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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité des droits de l'enfant examine le rapport de la République tchèque

31 Mai 2011

Comité des droits de l'enfant
31 mai 2011

Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport de la République tchèque sur les mesures prises par ce pays en application de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Présentant le rapport de son pays, Mme Monika Simunkova, Commissaire aux droits de l'homme de la République tchèque, a attiré l'attention sur la Loi de justice pénale aux fins de l'établissement du délit de possession de matériel pédopornographique et le nouveau Code pénal tchèque qui accroît la norme de protection du droit pénal en faveur des enfants face aux abus, violences, exploitations et négligences. Les autorités tchèques se sont efforcées d'apporter des changements législatifs, méthodologiques et procéduraux dans le domaine des soins institutionnels, considérant de prime abord qu'il est inadmissible que des enfants soient retirés de leurs familles uniquement en raison d'arrangements inadéquats en termes de logement ou pour toute autre raison sociale et économiques, du moment que leur vie, leur santé et leur développement positif ne sont pas gravement menacés et du moment qu'ils peuvent être protégés d'une autre manière, a poursuivi la Commissaire; aussi, l'État a-t-il reconnu son obligation de fournir une assistance appropriée aux parents capables d'élever leurs enfants. Depuis 2009, le Gouvernement tchèque applique un Plan d'action national visant à transformer et unifier le système de soins pour les enfants vulnérables; ce plan manifeste une claire préférence pour l'offre de soins aux enfants dans un environnement familial plutôt que dans un cadre institutionnel. Pour ce qui est du droit des enfants à l'éducation, la République tchèque a réalisé des progrès significatifs entre 2009 et 2011, a poursuivi la Commissaire. Elle a notamment attiré l'attention sur l'action entreprise afin de prévenir le placement d'enfants roms en dehors du système d'éducation ordinaire.

La délégation tchèque était également composée du Représentant permanent de la République tchèque auprès des Nations Unies à Genève, M. Tomas Husak, ainsi que de représentants du Conseil gouvernemental pour les droits de l'homme; du Ministère du travail et des affaires sociales; du Ministère de l'éducation, de la jeunesse et des sports; du Ministère de l'intérieur; du Ministère de la justice; du Ministère de la santé; et de la Mission permanente de la République tchèque auprès des Nations Unies à Genève. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, la situation des enfants roms; l'interdiction de la discrimination directe et indirecte; le placement d'enfants; l'adoption internationale; la violence contre les enfants; les questions d'éducation et de santé, y compris le suicide et l'avortement; les enfants réfugiés et demandeurs d'asile; ou encore l'administration de la justice pour mineurs.

La République tchèque s'oriente vers une interdiction totale du placement d'enfants de moins de trois ans dans des institutions ou centres de soins de substitution, a notamment annoncé la délégation.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport tchèque, M. Peter Guran, a fait part de plusieurs difficultés subsistant de son point de vue au regard de la mise en œuvre de la Convention en République tchèque. D'une part, il a relevé un manque de coordination dans la mise en œuvre de la Convention, ainsi qu'un manque de plan d'action clairement orienté vers la mise en œuvre de cet instrument. D'autre part, il a déploré une absence de surveillance et de suivi indépendant de la mise en œuvre de la Convention; il n'y a pas de mécanisme de plaintes spécifiquement dédié aux enfants, a-t-il souligné. «Je pense que l'esprit de la Convention fait défaut en République tchèque», a déclaré le rapporteur.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, ses observations finales sur le rapport de la République tchèque, avant de les rendre publiques à la fin de la session, le vendredi 17 juin prochain.

Le Comité entamera demain, à 10 heures, l'examen du rapport de Bahreïn (CRC/C/BHR/2-3).

