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Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale examine le rapport du Cambodge
19 février 2010
19 février 2010
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport du Cambodge sur les mesures prises par ce pays pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Présentant le rapport de son pays, M. Sun Suon, Représentant permanent du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que la société cambodgienne était essentiellement homogène, mais que le pays comprend aussi des groupes minoritaires ethniques, ainsi que des résidents étrangers et des immigrants. La société cambodgienne adopte naturellement une attitude ouverte et tolérante, respectueuse de la diversité culturelle, a-t-il affirmé. Le pays soutient et respecte les droits des groupes minoritaires et autochtones qui composent sa société, a-t-il poursuivi, rappelant que la Constitution interdit la discrimination fondée sur la race, la religion, le sexe ou le lieu de naissance et garantit l'égalité de tous les citoyens devant la loi ainsi que l'égalité des chances de tous, tout en accordant des mesures d'action affirmative à certains groupes particulièrement défavorisés. Le Gouvernement cambodgien accorde en outre une grande importance aux réformes foncières aux fins du développement socioéconomique durable et est conscient des défis constants et de la sensibilité liés aux dimensions historique, politique, économique et sociale de cette question. M. Suon a attiré l'attention sur les mesures prises par le Gouvernement s'agissant du développement des communautés autochtones et de l'enregistrement des terres et des droits d'utilisation des terres des communautés autochtones.
La délégation cambodgienne, composée de plusieurs membres de la Mission permanente du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève, a répondu aux questions soulevées par les membres du Comité s'agissant, entre autres, du tribunal des Khmers rouges; de la situation des Khmers kroms; des questions intéressant les populations autochtones, s'agissant notamment de la propriété des terres et de l'utilisation des ressources naturelles; des questions relatives à l'octroi de la nationalité cambodgienne; des questions de religion; et de la situation des réfugiés.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Cambodge, M. Pierre-Richard Prosper, a souligné que nombre d'aspects positifs sont ressortis de ce dialogue, à commencer par l'attachement du Cambodge à la Convention. Il a relevé certaines préoccupations qui sont apparues au cours du dialogue. En ce qui concerne le respect de l'état de droit, il a indiqué que le Comité attache une grande importance à ce que l'état de droit soit appliqué de manière uniforme, s'agissant notamment des réfugiés ou de différents groupes mentionnés durant le dialogue. Pour ce qui est de la question de l'appropriation des terres, si des lois existent certes, elles ne semblent pas être dûment appliquées dans la pratique, a regretté M. Prosper. Il faudra en outre que le pays se penche sérieusement sur la situation des Khmers kroms et sur la question de leur nationalité, a-t-il également indiqué.
Le Comité adoptera des observations finales sur ce rapport, qu'il rendra publiques à la fin de la session, le vendredi 12 mars 2010.
Cet après-midi, à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport du Guatemala (CERD/C/GTM/12-13).
Présentation du rapport du Cambodge
M. SUN SUON, Représentant permanent du Cambodge auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que la situation des droits de l'homme au Cambodge devait être évaluée en tenant compte de la situation passée, en particulier dans le contexte du processus d'instauration de la paix et du processus de réconciliation nationale engagé sur la base de la politique «gagnant-gagnant» mise en place par le Gouvernement à la fin des années 1990.
Le Cambodge est une société essentiellement homogène, a poursuivi M. Suon. Mais le pays comprend aussi des groupes minoritaires ethniques, en sus des résidents étrangers et des immigrants, a-t-il ajouté. La société cambodgienne adopte naturellement une attitude ouverte et tolérante, respectueuse de la diversité culturelle, a-t-il poursuivi. Grâce à la paix et à la stabilité acquises ces dernières décennies, le Gouvernement progresse désormais sur la voie de la poursuite d'un processus de développement politique, économique, social et culturel dans tous les domaines, y compris dans celui des droits de l'homme, a déclaré M. Suon. Il attache une grande importance à l'unité nationale, à l'intégration nationale et à l'harmonie sociale, a-t-il souligné.
