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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport de la France

12 août 2010

12 août 2010

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de la France sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, le Représentant permanent de la France auprès des Nations Unies à Genève, M. Jacques Pellet, a indiqué que la lutte contre les discriminations en France, et en particulier la discrimination raciale, s'appuie d'abord sur une politique résolue d'intégration, qui vise à permettre à tous les immigrés en situation régulière de trouver leur place au sein de la société française et à les faire accéder à une citoyenneté pleine et entière. M. Pellet a reconnu que les gens du voyage et les Roms rencontrent d'importantes difficultés d'ordre économique et social, ajoutant que la situation des gens du voyage, qui sont pour l'immense majorité d'entre eux de nationalité française, doit être clairement distinguée de celle des Roms, qui sont étrangers et dont les modes de vie et les attentes vis-à-vis des pouvoirs publics sont très différents. Pour lutter contre les discriminations dont font l'objet les Roms, il est indispensable de traiter aussi la question du défaut d'intégration de ces populations dans leur pays d'origine. S'agissant de la question des aires d'accueil réservées aux gens du voyage, leur réalisation est encore inégale selon les départements, mais la politique du Gouvernement en faveur du développement de ces aires sera poursuivie. Le représentant a par ailleurs fait part de la décision du Gouvernement de lancer la préparation d'un plan national de lutte contre le racisme.

La délégation française était également composée de représentants du Ministère de l'immigration, de l'identité nationale, de l'intégration et du développement solidaire; du Ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer; du Ministère de la justice et des libertés; du Ministère de l'intérieur, de l'Outre-mer et des collectivités territoriales; et du Ministère des affaires étrangères et européennes. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, la situation des Roms et les procédures de renvoi vers la Roumanie; la situation des gens du voyage s'agissant en particulier de l'exercice du droit de vote et de l'obligation de détenir un titre de circulation; la situation dans les départements et territoire d'outre-mer; le bilan de la loi sur l'interdiction du port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les établissements scolaires; ou encore les récentes déclarations officielles concernant un projet de déchéance de la nationalité française pour les auteurs de certains crimes, la délégation ayant notamment précisé que ce projet pourra faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité, comme toute autre loi.

Le récent discours du Président français relativement au retrait de la nationalité française dans certains cas est «non seulement discriminant contre les Français d'origine étrangère» mais il «constitue également une incitation à la haine», a pour sa part affirmé un membre du Comité, jugeant en outre comme un fait «grave» l'adhésion de la majorité de la population française à ce discours. Un représentant de la Commission nationale consultative des droits de l'homme de la France a souligné que de telles mesures, en introduisant une distinction néfaste entre les citoyens contraire au principe d'égalité, renforcerait la stigmatisation des Français d'origine étrangère.

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la France, M. Pierre-Richard Prosper, a déclaré qu'«il est temps pour la France de faire vivre les rêves de liberté, d'égalité et de fraternité». La politique sécuritaire de la France est marquée par la stigmatisation de l'immigration comme cause de tous les maux, a déploré un autre membre du Comité. De nombreux experts ont évoqué la situation des Roms et gens du voyage en France, l'un d'entre eux se demandant pourquoi, alors que la liberté de circulation est garantie en France, des Français appartenant à des minorités sont obligés de se munir de carnets de circulation.

Le Comité adoptera, dans le cadre de séances privées, des observations finales sur le rapport de la France, qui seront rendues publiques à la fin de sa session, le 27 août prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale entamera l'examen du rapport de la Slovénie (CERD/C/SVN/7).

Présentation du rapport

M. JACQUES PELLET, Représentant permanent de la France auprès des Nations Unies à Genève, a déclaré que le débat sur l'identité nationale ouvert par le Ministre de l'immigration en novembre 2009 visait à répondre aux préoccupations soulevées par la résurgence de certains communautarismes et a pour objectif d'associer l'ensemble des citoyens à une réflexion de fond sur ce que signifie, en ce début du XXIe siècle, «être Français». Ce débat révèle le souci des autorités françaises de rappeler et de renforcer les valeurs républicaines de la France, ce qui suppose notamment la nécessité de réduire la distance séparant l'égalité formelle de l'égalité réelle entre les citoyens, a ajouté M. Pellet.

En France, a poursuivi le Représentant permanent, la lutte contre les discriminations et, en particulier, la discrimination raciale, s'appuie d'abord, au-delà de l'arsenal juridique, sur une politique résolue d'intégration, qui vise à permettre à tous les immigrés en situation régulière de trouver leur place au sein de la société française et à les faire accéder à une citoyenneté pleine et entière. Cette volonté d'intégration s'exprime dans l'ensemble des domaines de la vie publique et ne concerne pas seulement ceux qui, pour la première fois, arrivent en France dans la perspective d'un établissement durable, a souligné M. Pellet. À l'école, dans le monde du travail ou encore dans le cadre de l'exercice du droit à un logement, toute une série d'initiatives ont été lancées avec pour objectif de donner à chacun sa chance, une chance égale, quelles que soient ses origines ou ses croyances, a-t-il ajouté. «L'intégration n'est pas l'assimilation et l'appartenance de tous les citoyens à une République indivisible ne signifie pas négation des diversités culturelles», a-t-il poursuivi. «La France est traditionnellement une terre de migration, un lieu de métissages: la richesse de notre culture, nous la devons aussi à tous ceux et celles qui, au fil des siècles, sont venus s'installer sur notre sol et ont mêlé leurs histoires à celle de notre pays», a-t-il insisté. Il a ajouté que «cette histoire commune, il est de notre devoir de la faire connaître à l'ensemble de la société et plusieurs initiatives s'inscrivent dans cette perspective».

