif à la manière de tenir compte des droits des peuples autochtones dans les projets d'extraction minière.  À ce propos, le Gouvernement péruvien a adopté, le 6 septembre dernier, une loi donnant effet au principe de consultation obligatoire des peuples autochtones dans toute décision les concernant, principe posé par la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail.  La même loi garantit la prise en compte des droits culturels des peuples autochtones.

Le représentant du Danemark a déclaré qu'outre l'Instance permanente sur les questions autochtones, le mécanisme d'experts est un élément important dans la défense des droits de ces derniers.  Elle s'est félicitée de la convergence des recommandations de ces deux entités.  La représentante a demandé au Rapporteur spécial comment il conçoit un futur mécanisme de consultation des peuples autochtones, notamment en ce qui concerne les activités d'extraction minière.  Par ailleurs, comment envisage-t-il de concrétiser les principes directeurs qu'il se propose d'élaborer?


Réunion-débat sur le rôle des langues et de la culture dans la promotion et la protection du bien-être et de l'identité des peuples autochtones

Introduction et exposés

MME KYUNG-WHA KANG, Haut-Commissaire adjointe aux droits de l'homme, a observé que, selon un rapport des Nations Unies, 45% des 6000 langues parlées dans le monde sont menacées de disparition: or, lorsqu'une langue autochtone disparaît, c'est une partie du patrimoine mondial qui s'efface.  La Haut-Commissaire adjointe a souligné les conséquences néfastes de la colonisation sur la survie de ces langues, en particulier en ce qu'elle a contribué à les faire disparaître par l'imposition d'une langue officielle.  Heureusement, certains États réhabilitent aujourd'hui les langues autochtones, par exemple en les déclarant langues officielles ou en garantissant leur protection dans leurs chartes fondamentales, comme c'est le cas en Nouvelle-Zélande ou au Brésil, par exemple.  Ces exemples montrent que les États sont tout à fait en mesure de promouvoir les langues autochtones, a noté Mme Kang.  Elle a également observé que certains outils concrets, comme par exemple la Déclaration sur les langues autochtones au Canada, facilitent la protection des langues menacées de disparition.  Il est donc urgent d'aider les langues autochtones avant qu'elles ne disparaissent, et de mobiliser toutes les ressources nécessaires à cet effet.  Il y va de l'intérêt non seulement des peuples autochtones, mais aussi du reste du monde, a conclu Mme Kang.

M. JAMES ANAYA, Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, a déclaré que le droit de pratiquer leur propre langue et leur culture appartient de plein droit aux peuples autochtones, ainsi que l'ont fait valoir certains de leurs représentants devant l'Instance permanente des Nations Unies sur les questions autochtones.  Les langues et les cultures ont subi des discriminations tout au long de l'histoire.  À l'échelon international, on observe actuellement un changement d'attitude qui a conduit à la reconnaissance du patrimoine culturel et des droits des peuples autochtones.  Le même mouvement est perceptible au niveau des politiques nationales qui consacrent parfois les langues et cultures autochtones, comme l'avait déjà observé le précédant Rapporteur spécial.  En Nouvelle-Zélande, des progrès ont été accomplis dans le domaine de la participation des peuples autochtones dans la promotion de leurs patrimoines linguistique et culturel.  Cela est aussi vrai pour des pays comme la Finlande, la Suède et la Norvège, où la langue sâme est désormais enseignée.  M. Anaya a encouragé les pays à soutenir leurs populations autochtones et à valoriser leurs traditions et cultures.  La langue ne saurait être dissociée du peuple et de ses traditions, a affirmé le Rapporteur spécial, en citant une représentante autochtone.  Il a incité la société civile et les gouvernements à prendre des mesures pour favoriser l'épanouissement ou la préservation de ce patrimoine culturel. 

M. VITAL BAMBANZE, Président-Rapporteur du Mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones, a rappelé que cette réunion-débat est le résultat indirect de la proposition faite par le Mécanisme d'experts au cours de sa troisième session en 2010, demandant au Conseil d'organiser une réunion sur les peuples autochtones.  M. Bambanze a rappelé que le Mécanisme d'experts avait parachevé deux études relatives aux droits des peuples autochtones: la première sur l'éducation et la seconde sur le droit à participer aux processus de prise de décision.  Ces deux rapports examinent les obligations des États en matière de promotion et de protection des langues et des droits culturels des peuples autochtones.  Le Mécanisme fonde une partie de ses analyses sur les dispositions de la Déclaration sur les droits des peuples autochtones, mais il convient de noter que la plupart des dispositions de la Déclaration appliquent simplement des normes contraignantes de droits de l'homme au contexte des peuples autochtones.  C'est notamment le cas de l'article 27 du Pacte international sur les droits civils et politiques, qui prévoit que les personnes appartenant à des minorités ont un droit à la langue et à la culture.