Le Cambodge soutient et respecte les droits des groupes minoritaires et autochtones qui composent sa société, a poursuivi M. Suon. Constitutionnellement, le Cambodge interdit la discrimination fondée sur la race, la religion, le sexe ou le lieu de naissance. La Constitution garantit l'égalité de tous les citoyens devant la loi ainsi que l'égalité des chances pour tous, tout en accordant des mesures d'action affirmative à certains groupes particulièrement défavorisés, a précisé le Représentant permanent. Il a en outre rappelé que le pays avait accédé à tous les principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Par ailleurs, depuis la fin du processus de paix en 1993, le pays a coopéré avec les Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme par le biais du Bureau du Haut Commissariat aux droits de l'homme au Cambodge.
Le Code pénal cambodgien traite de la prévention de la discrimination raciale dans ses articles 494 à 496, a souligné M. Suon. Du point de vue institutionnel, le Cambodge a mis en place un Comité national des droits de l'homme attaché au Gouvernement et chargé d'assurer la coordination et la coopération avec les institutions nationales et internationales et autres parties prenantes afin de traiter les défis pertinents en matière de droits de l'homme. Le Cambodge accorde une importance particulière à la réduction de la pauvreté en tant que moyen essentiel de promouvoir et protéger les droits de l'homme, a indiqué M. Suon.
Le Gouvernement cambodgien accorde en outre une grande importance aux réformes foncières aux fins du développement socioéconomique durable et est conscient des défis constants et de la sensibilité liés aux dimensions historique, politique, économique et sociale de cette question, a poursuivi le Représentant permanent. En appliquant ses politiques dans ce domaine, le Gouvernement a accordé une attention accrue au renforcement du système de gestion, de distribution, d'utilisation et de propriété de la terre, a-t-il notamment indiqué. M. Suon a attiré l'attention sur les mesures prises par le Gouvernement s'agissant du développement des communautés autochtones et de l'enregistrement des terres et des droits d'utilisation des terres des communautés autochtones. Il a notamment cité le sous-décret n°83 en date du 9 juin 2009 signé par le Premier Ministre afin de protéger la propriété de la terre des communautés autochtones. D'autres textes réglementaires ont également été adoptés, tels les sous-décrets relatifs à la gestion foncière et aux concessions économiques, la circulaire relative à l'occupation illégale des terres de l'État ou encore la circulaire (du Ministère du développement rural) relative l'établissement de l'identité des populations autochtones.
Évoquant les politiques éducatives mises en œuvre au Cambodge en faveur des pauvres, M. Suon a notamment fait part de l'abolition des frais de scolarité en 2001 et de la mise à disposition, à compter de 2002, de bourses pour la scolarisation, au niveau secondaire inférieur, des personnes pauvres et appartenant à des minorités ethniques. L'amélioration de l'accès des groupes ethniques minoritaires à des services éducatifs équitables et de qualité reste l'un des éléments importants du plan stratégique de développement de l'éducation mis en œuvre dans le pays, a souligné le Représentant permanent. Quant aux directives politiques du Ministère de la santé, elles ont été établies de manière à assurer des services de soins de santé à tous et en toute équité, a-t-il souligné.
La Constitution du Cambodge stipule que l'État reconnaît et promeut les droits des communautés culturelles autochtones dans le cadre de l'unité nationale et du développement national, a poursuivi M. Suon. Un Département du développement des minorités ethniques a été placé sous la supervision du Ministère du développement rural, dans le but d'améliorer le niveau de vie des peuples autochtones et de préserver leur culture, leurs traditions et leurs croyances. En avril 2009, une Politique nationale de développement des peuples autochtones a été élaborée à l'appui de cette démarche. Dans ce contexte, une mesure concrète a été prise avec la création du Conseil national pour les questions ethniques et démographiques – un organe de consultation et de coordination entre les institutions gouvernementales et les organisations non gouvernementales ayant pour principal objectif d'élaborer et d'appliquer les politiques nationales relatives à ces questions.
Le Gouvernement royal autorise les personnes de toutes les races à former des associations, a poursuivi M. Suon. En outre, la liberté religieuse est garantie par la Constitution et elle est respectée dans la pratique, a-t-il ajouté. Nous n'avons connaissance d'aucune restriction grave s'appliquant à des religions minoritaires, a déclaré le Représentant permanent. En conclusion, il a assuré le Comité de la volonté politique du Gouvernement royal du Cambodge d'adhérer à une véritable culture de la paix, de la tolérance et du respect de la diversité, tant au sein des nations qu'entre elles.