Trois mois après le lancement, en novembre 2009, du débat sur l'identité nationale, plusieurs pistes d'action ont pu être dégagées, a informé M. Pellet. Mais il ne s'agit là que d'une étape; le processus de réflexion n'est pas terminé et il a vocation à se prolonger dans le temps, a-t-il indiqué. Parmi les objectifs retenus à l'issue de ce séminaire, a-t-il précisé, figure le renforcement de l'intégration des étrangers dans la communauté nationale. C'est ainsi que les formations proposées gratuitement dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration signé avec chaque migrant primo-arrivant seront développées. En outre, l'opération «école ouverte aux parents d'enfants étrangers», expérimentée avec succès dans douze départements, va être étendue. Il est également proposé de faciliter l'accès à la nationalité française des étrangers signalés par le caractère exceptionnel de leur intégration, a indiqué M. Pellet.

«Notre politique d'intégration ne se limite pas, naturellement, aux conditions d'accueil en France des étrangers désireux de s'installer dans notre pays et d'acquérir la nationalité française. Elle concerne l'ensemble des aspects de la vie publique», a poursuivi le Représentant permanent de la France. Ainsi, en ce qui concerne la lutte contre les discriminations à l'école, la circulaire de la rentrée scolaire 2009 a fait du refus des discriminations et de la lutte contre la violence une priorité, a-t-il indiqué, soulignant que l'éducation est sans doute le premier des domaines où le principe de l'égalité des chances doit être pleinement effectif, afin de donner à tous, sans exception, les moyens de s'insérer dans la société. Les discriminations dans le domaine de l'emploi sont les plus nombreuses parmi celles adressées à la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE), a poursuivi M. Pellet. C'est dire l'importance d'une politique active, menée sur le terrain, afin de favoriser l'accès de tous au monde du travail. Aussi, M. Pellet a-t-il insisté sur l'initiative que constitue la mise en place d'une certification spécifique: le label «diversité» attribué par une commission indépendante et qui vise à garantir l'absence de toute discrimination dans tous les processus de gestion des ressources humaines des entreprises et des administrations. Au 31 juillet 2010, soit seulement 18 mois après sa création, près de 580 000 salariés étaient employés dans 210 établissements labellisés, ce qui prouve l'intérêt que cette démarche suscite auprès du monde économique, a précisé M. Pellet.

Une autre mesure, qui n'est pas encore effective mais devrait l'être prochainement, est celle du curriculum vitae anonyme, dont le principe a été posé par un article du code du travail, à la suite de l'adoption de la loi sur l'égalité des chances en mars 2008, a-t-il indiqué. La rédaction du décret d'application sera finalisée après consultation des partenaires sociaux sur le sujet et après avoir recueilli les résultats de l'expérimentation prévue dans le cadre de l'accord national interprofessionnel sur la diversité, a-t-il précisé. Par ailleurs, a fait valoir M. Pellet, la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale constitue une avancée considérable en matière de politique sociale du logement.

La politique d'intégration que développent avec conviction les autorités françaises ne saurait pour autant constituer une solution miracle, susceptible de répondre idéalement à toutes les situations auxquelles les pouvoirs publics sont confrontés, a toutefois reconnu M. Pellet. «Il ne fait pas de doute à cet égard que les gens du voyage et les Roms rencontrent sur notre territoire d'importantes difficultés d'ordre économique et social», a-t-il déclaré. En premier lieu, a-t-il poursuivi, la situation des gens du voyage, qui sont pour l'immense majorité d'entre eux de nationalité française, doit être clairement distinguée de celle des Roms, qui sont étrangers, essentiellement roumains et bulgares, et dont les modes de vie et les attentes vis-à-vis des pouvoirs publics sont très différents. La population des gens du voyage est estimée en France à environ 300 000 personnes, a indiqué M. Pellet. Or, ce sont 11 millions de Roms qui vivent en Europe, dont 7 à 9 millions au sein de l'Union européenne, a-t-il précisé. Leur situation socioéconomique est caractérisée par une grande précarité et leur intégration constitue un défi que la France s'efforce de relever, à l'échelon national mais aussi européen. Le Gouvernement estime en effet que pour lutter contre les discriminations dont font l'objet les Roms, il est indispensable de traiter aussi les causes de ce problème, à savoir le défaut d'intégration de ces populations dans leur pays d'origine, a déclaré le représentant. C'est le sens de l'initiative prise par la France et la Roumanie qui travaillent étroitement à l'intégration des Roms roumains en premier lieu dans leur pays d'origine, a-t-il souligné, précisant qu'un groupe de travail franco-roumain réuni pour la première fois en février 2010 doit élaborer et mettre en œuvre des accords bilatéraux dans le domaine de l'éducation des enfants et développer des programmes sociaux et sanitaires à l'intention des familles, à partir d'une feuille de route conjointe. L'objectif des autorités françaises est que les Roms se voient offrir des conditions de vie qui respectent leur égale dignité à travers l'ensemble de l'Union européenne, a insisté M. Pellet.