L'étude du Mécanisme d'experts sur l'éducation est particulièrement pertinente pour le sujet dont le Conseil est saisi, car elle précise que le droit à l'éducation des peuples autochtones inclut le droit à recevoir une éducation dans sa propre langue.  Le Mécanisme est favorable à une autonomie des peuples autochtones en matière d'éducation.  Enfin, dans son étude sur le droit à participer aux processus de prise de décision, le Mécanisme d'experts s'efforce de dresser une liste des lignes directrices sur les meilleures manières d'interpréter ce droit dans le contexte des peuples autochtones.  Il s'agit notamment d'informer les électeurs autochtones dans leurs propres langues et de veiller à ce que les peuples autochtones soient consultés sur les sujets qui les concernent.

M. LESTER COYNE, Coordonateur régional en matière de santé aborigène (Australie), a déclaré qu'au moment de la colonisation, on recensait en Australie 250 langues et plus de 600 dialectes, dont la plupart ont disparu depuis.  On constate aujourd'hui une certaine indifférence pour l'apprentissage des langues autochtones, un phénomène qui s'explique par des difficultés telles que l'alcoolisme ou le chômage, ou encore par le fait que les aborigènes ont adopté les mêmes objectifs que les populations du monde occidental, soit l'acquisition de maisons ou d'écrans plats, au détriment de la maîtrise des langues autochtones.  Les efforts de l'Australie pour enseigner ces langues sont déployés dans 25 centres linguistiques régionaux – au financement malheureusement insuffisant.  Le représentant a regretté que l'Australie n'applique de mesures de protection des langues premières d'Australie qu'au niveau local, aucune politique nationale n'ayant été adoptée.

M. JAVIER LÓPEZ SÁNCHEZ, Directeur général de l'Institut national pour les langues autochtones du Mexique, a affirmé que la référence à la langue manifeste l'organisation sociale, la culture et les valeurs attribuées à chaque chose.  Il ne fait aucun doute que toutes les langues du monde constituent le patrimoine intangible de l'humanité.  Au Mexique, seuls 20% des autochtones parlent aujourd'hui leur langue d'origine.  Le modèle de développement des États nationaux était incompatible avec la diversité linguistique, ce qui a conduit à l'extinction de nombreuses langues autochtones.  La domination coloniale a précipité cette uniformisation linguistique et culturelle.  Dans ce contexte, l'un des principaux défis pour les États consiste à faire preuve d'une volonté d'inclusion.  C'est ainsi qu'une «Année de la diversité linguistique et culturelle» a été décrétée par le Mexique en reconnaissance du caractère pluriel de la nation mexicaine.  D'autre part, une loi reconnaît, pour la première fois, la légitimité des langues autochtones, y compris dans les démarches administratives.  Les politiques publiques prévoient la réalisation progressive d'un catalogue des langues autochtones, l'élaboration de dictionnaires, l'enseignement et la réglementation de l'utilisation de ces langues (notamment s'agissant de la formation de traducteurs et interprètes).  Le responsable mexicain a souligné l'importance de veiller à ce que l'ensemble de la société participe à la sauvegarde de la diversité linguistique et culturelle.