Le rapport périodique du Cambodge (CERD/C/KHM/8-13, document regroupant les huitième à treizième rapports périodiques) indique que ce pays de 13 288 910 millions d'habitants compte différents types d'immigrants, notamment des Vietnamiens, des Chinois, des musulmans, des Laotiens, des Thaïlandais, des Européens, des Africains, des Japonais, des Coréens. Il abrite également plusieurs groupes ethniques minoritaires autochtones qui vivent, travaillent et organisent leur vie librement, précise le rapport. Le khmer est la langue officielle du pays, mais les immigrants ont toute liberté pour employer d'autres langues. Les écoles, publiques comme privées, dispensent généralement des cours de langues étrangères comme l'anglais, le français, le chinois, le japonais, le coréen, le thaï, le vietnamien. La Commission des droits de l'homme est l'une des neuf commissions de l'Assemblée nationale; elle est chargée de défendre les droits de l'homme dans le pays et traite de tous les problèmes et propositions des citoyens dont les droits ont été violés. La Commission du Sénat joue un rôle analogue.
Le Cambodge accepte la définition de la discrimination raciale énoncée à l'article premier de la Convention. En khmer, le terme «discrimination» vise le fait d'accepter ou de demander quelque chose pour satisfaire les souhaits d'une personne. Il a donc un sens identique à celui de la définition énoncée par la Convention. Le Cambodge n'a pas eu recours à la discrimination à des fins de distinction, de restriction ou de préférence en faveur des Khmers, d'étrangers, de minorités ou d'autochtones vivant dans le pays. Le Gouvernement cambodgien n'a jamais, en aucune circonstance, encouragé la discrimination à l'encontre des minorités ethniques ou des étrangers. Tous les habitants du Cambodge sont égaux devant la loi, souligne le rapport. Le Gouvernement considère que les dispositions de la Convention ne sont incompatibles avec aucune disposition, aucun principe ni aucune mesure ou loi du pays. Pour plus de facilité, il se fonde donc largement sur ces dispositions pour l'élaboration de la législation nationale. En ce qui concerne la nationalité, la citoyenneté ou la naturalisation au Cambodge, il n'existe plus aucune disposition susceptible de donner lieu à une discrimination ou à une distinction en fonction de la nationalité, indique en outre le rapport.
En réponse aux besoins et aux aspirations des tribus des montagnes et des hauts plateaux, le Gouvernement considère comme prioritaire le plan de mise en valeur des ressources humaines, qui prévoit un programme d'alphabétisation et un programme d'enseignement extrascolaire visant à renforcer leurs connaissances culturelles et linguistiques. Le Gouvernement royal entretient de bonnes relations avec les tribus des montagnes et des hauts plateaux concernant l'utilisation des terres et des ressources naturelles qu'elles ont toujours exploitées. Il garantit la possession et l'utilisation des terres traditionnelles des tribus, conformément à la législation en vigueur. Le projet de code pénal définit les infractions relevant de la discrimination raciale et les sanctions dont elles sont passibles, indique par ailleurs le rapport.
Examen du rapport
Questions et observations des membres du Comité
M. PIERRE-RICHARD PROSPER, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Cambodge, a jugé solide et édifiant le rapport présenté par le Cambodge. M. Prosper a souligné qu'il est difficile pour les experts de se faire une idée précise de la situation réelle au Cambodge à la lecture des nombreuses informations qu'ils reçoivent. Il a indiqué s'être personnellement rendu à cinq ou six reprises au Cambodge depuis la fin des années 1990 – la dernière fois en 2005 – et avoir constaté les progrès et la croissance économique incontestables qu'a connus le pays.
Les Khmers représentent près de 90% de la population du Cambodge et de nombreux groupes ethniques et autochtones composent également le tissu social du pays, a poursuivi M. Prosper. Le pays a créé les outils nécessaires pour combattre la discrimination raciale et protéger les citoyens, mais le Comité s'intéresse à la manière dont ces outils sont utilisés, a-t-il déclaré, expliquant que le Cambodge dispose de lois applicables mais qu'il reste à savoir dans quelle mesure et comment elles sont appliquées.
Le rapporteur a déclaré que des informations indiquent que des personnes d'origine ethnique chinoise auraient été renvoyées en Chine sans que les questions soulevées dans ces dossiers concernant des éléments de persécution n'aient été éclaircies.
