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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport de Monaco

16 février 2010

16 février 2010
 

Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport de Monaco sur la mise en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.

Présentant le rapport de son pays, le Représentant permanent de Monaco auprès des Nations Unies à Genève, M. Robert Fillon, a déclaré que le racisme était un phénomène sinon quasi-absent, du moins très marginal dans la Principauté. Cette situation singulière résulte de deux facteurs principaux: d'une part l'exiguïté du territoire et, d'autre part, la politique appropriée mise en œuvre par les autorités monégasques, a-t-il affirmé. À Monaco, la distinction dans l'octroi de droits ou d'avantages est fondée sur le critère de la nationalité ou celui de la résidence sur le territoire monégasque, à l'exclusion de toute distinction fondée sur la race ou l'ethnie. La question de l'incorporation d'une définition de la discrimination raciale dans le Code pénal et de la création d'une incrimination et de circonstances aggravantes est à l'étude, a par ailleurs indiqué M. Fillon.

La délégation monégasque était également composée de représentants du Département des relations extérieures, du Département des affaires sociales et de la santé, du Département de l'intérieur et de la Direction des services judiciaires. Elle a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant de la hiérarchie des normes; de la formation aux droits de l'homme; des fonctions de la cellule des droits de l'homme; des questions de religion; de la langue monégasque; des questions d'éducation; de l'emploi des étrangers; de l'application de la peine du bannissement; du projet d'incrimination de la discrimination raciale; et de la réserve émise par Monaco à l'égard de l'article 4 de la Convention sur l'interdiction des organisations prônant la discrimination raciale. À cet égard, la délégation a fait observer que cette réserve méritait d'être analysée en ce qui concerne sa pertinence suite à des modifications récentes intervenues dans le droit interne en matière de liberté d'expression, de liberté d'association et de liberté de réunion. La délégation a par ailleurs indiqué que la peine infamante du bannissement, qui n'est plus appliquée depuis des décennies, doit être abrogée à l'occasion de la révision en cours du Code pénal.

M. Nourredine Amir, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, a notamment recommandé à Monaco d'introduire dans le droit pénal des définitions correspondant aux dispositions de la Convention. Il a estimé que Monaco avait un fond historique qui constituait pour la communauté internationale un exemple à suivre. Il a aussi relevé que Monaco tenait compte du droit international et des conventions internationales.

Le Comité adoptera ses observations finales sur le rapport de Monaco dans le cadre de séances privées et les rendra publiques à la fin de la session, le vendredi 12 mars prochain.

Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport périodique de la Slovaquie (CERD/C/SVK/6-8).

Présentation du rapport

M. ROBERT FILLON, Représentant permanent de Monaco auprès des Nations Unies à Genève, a rappelé que la Principauté avait adhéré à la Convention pour l'élimination de la discrimination raciale en septembre 1995, soit deux années seulement après être devenue État Membre de l'Organisation des Nations Unies. Ce premier rapport relatif à l'application de la Convention constitue la synthèse des rapports bisannuels qui n'ont pu être remis en leur temps, a-t-il ajouté. le représentant a expliqué que cette présentation tardive était liée à des difficultés inhérentes à l'abondance, la concomitance et l'importance de nombreux rapports analogues que doivent établir les divers services de l'État monégasque alors que leurs effectifs sont à l'échelle du pays; elle n'est nullement inhérente à l'existence d'une situation de fait ou de droit qui aurait été notablement non compatible avec les stipulations de la norme internationale et n'est pas davantage la conséquence d'une suspension ou d'un quelconque mauvais vouloir dans la mise en œuvre progressive des mesures d'application des dispositions de la Convention dans le droit positif monégasque.