Les gens du voyage rencontrent quant à eux des difficultés de nature différente, notamment en raison de leur mode de vie itinérant, a poursuivi M. Pellet. L'Assemblée nationale a créé, en septembre 2009, une mission d'information parlementaire chargée d'établir le bilan et l'adaptation de la législation relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage, a-t-il fait valoir. La question d'une révision du dispositif d'application de la loi concernant les titres de circulation sera examinée dans le cadre des travaux de cette mission parlementaire, de même que celle relative aux modalités d'exercice du droit de vote par les gens du voyage, a-t-il indiqué. En ce qui concerne plus particulièrement les aires d'accueil réservées aux gens du voyage, il est incontestable que leur réalisation est encore inégale selon les départements, mais la politique du Gouvernement en faveur du développement de ces aires sera poursuivie, comme l'a encore tout récemment rappelé le Ministre de l'intérieur.

S'agissant de la répression des actes discriminatoires, le représentant français a notamment indiqué que par dépêche du 5 mars 2009, la Garde des Sceaux (Ministre de la justice) avait demandé aux procureurs généraux d'étendre la compétence des pôles antidiscrimination à tous les actes commis à raison de l'appartenance de la victime.

La lutte contre la discrimination raciale sur Internet fait partie des priorités de la France, a poursuivi M. Pellet, qui s'est dit conscient que la lutte contre le racisme sur Internet ne devait pas donner lieu à des restrictions abusives de la liberté d'expression.

M. Pellet a annoncé que le Gouvernement venait de décider de lancer la préparation d'un plan national de lutte contre le racisme, conformément aux engagements qu'il a pris sur la scène internationale.

En conclusion, le Représentant permanent de la France a reconnu qu'il n'existe aucun système parfait et que toutes les politiques, qu'elles soient communautaristes ou intégrationnistes, présentent des lacunes et des défauts. Il n'existe pas de modèle unique et infaillible, parce que chaque pays a son histoire, sa culture, ses choix de société qui lui sont propres, a-t-il insisté. «Nous sommes conscients de nos difficultés pour mettre un terme, sur notre territoire, au racisme, à la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance qui y est associée», a-t-il ajouté. «Nous avons en France une certitude: l'égalité est au cœur du pacte républicain et de l'identité de notre pays, et le respect de l'égalité nous impose de lutter jour après jour contre toutes les formes de discriminations, et la discrimination raciale en particulier», a-t-il conclu.

Le rapport périodique de la France (document CERD/C/FRA/17-19 regroupant les dix-septième à dix-neuvième rapports) indique qu'à la mi-2004, près de 5 millions d'immigrés résidaient en France métropolitaine, dont 1,97 million de français nés à l'étranger. Sur les 3,5 millions d'étrangers vivant en France à cette date, un peu moins de 3 millions sont nés à l'étranger, tandis que 550 000 sont nés en France. Parmi ces derniers, 450 000 sont des jeunes de moins de 18 ans, dont les parents sont étrangers et nés à l'étranger. Seuls les étrangers âgés d'au moins 18 ans (16 ans s'ils exercent une activité professionnelle) sont tenus de détenir un titre de séjour. Par conséquent, les chiffres contenus dans le rapport ne tiennent compte ni des mineurs, dont le nombre n'est pas connu de façon certaine, ni des étrangers en situation irrégulière. Par ailleurs, depuis 2004, les ressortissants des pays dits «communautaires» sont dispensés de titre de séjour. Il s'agit de 21 pays: les 15 pays de l'Union européenne avant l'élargissement, ainsi que Malte, Chypre, la Suisse, l'Islande, la Norvège et le Liechtenstein. La France ne reconnaît pas en son sein l'existence de minorités ayant un statut juridique en tant que tel, et considère que l'application des droits de l'homme à tous les ressortissants d'un État, dans l'égalité et la non-discrimination, apporte normalement à ceux-ci, quelle que soit leur situation, la protection pleine et entière à laquelle ils peuvent prétendre, indique également le rapport.