Par ailleurs, les choses ne sont pas totalement claires en ce qui concerne les autochtones, dont il est dit qu'ils relèvent de 17 à 24 groupes autochtones différents et représentent 200 000 personnes, voire plus selon certains.
M. Prosper a en outre indiqué avoir reçu des informations faisant état de problèmes s'agissant des droits fonciers des populations autochtones, des concessions étant parfois accordées à des entreprises si rapidement que les processus de consultation requis ne sont pas appliqués. Que font les autorités pour garantir les titres de propriété collective des autochtones et pour assurer le bon déroulement des processus de consultation s'agissant de ces questions, a insisté M. Prosper?
M. Prosper a également fait état d'incidents contre les Thaïlandais, notamment en 2003 lorsque des personnes ont été blessées et certaines tuées.
Plusieurs membres du Comité se sont réjouis que le Cambodge rétablisse le dialogue avec le Comité après dix années d'absence. Un expert a ajouté que le Comité comptait préciser, à l'intention du Cambodge, un certain nombre de définitions et de concepts relatifs à la discrimination raciale, Phnom Penh ne semblant «pas au courant de ce qui se fait au Comité» du fait de cette décennie d'interruption du dialogue entre le Cambodge et le Comité. En particulier, il a signalé que la définition qui figure au paragraphe 42 du rapport est celle de la corruption et, en aucune manière, celle de la discrimination.
Un expert a exprimé l'espoir que le processus de reconstruction et de rétablissement de l'état de droit qui est en cours aille jusqu'à son terme.
Dans le contexte des populations autochtones, plusieurs membres du Comité se sont inquiétés des concessions accordées à des entreprises, parfois sans consultation préalable des populations autochtones vivant sur les terres concernées. Un expert a fait état d'informations selon lesquelles des agressions et actes de violence auraient été commis contre des membres de ces communautés autochtones. Des indemnités sont-elles accordées aux autochtones lorsqu'ils sont victimes de confiscations de leurs terres, a également demandé un autre expert? Il semblerait que dans certaines zones, des représentants de populations autochtones soient expulsés de leurs terres, en raison notamment de projets liés, par exemple, à l'extraction de minerais ou de minéraux, a-t-il poursuivi. Certes, six groupes de populations autochtones ont été enregistrés en tant que personnes morales, ce qui est important du point de vue juridique, mais globalement, des difficultés persistent et il serait intéressant de savoir ce qui est proposé par les autorités pour améliorer la situation, a demandé l'expert.
Il semblerait qu'en vertu de la Loi sur les ressources minérales de 2001, l'indemnisation prévue lors de l'octroi d'une concession s'adresse au propriétaire du titre foncier, ce qui peut être discriminatoire si une communauté autochtone ne s'est pas encore vu octroyer le titre de propriété au moment de l'octroi de la concession, a relevé un membre du Comité. Un expert s'est en outre enquis de la procédure d'expropriation en vigueur dans le pays. Un autre a voulu savoir si les populations autochtones sont habilitées à recevoir des titres de propriété foncière.
Toutes les personnes appartenant à des groupes autochtones disposent-elles désormais de papiers d'identité et sont-elles citoyennes cambodgiennes, a demandé un autre membre du Comité.
Le Gouvernement cambodgien devrait reconnaître le statut des Khmers kroms, a estimé un membre du Comité. Le Gouvernement peut et doit faire davantage pour améliorer la situation de façon à ce que les populations autochtones puissent jouir des progrès économiques sur un pied d'égalité, a-t-il affirmé. Il a en outre exprimé l'espoir que le Cambodge puisse régler rapidement ses conflits frontaliers avec tel ou tel pays voisin; contrairement aux apparences, cette question relève du Comité car ce conflit frontalier touche des groupes ethniques particuliers, a-t-il fait observer.
Selon certaines informations, 19 Khmers kroms attendent des papiers d'identité depuis le mois de janvier de cette année et se les seraient vu refuser en raison de problèmes relatifs au certificat de résidence, a-t-il été souligné.
Des membres du Comité ont encouragé le Cambodge à ratifier la Convention n°169 de l'Organisation internationale du travail concernant les droits des peuples autochtones et tribaux.