Présentation du rapport

MME MONIKA SIMUNKOVA, Commissaire aux droits de l'homme du Bureau du Gouvernement de la République tchèque, a rappelé que ce rapport couvre la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2006. S'agissant de la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants, le rapport souligne notamment que le 1er janvier 2004, a été introduit dans le Code pénal tchèque un nouveau délit d'incitation à un rapport sexuel, a-t-elle indiqué. L'une des plus importantes mesures prises en faveur du renforcement de la protection des enfants durant la période couverte par le présent rapport réside dans l'amendement apporté en 2007 à la Loi de justice pénale aux fins de l'établissement du délit de possession de matériel pédopornographique. Depuis, a également été établi comme délit spécifique l'abus d'un enfant aux fins de la production et de la diffusion de tels matériels, a-t-elle précisé. Le nouveau Code pénal tchèque en vigueur depuis janvier 2010 accroît la norme de protection du droit pénal en faveur des enfants face aux abus, violences, exploitations et négligences, a poursuivi Mme Simunkova, qui a notamment précisé que la mise en danger l'éducation d'un enfant a été définie de crime, en rapport avec toute menace au développement intellectuel, émotionnel ou moral de l'enfant. Ce crime est réputé commis par les délinquants qui enfreignent gravement leur devoir de prendre soin d'un enfant ou toute autre obligation importante en rapport avec la responsabilité parentale.

La Convention relative aux droits de l'enfant est devenue un document utilisé par un nombre croissant de professionnels en contact avec les enfants, a par ailleurs fait valoir la Commissaire tchèque aux droits de l'homme. Afin de prévenir le placement d'enfants dans des établissements de soins institutionnels sur la seule base de considérations sociales et économiques, a-t-elle indiqué, les autorités du Gouvernement central se sont efforcées d'apporter des changements législatifs, méthodologiques et procéduraux dans le domaine des soins institutionnels, considérant de prime abord qu'il est inadmissible que des enfants soient retirés de leurs familles uniquement en raison d'arrangements inadéquats en termes de logement ou pour toute autre raison sociale et économiques, du moment que leur vie, leur santé et leur développement positif ne sont pas gravement menacés et du moment qu'ils peuvent être protégés d'une autre manière. Aussi, l'État a-t-il reconnu son obligation de fournir une assistance appropriée aux parents capables d'élever leurs enfants, a souligné Mme Simunkova.

La Commissaire aux droits de l'homme a par ailleurs rappelé que l'adoption par la République tchèque du Protocole facultatif à la Convention qui traite de la vente d'enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie mettant en scène des enfants dépend toujours de l'adoption d'une loi sur la responsabilité pénale des personnes morales. Le projet de loi (sur cette question) est actuellement débattu par la Chambre des députés du Parlement tchèque, a-t-elle indiqué, ajoutant que l'on peut s'attendre à la ratification de cet instrument incontestablement important dans un avenir proche. Mme Simunkova a en outre rappelé que son pays appuyait la négociation d'un troisième protocole facultatif à la Convention, relatif à une procédure de plaintes.

Depuis 2009, a poursuivi Mme Simunkova, le Gouvernement tchèque applique un Plan d'action national visant à transformer et unifier le système de soins pour les enfants vulnérables (2009-2011); ce plan manifeste une claire préférence pour l'offre de soins aux enfants dans un environnement familial plutôt que dans un cadre institutionnel.

Le Système d'intervention précoce est un système interministériel normalisé de collaboration pluridisciplinaire et de fourniture réciproque et rapide d'informations, qui devrait améliorer la situation des enfants vulnérables en République tchèque, avec l'appui d'Équipes pour les enfants et les jeunes aux niveaux municipal et régional, a d'autre part indiqué Mme Simunkova. Est envisagée dans ce contexte la création d'un Bureau central d'information permettant de lier les institutions de protection de l'enfance à travers tout le pays; un registre central des enfants vulnérables est également prévu. Le lancement complet de ce Système d'intervention précoce à cette échelle est prévu pour 2013-2022, a précisé la Commissaire aux droits de l'homme.

Ces dernières années, a en outre reconnu Mme Simunkova, de nombreux cas de violence contre les enfants ont été mis en lumière en République tchèque; les autorités ont pris des mesures afin de remédier à cette situation en sensibilisant le public à la question de la violence contre les enfants et en lançant des campagnes de sensibilisation destinées à faire changer les attitudes du public et accroître ainsi l'efficacité du point de vue de la détection des cas de violences contre les enfants.

Un groupe particulièrement vulnérable d'enfants est constitué par ceux qui ont fui leurs familles ou des foyers résidentiels et par ceux qui sont portés disparus pour d'autres raisons (par exemple parce qu'ils ont été enlevés). Aujourd'hui, c'est le Mécanisme national de coordination des recherches pour les enfants portés disparus qui est responsable de retrouver ces enfants, a indiqué Mme Simunkova.

Pour ce qui est du droit des enfants à l'éducation, la République tchèque a réalisé des progrès significatifs entre 2009 et 2011, a poursuivi la Commissaire aux droits de l'homme. Elle a notamment attiré l'attention sur l'action entreprise afin de prévenir le placement d'enfants roms en dehors du système d'éducation ordinaire. Mme Simunkova a par ailleurs insisté sur le Plan national d'action pour l'éducation inclusive, adopté par le Gouvernement en mars 2010, dont l'objectif est notamment de prévenir l'exclusion sociale d'individus et de groupes sociaux entiers, qu'il s'agisse des Roms ou d'autres minorités telles que les enfants handicapés et les enfants d'autres pays.

En conclusion, Mme Simunkova a notamment indiqué qu'elle allait plaider en faveur de la désignation, dans son pays, d'un médiateur spécial pour les enfants.

Le rapport périodique de la République tchèque (CRC/C/CZE/3-4) indique notamment que la République tchèque n'a pas retiré sa réserve concernant l'article 7 de la Convention, en particulier en matière d'adoption irrévocable. Ce type d'adoption éteint les droits et les obligations entre l'enfant adopté et sa famille biologique. C'est aux parents adoptifs de décider s'ils souhaitent ou non faire savoir à l'enfant qui sont ses parents biologiques. Mais le Code civil est en cours de remaniement et un nouveau texte de loi prévoit que pourrait permettre à la République tchèque de retirer sa réserve. L'amendement du Code pénal entré en vigueur le 1er juin 2004 érige en infraction la maltraitance à l'égard d'une personne vivant dans le même appartement ou la même maison, indique par ailleurs le rapport. L'amendement à la loi relative à la protection de l'enfance règle dans le détail les modalités de la protection des enfants en danger: enfants maltraités ou négligés, enfants séparés de leur famille, etc. Cet amendement élargit les compétences des établissements prenant en charge les enfants ayant besoin d'une assistance immédiate, le champ d'application du placement provisoire, mais il élargit aussi considérablement l'aide apportée aux familles par l'instance chargée de la protection de l'enfance. En matière pénale, de nouveaux délits de traite des êtres humains ont été créés, qui modifient considérablement les définitions précédentes des délits commis à des fins sexuelles. En outre, une sanction punissant la mise en danger d'un enfant dans le domaine sexuel a été introduite dans le Code pénal (incitation à un rapport sexuel); la possession de matériel de pédopornographie pour ses besoins personnels a été définie comme constitutive d'un délit et les sanctions à l'encontre de ces comportements considérablement durcies.

Le Ministère de l'éducation vérifie régulièrement que les droits des enfants placés dans les centres chargés de l'éducation surveillée préventive sont respectés. Afin de prévenir les comportements sociaux pathologiques parmi les jeunes et au sein des familles, le Ministère de l'intérieur participe lui aussi à la prise en charge des enfants en danger. Depuis 2002, la plupart des activités dans le domaine de la protection de remplacement ont été transférées du Ministère du travail aux régions, indique ensuite le rapport. Une nouvelle forme de placement provisoire en famille d'accueil a été instaurée, dont l'objectif est de veiller à ce que les enfants qui en ont besoin soient pris en charge par une famille d'accueil. Ce type de placement offre une marge de manœuvre suffisante pour travailler avec la famille afin d'accélérer la réintégration de l'enfant dans son milieu familial. Les établissements prenant en charge les enfants ayant besoin d'une assistance immédiate apportent aide et protection aux enfants livrés à eux mêmes ou dont la vie ou l'épanouissement sont gravement compromis, aux enfants ne bénéficiant pas de soins adaptés à leur âge, aux enfants ayant fait l'objet de mauvais traitements physiques ou psychologiques, ou encore aux enfants se trouvant dans un environnement où leurs droits fondamentaux sont gravement bafoués. La protection et l'aide apportée à ces enfants consiste à répondre aux besoins fondamentaux de l'existence, dont le logement, et à pratiquer les soins médicaux, psychologiques ou autres, nécessaires. L'amendement apporté à la loi relative à l'éducation garantit l'accès de tous les étrangers à l'éducation primaire et aux services s'y rapportant, dans les mêmes conditions que les ressortissants tchèques, qu'ils résident légalement ou non dans le pays. La nouvelle loi relative à l'éducation a aboli les écoles dites spéciales pour en faire des écoles primaires.

Une deuxième partie du rapport fournit des renseignements sur la mise en œuvre du Protocole facultatif sur l'implication d'enfants dans des conflits armés. Dans cette seconde partie, il est notamment rappelé que la République tchèque a ratifié le Statut de Rome de la Cour pénale internationale le 23 janvier 2008. Les enfants scolarisés dans des établissements secondaires militaires («ESM») ne sont pas des militaires et leur scolarisation dans ces établissements ne les oblige pas à rejoindre les forces armées, que ce soit au combat ou dans des missions administratives. Par conséquent, ils ont le même statut que les élèves des autres établissements secondaires. Leur nombre décroît progressivement du fait que, en 2002, il a été décidé de réduire cette forme d'enseignement. Durant la période examinée, des cinq ESM d'origine comptant quelque 750 élèves, il n'en reste que deux, soit 200 élèves, précise le rapport.

Examen du rapport

Observations et questions des membres du Comité

M. PETER GURAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la République tchèque, a d'emblée souligné que la République tchèque est un pays qui a une longue culture de protection des enfants et de politique sociale. Il a toutefois déploré que les recommandations que le Comité avait adressées au pays à l'issue de l'examen de son précédent rapport n'aient pas été toutes mises en œuvre. La République tchèque est confrontée à des difficultés concernant l'application de l'esprit de la Convention, a ensuite estimé M. Guran. La question la plus importante dans le contexte tchèque, a-t-il ajouté, a trait à la volonté politique d'élaborer un plan d'action national très clair consacré aux droits de l'enfant et fondé sur la Convention – un plan qui, à ce jour, fait toujours défaut.

Pour ce qui est de la législation antidiscrimination et de la transposition de toutes les directives de l'Union européenne en la matière, M. Guran a fait observer que la République tchèque est le dernier pays de l'Union procédant à cette transposition. La République tchèque manque de cadres institutionnels permettant de recevoir les plaintes des enfants et de leurs représentants, a-t-il souligné. De très nombreuses institutions en République tchèque ne sont pas coordonnées entre elles, a-t-il par ailleurs fait observer.

M. Guran a d'autre part soulevé la question des enfants roms en République tchèque et a attiré l'attention sur la ségrégation dont ils souffrent, au regard du système éducatif et plus particulièrement des écoles spéciales; l'important n'est pas de modifier ce système mais d'en parler au public car il existe en République tchèque de graves préjugés contre les enfants roms, a déclaré le rapporteur.

Parfois, au sein de la population rom, ont lieu des mariages précoces et les jeunes mariés n'enregistrent alors pas l'enfant qui peut être issu d'une telle union, a fait observer une autre membre du Comité, avant de s'enquérir des mesures prévues pour remédier à ce problème.

Une autre experte a souligné que la République tchèque n'a transposé en droit interne qu'une partie des dispositions des directives antidiscrimination de l'Union européenne. En effet, seule la discrimination directe est couverte dans le droit interne tchèque; la discrimination indirecte ne l'est pas, ce qui constitue un grave problème tant il est vrai qu'il est rare de pouvoir observer clairement la discrimination directe. S'agissant des procédures accompagnant le placement d'enfants dans un milieu de substitution, cette experte a souhaité savoir si avait été apporté au Code civil un amendement stipulant que l'enfant doit être écouté et entendu dans ce contexte.

Une autre experte s'est enquise du nombre d'affaires de discrimination ayant abouti à une condamnation.

Un expert s'est enquis des mesures prises par la République tchèque pour assurer qu'un enfant puisse agir non seulement en désaveu mais aussi en recherche de paternité.

Comment la loi garantit-elle que l'intérêt supérieur de l'enfant est dûment pris en compte dans les décisions de justice, a demandé un autre expert ?

Une experte a relevé que les plans et politiques en faveur des enfants en République tchèque semblent cibler particulièrement les enfants vulnérables, au détriment d'une approche plus intégrale qui ciblerait la totalité des droits de l'enfant.

S'interrogeant sur la situation qui prévaut en République tchèque en matière de suicides chez les enfants, un expert a rappelé que selon la Convention, l'État doit se doter d'un mécanisme d'enregistrement de tous les décès d'enfants et d'enquête à leur sujet. Une autre experte s'est inquiétée du niveau élevé de suicides chez les jeunes et a souhaité en connaître les raisons.

D'autres membres du Comité on relevé le nombre important d'avortements, une experte relevant qu'une grossesse sur quatre serait interrompue, parmi les quelles de nombreux cas concernent des mineures.

Qu'en est-il du fonctionnement des institutions chargées des adoptions internationales, a demandé un membre du Comité ?

Une experte s'est enquise du droit à l'éducation pour les réfugiés et les demandeurs d'asile, accompagnés ou non par leurs parents.

La prévention des abus sexuels contre les enfants reste négligée en République tchèque, a estimé une autre experte. Quel système est-il prévu pour protéger les enfants contre ce type d'abus, a-t-elle demandé ? En outre, les procédures judiciaires sont très longues pour de telles affaires, a-t-elle déploré. Des mesures sont-elles prévues pour éviter la comparution de l'enfant victime d'abus devant la personne auteur présumée du délit, a aussi demandé l'experte ?

En ce qui concerne l'administration de la justice pour mineurs, un expert s'est enquis des mesures prises pour assurer une formation spécialisée des juges ayant à connaître des affaires impliquant des enfants. Les enfants de moins de 15 ans sont-ils réputés ne pas pouvoir commettre d'infraction, a-t-il en outre demandé ? La République tchèque entend-elle prendre des mesures pour interdire et punir formellement l'implication d'enfants dans des conflits armés, comme l'y oblige le Protocole à la Convention qu'elle a ratifié, même s'il est clair que de telles situations n'existent pas dans ce pays, a également demandé cet expert ?

Relevant que depuis 2004 la République tchèque dispose d'une nouvelle loi de justice juvénile en vertu de laquelle doivent être institués des tribunaux pour enfants, un membre du Comité a souhaité savoir si toutes les régions du pays sont désormais dotées de tels tribunaux spécialisés. Cet expert s'est en outre enquis des mesures alternatives à la privation de liberté qui sont prévues pour les enfants, ainsi que des règles encadrant la prévention avant jugement. Pour quels types de délit la détention d'un mineur peut-elle aller jusqu'à 10 ans, a-t-il également demandé ? Que sont exactement les institutions d'éducation protégées et qui s'y trouve: enfants ayant commis des délits ou enfants en difficultés ?

Un membre du Comité s'est enquis des critères présidant à l'examen et au réexamen de la séparation d'un enfant de ses parents.

Plusieurs experts ont souhaité en savoir davantage au sujet de la situation des enfants roms.

Réponses et renseignements complémentaires fournis par la délégation

La délégation a déclaré qu'un projet de loi portant nouveau Code civil a été approuvé par le Gouvernement le 18 mai dernier et sera présenté au Parlement pour adoption. On s'attend à ce que les débats sur ce projet au Parlement soient longs et difficiles et c'est pourquoi on s'attend à ce que ce texte – qui comporte plus de trois mille alinéas – n'entre en vigueur qu'au 1er janvier 2013. Après adoption de ce nouveau Code civil, la République tchèque sera en mesure de retirer les réserves qu'elle maintient à l'égard de la Convention, a précisé la délégation.

Le Médiateur public est un organe indépendant qui examine notamment les cas de discrimination, a poursuivi la délégation. Il peut aussi être saisi de plaintes impliquant des enfants, présentées par eux directement ou en leur nom; généralement, de telles affaires concernent des enfants placés en institutions.

En République tchèque sont interdites aussi bien la discrimination directe que la discrimination indirecte, a par ailleurs assuré la délégation. La loi contre la discrimination ne relève pas du domaine pénal, a-t-elle en outre souligné.

S'agissant de la situation des enfants roms, la délégation a reconnu que la situation de la population rom est probablement l'un des plus graves problèmes de droits de l'homme qui se posent à la République tchèque. Les autorités sont conscientes des préjugés raciaux qui existent à l'encontre des tziganes, a poursuivi la délégation. Elle a fait part des nombreuses campagnes de sensibilisation antiraciste qui ont été menées par les autorités tchèques; ces campagnes s'efforcent de montrer la population rom de manière plus positive, notamment en soutenant la culture rom, comme en témoigne l'ouverture d'un musée de la culture rom – unique en Europe centrale. Il est difficile d'établir qui est rom et qui ne l'est pas, a par ailleurs souligné la délégation.

La délégation a d'autre part souligné que les autorités tchèques ont reconnu le problème posé par la ségrégation des enfants roms dans un système éducatif autre que le système éducatif ordinaire. Conformément à sa stratégie d'éducation inclusive, la République tchèque appuie la notion de l'école pour tous, qui se fonde sur la loi sur l'éducation adoptée en 2005.

La délégation tchèque s'est par ailleurs dite consciente du nombre élevé d'enfants placés en institutions. D'ailleurs, le nombre d'enfants entrant dans des institutions n'est pas en déclin à l'heure actuelle; il convient donc de concentrer l'action sur un soutien précoce aux familles, en amont, a-t-elle ajouté. Beaucoup d'obstacles sont liés à la fragmentation du système de soins, a souligné la délégation. La République tchèque s'oriente vers une interdiction totale du placement d'enfants de moins de trois ans dans des institutions ou centres de soins de substitution, a-t-elle annoncé.

La République tchèque aura besoin de 35% de travailleurs sociaux supplémentaires pour appliquer sa nouvelle stratégie, qui visant à réduire le placement des enfants en institutions, a précisé la délégation.

Pour ce qui est des adoptions internationales, la délégation a notamment indiqué que l'an dernier, une quarantaine d'enfants ont été adoptés à l'international, la plupart étant des enfants roms. La République tchèque souhaite privilégier le placement d'enfants adoptables en familles d'accueil dans le pays et ne réserver l'adoption internationale qu'aux cas de dernier recours.

S'agissant de la violence contre les enfants, la délégation a souligné que le Code pénal de 2009 définit plusieurs catégories de violences sexuelles contre les enfants: viol, abus sexuel, traite, coercition sexuelle, prostitution, mise en danger du développement de l'enfant ou encore pédopornographie, entre autres. La délégation a par ailleurs fait part de l'adoption de nombreux plans d'actions et de nombreuses stratégies et politiques visant à prévenir la violence, y compris la violence domestique, contre les enfants.

La République tchèque ne s'est pas encore dotée d'une loi globale interdisant les châtiments corporels à l'encontre des enfants, a poursuivi la délégation. Selon une étude, seuls 8,3% des Tchèques n'auraient jamais recours aux châtiments corporels. Les autorités ont donc choisi d'œuvrer progressivement vers une sensibilisation du public à cette question, par le biais de campagnes ciblées; les autorités proposeront une loi sur l'interdiction des châtiments corporels lorsque la société tchèque sera davantage favorable à une telle démarche. Il n'en demeure pas moins que déjà, la loi sur la famille n'autorise aucune mesure dans le cadre familial qui soit susceptible d'humilier l'enfant et que la loi sur les écoles interdit de fait les châtiments corporels (puisqu'ils ne figurent pas au nombre des mesures pouvant être prises à l'encontre d'un élève).

Pour ce qui est des questions de santé, la délégation a indiqué qu'en République tchèque, le taux de mortalité infantile est de seulement 2,88 pour mille naissances. Par ailleurs, les nouveau-nés font tous l'objet d'un dépistage pour 13 maladies rares. D'autre part, l'État tchèque assure la prise en charge de l'assurance maladie des enfants et des adolescents jusqu'au terme de leur éducation et au plus tard jusqu'à 26 ans.

Répondant aux questions sur le suicides des jeunes, il s'agit d'un grave problème pour la République tchèque puisqu'il s'agit de la deuxième cause de décès pour les jeunes de 15 à 19 ans, a par ailleurs déclaré la délégation. Il n'en demeure pas moins que les données récentes attestent d'une baisse des suicides dans le pays.

Au sujet de l'avortement, la délégation a indiqué qu'une femme enceinte peut demander à subir une interruption volontaire de grossesse jusqu'à la douzième semaine de grossesse; la seule raison pour laquelle l'avortement peut lui être refusé a trait au risque que cet avortement pourrait faire peser pour sa santé. Par ailleurs, une interruption volontaire de grossesse peut, pour des raisons de santé de la mère, être autorisée jusqu'à un délai de 24 semaines de grossesse. Grâce à la diffusion des moyens de contraception, le nombre d'avortements a considérablement chuté ces dernières décennies, a par ailleurs assuré la délégation, après avoir indiqué qu'il y en a environ 40 000 par an dans le pays.

Les moyens de contraception ne sont pas gratuits pour les jeunes filles; elles doivent se prévaloir d'une ordonnance et n'ont donc pas accès à une contraception libre et gratuite, a ensuite souligné la délégation.

La durée du congé de maternité est de six mois et la mère peut choisir de rester chez elle jusqu'à ce que l'enfant ait atteint l'âge de 4 ans, a indiqué la délégation.

En ce qui concerne les enfants réfugiés et demandeurs d'asile, la délégation a fait valoir que la période de rétention des familles avec enfant a été réduite à 90 jours depuis cette année. En outre, un mineur non accompagné ne peut être expulsé vers son pays d'origine que lorsque l'État tchèque en a averti ledit pays.

S'agissant enfin de l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a indiqué que si un mineur de moins de 15 ans n'est pas pénalement responsable, les enfants de moins de 15 ans peuvent néanmoins dans certains cas être déférés devant un juge. Dans ce cas, le tribunal – qui est un tribunal pénal – ne peut pas lui imposer de sanctions pénales mais seulement des sanctions de nature autre; de telles mesures – dites de protection – peuvent être prises ex officio par le tribunal pénal s'il dispose pour cela d'informations suffisantes et elles dépendent bien sûr de la gravité de l'acte. Ces mesures de protection peuvent par exemple prendre la forme d'une supervision par un agent de protection ou d'une participation à un programme thérapeutique ou psychologique. Des tribunaux pour enfants existent auprès de tous les tribunaux de district du pays, a précisé la délégation.

Observations préliminaires

M. PETER GURAN, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport tchèque, a remercié la délégation pour les informations actualisées qu'elle a fournies aux membres du Comité. Il a fait part de plusieurs difficultés subsistant, de son point de vue, s'agissant de la mise en œuvre de la Convention en République tchèque. D'une part, il a relevé un manque de coordination des agents et instances chargés de la mise en œuvre de la Convention, assorti d'un manque de plan d'action clairement orienté vers la mise en œuvre de cet instrument. Le rapporteur a d'autre part déploré une absence de surveillance et de suivi indépendant de la mise en œuvre de la Convention; il n'y a pas de mécanisme de plaintes spécifiquement dédié aux enfants, a-t-il souligné. Il a enfin évoqué la question de la volonté politique au regard de la décentralisation des services sociaux qui ne sont pas suffisamment financés. M. Guran a estimé que l'esprit de la Convention fait défaut en République tchèque.

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