Depuis le précédent rapport, afin de renforcer la répression de toutes les formes de racisme et d'antisémitisme le législateur a étendu la circonstance aggravante à de nouvelles infractions telles que les menaces, les vols et les extorsions et a allongé les délais de prescription des délits à caractère raciste ou antisémite en matière de presse. Le rapport fait par ailleurs état de la création en 2007 d'un pôle antidiscriminations au sein de chaque parquet. La loi sur l'égalité des chances, du 31 mars 2006, a créé l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé), laquelle se substitue au Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations. L'Acsé vise à renforcer l'efficacité de l'action de l'État en faveur des habitants des quartiers dits prioritaires dans le cadre des politiques de la ville, dans l'intégration des personnes immigrées et issues de l'immigration et dans la lutte contre les discriminations. Par ailleurs, la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE), créée en 2004 en réponse aux sollicitations prévues dans les directives européennes en matière de lutte contre les discriminations, a vu ses pouvoirs renforcés par la loi 2006-396 du 31 mars 2006. Les tests de discrimination (dits testing) ont reçu une consécration législative par la loi du 31 mars 2006, indique par ailleurs le rapport.
La législation applicable en matière d'entrée et de séjour des étrangers s'articule autour de 3 orientations: préparation du parcours d'intégration dans le pays de résidence (prévoyant notamment une évaluation du degré de connaissance de la langue française et des valeurs de la République); mise en place d'un contrat d'accueil d'intégration pour la famille (formation spécifique sur les «droits et devoirs des parents»; renforcement de l'intégration par une meilleure insertion professionnelle. En 2007, la France a accueilli 35 520 demandeurs d'asile, se situant ainsi au second rang des pays européens en matière d'accueil, derrière la Suède. Ce chiffre était de 39 315 en 2006 et de 59 221 en 2005, précise le rapport. Au cours de l'année 2007, 8 781 personnes se sont vues octroyer le statut de réfugié ou la protection subsidiaire (7 354 en 2006), ce qui représente un taux d'admission de 29,9%, en augmentation (19,5% en 2006). Ce chiffre porte à 130 926 le nombre des réfugiés et des bénéficiaires de la protection subsidiaire. Le rapport attire en outre l'attention sur l'instauration, par la loi du 20 novembre 2007, d'un recours juridictionnel, pleinement suspensif contre les décisions de refus d'admission à la frontière au titre de l'asile.

La population tsigane en France est estimée, d'après les sources associatives, à environ 300 000 personnes. Elle est le plus souvent désignée sous l'appellation générique «gens du voyage» bien qu'environ un tiers seulement se déplace sur le territoire national. Un autre tiers est considéré comme semi-itinérant. Le dernier tiers est sédentarisé. Cette population rencontre d'importantes difficultés d'ordre économique et social. Outre des obstacles persistants dans le domaine du logement et du stationnement, les gens du voyage ont souvent une faible qualification qui permet difficilement leur insertion sur le marché du travail. Ils souffrent également de discriminations en matière d'emploi, de logement, d'éducation, de santé et de citoyenneté. L'action de l'État, conformément au modèle républicain, cherche à favoriser leur intégration dans la communauté nationale par l'accès aux droits fondamentaux de tout citoyen. Cette action se situe dans le cadre des politiques de droit commun, mais elle est également complétée, le cas échéant, par des mesures spécifiques.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. PIERRE-RICHARD PROSPER, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la France, a salué la volonté de coopération de la France avec le Comité, ainsi que le caractère impressionnant du rapport présenté. Les remarques de la France sont rassurantes, d'un point de vue juridique et technique, a poursuivi M. Prosper, ajoutant que la France dispose d'un arsenal d'outils pour combattre la discrimination raciale. La France est un grand pays dont la contribution à l'humanité est riche, a poursuivi M. Prosper, soulignant que l'influence de la France a été profonde à travers le monde. De nombreuses personnes ont alors eu soif de ce que la France offrait: la liberté.

Mais, dans le pays, nombreux sont ceux qui voient leur rêve brisé en constatant qu'ils n'ont pas de possibilité de se hisser vers le haut. Des efforts politiques sont même déployés pour révoquer leur nouvelle nationalité française.

D'une certaine façon, ce qui manque en France, c'est une réelle volonté politique, un effort, pour élever les plus qualifiés et leur permettre de concrétiser leurs rêves, a estimé le rapporteur.

Beaucoup d'immigrés s'intègrent certes bien dans la société française; mais le sentiment persiste qu'il y a très peu de diversité dans les «milieux influents», a constaté M. Prosper. «Il est temps pour la France de faire vivre les rêves de liberté, d'égalité et de fraternité», a lancé le rapporteur.

Un autre membre du Comité s'est inquiété de la recrudescence du racisme et de la xénophobie en France.

Un expert a salué la présentation du rapport de la France dans les délais et de la qualité du dialogue et de l'attitude de la France à l'égard du Comité. Il a ensuite indiqué qu'il aurait souhaité connaître la structure ethnique de la nation française, soulignant l'importance de telles données pour l'adoption de mesures préventives visant à améliorer les situations socioéconomiques particulières de certains groupes de population. Il a aussi souhaité en savoir davantage au sujet des gens du voyage et des Roms, s'agissant notamment des questions d'auto-identification et de l'accès à l'éducation. Il a en outre attiré l'attention sur le nombre insuffisant de campements disponibles pour ces personnes. Se pose également le problème de l'enregistrement sur les listes électorales de celles qui ont un mode de vie nomade, a souligné l'expert. Il a par ailleurs souhaité connaître le statut de Mayotte.

Sur la base des déclarations politiques récentes, on a «l'impression que le politique maltraite le droit en France», a pour sa part déclaré un autre expert. Il a par ailleurs vivement regretté que de nombreuses recommandations émanant d'institutions telles que la Commission nationale consultative des droits de l'homme et la HALDE ne soient pas suivies d'effet, surtout en ce qui concerne les questions de discrimination. Il a aussi demandé comment la France entendait traduire la décision du Conseil constitutionnel concernant les pensions des anciens combattants ressortissants des pays et territoires autrefois sous souveraineté française. La liberté de circulation étant garantie en France, pourquoi des Français appartenant à des minorités sont-ils obligés de se munir de carnets de circulation, ce qui est effrayant et «rappelle l'époque de Pétain», a poursuivi l'expert?

Une experte du Comité a par la suite indiqué ne pas comprendre pourquoi des citoyens français – les gens du voyage – doivent pointer à la police tous les trois mois, alors que la carte nationale d'identité n'est pas pour eux une obligation. Elle a souhaité que le Comité demande la suppression de ce système de titre de circulation.

Un autre membre du Comité a salué le «discours généreux, valorisant et plein d'espoir» de la délégation française, à partir duquel, a-t-il ajouté, on ne peut que s'interroger sur les faits actuels. Rappelant que la Convention considère la discrimination raciale comme un crime, l'expert s'est enquis de la constitutionnalité de certaines mesures à caractère administratif voire politique au regard de l'interdiction de la discrimination raciale. Les mesures récemment prises en France par le pouvoir politique sont-elles constitutionnelles, a insisté cet expert? A-t-on approché des magistrats du Conseil constitutionnel pour vérifier que des mesures prises ne soient pas un jour ou l'autre abrogées ou amendées, générant alors un déficit de confiance à l'égard de ceux qui prennent des décisions à caractère administratif? Comment peut-on expliquer qu'une décision à caractère général puisse être prise en lieu et place d'une décision qui aurait dû être prise à titre individuel en vertu du droit pénal, comme cela s'est vu dans le contexte des gens du voyage et des Roms, a demandé l'expert? Comment se peut-il que des Roms puissent être extradés d'un lieu qui appartient à l'Union européenne, comme si la Roumanie et la Bulgarie ne faisaient pas partie de l'Union européenne? L'expert s'est étonné qu'une différence puisse être établie «entre des citoyens français de première zone et des citoyens français de deuxième zone». Évoquant notamment les événements de Sétif de 1945, l'expert s'est demandé s'il ne serait pas possible pour la France de demander pardon au peuple algérien.

Une experte s'est enquise du sort réservé par la France aux recommandations que le Comité avait adressées au pays en ce qui concerne l'enseignement des langues, d'une part, et la situation des anciens combattants des anciennes colonies, de l'autre. Évoquant la situation en Outre-mer, cette experte a déclaré que «la France a mal à sa pluralité et a par conséquent mal à certains de ses principes». «Dans l'Outre-mer, c'est l'exacerbation d'une situation générale qui s'est traduite par des convulsions, des émeutes et des revendications qui vont peut-être au-delà de ce qui s'est passé jusqu'à présent», a poursuivi l'experte. Quant on parle de droit coutumier, on en arrive au statut des peuples autochtones, ce que la France ne reconnaît pas, puisqu'elle ne reconnaît ni minorités, ni peuples autochtones.

Évoquant la question de la terre en Nouvelle-Calédonie, l'experte a rappelé qu'après les accords de Nouméa, des efforts accrus avaient été déployés en vue d'une redistribution des terres aux Kanaks. Or, cette question, qui n'est pas traitée dans le rapport, est importante et incontournable, car, quel que soit l'avenir de la Nouvelle-Calédonie, cette question sous-tendra la politique dans la région et dans le Territoire, a souligné l'experte. Un membre du Comité a insisté sur la répartition inégale des terres en Nouvelle Calédonie où, selon certaines informations, on compterait 7 hectares de terres pour un Kanak pour 100 hectares pour un «Européen».

La France envisage-t-elle, dans le cadre du Plan national de lutte contre le racisme dont elle vient de décider de la préparation, une ouverture vers un minimum de reconnaissance des droits des peuples autochtones, a demandé une experte? Tous les événements récents en France sont dus à la «mise en œuvre d'une politique chaotique du cas par cas», et une vision d'ensemble serait la bienvenue dans ce contexte, a-t-elle estimé.

La lutte contre la discrimination raciale doit commencer à l'école, a pour sa part souligné un autre membre du Comité. La volonté de la France est bien réelle, comme le montent les différentes mesures qui sont prises par les autorités pour lutter contre le racisme et la discrimination, a-t-il poursuivi; mais les résultats ne sont pas à la mesure des efforts, au vu de la persistance des phénomènes racistes et xénophobes. La politique sécuritaire de la France est marquée par la stigmatisation de l'immigration comme cause de tous les maux, a-t-il poursuivi. Le récent discours du Président français sur le retrait de la nationalité française dans certains cas est «non seulement discriminant contre les Français d'origine étrangère» mais il «constitue également une incitation à la haine», a souligné l'expert, avant de juger comme grave le fait que la majorité de la population française adhère à ce discours.