Le racisme en tant que processus de constitution de groupes humains ou de courants idéologiques dont le critère commun est la primauté d'une race est un phénomène sinon quasi-absent, du moins très marginal dans la Principauté de Monaco, a affirmé M. Fillon. Cette situation singulière résulte de deux facteurs principaux: d'une part l'exiguïté du territoire et, d'autre part, la politique appropriée mise en œuvre par les autorités monégasques, a-t-il affirmé. La population résidente sur le territoire monégasque est composée de plusieurs communautés de nationalités différentes. Pour autant, il n'existe à Monaco aucune tension ayant pour origine des antagonismes raciaux, a poursuivi M. Fillon. D'ailleurs, les actes à caractère racial ayant donné lieu à des investigations ont été extrêmement limités (deux procédures en 2004 concernant des actes d'antisémitisme), a-t-il ajouté. De l'année 2005 à l'année 2009, le Parquet général n'a enregistré aucune procédure concernant une infraction de caractère racial, comme circonstance aggravante ou à titre de tentative de justification par l'auteur de cet acte, a-t-il précisé. L'exiguïté du territoire contribue par elle-même à la mixité des communautés et fait obstacle à l'émergence de processus de racisme fondés sur la concordance entre une communauté particulière et un espace déterminé, a-t-il fait valoir. Néanmoins, dans un objectif de sauvegarder une situation de coexistence paisible, des actions de prévention sont organisées, sous la forme d'actions de formation et de sensibilisation aux droits de l'homme destinées aux magistrats et aux praticiens du droit, aux fonctionnaires et agents de la sûreté publique ainsi qu'aux élèves de l'enseignement secondaire.

Dans la Principauté de Monaco, la distinction dans l'octroi de droits ou d'avantages est fondée sur le critère de la nationalité ou celui de la résidence sur le territoire monégasque, à l'exclusion de toute distinction fondée sur la race ou l'ethnie, a poursuivi le Représentant permanent de Monaco. La loi du 23 décembre 2008 concernant les associations et les fédérations d'associations exclut toute discrimination fondée sur la race par la généralité même de ses termes et de ses dispositions, a-t-il notamment indiqué. Une autre illustration de la politique de prévention est constituée par la loi de 2007 sur l'éducation qui dispose que l'enseignement est obligatoire pour tout enfant de l'un ou de l'autre sexe depuis l'âge de six ans jusqu'à l'âge de seize ans révolus qui est de nationalité monégasque ou qui est de nationalité étrangère et dont les parents, le représentant légal ou la personne en assumant effectivement la garde résident ou sont établis régulièrement à Monaco. Ainsi, aucun enfant d'âge scolaire ne peut être exclu du système éducatif.

La loi du 4 décembre 2008 prohibe tout traitement d'informations nominatives incluant des données à caractère racial ou ethnique, hors un nombre restreint d'exceptions justifiées par des considérations de sécurité publique et subordonnées à des conditions restrictives, a par ailleurs indiqué M. Fillon. Enfin, il a souligné que Monaco avait adhéré à la Convention européenne d'extradition de 1957, dont l'article 3 prévoit que les autorités de l'État peuvent refuser l'extradition d'une personne physique lorsqu'elles ont des raisons sérieuses de croire que la demande d'extradition motivée par une infraction de droit commun a été présentée aux fins de poursuivre ou de punir un individu pour des considérations de race, de religion, de nationalité ou d'opinions politiques ou que la situation de cet individu risque d'être aggravée pour l'une ou l'autre de ces raisons.

Répondant à une liste de questions écrites du Comité, M. Fillon a expliqué que si la Constitution prévoit un traitement différent entre les droits accordés à des nationaux et ceux accordés à tous les résidents, le critère exclusif d'une distinction en matière de droits reste la nationalité de la personne. Certaines lois ajoutent un autre critère lié à la domiciliation; c'est le cas de la loi sur les conditions d'embauche et de licenciement. Pour ce qui est du droit à l'éducation, M. Fillon a souligné que les Monégasques ont droit à l'éducation gratuite primaire et secondaire et que ce droit à l'éducation est le même pour les enfants monégasques et pour les enfants étrangers résidant à Monaco.