Résumé des échanges

Au cours du débat avec les experts, les délégations sont convenues de l'importance de revivifier les langues en voie d'extinction et de promouvoir le plurilinguisme.  Le représentant du Mexique a rappelé à cet égard que l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture estime qu'il est urgent de prendre des mesures pour promouvoir le plurilinguisme afin d'éviter la disparition de certaines langues.  De nombreuses délégations, à l'instar du Guatemala, ont souligné que la langue et la culture sont des piliers de l'identité des individus et qu'elles confèrent un sentiment d'appartenance à ceux qui les pratiquent.  On a relevé que la disparition d'une langue risque d'entraîner une perte de la culture.  À cet égard, il est non seulement nécessaire de sauvegarder les langues autochtones en voie d'extinction, mais aussi de dynamiser leur usage et leur apprentissage, par des programmes ciblés.  L'Australie, le Canada et la Norvège ont présenté les mesures qu'ils ont prises à cet égard, notamment grâce à des programmes visant à enregistrer des langues en voie d'extinction et à produire des dictionnaires bilingues.  L'Australie organise en particulier à l'enregistrement phonographique des langues en voie d'extinction et soutient la compilation de dictionnaires bilingues.  Le Gouvernement du Canada gère, quant à lui, un programme de recherche sur langues autochtones parlées au Canada.  Il se penche en outre sur la manière d'encourager l'apprentissage des langues autochtones par les jeunes.

La Nouvelle-Zélande, le Paraguay, la Finlande, la Fédération de Russie, le Danemark et le Honduras ont mis l'accent sur l'importance de la préservation et de la dissémination des langues et des cultures autochtones.  Les intervenants ont expliqué ce que leurs gouvernements respectifs s'efforçaient de faire dans cette optique.  Ainsi, la Nouvelle-Zélande, par crainte de l'extinction de la langue Maori, s'est dotée d'une politique nationale en vue de sa protection, axée sur son enseignement et sur la création d'une radio et de divers programmes à l'échelle nationale et locale.  Le pays accueille actuellement la Coupe du monde de rugby, l'occasion pour la Nouvelle-Zélande de célébrer le Maori à l'échelle internationale, a déclaré sa représentante.  Le Paraguay a informé, pour sa part, que le Rapporteur spécial sur le droit à l'éducation, M. Vernor Muñoz Villalobos, avait effectué en avril 2009, une visite au Paraguay et évoqué son modèle réussi de bilinguisme: en effet, le guarani est langue officielle du pays, avec l'espagnol.  La Finlande a adopté récemment des mesures ciblées d'utilisation de la langue sâme dans les procédures administratives.  La déléguée de la Finlande a attiré l'attention sur l'urbanisation croissante des populations autochtones, ce qui constitue un obstacle pour le développement: 60 % des Sâmes de Finlande vivent en dehors de leur territoire ancestral.  La Fédération de Russie, pays plurinational où vivent plus de 165 peuples aux caractéristiques distinctes, a offert aux entités fédérées la possibilité de décider elles-mêmes de la manière dont elles entendent promouvoir et protéger leurs modes de vie et cultures respectifs.  Au titre du suivi, chaque année, le Gouvernement évalue la manière dont les langues évoluent.  La Constitution du Honduras oblige de préserver la culture et les langues autochtones.  Des manuels de lecture ont été élaborés dans sept langues, en sus de l'espagnol, et des enseignants dûment formés.  D'autres mesures concrètes ont été adoptées: nomination d'un Ministre des cultures ethniques, d'un procureur spécial et d'un Secrétariat des peuples autochtones.  L'Union européenne a souligné qu'il appartient aux gouvernements de lutter contre le racisme et l'intolérance à l'encontre peuples autochtones. 

La représentante du Pérou a affirmé que la langue est un patrimoine immatériel d'une valeur inestimable qui doit se transmettre de génération en génération.  À ce titre, il est nécessaire d'encourager l'éducation rurale et la normalisation des langues autochtones.  La Commission nationale des droits de l'homme de Malaisie a repris à son compte l'appel du Mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones visant à intégrer les langues autochtones aux programmes scolaires.  Le Népal et la Bolivie ont évoqué la question de l'éducation en langue autochtone sous l'angle des défis auxquels font face les pays en développement dans le contexte de la mondialisation.  Les trente-six langues autochtones parlées en Bolivie sont reconnues comme autant de langues officielles; le Gouvernement dispense à tous les fonctionnaires des cours gratuits de langues autochtones.  Le Chili a relevé le caractère crucial de la protection des langues autochtones, observant que seuls 14% des autochtones au Chili parlent encore leur langue première.  Le Brésil a indiqué que la société de son pays est imprégnée de l'influence de plus de 800 000 personnes issues des peuples autochtones et de 180 langues autochtones parlées.  Le Gouvernement offre des garanties quant à l'utilisation des langues autochtones dans toutes les manifestations culturelles, notamment.