Comment obtient-on la nationalité cambodgienne, a-t-il également été demandé? Quelle voie doivent suivre pour obtenir la nationalité cambodgienne les étrangers qui résident en permanence au Cambodge mais qui ne sont pas mariés à un citoyen cambodgien?
Un expert s'est pour sa part enquis de la situation des personnes d'origine africaine présentes au Cambodge.
Un expert a regretté que le rapport n'aborde pas, sous l'aspect psychologique, les conséquences des souffrances endurées par les personnes qui ont subi les conséquences du génocide.
«Le Cambodge est dans le subconscient de l'humanité le pays de l'harmonie: je vous souhaite de retrouver cette harmonie», a conclu une experte.
Renseignements complémentaires fournis par la délégation
La délégation cambodgienne a souligné qu'après la période difficile qu'il a connue, le Cambodge a dû surmonter un certain nombre de difficultés, notamment dans le domaine judiciaire. Au total, néanmoins, quelque 140 lois ont été promulguées pendant la troisième législature, dont les importants codes pénal, civil et de procédure pénale, a-t-elle précisé. Le Gouvernement entend poursuivre sa réforme judiciaire afin d'atteindre les objectifs fondamentaux qu'il s'est fixés, notamment la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la modernisation du droit ou encore la garantie de l'accès des citoyens à la justice. La délégation a également fait état de l'amendement apporté à la loi sur la fonction publique afin de prévoir des sanctions à l'encontre des fonctionnaires qui enfreignent la loi.
S'agissant du Tribunal des Khmers rouges que l'on appelle le Tribunal extraordinaire et qui est chargé de traduire en justice les anciens dirigeants khmers rouges, la délégation a rappelé que le Cambodge coopérait avec les Nations Unies dans ce domaine, sur la base d'un accord consensuel qui a été passé avec les Nations Unies aux fins de traduire en justice, en vertu droit cambodgien, des anciens responsables du Kampuchea démocratique. Ce tribunal est un tribunal cambodgien qui permet de combattre l'impunité suite au régime des Khmers rouges, a insisté la délégation.
Environ 82 000 Khmers kroms vivent au Cambodge et leur statut de citoyens est reconnu, ce qui leur permet de participer à la vie politique, a par ailleurs indiqué la délégation. Pour ce qui est de l'obtention des papiers d'identité, la délégation a souligné que la carte d'identité est un document essentiel pour cette communauté comme pour tous les citoyens; les autorités ont donc pris cette question à bras-le-corps, même si cela ne fut pas facile étant donné que les Khmers kroms vivent dans les quatre coins du pays. Les conditions préalables à l'obtention d'une carte d'identité sont de disposer d'une adresse permanente du Cambodge, de présenter un certificat de naissance et de présenter son affiliation familiale (identité des parents), après quoi un décret d'octroi de nationalité peut être signé par le Roi.
Quasiment tous les Cambodgiens sont khmers et de nombreuses personnes au Cambodge ont une double nationalité. Mais la question des Khmers kroms est très particulière, pour des raisons historiques, et il faut, s'agissant de cette question, collaborer avec le Viet Nam, notamment, a ajouté la délégation.
Pour ce qui est de la naturalisation des personnes non mariées à un citoyen cambodgien, la délégation a indiqué que la Constitution et d'autres textes législatifs stipulent que tout résident étranger contribuant à l'économie, au monde scientifique et culturel ou de toute autre manière à la vie de la société cambodgienne peut se voir octroyer la citoyenneté cambodgienne.
Un projet de loi sur la lutte contre la corruption a été adopté en Conseil des ministres et se trouve actuellement en cours d'examen devant le Parlement, a indiqué la délégation. Elle a en outre rappelé que le Cambodge était signataire de la Convention internationale sur la lutte contre la corruption.
