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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport de l'Iran

05 août 2010

5 août 2010

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de l'Iran sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de l'Iran, M. Gholam Hossein Dehghani, Directeur général aux affaires politiques internationales du Ministère des affaires étrangères, a indiqué que sept groupes nationaux, dotés de cultures et de langues diverses, à savoir les Fars, les Lors, les Azéris, les Kurdes, les Balouches, les Turkmènes et les Arabes, vivent en Iran. Tout en maintenant les composantes fondamentales de leurs identités, ces groupes ethniques ont aussi créé une identité nationale unique qui insuffle intégrité et unité à l'ensemble du pays, a-t-il déclaré. Les dispositions de la Convention sont considérées comme faisant partie de la loi interne et sont donc contraignantes, a poursuivi M. Dehghani. Il a par ailleurs attiré l'attention sur la loi de 2005 relative aux droits des citoyens, la plus importante adoptée ces dernières années dans ce domaine. Il a également fait part des allocations budgétaires et des sommes prélevées sur les revenus pétroliers et gaziers au bénéfice du développement des régions les moins développées du pays, en particulier celles habitées par des groupes ethniques.

La délégation iranienne était également composée de M. Seyyed Mohammad Reza Sajjadi, Représentant permanent de l'Iran auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que d'autres représentants du Ministère des affaires étrangères et de fonctionnaires du Ministère de l'intérieur, du Ministère de la culture et de l'orientation islamique, de l'Organisation judiciaire des forces armées; du pouvoir judiciaire, du Bureau de la Présidence de la République, et du Haut Conseil pour les droits de l'homme. Un membre du Parlement faisait également partie de la délégation. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, entre autres, de la place de la Convention dans l'ordre juridique interne; de l'intégration des femmes dans la société et l'économie; du respect du principe de l'égalité de tous devant la loi ainsi qu'en matière d'accès à l'emploi; des notions de «tribu» et de «nomade»; de la situation des minorités religieuses; ou encore des peines qui peuvent être prononcées pour des crimes graves. Elle a notamment expliqué que le cas d'une jeune femme dont il est prétendu qu'elle a été condamnée à mort par lapidation pour adultère est en réalité actuellement en cours de jugement, aucune sentence définitive n'ayant encore été rendue s'agissant de cette personne, dont la délégation a précisé qu'elle était également poursuivie pour complicité dans le meurtre de son mari.

Présentant en fin de séance des observations préliminaires, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Iran, M. Dilip Lahiri, a regretté que l'Iran ne semble pas comprendre l'utilité de disposer de données ventilées afin de savoir où il peut y avoir des discriminations et, ainsi, d'être en mesure de les corriger. En juin dernier, a-t-il par ailleurs déploré, le Conseil central de sélection des étudiants a affirmé que les étudiants des religions «artificielles» et des minorités non officielles n'avaient pas le droit d'étudier dans les universités. Il est pour le moins étonnant qu'une entité gouvernementale tienne de tels propos alors que l'Iran affirme que ses lois nationales ne sont pas en contradiction avec la Convention, a souligné M. Lahiri. Dans sa présentation, le rapporteur avait par ailleurs félicité l'État iranien pour l'adoption d'importantes mesures sociales, économiques et culturelles qui ont permis d'améliorer les niveaux de vie de sa population. En dépit des garanties constitutionnelles relatives à l'égalité de tous, les membres de minorités ethniques et religieuses semblent être soumis à diverses lois civiles et pénales discriminatoires, s'est-il toutefois inquiété.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de l'Ouzbékistan (CERD/C/UZB/6-7).