Le très petit nombre de problèmes liés au racisme et à la discrimination raciale en Principauté de Monaco, ainsi que leur caractère non significatif n'appellent pas la création d'un système autonome de collecte des données relatives aux crimes à caractère haineux ainsi qu'au racisme et à la discrimination raciale, a également indiqué M. Fillon.

Le Gouvernement envisage, dans le cadre de la refonte en cours du statut des fonctionnaires de l'État, d'intégrer une disposition faisant échec aux discriminations, que celles-ci soient basées sur les opinions publiques, philosophiques, religieuses ou syndicales des fonctionnaires, ou sur leur état de santé, leur handicap, leur apparence physique ou encore leur appartenance ethnique, a poursuivi le Représentant permanent.

Présentement, il n'est pas envisagé de créer une institution indépendante nationale pour la protection des droits de l'homme, a en outre indiqué M. Fillon. À Monaco, les fonctions généralement dévolues à une telle institution sont assurées et réparties entre différents organes et notamment entre une cellule des droits de l'homme et un médiateur auprès du Ministre d'État, sans parler des recours juridictionnels.

La question de l'incorporation d'une définition de la discrimination raciale dans le Code pénal et de la création d'une incrimination et de circonstances aggravantes est à l'étude, a par ailleurs déclaré M. Fillon.

Le Code de procédure pénale prévoit la présence d'un interprète dès la garde à vue dans le cas où la personne ne comprend ni ne parle la langue française, a-t-il poursuivi.

Présentement, a fait savoir M. Fillon, les autorités n'envisagent pas de réviser les articles 54 et 79 de la Constitution qui exigent cinq années de citoyenneté pour être éligible au conseil national ou au conseil communal.

Les décisions de refoulement et d'expulsion, de nature administrative, prises par le Ministre d'État peuvent faire l'objet de recours devant le Tribunal suprême qui, depuis 2002, s'est prononcé une fois en matière d'expulsion et seize fois en matière de refoulement. L'examen des affaires ayant fait l'objet de décisions du Tribunal suprême fait apparaître qu'aucun plaignant n'a, à ce jour, invoqué une discrimination à caractère racial à l'occasion de son recours. La reconnaissance par les autorités monégasques de la qualité de réfugié politique est subordonnée à l'obtention préalable de ce statut auprès de l'Office français des réfugiés et apatrides, a par ailleurs rappelé M. Fillon. Dans les cas de refus d'octroi de ce statut, les recours sont possibles devant les juridictions françaises compétentes, a-t-il précisé.

Les droits reconnus dans le domaine de l'emploi s'exercent de manière égale; les seules distinctions possibles sont liées à la nationalité ou au lieu de résidence, a poursuivi le Représentant permanent de Monaco. Eu égard à l'importance de la population étrangère travaillant à Monaco, il apparaît que les règles relatives à la priorité d'embauche n'ont aucune conséquence négative sur la possibilité pour les étrangers d'accéder à un emploi dans la Principauté, a-t-il fait valoir. La loi de 1957 réglementant les conditions d'embauche et de licenciement précise que le critère de répartition des salariés se fait en fonction de leur lieu de résidence et non sur un ou des éléments liés à la race, a-t-il rappelé. L'Inspection du travail n'a reçu aucune plainte concernant une éventuelle discrimination raciale depuis plusieurs années, a en outre indiqué M. Fillon. Sur les 3959 personnes employées dans le secteur public, seules 30,6% sont des nationaux monégasques, a-t-il par ailleurs souligné.

S'agissant des mesures d'assistance sociale et médicale accordées aux personnes non monégasques sous condition de résidence, M. Fillon a notamment fait état d'une condition de résidence de plus de cinq ans pour le droit à l'aide médicale gratuite pour les personnes non monégasques et d'une condition de résidence de trois ans pour l'allocation logement accordée aux personnes handicapées. Des dérogations aux conditions de durée de résidence sont fréquemment accordées pour tenir compte des situations sociales délicates, a-t-il précisé. Il peut en outre être souligné que la plupart des aides sociales sont accordées sans aucune condition de durée de résidence, a-t-il ajouté.

Le rapport de Monaco (document CERD/C/MCO/6 rassemblant le rapport initial et les deuxième à sixième rapports périodiques) indique qu'en 2007, la population de Monaco était estimée à 35 000 habitants, dont environ 8039 Monégasques, la proportion d'étrangers dans la population de Monaco étant de 68,4%. Quelque 36 000 personnes habitant les régions limitrophes de France et d'Italie et travaillant sur le territoire monégasque franchissent quotidiennement la frontière, ajoute le rapport. La répartition par nationalité des salariés dans le secteur privé indique que 67,37% d'entre eux étaient français en 2006 et 13,83% italiens. En tout, quelque 126 nationalités cohabitent sur le territoire monégasque. Cette pluralité de nationalités, de langues, de convictions, unies vers des idéaux communs, combinée aux racines de l'histoire de Monaco contribue à cimenter la cohésion du pays dans sa diversité qui fonde son originalité. La religion catholique, apostolique et romaine est la religion de l'État, mais la liberté de culte est prévue au plus haut degré de la hiérarchie des normes de la Principauté de Monaco, indique le rapport. L'obtention de la nationalité monégasque peut se faire par transmission ou acquisition. La transmission est effectuée par filiation maternelle ou paternelle. Un certain nombre de modifications législatives récentes assurent davantage d'égalité aux femmes dans ce domaine, précise le rapport. Toute personne qui justifie d'une résidence habituelle de dix années après avoir atteint l'âge de 18 ans peut demander la naturalisation, ajoute-t-il.

Une loi sur la liberté d'expression publique, récemment adoptée, sanctionne l'incitation à la haine raciale, indique en outre le rapport. Les manifestations violentes de racisme, de xénophobie, de discrimination et d'antisémitisme demeurent inexistantes à Monaco, assure-t-il, ajoutant qu'aucune condamnation n'a en effet été prononcée à ce jour par des tribunaux de la Principauté envers des actes inspirés par le racisme et l'intolérance. De même, aucun acte de nature raciste n'a été porté à la connaissance des autorités compétentes en 2005. Il en est de même pour les années 2006 et 2007. La loi de 2005 sur la liberté d'expression publique prévoit que «sont punis des mêmes peines (cinq ans d'emprisonnement et l'amende prévue au paragraphe 4 de l'article 26 du Code pénal, ou l'une de ces deux peines seulement) ceux qui (…) provoquent à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine, de leur appartenance ou de leur non appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, ou à raison de leur orientation sexuelle, réelle ou supposée».

Le traitement différencié favorable aux Monégasques, voire à des étrangers en fonction de leur lien avec Monaco, y compris pour ce qui est d'avantages économiques et sociaux, est une composante essentielle de l'organisation des rapports sociaux à Monaco dont le fondement réside dans la Constitution elle-même eu égard au caractère minoritaire de la communauté nationale en termes démographiques. Il existe dans la Principauté deux procédures d'éloignement des étrangers: l'expulsion et le refoulement. La mesure d'expulsion vise à interdire la présence d'un étranger à Monaco ainsi que, conformément à la Convention de voisinage signée avec la France en 1963, dans les départements des Alpes maritimes, des Alpes-de-Haute-Provence et du Var.

Examen du rapport

Questions et observations des membres du Comité

M. NOURREDINE AMIR, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, a rappelé que la Principauté de Monaco s'inscrit dans un espace réduit. Du point de vue du territoire et de la population, la Principauté couvre une superficie de 2 kilomètres carrés pour 32 000 à 35 000 habitants - la progression démographique étant à cet égard assez significative, a-t-il ajouté.

S'agissant des questions de nationalité, M. Amir a relevé l'évolution positive que constitue le fait qu'une fois le divorce prononcé, une femme (qui aurait acquis la nationalité monégasque par le mariage) ne semble plus devoir perdre ses droits à la nationalité.

Les nombreux non-ressortissants originaires de pays musulmans qui se trouvent à Monaco sont-ils pratiquants et existe-t-il dans la Principauté des lieux leur permettant de pratiquer leur religion, a ensuite demandé M. Amir?

L'expert a par ailleurs relevé que Monaco a émis une réserve à l'article 2 de la Convention, en rapport avec les dispositions légales dont Monaco entend conserver la maîtrise relativement à l'admission des étrangers sur le marché du travail de la Principauté.

Il n'est pas un seul pays au monde qui n'ait pas de ségrégation raciale, fût-elle passive, a par ailleurs souligné M. Amir, relevant que le rapport monégasque affirme qu'une telle ségrégation n'existe pas dans la Principauté. Quelles discriminations ont-elles pu être relevées, à un moment ou à un autre, par les autorités monégasques, a-t-il demandé ?

Existe-t-il au niveau législatif une disposition criminalisant l'acte de discrimination, a par ailleurs demandé M. Amir, rappelant que la discrimination est considérée par la Convention comme un crime et non comme un délit de droit commun ?

M. Amir a souhaité en savoir davantage sur la cellule des droits de l'homme existant à Monaco et sur les observations que celle-ci a présentées en janvier 2008, dans le contexte de la préparation du présent rapport monégasque. Qu'en est-il des activités de formation et de sensibilisation menées par cette cellule, a-t-il demandé ?

M. Amir a recommandé à l'intention de Monaco que soit introduit en droit pénal une définition de tout concept énoncé par la Convention.

Un autre membre du Comité a souhaité savoir si les autorités avaient constaté à l'égard des ressortissants français présents à Monaco une quelconque forme de discrimination et s'est enquis des raisons expliquant le grand nombre de Français qui ont quitté le territoire monégasque ces dernières années.

Le rapport et le document de base présentés par Monaco mettent en relief la grande spécificité - géographique, territoriale et institutionnelle - de la Principauté, a relevé un expert. Il s'est enquis des raisons expliquant la difficulté apparente voire l'impossibilité du pays à fournir des statistiques à caractère ethnique ou racial. Il a également souhaité savoir si Monaco autorisait les procédures de testing telles que, par exemple, la technique dite du curriculum vitae anonyme, pour déceler l'existence d'éventuelles discriminations. Relevant que Monaco envisageait d'intégrer dans son nouveau Code pénal une circonstance aggravante générale liée aux délits de racisme ainsi qu'une définition de la discrimination raciale conforme à celle de la Convention, l'expert a souhaité en savoir davantage au sujet du contenu précis des textes envisagés en la matière. Tout en se disant convaincu que l'absence de plaintes pour racisme s'explique certes par l'exiguïté du territoire et par la population peu nombreuse de Monaco, l'expert a rappelé la doctrine du Comité selon laquelle l'absence de plaintes ou de poursuites pour discrimination raciale ne doit pas nécessairement être considérée comme positive car elle peut être révélatrice d'une insuffisance de recours disponibles ou encore d'une méconnaissance de la loi, par exemple.

Un expert a demandé si la délégation pouvait expliquer pour quelles raisons on trouvait peu de personnes de couleur à Monaco.

Monaco a-t-il déjà ratifié la Convention n°111 de l'Organisation internationale du travail que la Principauté s'est engagée à ratifier à l'issue de l'examen périodique universel auquel elle a récemment été soumise, a demandé un autre expert ?

Informations complémentaires fournies par la délégation de Monaco

La délégation a assuré qu'à Monaco, la femme qui divorce ne perd pas sa nationalité. Une fois acquise, la nationalité monégasque se perd très difficilement – si difficilement que cela n'est peut être d'ailleurs jamais arrivé, a ajouté la délégation.

S'agissant des questions de religion, la délégation a rappelé qu'il existe à Monaco un «dialogue interreligieux suivi et nourri» ainsi que plusieurs lieux de culte. À la connaissance de la délégation, il n'existe pas dans la Principauté de pratique collective constante du culte musulman; il n'en demeure pas moins qu'il existe un certain nombre de lieux de culte privés consacrés à la prière. La liberté religieuse est assurée par la Constitution, a insisté la délégation. Le dialogue interreligieux susmentionné n'est pas un dialogue institutionnel mais un dialogue qui se développe librement, a-t-elle ensuite précisé.

La délégation a indiqué que onze formations à l'intention du personnel judiciaire ont été organisées depuis 2005, en liaison avec la cellule des droits de l'homme. Aujourd'hui, a fait valoir la délégation, non seulement dans les jugements en appel mais aussi dans les jugements en première instance, les juges n'hésitent pas à se référer à des instruments internationaux tels que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ou la Convention européenne des droits de l'homme – ce qu'autorise effectivement la hiérarchie des normes en vigueur dans la Principauté. La cellule des droits de l'homme a également entrepris de diffuser les valeurs universelles des droits de l'homme auprès des agents de la sécurité publique (police).

En réponse aux questions qui lui ont été adressées au sujet de l'emploi des étrangers à Monaco, la délégation a souligné que la Convention n°111 de l'Organisation internationale du travail (OIT) est réservée aux États membres de l'OIT; or, Monaco n'est pas membre de cette Organisation. Pour autant, la Principauté n'est pas fermée à une réflexion pour se rapprocher de cette Organisation et une réflexion est actuellement en cours, a indiqué la délégation. Quoi qu'il en soit, Monaco a passé deux accords en matière de sécurité sociale couvrant les questions de retraite, d'assurance maladie, de congés maternité, notamment: l'un avec la France et l'autre, du même type, avec l'Italie.

Le système d'emploi à Monaco prévoit que la priorité est accordée aux Monégasques; mais il ne s'agit pas d'un système exclusif puisque les travailleurs étrangers ne sont absolument pas exclus du marché de l'emploi dans la Principauté, a précisé la délégation.

S'agissant de l'incrimination de la discrimination raciale, la délégation a indiqué qu'un projet de loi était à l'étude qui viserait à faire de la discrimination raciale une infraction punissable en intégrant à cette fin un article spécifique dans le Code pénal. On peut donc espérer une modification prochaine du Code pénal dans ce sens, a insisté la délégation. Dans leur démarche, les autorités sont soucieuses de ne pas créer un trop grand nombre d'incriminations afin que les magistrats puissent facilement appliquer le Code pénal en ayant bien connaissance de tous les points d'incrimination existants. Se pose également dans ce contexte la question de la définition de la discrimination raciale dont on peut dire qu'elle serait très certainement intimement liée à celle énoncée dans la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, a ajouté la délégation.

Quoi qu'il en soit, la discrimination raciale est déjà incriminée dans un certain nombre de textes de loi comme, par exemple, la loi sur la liberté d'expression publique – laquelle sanctionne les personnes qui provoquent à la haine ou à la violence à l'encontre d'une personne ou d'un groupe de personnes en raison de leur origine ou de leur appartenance ou non à une ethnie, une race ou une religion déterminée ou en raison de leur orientation sexuelle réelle ou supposée.

Pour ce qui est de la hiérarchie des normes à Monaco, la délégation a rappelé que l'on trouve au premier rang la Constitution, au deuxième les traités multilatéraux et bilatéraux et au troisième, les lois. Un traité prévaut sur une loi - qu'elle soit antérieure ou postérieure à l'entrée en vigueur du traité, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs indiqué que la cellule des droits de l'homme et des libertés fondamentales relève du Département des relations extérieures; sa principale fonction est de veiller à l'adéquation de la législation monégasque aux normes des droits de l'homme. La cellule joue également un rôle de conseiller juridique permanent auprès des autorités pour toutes les questions relatives aux droits de l'homme. Il ne s'agit pas d'une juridiction, a par la suite précisé la délégation; lorsqu'on dit que cette cellule «protège» les droits de l'homme, elle le fait surtout par ses actions de prévention et par son attachement à définir des normes qui soient le plus adaptées et respectueuses des droits de l'homme.

Pour l'heure, il n'est pas prévu de créer une institution nationale des droits de l'homme à Monaco, a par ailleurs indiqué la délégation, précisant que la cellule des droits de l'homme et le Médiateur remplissent les principales fonctions généralement assumées par une telle institution. De plus, il n'existe pas de véritable revendication de la société civile en ce qui concerne les droits de l'homme à Monaco et il n'existe d'ailleurs dans la Principauté aucune association en rapport avec les droits de l'homme alors qu'il serait très simple d'en créer une, a dit la délégation. D'ailleurs, la quasi-totalité des petits États d'Europe, à l'exception du Luxembourg, n'ont pas d'institution nationale des droits de l'homme, a-t-elle fait observer.

La langue monégasque est enseignée au niveau du primaire et fait l'objet d'une option au baccalauréat, a par ailleurs indiqué la délégation. Néanmoins, a-t-elle précisé, le monégasque n'a jamais – à aucun moment de son histoire – été langue officielle à Monaco. Il s'agit surtout d'une langue à diffusion orale pour laquelle la littérature est assez rare; il existe néanmoins une grammaire de cette langue qui en facilite l'apprentissage.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a souligné que tout enfant dont les parents résident à Monaco doit être accueilli, dans la limite des places disponibles, dans les écoles de la Principauté, dont la capacité d'accueil est de 6000 élèves – ce qui est loin d'être négligeable au regard de la taille de la Principauté. D'autres enfants, notamment les enfants dont les parents travaillent à Monaco, peuvent ensuite être accueillis, s'il reste des places.

Le Code pénal prévoit que les juridictions peuvent infliger en matière criminelle des peines infamantes au nombre desquelles figure le bannissement, a par ailleurs indiqué la délégation. Néanmoins, au cours des décennies récentes, aucune juridiction monégasque n'a appliqué cette peine, a-t-elle souligné. D'ailleurs, cette peine doit être abrogée à l'occasion d'une révision assez vaste du Code pénal qui est actuellement en cours, a-t-elle ajouté.

En ce qui concerne la réserve que Monaco a émise à l'égard de l'article 4 de la Convention, la délégation a rappelé qu'elle avait été formulée en 1995, au moment de la ratification de la Convention par la Principauté. Depuis cette date, le contexte a en partie changé, en ce sens que le droit interne a été modifié, en particulier, par la loi de 2005 sur la liberté d'expression et celle de 2008 sur la liberté d'association; dès lors, la réserve, qui couvre trois domaines - liberté d'expression, liberté d'association et liberté de réunion - mérite sans doute d'être analysée en ce qui concerne sa pertinence, a déclaré la délégation.

Il n'existe pas à ce jour de problème identifié avec les Roms à Monaco, a par ailleurs indiqué la délégation en réponse à la question d'un expert qui souhaitait s'informer de la manière dont les Roms sont accueillis à Monaco.

Observations préliminaires

Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de Monaco, M. Nourredine Amir, a remercié la délégation pour la précision et la concision de ses réponses. Monaco est un espace réduit, urbain et sans agriculture, a-t-il relevé, saluant l'assistance que la Principauté apporte aux pays du tiers-monde, aux pays pauvres. Monaco n'est pas un «petit pays», a-t-il poursuivi. Il n'existe pas de petit pays ou de grand pays: un pays existe par son outil institutionnel et par l'état de droit dans lequel il s'inscrit – en vertu duquel on mérite ou non le respect que l'on doit à un État. Monaco a un fond historique qui constitue pour la communauté internationale un exemple à suivre, a-t-il estimé. Monaco tient compte du droit international et des conventions internationales, a constaté M. Amir.
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