L'organisation non gouvernementale International Committee for the Indians of the Americas - Incomindios Switzerland a comparé la disparition d'une langue à l'extinction d'un peuple tout entier.  Son représentant a exprimé sa profonde préoccupation devant les agissements de certains Gouvernements et entreprises sur des territoires autochtones.  Il a souhaité que les conférenciers disent ce qu'il faut faire face à la libéralisation de l'économie qui entraîne les pillages des ressources naturelles et la dégradation écologique.  Une autre organisation non gouvernementale a regretté le sous-financement des écoles dispensant des enseignements dans les langues autochtones, ainsi que la non-reconnaissance des diplômes offerts par certaines de ces écoles.  Le représentant a observé que la culture ne doit pas être considérée seulement sous l'angle folklorique.  Il ne faudrait pas parler de «culture dans l'éducation» mais plutôt d'«éducation dans la culture».

Dans une déclaration conjointe, le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP) et l'Union syndicale des travailleurs kanaks et des exploités (USTKE) ont déclaré que la marginalisation sociale du peuple kanak, et ses conséquences politiques, économiques et culturelles, sont un frein à la mise en application des différents points inscrits dans l'Accord de Nouméa.  Ces marginalisations, acculturation et discriminations se manifestent notamment au sein du système éducatif.  Le représentant a invité la communauté internationale, et en particulier le Gouvernement français, à reconnaître pleinement et à respecter les articles de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, notamment les articles relatifs aux droits collectifs des derniers peuples autochtones encore sous domination.  Le représentant a invité également la France à ratifier la Charte européenne des langues minoritaires et, surtout, les Conventions n° 111 et n° 169 de l'Organisation internationale du travail, outils importants pour que cessent les inégalités sociales et culturelles dont souffrent les peuples autochtones.

Réponses et conclusions des panélistes

M. ANAYA a déclaré qu'il faut prendre en compte tous les comportements discriminatoires à l'encontre des peuples autochtones, y compris ceux portant sur leurs langues.  Le Rapporteur spécial a ainsi déploré l'institutionnalisation de certaines «discriminations passives», comme par exemple le fait d'ignorer l'existence des langues autochtones, notamment au niveau des relations des citoyens avec l'administration.  M. Anaya a aussi observé que l'éducation des enfants autochtones est plus efficace lorsqu'elle se déroule dans leur langue.  Plutôt que de combattre la discrimination des langues autochtones, il faudrait promouvoir leur usage généralisé, a aussi déclaré le Rapporteur spécial.  Il faudrait aussi que les communautés autochtones revalorisent leurs propres langues: il s'agit là d'un principe lié au droit à l'autodétermination des populations autochtones.  Les défis semblent malheureusement insurmontables,  Aussi la revitalisation des langues autochtones passera nécessairement par une coopération entre populations autochtones, États et organisations internationales. 

M. COYNE a observé que les meilleures pratiques sont proposées par des personnes qui parlent les langues autochtones.  L'immersion en milieu familial est un excellent moyen d'apprentissage de ces langues.  Le responsable australien en matière de santé aborigène a affirmé qu'il faut consacrer les droits des autochtones en promulguant des lois et non en se contentant d'en parler.  Il a en outre regretté l'apathie des communautés autochtones et leur situation sanitaire déplorable, qui sont des phénomènes attristants. 

M. BAMBANZE a souligné l'impact de l'éducation sur le futur des enfants des peuples autochtones.  Il a espéré que les agences onusiennes adopteront des programmes pour assurer la survie des peuples autochtones et de leurs langues.  Le Président du Mécanisme d'experts sur les droits des peuples autochtones a fait savoir à ce sujet qu'il avait élaboré un dictionnaire sur Internet, afin que les jeunes puissent se l'approprier plus facilement.

M. LÓPEZ SÁNCHEZ a rappelé qu'il ne suffit pas de faire référence au cadre juridique, l'important est de prendre des mesures concrètes pour faire changer les mentalités.  Son pays, le Mexique, a précisément œuvré à un véritable changement de mentalité, en usant des moyens de communication modernes et en misant sur la visibilité et l'audibilité des langues autochtones.  Ainsi, des feuilletons radiophoniques en langues autochtones sont-ils produits et diffusés.  Il est important que les autochtones entendent leurs langues, a-t-il ajouté.  De plus, il faut inclure les autochtones eux-mêmes dans les stratégies de promotion de leurs langues, afin qu'ils décident de la manière de les enseigner.

__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :