Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport d'El Salvador

04 août 2010

4 août 2010
 

La délégation annonce la fin d'une politique de non-reconnaissance et d'oubli des peuples autochtones suite à l'arrivée au pouvoir de l'actuel Président

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport d'El Salvador sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, M. Alfonso Avelar, Directeur de la Direction des peuples autochtones au Secrétariat de l'intégration sociale d'El Salvador, a notamment annoncé qu'en vertu d'un accord signé la semaine dernière, toutes les personnes appartenant aux peuples autochtones qui, en raison de la répression de 1932, avaient dû changer de noms, pouvaient désormais récupérer leurs noms et prénoms autochtones. Ainsi, le Gouvernement du Président Mauricio Funes manifeste-t-il son engagement en faveur du dédommagement moral des peuples autochtones. Avec la présidence de Mauricio Funes, la politique de non-reconnaissance et d'oubli des peuples autochtones a pris fin, a insisté M. Avelar, qui a notamment attiré l'attention sur la convocation, en octobre prochain, du premier Congrès national autochtone. Au nombre des défis à relever, il a notamment cité la nécessité d'obtenir un consensus de la part des organisations autochtones afin d'élaborer des politiques publiques et de faire en sorte que les mesures de dédommagement moral permettront aux peuples autochtones de trouver confiance en l'État et de déclarer leur condition d'autochtone lors du recensement de 2012.

La délégation salvadorienne était également constituée de représentants du Ministère de l'éducation, du Ministère des relations extérieures, ainsi que de M. Byron Fernando Larios López, Représentant permanent d'El Salvador auprès des Nations Unies à Genève et d'autres membres de la Mission. Elle a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, essentiellement, de la situation des autochtones dans le pays, faisant part, notamment, de la volonté du Gouvernement salvadorien d'adhérer à la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail relative aux peuples indigènes et tribaux. Nombre de membres du Comité ont pris acte du changement profond de la politique de l'État salvadorien, du moins en ce qui concerne la population autochtone.

Présentant des observations préliminaires, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport d'El Salvador, M. Alexei Avtonomov, s'est dit conscient des changements politiques en cours en El Salvador et qui sont très importants. Il a exprimé l'espoir que les recommandations qui seront adressées à El Salvador seront utiles, en particulier dans le cadre des mesures que le Gouvernement sera appelé à prendre en faveur des peuples autochtones – qui ont connu une situation extrêmement grave en El Salvador.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de l'Iran (CERD/C/IRN/20).

Présentation du rapport

M. ALFONSO AVELAR, Directeur de la Direction des peuples autochtones au Secrétariat de l'intégration sociale d'El Salvador, a reconnu que, dans les rapports soumis par les gouvernements antérieurs, la position exprimée relativement à l'existence de peuples autochtones en El Salvador a consisté d'abord à en nier l'existence, puis à dire que les peuples autochtones existent mais sont invisibles en raison du métissage et enfin à dire que les peuples autochtones existent, mais qu'il est difficile d'en préciser le nombre car ils ne se définissent pas comme tels. Sur cette base, il était affirmé que la discrimination raciale n'existait pas dans le pays, ce qui avait pour conséquence un manque de reconnaissance juridique et l'absence de politiques publiques consacrées à la promotion et à la protection des droits des peuples autochtones. L'État d'El Salvador reconnaît que le contenu du présent rapport se borne à présenter un rappel des dispositions légales qui interdisent la discrimination dans chacun des domaines qui intéressent la Convention, ce qui correspond à la politique des gouvernements du passé consistant à nier l'existence des peuples autochtones et, par conséquent, à une pratique de discrimination à l'égard de ces peuples.

M. Avelar a rappelé qu'en 1932, la zone occidentale du pays avait été le théâtre d'un soulèvement autochtone qui s'était soldé par la mort d'environ 32 000 personnes. Les personnes qui ont survécu à ce massacre ont été obligées à changer de noms et de prénoms, à occulter ainsi leur identité et à se disperser à travers le territoire salvadorien, changeant également leur mode vestimentaire et leur façon de parler et d'exprimer leurs coutumes, car si elles étaient identifiées, elles risquaient d'être mutilées voire assassinées, ce qui n'a pas empêché que des personnes appartenant à ces peuples d'origine soient tuées et portées disparues dans le cadre de la répression, comme en témoignent le massacre intervenu en 1983 à Las Hojas ainsi que d'autres faits survenus dans le pays entre janvier 1980 et juillet 1991.

S'agissant de la loi d'amnistie de 1993, M. Avelar a souligné qu'une sentence de la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice en date du 26 septembre 2000 ouvre la possibilité pour les juges, dans l'examen de cas concrets, d'envisager la non-application de la loi d'amnistie de 1993 face à des violations intervenues durant le conflit armé interne.

Les peuples autochtones d'El Salvador n'ont pas les caractéristiques culturelles externes observables chez d'autres peuples et dans d'autres cultures, comme par exemple l'usage de vêtements traditionnels ou d'une langue propre, a fait observer M. Avelar. Les autochtones d'El Salvador sont «invisibles», en ce sens que les facteurs susceptibles de les identifier comme peuple relèvent d'aspects tels que leur vision cosmique, leurs traditions, leurs coutumes ou leurs connaissances en médecine traditionnelle. Leur existence historique, l'usufruit du sol ou encore l'éducation bilingue sont des aspects actuellement fondamentaux dans le cadre d'un nouveau contexte pour la reconnaissance des peuples autochtones, a indiqué M. Avelar. En El Salvador, a-t-il poursuivi, il existe trois groupes autochtones: les Nahuat/Pipiles, les Lencas et les Kakawiras (ou Cacaopera). Ces groupes se trouvent géographiquement dans les départements de Sonsonate, d'Ahuachapán, de La Paz et de Morazán. À cet égard, a insisté M. Avelar, l'État d'El Salvador souhaite indiquer clairement au Comité qu'il reconnaît qu'El Salvador est une nation multiculturelle, qu'au moins deux des peuples parlent une langue différente du castillan, qu'il existe un héritage culturel, historique et ethnique produit de ses peuples originaires et que la reconnaissance légale de l'existence des peuples est donc judicieuse. L'État d'El Salvador reconnaît en outre qu'il est judicieux de dégager, en collaboration avec les peuples autochtones, un consensus afin que l'État puisse mener à bien des politiques publiques qui incluent les populations autochtones dans l'ordre du jour national en vue de favoriser le développement économique, social et culturels de ces peuples.

Le représentant salvadorien a annoncé qu'en vertu d'un accord signé la semaine dernière – le 28 juillet 2010 – entre le Secrétariat à l'intégration sociale et le Registre national des personnes naturelles, la Corporation des municipalités du pays et le bureau du Procureur général du pays, toutes les personnes appartenant aux peuples autochtones qui, en raison de la répression de 1932, avaient dû changer de noms (en l'achetant ou en l'acquérant de toute autre manière) peuvent désormais récupérer leurs noms et prénoms autochtones.

Ainsi, le Gouvernement du Président Mauricio Funes manifeste-t-il son engagement en faveur du dédommagement moral des peuples autochtones. Avec la présidence de Mauricio Funes, la politique de non-reconnaissance et d'oubli des peuples autochtones a pris fin, a insisté M. Avelar, exprimant la ferme volonté de l'État salvadorien d'entreprendre des actions concrètes en vue du dédommagement moral des peuples autochtones et, dans la mesure des ressources, de la réparation matérielle. L'acceptation par l'État salvadorien de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones est un témoignage clair de la volonté qui existe de reconnaître les droits de ces peuples. Par ailleurs, a ajouté M. Avelar, le Gouvernement est en train de consulter les diverses entités gouvernementales en vue de l'adhésion du pays à la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail.

Les estimations concernant la population autochtone en El Salvador ne sont pas fiables, a poursuivi M. Avelar. Alors qu'une étude menée en 2003 avec le soutien de la Banque mondiale était parvenue à un pourcentage de population autochtone oscillant entre 10 et 12% de la population salvadorienne, le recensement national de 2007 était parvenu à un chiffre de 0,23%, ce qui avait amené le Comité à parler de «présumé génocide statistique», a-t-il rappelé. Aussi, des discussions sont-elles en cours pour qu'en 2012, une étude soit conjointement menée par des institutions gouvernementales et par le Fonds des Nations Unies pour la population, afin de disposer de données ventilées concernant la population autochtone dans le pays.

S'agissant de l'intégration de la définition de la discrimination raciale dans la législation interne, M. Avelar a indiqué que le Secrétariat à l'intégration sociale prévoyait à moyen terme le lancement d'une initiative législative visant l'incorporation, dans le droit interne, d'une définition qui soit conforme aux termes de la Convention. Le représentant a souligné qu'en attendant, dans la pratique, la définition de la discrimination a été élargie.

Par ailleurs, une commission de l'Assemblée législative est saisie d'une proposition de réforme constitutionnelle soumise par la chambre permanente du Bureau du Procureur pour la défense des droits de l'homme qui stipule notamment que «les peuples autochtones sont des peuples originaires des terres qui forment le territoire salvadorien et qu'ils ont donc le droit de développer leurs formes propres d'organisation sociale, politique et économique, leurs cultures, usages et coutumes, leurs langues et religions, ainsi que leurs territoires qui, ancestralement et traditionnellement leur correspondent conformément à leur vision cosmologique».

L'État salvadorien est en train de mener un processus de consultation interne visant la reconnaissance de la compétence du Comité pour recevoir des communications en vertu de l'article 14 de la Convention, a par ailleurs indiqué M. Avelar.

M. Avelar a ensuite indiqué que la convocation du premier Congrès national autochtone est programmée pour le 12 octobre prochain; l'ordre du jour de ce Congrès s'établit sur la base de la participation des organisations autochtones et du consensus entre elles et on espère en outre la reconnaissance publique par l'État salvadorien de l'existence des peuples autochtones en El Salvador, a-t-il précisé. Il a souligné que la Direction des peuples autochtones du Secrétariat à l'intégration sociale est la plus haute autorité gouvernementale pour ce qui a trait aux peuples autochtones. À ce jour, 21 associations autochtones sont inscrites au Registre national des associations et fondations à but non lucratif, a-t-il en outre indiqué.

Pour l'Institut salvadorien de transformation agraire, les principaux critères pour l'octroi des terres sont que les personnes n'aient pas de terres et qu'elles se consacrent à la production agricole, a par ailleurs indiqué M. Avelar. Cette institution ne retient pas la condition ethnique comme critère pour l'assignation de terres, a-t-il ajouté. Il a en outre fait part de deux programmes spécifiques que le Ministère de la santé est en train de mettre en œuvre afin de promouvoir l'accès des peuples autochtones aux services de santé. Le Gouvernement salvadorien actuel conçoit la santé comme un bien public et rejette toute idée de la considérer comme une marchandise, a déclaré M. Avelar. Au nombre des actions prioritaires du Gouvernement, a-t-il ajouté, figure l'élargissement de la couverture des services de santé dans les zones rurales et dans les zones urbaines les plus fragiles socialement.

La justice est gratuite en El Salvador, a par ailleurs fait valoir M. Avelar. Il a toutefois reconnu qu'El Salvador en compte 21 056 détenus pour une capacité totale de 8110 personnes dans les institutions pénitentiaires. Cette réalité est notamment imputable à la politique dite de la main dure contre les bandes criminelles, qui pénalise les personnes qui arborent des symboles ou des signes comme moyens d'identification et qui se marquent le corps de cicatrices ou de tatouages. Dans le cadre de cette politique, deux lois contre les bandes furent successivement adoptées, a précisé M. Avelar. Le Président Funes reconnaît que la situation des bandes est un problème complexe qui plonge ses racines dans la pauvreté et l'exclusion sociale et qui requiert un traitement multidisciplinaire, a-t-il indiqué.

Au nombre des défis à relever, M Avelar a également cité la nécessité d'obtenir un consensus de la part des organisations autochtones afin d'élaborer des politiques publiques et de faire en sorte que les mesures de dédommagement moral servent à ce que les peuples autochtones aient confiance en l'État et affirment leur condition autochtone lors du recensement de 2012.

Le rapport périodique d'El Salvador (document regroupant les quatorzième et quinzième rapports CERD/C/SLV/14-15) rappelle qu'il est établi à l'article 144 de la Constitution que les traités conclus par El Salvador constituent des lois de la République et l'emportent sur les lois secondaires. Il souligne en outre qu'aux termes de l'article 3 de la Constitution: «Toutes les personnes sont égales devant la loi. La jouissance des droits civils ne peut faire l'objet de restrictions fondées sur des différences de nationalité, de race, de sexe ou de religion. Aucun emploi ou privilège ne peut être héréditaire». Les dispositions de la Constitution relatives à l'éducation, aux sciences et à la culture interdisent aux établissements d'enseignement de refuser l'accès à l'éducation pour des motifs de race. Au niveau des lois secondaires, le principe de non-discrimination dans le domaine de la santé est consacré par le Code de la santé, qui prévoit à l'article 33 que les professionnels, techniciens, auxiliaires, spécialistes et assistants de la santé sont tenus de fournir la meilleure assistance possible à toute personne qui sollicite leurs services, en se préoccupant toujours de son état, sans distinction de nationalité, de religion, de race, d'opinion politique ou de classe sociale, etc. En outre, selon l'article 47 de ce Code, le Ministère de la santé publique et ses différents services doivent promouvoir le bien-être social de tous les membres de la société quelles que soient leur idéologie ou leurs croyances. Par ailleurs, la discrimination en matière d'emploi pour des motifs raciaux est interdite par le Code pénal (article 246). Le rapport indique aussi que la procédure d'amparo peut être engagée contre tout type d'acte ou d'omission de la part de toute autorité ou tout fonctionnaire de l'État ou de ses organismes décentralisés et contre les décisions définitives rendues par la Chambre du contentieux administratif qui violeraient ces droits ou feraient obstacle à leur exercice.

Il existe en El Salvador des dispositions qui sanctionnent les actes ou les idées qui encouragent la supériorité ou la haine raciale, ainsi que tous actes de violence ou d'incitation dirigés contre toute race ou tout groupe de personnes d'une autre couleur ou d'une autre origine ethnique, poursuit le rapport. Il convient de mentionner qu'il n'existe pas dans le pays d'organisations ni d'activités de propagande qui incitent à la discrimination raciale ou qui l'encouragent, ajoute-t-il. Par ailleurs, il n'a pas été signalé en El Salvador de cas dans lesquels une autorité ou une institution publique, nationale ou locale aurait incité à la discrimination raciale ou l'aurait encouragée. Dans les registres statistiques de la Police nationale civile (PNC), il n'est fait mention, jusqu'en l'an 2008, d'aucune affaire ni d'aucune plainte concernant des membres du corps de police, des fonctionnaires ou des particuliers qui auraient violé le droit à la sûreté de la personne, ou seraient coupables d'actes de violence contre une personne ou d'atteinte à son intégrité par suite d'une quelconque discrimination, fait en outre valoir le rapport.

En ce qui concerne le droit à la santé, pour satisfaire les besoins de la population en la matière, le Gouvernement salvadorien a décrété la gratuité des soins de santé primaires. Dans tous les établissements de santé publics, des soins sont dispensés à quiconque en fait la demande, sans distinction de croyance, de race ou d'origine sociale, conformément à la Constitution. Il convient de préciser que le système éducatif d'El Salvador accueille tous les enfants et adolescents nés de parents étrangers, indique par ailleurs le rapport. Dans le cadre des politiques publiques d'El Salvador destinées à répondre aux besoins des populations autochtones, des actions ont été réalisées en faveur des droits culturels et sociaux de ces populations. Ainsi, depuis 2004, le Conseil national pour la culture et les arts (CONCULTURA) mène-t-il, en coopération avec l'Université Don Bosco un projet de revitalisation de la langue nahuatl, indique notamment le rapport. Les résultats du recensement ont fait apparaître que la population autochtone comptait 13 310 personnes et formait 0,23 % du total des habitants, indique par ailleurs le rapport. Il précise en outre que de l'an 2000 à ce jour, le statut de réfugié a été reconnu à 66 personnes: 33 Colombiens, 29 Nicaraguayens établis dans le pays de longue date, 1 Russe, 2 Tamouls (Sri Lanka), et 1 Sud-Africain.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. ALEXEI S.AVTONOMOV, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport d'El Salvador, a relevé que certaines des préoccupations que le Comité avait exprimées dans ses dernières observations finales en date concernant El Salvador ne trouvent pas de réponse dans le présent rapport, de sorte qu'il n'est pas possible de savoir ce qui a été fait pour corriger des problèmes ou des lacunes qui avaient alors été identifiés. Ce rapport parle de la législation existante mais ne fournit pas d'informations concernant la mise en œuvre de cette législation, a-t-il en outre déploré. Faute de savoir si les dispositions juridiques existantes sont appliquées, il est difficile de dire si elles sont pertinentes.

M. Avtonomov s'est félicité qu'El Salvador ait ratifié la Convention internationale sur les droits des personnes handicapées et son Protocole facultatif. Il s'est également réjoui de l'adoption en 2009 de la loi pour la protection intégrale de l'enfant et de l'adolescent. Le rapporteur s'est ensuite enquis des mesures prises pour promouvoir les langues et cultures d'autres peuples autochtones que celui des Nahuat. Certaines organisations non gouvernementales évaluent à 600 000 personnes environ, soit 10% de la population totale, la proportion des peuples autochtones en El Salvador, alors que des statistiques officielles parlent d'une proportion de 0,23%, a-t-il par ailleurs fait observer.

Il y aurait encore un petit nombre de Mayas sur le territoire salvadorien et il serait judicieux d'en savoir davantage sur leur situation, a ajouté l'expert. Il convient en outre d'éclaircir plus avant la question de la propriété des terres concernant les peuples autochtones, a-t-il souligné. Il a souhaité en savoir davantage au sujet de la mise en œuvre du programme d'affectation des terres dont est chargé l'Institut de transformation agraire.

Le rapporteur a également souhaité obtenir davantage de précisions au sujet de la situation des réfugiés en El Salvador et de la manière dont s'obtient le statut de réfugiés dans ce pays.

Plusieurs autres membres du Comité ont relevé que la déclaration orale faite par la délégation salvadorienne au titre de la présentation du rapport témoigne d'un changement profond de la politique de l'État, au moins en ce qui concerne la population autochtone. Plusieurs experts ont souhaité savoir si El Salvador envisageait de ratifier la Convention n°169 de l'OIT sur les peuples autochtones et tribaux.

Un citoyen espagnol a priorité sur tout autre citoyen étranger aux fins de l'acquisition de la citoyenneté salvadorienne, ce qui au regard de la Convention constitue une discrimination, a relevé un membre du Comité. Cet expert s'est en outre enquis des mesures que le pays entend prendre pour protéger les défenseurs des droits de l'homme, y compris ceux qui proviennent des populations autochtones.

Un expert s'est étonné que ni le rapport, ni la délégation n'aient mentionné la population d'ascendance africaine en El Salvador, de sorte qu'il est permis de penser que cette population est, dans ce pays, encore plus «invisible» que la population autochtone.

Les populations autochtones disposent-elles de titres de propriété qui leur permettrait d'appuyer leurs revendications foncières, a demandé un autre expert?

Un membre du Comité s'est enquis des éventuelles initiatives en cours en vue d'une abolition de la loi d'amnistie. Qu'en est-il en outre d'éventuelles enquêtes visant à déterminer les responsabilités dans l'assassinat de monseigneur Romero, a par ailleurs demandé cet expert?

Un expert a relevé qu'au nombre des recommandations adressées en El Salvador et acceptées par lui dans le cadre de l'Examen périodique universel réalisé par le Conseil des droits de l'homme, figure celle visant l'élaboration et l'exécution d'un plan d'action pour protéger les militants des droits de l'homme et assurer leur sécurité. Il s'est réjoui qu'El Salvador ait accepté un très grand nombre des recommandations qui lui ont été adressées dans le cadre de l'Examen périodique universel.

Réponses de la délégation

La délégation d'El Salvador a déclaré que «nous voulons demander pardon aux populations autochtones pour tout ce qu'elles ont subi». Elle a rappelé que la relation des autochtones avec la terre allait de pair avec une philosophie accordant un caractère sacré à la terre. Toute la culture de la terre était alors fondée sur le maïs. Mais l'unité entre les autochtones et la terre n'a pas été bien comprise ni par les Espagnols, ni par les créoles et latinos, a souligné la délégation. La culture du café est arrivée au milieu du XIXe siècle, et les classes dirigeantes ont voulu imposer la propriété privée, souhaitant abolir les terres communautaires au profit de propriétaires privés, a expliqué la délégation. Entre 1872 et 1875, se déclenchèrent alors les premières rébellions paysannes au sujet de la propriété des terres. Le 2 mars 1882, fut promulguée la loi mettant fin à l'existence des terres communales. Les terres furent alors accaparées par les classes aisées, ce qui eut pour conséquence que toutes les communautés autochtones se sont vues reléguées au second plan, se retrouvant quasiment indigentes. Le désir de rébellion a grandi pour aboutir à la rébellion de 1932. À partir de la loi abolissant les terres communales, la situation des communautés autochtones s'est profondément modifiée, a insisté la délégation.

Réitérant la volonté du Gouvernement salvadorien d'adhérer à la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail relative aux peuples autochtones et tribaux, la délégation a souligné que la ratification de cet instrument était l'une des principales tâches qui reste à accomplir en El Salvador s'agissant de ces questions et les autorités salvadoriennes sont donc en train de procéder à des consultations avec les différentes entités gouvernementales pertinentes à cette fin. Il convient aussi de rallier les différentes forces politiques à cette cause afin d'assurer la pérennité de la démarche, en cas de changement de Gouvernement.

Les peuples autochtones n'ont aucunement l'obligation de se constituer en association ou fondation, sauf s'ils sont appelés à recueillir des subventions ou des fonds, a d'autre part assuré la délégation.

La loi sur les étrangers stipule que le Ministère de l'intérieur est l'autorité compétente pour ce qui est des démarches à effectuer aux fins de la naturalisation, a par ailleurs précisé la délégation.

Le Gouvernement du Président Funes ne gouverne pas pour un parti mais pour tous les Salvadoriens, a en outre affirmé la délégation. En El Salvador, les choses sont en train de changer, a-t-elle assuré. Ainsi, depuis l'arrivée au pouvoir du Président Funes, en 2009, les élèves des écoles publiques d'El Salvador reçoivent uniformes, fournitures et nourriture. Ces uniformes sont fabriqués dans les communautés elles-mêmes et non pas quelque grande entreprise qui aurait raflé ce marché, ce qui a donné lieu à d'importantes créations d'emplois au sein de ces communautés. Désormais, depuis l'arrivée du Président Funes, les gens ne doivent plus payer pour bénéficier des soins de santé, a par ailleurs fait valoir la délégation.

Au printemps dernier, devant le peuple salvadorien, le Président Funes a demandé pardon, au nom de l'État, pour l'assassinat de monseigneur Romero, a en outre rappelé la délégation.

D'autre part, la délégation a indiqué qu'elle s'engageait à faire en sorte que le prochain recensement contienne une rubrique permettant de compter les personnes d'ascendance africaine en El Salvador.

S'agissant de l'acquisition de la nationalité salvadorienne, la délégation a assuré qu'aucun avantage ou prérogative n'est accordée en fonction du pays d'origine. Il existe des accords centraméricains facilitant la circulation des citoyens entre les pays concernés, mais en aucun cas des accords facilitant l'accession à la citoyenneté (naturalisation), a-t-elle insisté.

Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport d'El Salvador, M. AVTONOMOV, a salué le dialogue avec la délégation, qui a permis de comprendre les changements qui se déroulent actuellement dans le pays. Les critiques adressées concernant le rapport ne constituent pas une critique du gouvernement actuel, et il a exprimé l'espoir que le prochain rapport périodique se rapprochera davantage de ce qu'attend le Comité pour El Salvador.

Toutes les recommandations et observations finales du Comité se fondent certes sur le rapport périodique, mais aussi sur les informations fournies par la délégation, a-t-il néanmoins souligné, estimant que, d'une manière générale, le dialogue avec la délégation avait été extrêmement fructueux. Le Comité est conscient des changements politiques actuels qui s'opèrent en El Salvador et qui sont très importants, a poursuivi M. Avtonomov; il espère donc que ses recommandations seront utiles, en particulier, dans le cadre des mesures que le Gouvernement sera appelé à prendre en faveur des peuples autochtones – qui ont connu une situation extrêmement grave en El Salvador.

__________

Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

VOIR CETTE PAGE EN :