Le climat a changé en France ces derniers temps, a souligné un expert. La préoccupation principale du Comité a trait à la situation des Roms, Français ou étrangers, résidant en France qui, quoi qu'il en soit, sont globalement tous citoyens de l'Union européenne, a-t-il indiqué. À cet égard, l'expert a dénoncé l'attitude visant à attribuer à l'ensemble de la communauté rom des actes criminels perpétrés au niveau individuel.

Un autre membre du Comité s'est enquis des effets qu'a eus la loi de 2004 sur le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les établissements scolaires.

Un expert s'est enquis de ce que signifie la notion de «Français d'origine étrangère» et s'est interrogé sur la constitutionnalité du projet de loi sur le retrait de la nationalité française s'il venait à devenir une loi.

Intervention de l'institution nationale des droits de l'homme de la France

M. MARC LEYENBERGER, membre de la Commission nationale consultative des droits de l'homme, a rappelé que la Commission, créée en 1947, a reçu pour mission - par la loi du 13 juillet 1990 - de présenter chaque année au Premier Ministre un rapport sur la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la xénophobie. Il a précisé que la Commission a été associée à la préparation du rapport de la France, selon une méthodologie désormais bien établie, comme pour l'examen périodique universel et les autres rapports présentés devant les organes de traités des Nations Unies. Au titre des recommandations de la Commission adressées au Gouvernement français, figurait notamment la nécessité pour la France d'adopter un plan national d'action de lutte contre le racisme, a souligné le représentant, avant de se féliciter que, depuis hier, la délégation française ait donné l'assurance de la mise en chantier de ce plan. Le représentant a en revanche déploré que le Comité interministériel de lutte contre le racisme, qui existe depuis plusieurs années, ne soit toujours pas à l'heure actuelle l'outil de pilotage si nécessaire qu'il devrait être.

Les manifestations du racisme sur Internet constituent un sujet de préoccupation constante de la Commission, a poursuivi son représentant. En effet Internet est devenu ces dernières années, en France comme ailleurs dans le monde, le moyen le plus accessible pour véhiculer des idées racistes et xénophobes, perpétuer ainsi des stéréotypes et entretenir des sentiments d'hostilité à l'égard notamment des juifs, des musulmans, des étrangers, des immigrés et des Roms. Devant la teneur et la multiplication des faits constatés, une action spécifique et concertée dans ce domaine doit être une priorité politique pour le Gouvernement français. Par ailleurs, la Commission réitère sa recommandation constante de créer un observatoire public du racisme, de l'antisémitisme et de la xénophobie sur Internet.

M. Leyenberger a par ailleurs souligné que la Commission n'avait pas manqué de se prononcer sur le récent projet de loi sur l'immigration, l'intégration et la nationalité, dans un avis rendu le 5 juillet dernier et qui figure sur le site de la Commission. Cette dernière fera montre de la même vigilance à l'égard d'amendements qui pourraient être introduits dans le projet de loi lors de la discussion parlementaire de l'automne, a assuré le représentant. Enfin, il a fait état de l'inquiétude des membres de la Commission devant les déclarations officielles de caractère discriminatoire à l'encontre des gens du voyage et des Roms à propos desquels la Commission avait produit en 2008 une étude de fond et une série de propositions en évitant toute stigmatisation et tout amalgame. Un communiqué de la Commission vient d'être publié à cet effet, a précisé le représentant, soulignant que ce communiqué aborde également les propositions gouvernementales récentes concernant l'élargissement des cas dans lesquels une personne pourrait être déchue de sa nationalité ainsi que la suppression de l'automaticité de l'acquisition de la nationalité française, à leur majorité, pour des mineurs nés en France qui auraient été condamnés. «De telles mesures, en introduisant une distinction néfaste entre les citoyens contraire au principe d'égalité, renforcerait la stigmatisation des «Français d'origine étrangère»», a affirmé M. Leyenberger.

Réponses de la délégation

La délégation française, en réponse aux préoccupations exprimées par des membres du Comité au sujet de la rigidité, réelle ou supposée, des principes et valeurs de la France et du refus de la France de reconnaître des composantes du peuple français comme constituant des minorités, a rappelé que le principe de l'égalité de tous les citoyens devant la loi fonde la politique de la France en matière de lutte contre la discrimination. La France reste profondément attachée à ce principe qui n'implique aucunement une négation des différences, culturelles, religieuses ou linguistiques, existant entre les citoyens, a-t-elle souligné. L'attachement de la France à ses valeurs et au «pacte républicain» n'est pas synonyme d'immobilisme, a insisté la délégation. Elle a rappelé que la dernière révision constitutionnelle, entrée en vigueur en mars dernier, a notamment instauré un contrôle de la constitutionnalité des lois par le citoyen. Elle a également attiré l'attention sur la création récente du défenseur des droits, auquel toute personne s'estimant lésée par le fonctionnement d'une administration ou d'un service public peut adresser une réclamation. Ce défenseur peut être saisi de tout cas de discrimination, directe ou indirecte, prohibée par la loi, a précisé la délégation. La saisine de ce défenseur des droits sera gratuite, a-t-elle indiqué, ajoutant que le défenseur pourra s'autosaisir.

En ce qui concerne les récentes déclarations de personnalités politiques, s'agissant plus particulièrement du projet de déchéance de la nationalité française susceptible d'être prononcée à l'encontre d'auteurs de crimes contre des dépositaires de l'autorité publique, la délégation a indiqué qu'il n'était pas possible de s'exprimer sur un projet de loi dont nul ne connaît encore les détours exacts. Il n'en demeure pas moins que ce projet pourra faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité, comme toute autre loi, a-t-elle souligné. Il ne s'agit pas pour la délégation de se dérober aux questions du Comité, mais il n'y a pour l'instant pas de texte, a fait remarquer la délégation.

S'agissant de la question de la revalorisation des pensions des anciens combattants ressortissants des pays et territoires autrefois sous souveraineté française, la délégation a rappelé les propos tenus le 13 juillet 2010, devant des chefs d'État africains, par le Président de la République, qui a affirmé qu'«il est des dettes qui ne s'éteignent jamais», annonçant ainsi que les pensions des anciens combattants africains seraient alignées sur celles de leurs homologues français. Cette annonce résulte d'une décision du Conseil constitutionnel du 28 mai 2010 et la nouvelle législation devrait profiter à près de 30 000 personnes, a indiqué la délégation.

Répondant aux questions sur la reconnaissance des minorités, la délégation a rappelé que la France a toujours averti des effets pervers que pourrait receler la tentative de définir des critères généraux associés à des minorités, voire de recenser des personnes appartenant à des minorités.

Malgré la politique volontariste de la France en matière de lutte contre les actes racistes et antisémites, ces actes restent, dans le pays, à un niveau trop élevé, a reconnu la délégation. Le préfet Michel Morin a donc été chargé de coordonner l'action des administrations compétentes en la matière et de faire des propositions visant à améliorer la connaissance statistique des actes antisémites et racistes; ses propositions devraient être connues d'ici quelques mois, a-t-elle indiqué.

La délégation a fait état d'une baisse d'environ 20% des «faits» racistes, ainsi que d'une baisse nette (de l'ordre de 60%) des «faits» antisémites, si l'on compare les premiers mois de 2009 et ceux de 2010. Le niveau moyen des peines d'emprisonnement ferme qui sont prononcées traduit la sévérité des juridictions face à de tels faits, a fait valoir la délégation.

En ce qui concerne la politique menée par la France au sujet des gens du voyage et la distinction qu'opère la France entre Roms et gens du voyage, la délégation a souligné que les gens du voyage sont en quasi-totalité des citoyens français dont on estime le nombre entre 300 000 et 400 000 en France. Ce terme de «gens du voyage» est un terme administratif qui permet d'éviter de distinguer des citoyens français en fonction de leur origine et correspond bien au mode de vie concerné, même si certains de ces gens du voyage sont totalement sédentarisés. Les Roms, en revanche, sont le plus souvent sédentaires; il s'agit de ressortissants de pays d'Europe centrale et orientale, principalement de la Roumanie et de la Bulgarie et on estime actuellement leur nombre sur le territoire français à environ 15 000.

Pour ce qui est du droit de vote des gens du voyage et de leur titre de circulation, la délégation a rappelé que ces questions ont fait l'objet à l'automne dernier d'un rapport spécial de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (HALDE), qui demandait que soit supprimée l'obligation faite aux gens du voyage de faire viser tous les trois mois un titre par la police ou la gendarmerie. Il convient ici de souligner que cette obligation relève d'une disposition légale qui date de 1969 et qui s'applique à toutes les personnes dépourvues de domicile fixe et logeant dans un véhicule, une remorque ou autre lieu mobile. Cette disposition se justifie par le fait que ces personnes n'ont pas d'attache permanente ni de domicile fixe; elle constitue «une contrepartie de la très grande liberté de circulation» dont bénéficient les gens du voyage, a affirmé la délégation. La HALDE ayant donc demandé que soient réexaminées les conditions dans lesquels ces documents (titres) sont visés, cette question – qui revient à se demander s'il faut continuer à les faire viser tous les trois mois – va être examinée par la Commission nationale consultative des gens du voyage, instituée en juin dernier, a indiqué la délégation. Certains gens du voyage estiment que ces documents constituent un symbole de leur identité, a tenu à préciser la délégation.

Par ailleurs, la HALDE a recommandé de réformer la loi de 1969 afin de garantir un accès non discriminatoire des gens du voyage au droit de vote. La délégation a expliqué que les gens du voyage ont bien la possibilité de voter et bénéficient pour ce faire de deux régimes d'inscription sur les listes électorales. L'un leur laisse le choix de la commune dans laquelle ils souhaitent être inscrits, pour autant qu'ils y résident depuis 3 années, alors qu'une autre disposition du code électoral concernant les personnes sans domicile stable permet à ces personnes de s'inscrire dans la commune où se situe la structure ou le centre d'accueil agréé dans lequel elles sont inscrites depuis au moins six mois. La réflexion sur cette question va également être menée dans les mois qui viennent au sein de la Commission nationale consultative des gens du voyage, a précisé la délégation.