Présentation du rapport

M. GHOLAM HOSSEIN DEHGHANI, Directeur général pour les affaires politiques internationales au Ministère des affaires étrangères de la République islamique d'Iran, a indiqué que selon le dernier recensement national, la population iranienne s'élevait en 2007 de 70 495 782 habitants. Sept groupes nationaux, dotés de cultures et de langues diverses, à savoir les Fars, les Lors, les Azéris, les Kurdes, les Balouches, les Turkmènes et les Arabes, vivent en Iran, a-t-il précisé. Tout en maintenant les composantes fondamentales de leurs identités, ces groupes ethniques ont aussi créé une identité nationale unique qui insuffle intégrité et unité à l'ensemble du pays. L'intégrité et la coexistence pacifique de ces groupes ethniques sont depuis longtemps considérées dans la région comme une caractéristique essentielle de la société iranienne. On considère généralement que les habitants des provinces de l'Azerbaïdjan occidental, de l'Azerbaïdjan oriental, de l'Ardebil, du Zandjân, du Kurdistan, du Seistân-et-Baloutchistan, du Golestan, du Khorassan du Nord, du Khouzestan, du Tchahâr Mahâl-et-Backhtiâri, du Kohguilouyeh-et-Bouyerahmad, de l'Elâm et du Lorestân sont largement issus des groupes ethniques susmentionnés, a ajouté M. Dehghani.

La Constitution de la République islamique d'Iran, en tant que loi suprême du pays, a intégré les principes de non-discrimination dans la jouissance des droits fondamentaux et d'égalité de tous devant la loi et ce, avec une portée plus étendue encore que ce que prévoit la définition de la discrimination raciale énoncée dans la Convention, a poursuivi M. Dehghani. Sur la base de l'article 9 du Code civil et avec l'adoption de la loi relative à la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale par le Parlement iranien en 1968, les dispositions de la Convention sont considérées comme faisant partie de la loi interne et sont donc contraignantes, a-t-il ajouté, précisant que les cours et tribunaux du pays peuvent donc les invoquer lors des audiences et s'y référer dans leurs décisions.

M. Dehghani a par ailleurs attiré l'attention sur la loi de 2005 relative aux droits des citoyens, soulignant qu'il s'agit de la plus importante loi relevant du domaine des droits de l'homme qui ait été adoptée ces dernières années. Il a en outre mis l'accent sur un certain nombre de dispositions juridiques relatives à la non-discrimination dans le traitement du public en termes de droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Il a également fait part des allocations budgétaires et des sommes prélevées sur les revenus pétroliers et gaziers au bénéfice du développement des régions les moins développées du pays, en particulier celles habitées par des groupes ethniques. À cet égard, le représentant iranien a par la suite souligné qu'afin de donner un contenu concret aux objectifs de promotion de la justice et de développement équilibré de toutes les régions du pays, les crédits alloués aux provinces habitées par les groupes ethniques ont été très sensiblement augmentés.

L'Iran est devenu un chef de file dans la bataille contre l'apartheid et d'autres formes de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et d'intolérance y associée et a lancé un certain nombre d'initiatives dans le contexte du dialogue entre les civilisations et les cultures, a poursuivi M. Dehghani, rappelant que l'Iran avait lancé cette idée de dialogue entre les civilisations en opposition à la théorie du choc des civilisations, il y a plusieurs années. M. Dehghani a d'autre part indiqué que le Ministère iranien des affaires étrangères avait transmis le programme d'action de la Conférence de Durban aux autorités locales pertinentes aux fins de la mise en œuvre de ses dispositions.

Outre la loi relative aux poursuites et sanctions contre la propagande raciste, la loi relative à la presse, elle aussi, prévoit de punir la propagande fondée sur le racisme et la suprématie ethnique et raciale, ainsi que la diffusion d'idées racistes, a poursuivi M. Dehghani. Le paragraphe c) de l'article 2 de cette loi stipule que l'une des fonctions de la presse en Iran est de décourager toute présentation de document faux et fabriqué visant à semer la discorde et à entraîner la confrontation entre les groupes ethniques sur la base de la race, de la langue, des coutumes, des traditions. L'article 30 de cette même loi rappelle que la diffusion de tout document incluant des calomnies, diffamations, insultes ou mots obscènes à l'encontre des citoyens du pays est interdite. Étant donné la coexistence pacifique des groupes ethniques iraniens au cours de ce dernier millénaire, il n'y a pas eu de cas de propagation de racisme dans la presse iranienne ou dans les médias publics, a fait valoir M. Dehghani. Évoquant le cas du dessin caricatural publié dans le journal «Iran» en 2006 qui avait été considéré comme calomnieux et insultant pour les Azéris, il a rappelé que ce cas avait rapidement été pris en main par le procureur et l'organe de supervision de la presse et qu'il avait été estimé que cette acte n'était pas systématique et relevait d'une faute personnelle commise par inadvertance par une personne qui était d'ailleurs elle-même azérie. Le journal concerné fut temporairement interdit et ensuite autorisé à paraître de nouveau après présentation d'excuses publiques.

Il n'existe aucune restriction, distinction ou discrimination à l'encontre d'un quelconque groupe ethnique ou racial pour la constitution d'un parti politique ou de toute autre organisation, a par ailleurs assuré M. Dehghani. Le Gouvernement alloue chaque année un budget spécifique aux activités des partis, organisations non gouvernementales et associations de minorités religieuses et ce budget est distribué sans discrimination aucune, a-t-il affirmé.

Les tribunaux du pays sont tous tenus d'entendre sans discrimination les plaintes dont ils sont saisis, a poursuivi M. Dehghani. Les études qui ont été menées par les autorités pertinentes indiquent qu'il n'y a eu jusqu'ici aucune dénonciation d'acte de discrimination ou de manquement des autorités judiciaires dans le traitement des affaires de la part des membres des groupes ethniques, a-t-il indiqué.

Le rapport périodique de l'Iran (document CERD/C/IRN/18-19 - et non CERD/C/IRN/20 comme indiqué - regroupant les dix-huitième et dix-neuvième rapports) affirme d'emblée que, comme l'enseigne l'islam, les êtres humains sont égaux devant Dieu par nature et par essence, partagent les mêmes talents et ont les mêmes possibilités, peuvent s'élever dans l'échelle des valeurs, avoir une conduite exemplaire et sont récompensés pour leurs actes sans distinction de race, de couleur, d'origine ethnique ou nationale. L'islam, dans son enseignement, rejette et condamne les barrières raciales et ne tolère aucune discrimination ethnique ou raciale. De ce point de vue, l'appartenance à une ethnie ou à une race ne donne ni supériorité ni avantage. En conséquence, une approche discriminatoire n'a pas sa place dans la législation, la réglementation ou les décisions politiques du pays et il est impossible de trouver dans les règlements (y compris dans la Constitution ou les lois de la République islamique d'Iran) d'exemple de groupes qui seraient traités différemment dans la société en se fondant sur leurs différences raciales, ethniques ou linguistiques. Selon l'article 9 du droit civil, conformément à la Constitution, les dispositions des traités passés entre l'Iran et d'autres États sont assimilées à la loi, précise en outre le rapport.

La population des tribus en Iran, qui connaît un taux de croissance net d'environ 1,13 %, a été estimée à 1 395 283 personnes réparties en 213 911 familles à la fin de 2004, sur la base de deux recensements effectués en 1998 et 1987, indique par ailleurs le rapport. Environ 250 milliards de rials ont été alloués en 2005 et 234 milliards supplémentaires ont été affectés en 2006 pour aider à sédentariser les tribus nomades. Le budget tient spécialement compte du besoin de justice sociale, indique plus loin le rapport. L'Iran accueille encore un grand nombre de réfugiés, poursuit-il. Ces dernières années, la situation qui prévaut en Irak et en Afghanistan n'a pas favorisé ni encouragé les réfugiés à retourner dans leur pays d'origine. D'après le plan d'identification réalisé en 2002, 2 563 826 réfugiés ont été recensés en Iran parmi lesquels 2 355 427 Afghans, 202 877 Iraquiens et 5522 ressortissants d'autres pays. Les partis, les groupements, les associations politiques et syndicales, les associations islamiques ou les minorités religieuses reconnues, sont libres à condition qu'ils ne portent pas atteinte aux principes d'indépendance, de liberté, de solidarité nationale, aux préceptes islamiques et aux fondements de la République islamique, indique par ailleurs le rapport.
Ces dernières années, annuellement, environ 200 écoles avec internat ont été créées dans tout le pays pour les élèves des zones rurales défavorisées et des populations nomades, fait valoir le rapport. Un projet de loi sur l'éducation des réfugiés afghans ratifié par le gouvernement prévoit que les réfugiés afghans qui n'ont pas d'autorisation de séjour légale en Iran et les enfants afghans qui vivent légalement en Iran mais qui, pour des raisons professionnelles de leur père, ont dû changer de lieu de résidence, ont droit à l'éducation et que le Ministère de l'éducation et le Mouvement pour l'alphabétisation ont l'obligation de prendre en charge les réfugiés afghans en utilisant les capacités disponibles, en affectant des professeurs et en fournissant des livres.

Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité

M. DILIP LAHIRI, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Iran, a félicité l'État iranien pour l'adoption d'importantes mesures sociales, économiques et culturelles qui ont permis d'améliorer les niveaux de vie par le biais de la croissance économique et des programmes sociaux, tout en améliorant les services sociaux fondamentaux et les infrastructures dans les zones les moins développées du pays, habitées par des groupes de minorités ethniques. Des progrès significatifs ont également été enregistrés en ce qui concerne la situation des femmes, suite aux politiques et programmes stratégiques menés au niveau national en vue de leur développement économique et social – progrès d'autant plus remarquables qu'ils s'inscrivent sur une toile de fond de discrimination continue fondée sur le sexe.

L'Iran assure que toutes les dispositions de la Convention sont automatiquement incorporées dans la législation interne iranienne, a par ailleurs relevé M. Lahiri; si tel est le cas, comment comprendre la différence de traitement des personnes que prévoit le Code civil s'agissant des questions d'héritage ou encore le Code pénal pour ce qui est des sanctions prévues pour divers délits, a-t-il demandé?

S'il est détaillé et informatif et se conforme généralement aux directives du Comité, le rapport présenté par l'Iran n'en reste pas moins, s'agissant de certains domaines cruciaux, insuffisamment informatif pour permettre au Comité d'étudier l'application pratique de la Convention dans le pays, a poursuivi M. Lahiri. Ainsi, en dépit de demandes répétées, le Comité n'a à ce stade toujours pas reçu, s'agissant de la composition démographique de la population et des indicateurs économiques et sociaux, de données ventilées en fonction de l'appartenance ethnique. Le rôle du Comité est de suspecter l'existence d'une discrimination raciale, directe ou indirecte, chaque fois que des disparités marquées et persistantes entre groupes ethniques apparaissent dans ces indicateurs, a-t-il rappelé. Dans ce contexte, il a souhaité que soit clarifiée l'utilisation des termes «groupe ethnique», «tribu» et «communautés nomades».

En dépit des garanties constitutionnelles relatives à l'égalité de tous les citoyens, les membres de minorités ethniques et religieuses semblent être soumis à diverses lois civiles et pénales discriminatoires, s'est par ailleurs inquiété M. Lahiri. Il a attiré l'attention sur des informations persistantes laissant apparaître que les membres de minorités sont représentés de manière disproportionnée parmi les personnes qui sont confrontées à des jugements inéquitables ainsi que parmi les personnes condamnées à mort et exécutées.

D'autres informations persistantes, a poursuivi le rapporteur, indiquent que la candidature à des fonctions publiques ou à des emplois de la fonction publique est soumise à une sélection idéologique discriminatoire par le biais du processus de sélection dit «gozinesh». Un contrôle idéologique similaire – qui frapperait en particulier la communauté baha'íe - semblerait être appliqué pour ce qui est des possibilités offertes de poursuivre l'éducation, a ajouté M. Lahiri. Il s'est également inquiété d'informations persistantes relatives à des pratiques discriminatoires et harcèlements dont seraient victimes certains groupes tels que les Balouches, les Kurdes, les Azéris et les Arabes et s'est dit préoccupé par les informations faisant état de meurtres durant les manifestations qui se sont produites en 2005 dans le province du Khouzestan. M. Lahiri a également évoqué la situation spécifique des femmes issues de minorités ethniques, qui pourraient être exposées à une double discrimination.

S'agissant de la question de la religion, qui semble être inextricablement liée à l'appartenance ethnique, M. Lahiri a souhaité obtenir des clarifications quant à ce qu'impliquent les termes de «religion officielle» et de «religion reconnue» et quant à la situation de ceux qui, tels les baha'ís, ne relèvent d'aucune de ces catégories.

M. Lahiri a ensuite demandé à la délégation de préciser quelle était l'institution gouvernementale en charge de la lutte contre la discrimination raciale. Quelle est l'institution qui est habilitée à recevoir et traiter les plaintes émanant de victimes de discrimination raciale, a-t-il également demandé? Il s'est en outre enquis de la manière dont l'Iran traite de la question des langues des minorités.

Rappelant que lors de la procédure d'examen périodique universel du Conseil des droits de l'homme, l'Iran avait indiqué que la mise en place de l'institution nationale des droits de l'homme était l'une de ses priorités et qu'une législation pertinente était à cette fin en train d'être élaborée par le Haut Conseil pour les droits de l'homme et devait être bientôt présentée à l'Assemblée consultative islamique, M. Lahiri a demandé quelle était la situation actuelle à cet égard.

Un autre membre du Comité a relevé l'importance du pouvoir judiciaire en Iran; il faut donc se féliciter que la délégation présente devant le Comité intègre plusieurs représentants de ce pouvoir, a-t-il ajouté. L'expert a souhaité en savoir davantage sur le plan de développement actuellement en cours en Iran. Il s'est également enquis de la manière dont les autorités iraniennes appréhendent les mesures d'action positive. Arméniens et juifs, dont chacun sait qu'un certain nombre vivent depuis des siècles en Iran, où ils sont d'ailleurs bien intégrés, sont-ils considérés comme une minorité ethnique et leur permet-on de vivre suivant leurs cultures propres, a par ailleurs demandé cet expert?

Il est difficile aujourd'hui, alors que les femmes sont souvent victimes de discriminations multiples, de ne pas se préoccuper de discrimination à l'encontre des femmes lorsque l'on parle de discrimination raciale, a fait observer un autre expert. Aussi, s'est-il enquis de ce que pense la délégation iranienne des préoccupations exprimées et des débats nourris à travers le monde au sujet de la situation qui est faite aux femmes en Iran. Il a également voulu savoir quelles mesures le Gouvernement iranien mettait en place pour faire en sorte que les femmes soient traitées sur un pied d'égalité et ne soient pas victimes de discrimination.

Un membre du Comité s'est enquis de la situation des populations nomades, en particulier en ce qui concerne leur éducation et de leur santé.

Un expert a soulevé la question du traitement des étrangers dans le système judiciaire iranien, rappelant que certains rapports avaient fait état, à cet égard, de détention arbitraire. Aussi, a-t-il souhaité en savoir davantage sur le système de justice en Iran et sur la manière dont les étrangers sont traités dans ce contexte. Il s'est plus particulièrement enquis de la situation qui prévaut dans la prison d'Evin.

Un membre du Comité a relevé un certain contraste entre les informations très positives qui sont fournies dans le rapport périodique et dans la déclaration de présentation de la délégation et celles, plus réservées ou critiques, en provenance d'autres sources, extérieures – à savoir les autres organes des Nations Unies et les organisations non gouvernementales. L'expert s'est enquis du statut de la Convention dans l'ordre juridique interne iranien, rappelant que ce dernier est fondé sur les principes de l'islam. Il a voulu savoir si la loi islamique était supérieure au droit international ou si c'est ce dernier qui a la primauté sur le droit islamique. Tout en assurant avoir le plus grand respect pour les religions, l'expert a souligné que pour les organes conventionnels, la prééminence du droit universel des droits de l'homme est une préoccupation première. L'expert a demandé si l'interprétation stricte de la loi islamique, qui inspire notamment la Constitution, ne risquait pas d'aboutir à des discriminations à l'encontre des non musulmans, des étrangers ou encore des femmes en Iran.

L'expert s'est également enquis des mesures prises pour prévenir les pratiques discriminatoires et les atteintes à la liberté de pensée à l'encontre, notamment, des Balouches, des Azéris, des Kurdes, des arabes ou encore de la minorité baha'í. Quelles mesures ont-elles en outre été prises pour permettre aux étudiants de s'inscrire à l'université sans être tenus de préciser leur religion, a-t-il demandé?

Plusieurs experts se sont inquiétés de la volonté du Gouvernement de sédentariser les populations nomades.

Un expert a souhaité obtenir davantage de renseignements au sujet de la situation de la communauté baha'íe en Iran. Il s'est inquiété d'informations selon lesquelles les groupes minoritaires en Iran ne jouissent pas des mêmes droits que la population majoritaire; par exemple, les non musulmans ne jouissent pas des mêmes droits que les musulmans, a-t-il insisté.

Un expert s'est enquis de la manière dont les sunnites musulmans – qui sont en fait en Iran des Turkmènes, Kurdes et Balouches - se voient assurés leurs droits.

Plusieurs membres du Comité ont évoqué le cas d'une jeune femme qui, en Iran, vient d'être condamnée à mort par lapidation pour crime d'adultère.

Réponses de la délégation

La délégation iranienne a indiqué que le Haut Conseil aux droits de l'homme, présidé par le Ministre de la justice, est l'institution la plus importante en matière de droits de l'homme en Iran. Ce Conseil est chargé d'élaborer les politiques, de coordonner les activités et de recevoir les plaintes, a-t-elle précisé.

La coopération constructive, dont se sont fait l'écho le Président du Comité et certains des membres de cet organe, plutôt que la confrontation compétitive, peut assurer la réalisation, à travers le monde, de l'aspiration inhérente à la Convention, a par ailleurs déclaré la délégation.

La délégation a ensuite rappelé que l'Iran, membre fondateur de l'Organisation internationale du travail, a ratifié la plupart des conventions fondamentales de l'OIT. Tous les ressortissants du pays, sans discrimination, bénéficient de la protection de la loi pour ce qui est de l'accès à l'emploi et de l'accès à la formation, a ensuite souligné la délégation.

Aucun gouvernement de l'histoire récente du pays n'a jamais tenté de stéréotyper les ressortissants de l'Iran comme étant membres d'un quelconque groupe ethnique, racial ou religieux, a par ailleurs fait valoir la délégation. Les Iraniens se distinguent les uns des autres par leurs noms, parents et lieux de naissance et cela est vrai pour les musulmans comme pour les juifs ou autres.

Dans son dernier rapport devant l'OIT, a poursuivi la délégation, l'Iran a informé les experts de l'application des normes que, selon les dernières statistiques disponibles, la part du lion des postes de rang supérieur dans les provinces habitées par des groupes de minorités est accordée à ces minorités elles-mêmes. Il en est ainsi, par exemple, dans la province d'Azerbaïdjan occidental (Azerbaïdjan Sharghi) où les Turcs et les Kurdes occupent 83,71% de ces postes; dans la province d'Ilam où les Lors occupent 84,3% desdits postes; ou encore dans la province du Seistân-et-Baloutchistan, où Balouches en occupent 65,7%.

Ces dernières années, a par ailleurs souligné la délégation, les femmes ont été presque pleinement intégrées dans la société et l'économie iranienne. Ainsi, leur taux de participation économique au cours de la décennie écoulée a-t-il cru de 72% par rapport à la décennie précédente, a-t-elle fait valoir. Quant à l'accès des femmes à l'éducation supérieure, la délégation a indiqué que près de 390 306 femmes candidates ont été admises en 2008 dans des centres d'éducation supérieures, ce qui représente environ 70% du total des candidats. D'autre part, on trouve en Iran douze femmes membres du Parlement, deux femmes Vice-Présidentes, une femme Ministre de la santé et des femmes occupent des postes de rang supérieur dans la quasi-totalité des ministères ainsi que dans les bureaux administratifs aux niveaux provincial et municipal. Au moins un tiers des membres des conseils municipaux à travers le pays sont des femmes, a insisté la délégation.

Sur les près de 200 partis politiques que compte l'Iran, 17 appartiennent exclusivement aux femmes; on y trouve alors des femmes issues de tous les groupes ethniques, a par ailleurs indiqué la délégation.

Dans le système judiciaire iranien, a d'autre part rappelé la délégation, les conventions internationales deviennent contraignantes à partir du moment où elles ont été adoptées par le Majlis (Parlement); tous les articles de ces conventions deviennent alors assimilables aux lois iraniennes. Le Code civil iranien, dans sa toute première partie, énonce un certain nombre de principes généraux qui, dans d'autres pays, peuvent être évoqués dans la Constitution; il en va ainsi du processus d'application des lois, par exemple. Le Code civil établit notamment la place des conventions internationales dans l'ordre juridique interne. Ainsi, dès qu'une convention est adoptée par le pouvoir législatif iranien, elle devient assimilable à une loi et peut être appliquée, a réitéré la délégation. La primauté du droit international sur le droit national n'est pas acceptée dans le système juridique iranien; mais dans la pratique législative, les lois qui sont adoptées prévoient le respect des dispositions internationales préalablement acceptées par le pays. Par conséquent, l'Iran n'adopte et n'a donc aucune loi qui soit en contradiction avec les traités internationaux auxquels le pays a adhéré avant cette loi. Si les lois qui avaient été adoptées avant la République islamique et qui étaient en fait en contradiction avec la Constitution du pays n'ont pas été maintenues, il n'en demeure pas moins qu'il a été clairement établi que la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale était un texte auquel les tribunaux peuvent faire référence. Ainsi, il a été établi qu'il n'y a pas contradiction entre les articles de cette Convention et ceux que l'on peut trouver dans la Constitution ou les lois iraniennes.

Relevant que des membres du Comité ont affirmé que les membres des groupes ethniques sont davantage poursuivis en justice que les autres citoyens, la délégation a souligné que dans aucun procès en Iran n'est invoquée l'appartenance ethnique d'une personne, car toutes les personnes sont égales devant la loi et sont donc poursuivies de la même manière.

Présentant un certain nombre de cas montrant qu'aucune affaire en Iran n'est tranchée sur une base discriminatoire pour des motifs ethniques ou autre, la délégation a indiqué qu'en l'an 1360 du calendrier iranien, l'association des baha'ís du Seistân avait présenté une plainte concernant son cimetière, car le Ministère de l'écologie et de l'environnement souhaitait donner ce lot de terre au Ministère des transports et plus précisément à l'entreprise de bus de la province, pour en faire un parking. L'association susmentionnée a donc porté plainte et en l'an 1381 du calendrier iranien, la question fut réglée à l'amiable, le lot de terre qui se trouvait à côté de ce cimetière ayant été proposé aux baha'ís.

S'agissant du cas récent, soulevé par des membres du Comité, de la jeune femme dont il est prétendu en Europe et ailleurs qu'elle a été condamnée à mort par lapidation en Iran, la délégation a déclaré qu'un certain nombre d'informations erronées circulent dans la presse à ce sujet, qui sont reprises par des organisations non gouvernementales. Cette affaire est actuellement en cours de jugement et il n'y a pas encore eu de sentence définitive, a insisté la délégation. Aussi, a-t-elle jugé surprenant que la presse diffuse des informations tout à fait déformées et erronées à ce sujet. Dans cette affaire, la femme concernée, outre qu'elle a commis un adultère, est également poursuivie pour complicité dans le meurtre de son mari, a précisé la délégation. Selon la loi iranienne, une personne qui tue une autre personne est passible de la peine de mort, a-t-elle rappelé. Tant qu'une sentence définitive n'a pas été rendue, nul n'a le droit de se prononcer sur cette affaire, ni de répondre à des questions à ce sujet, a-t-elle ajouté.

En Iran, a souligné la délégation, il n'existe pas de population autochtone au sens de la définition retenue en la matière par les Nations Unies. Il y a une population iranienne qui vit là depuis des siècles. La délégation a tenu à ajouter que l'habitude dans le pays est de régler les problèmes par le dialogue.

L'Iran compte une soixantaine d'associations appartenant aux minorités religieuses, a en outre indiqué la délégation, précisant que chaque année, au moins 15 milliards de rials leur sont alloués pour les encourager à être actives dans les domaines social, culturel, sportif et caritatif. Les minorités religieuses ont le droit de pratiquer leur religion et d'exercer leurs coutumes; elles disposent également de leurs propres journaux, une dizaine au total.

Les seules minorités religieuses reconnues en Iran sont les chrétiens – essentiellement arméniens et assyriens –, les zoroastriens et les juifs. Ces minorités reconnues peuvent donc pratiquer leurs rites; ainsi, l'Iran compte 300 églises, 75 synagogues ainsi que de nombreux temples du feu pour les zoroastriens. Les membres de ces minorités peuvent s'inscrire dans les écoles du pays, mais aussi dans leurs propres écoles où ils peuvent recevoir un enseignement dans leur langue.

«Tribu» et «nomade» ne sont pas des termes définis en vertu du droit interne iranien, a par ailleurs indiqué la délégation. Pour ce qui est de la définition de ces termes, il faut donc s'en remettre aux facultés de sociologie des universités du pays. En Iran, a poursuivi la délégation, lorsqu'un certain nombre de familles sont reliées par leur ascendance, on en déduit qu'elles ont les mêmes racines et les mêmes origines, puisqu'elles ont des ancêtres communs; lorsque tel est le cas, on parle de tribu. Quant aux communautés nomades, quelle que soit leur religion, elles mènent généralement des activités dans l'élevage. L'Iran, du fait de son étendue, connaît divers climats, de sorte que les éleveurs, pour assurer un pâturage à leurs troupeaux, sont obligés de se déplacer d'un lieu à un autre, gagnant les contreforts des montagnes à la fin de printemps puis redescendant vers des zones plus tempérées à la fin de l'été, a expliqué la délégation.

Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires, le rapporteur pour l'examen du rapport de l'Iran, M. DILIP LAHIRI, s'est dit très impressionné par les explications très détaillées fournies par la délégation en réponse aux questions posées par les experts. Il s'est réjoui de tout ce qui est fait en Iran pour promouvoir le développement économique et social et améliorer la situation des femmes. Tout en prenant note de ce qui est fait en Iran en faveur, par exemple, des régions sous développées, il a toutefois regretté que l'Iran ne semble pas comprendre l'utilité qu'il y a de disposer de données ventilées afin de savoir où il peut y avoir des discriminations et, ce faisant, d'être en mesure de les corriger. En juin dernier, a-t-il par ailleurs déploré, le Conseil central de sélection des étudiants a affirmé que les étudiants des religions «artificielles» (autres que celles du livre) et des minorités non officielles n'avaient pas le droit d'étudier dans les universités et que, s'il s'en trouvait donc dans les universités du pays, il fallait le lui rapporter. Il est pour le moins étonnant qu'une entité gouvernementale tienne de tels propos alors que l'Iran affirme que ses lois nationales ne sont pas en contradiction avec la Convention, a souligné M. Lahiri.

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