Une réflexion est actuellement menée sur les moyens de mobiliser les collectivités locales qui n'ont pas répondu aux dispositions de la Loi Besson relatives à l'obligation d'instauration d'aires d'accueil pour les gens du voyage, a par ailleurs indiqué la délégation. Les gens du voyage devant payer un droit d'usage pour stationner sur ces aires, se pose en outre le problème de la tarification de ce droit d'usage, laquelle n'est pas harmonisée, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne la question de la scolarisation des gens du voyage et des Roms, la délégation a reconnu des difficultés dans ce domaine, rappelant par ailleurs qu'il existe un arsenal législatif destiné à réglementer l'accès à l'école. La délégation a rappelé que l'éducation en France est obligatoire jusqu'à 16 ans et gratuite, soulignant que les autorités ont mis en place des moyens importants pour s'assurer que tous aillent à l'école. La délégation a fait état de l'existence sur le territoire français d'une quarantaine d'antennes scolaires mobiles, mais il convient de développer des passerelles vers un cursus normal - qui reste l'objectif à atteindre pour toute la population.

Certes, a poursuivi la délégation, la Roumanie et la Bulgarie font partie de l'Union européenne depuis 2007 et les ressortissants de ces deux États bénéficient des libertés de circulation et de séjour sur l'ensemble du territoire de l'Union. Cependant, le traité d'adhésion de ces deux pays permet une période transitoire de sept ans, qui prendra fin en 2013, durant laquelle les États membres de l'Union peuvent maintenir une restriction à l'emploi des ressortissants de ces deux pays. La France, comme neuf autres pays de l'Union européenne, applique cette restriction qui relève d'un principe qui n'est pas nouveau puisqu'il fut appliqué en son temps à l'égard de l'Espagne et du Portugal.

Conformément au droit européen, a ajouté la délégation, tout État membre peut mettre fin au droit de séjour d'un ressortissant européen s'il est sans emploi, sans ressource et s'il représente une charge déraisonnable pour le système d'assurance sociale. Tous les renvois de Roumains ou de Bulgares qui sont opérés par la France se font dans le cadre de retours volontaires; en outre, ils relèvent toujours de procédures individualisées et des aides peuvent être apportées à la réinsertion dans le pays d'origine. En 2009, plus de 7000 Roumains ont bénéficié de cette aide humanitaire au retour volontaire, a déclaré la délégation.

En ce qui concerne les départements et territoires d'Outre-mer (DOM-TOM), la délégation a indiqué qu'un projet de loi relatif à la départementalisation de Mayotte a été déposé devant le Parlement et devrait être adopté d'ici la fin de l'année. Ainsi, le département de Mayotte, exerçant à la fois les compétences d'un département et d'une région, devrait être crée en mars 2011. Pour ce qui est de la question de l'attribution de terres aux Kanaks, prévue dans les accords de Nouméa, la délégation a indiqué que c'est une agence foncière qui s'est vu confier la charge d'organiser la restitution. Ce processus est en cours; il est long et il s'agit d'une tâche difficile, car il faut cadastrer l'ensemble des terres de Nouvelle-Calédonie et il faut ensuite démontrer, ce qui n'est pas aisé, qu'il y a eu spoliation, a souligné la délégation.

S'agissant du bilan de la loi sur l'interdiction du port de signes religieux ostentatoires à l'école, la délégation a indiqué que 639 élèves se sont présentés à la rentrée 2004-2005 avec un signe ostensible d'appartenance religieuse, soit moitié moins qu'à la rentrée précédente; seuls 47 d'entre eux ont alors été définitivement exclus après passage devant le conseil de discipline. En 2008-2009, aucun cas n'a donné lieu à une action disciplinaire, a ajouté la délégation.

Dissimuler son visage dans l'espace public est une question totalement différente, a poursuivi la délégation. La loi élaborée sur cette question ne vise pas une pratique religieuse; elle procède d'une part de la reconnaissance du fait que le voile intégral est un obstacle à l'émancipation et à la sociabilisation de la femme et, d'autre part, de la nécessité d'assurer l'ordre et la sécurité publique, qui sont très difficiles à assurer si des personnes ont le visage dissimulé dans le contexte des diverses transactions quotidiennes.

Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la France, M. PROSPER, a remercié la délégation pour le dialogue fructueux et exhaustif avec le Comité, qui a permis d'en apprendre davantage au sujet des efforts déployés par la France en matière de lutte contre la discrimination raciale. Il a souligné que la France est un État de droit qui dispose de nombreux outils pour remédier aux problèmes qui se posent. À l'avenir, a-t-il ajouté, il serait utile de mener un débat technique sur la nature même des problèmes. Les statistiques doivent permettre d'identifier les groupes qui souffrent le plus, a-t-il par ailleurs rappelé. Il semble qu'il y ait beaucoup de débat en France sur les mécanismes qui devraient être mis en œuvre, a constaté l'expert, ajoutant que la France devrait savoir à quel niveau prendre les décisions pour résoudre les problèmes. Lorsque l'on rentre dans les considérations bureaucratiques, les choses prennent du temps, alors que des décisions pourraient être prises et des mesures prises dès maintenant, a-t-il souligné. Par ailleurs, il convient de se réjouir du plan national de lutte contre le racisme dont la France vient d'annoncer la préparation, a-t-il conclu.

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