En ce qui concerne les questions intéressant les populations autochtones, la délégation a expliqué que le Gouvernement cambodgien s'efforçait d'attirer les investissements étrangers dans certains secteurs tels que l'agro-industrie et l'industrie minière, entre autres. Ce faisant, le Gouvernement a néanmoins toujours pris en compte les conséquences néfastes que pourraient avoir pour les autochtones des concessions de terres dans ce contexte et s'est donc efforcé d'en minimiser l'impact, y compris d'un point de vue environnemental, a assuré la délégation. Les entreprises qui réclament des concessions de terres doivent en contrepartie créer des emplois pour les personnes vivant sur ces terres, a-t-elle indiqué. La politique nationale de développement autochtone adoptée en avril 2009 prône la coopération aux fins du développement des autochtones dans toutes les régions ainsi que le respect, au mieux, des intérêts des autochtones. Il faut obtenir leur consentement pour que des autochtones soient amenés à quitter leurs terres; ils ont alors droit à une indemnisation, a précisé la délégation. Les décisions s'agissant de ces questions sont prises après un processus de consultation, a-t-elle ajouté. La délégation a fait valoir qu'en 2007, sept contrats de concession de terres avaient été annulés définitivement.
La délégation a par ailleurs attiré l'attention sur la loi promulguée en avril 2009 concernant la propriété des terres autochtones. On s'est efforcé de faire en sorte que les communautés autochtones, sur une base collective, puissent revendiquer la propriété de leurs terres, a-t-elle précisé. En vertu de la Constitution, les ressources naturelles appartiennent à l'État, mais ce dernier a le droit de les octroyer à ses citoyens – et donc aux populations autochtones, a indiqué la délégation.
La délégation a ensuite fait part des progrès accomplis s'agissant de l'enregistrement des terres de communautés autochtones sous le régime de la propriété collective. Pour bénéficier de l'enregistrement d'une propriété collective, une communauté doit être reconnue comme entité légale en tant que collectivité reconnue. En 2009, plusieurs communautés de différents districts ont été constituées et d'autres étaient sur le point de l'être. Au total, on pourrait atteindre cette année le chiffre de neuf communautés autochtones dûment enregistrées, a indiqué la délégation.
Il existe dans la loi des mesures de protection provisoire des terres des communautés autochtones non encore enregistrées, a par ailleurs indiqué la délégation.
La Constitution est la loi suprême du pays, a rappelé la délégation. C'est surtout le droit civil et la common law qui prévalent au Cambodge, a-t-elle souligné.
S'agissant des questions d'éducation, la délégation a souligné qu'en vertu de la loi, tout étudiant cambodgien d'origine minoritaire peut suivre une éducation bilingue fondée sur l'utilisation de manuels bilingues (en langue khmère et dans la langue d'origine de l'élève).
La majorité des universités au Cambodge sont des universités privées, dans lesquelles toute personne, y compris des étrangers, peut enseigner, a en outre indiqué la délégation.
En ce qui concerne le bouddhisme, religion d'État, et la raison pour laquelle les autres religions ne sont pas des religions officielles, la délégation a assuré qu'il n'y a là aucune discrimination et que le Cambodge est une société tolérante. La majorité de la population, composée de Khmers, pratique à 90% le bouddhisme.
S'agissant des réfugiés, la délégation a rappelé que le sous-décret n°224 de 2009 porte sur les procédures d'identification des réfugiés. Le Cambodge collabore étroitement avec le bureau national du Haut Commissariat pour les réfugiés s'agissant de ces questions, a-t-elle souligné. Elle a en outre rappelé que le Cambodge est signataire de la Convention de 1961 sur le statut des réfugiés. Après avoir évoqué, notamment, la situation de la tribu vietnamienne vivant sur les hauts plateaux, la délégation a indiqué qu'entre 2004 et 2009, le Cambodge a accueilli quelque 1830 montagnards et a tout mis en œuvre pour les protéger; il collabore à cette fin avec le Haut Commissariat pour les réfugiés afin de faciliter leur séjour, conformément à la Convention de 1961 susmentionnée. D'après les données du Ministère cambodgien de l'intérieur, 902 montagnards au total se sont rendus dans d'autres pays et 400 sont rentrés chez eux, certains sur une base volontaire, grâce à l'aide du HCR. Certains ont obtenu le statut de réfugié, a ajouté la délégation.
Observations préliminaires
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport du Cambodge, M. Pierre-Richard Prosper, s'est réjoui du ton direct et ouvert du dialogue entre le Comité et la délégation cambodgienne, qui a permis d'en apprendre beaucoup sur la situation au Cambodge. Il a tenu à souligner les progrès tout à fait louables enregistrés par le Cambodge. Il a par ailleurs exprimé l'espoir que lorsqu'une délégation cambodgienne se présentera de nouveau, dans quatre ans, devant le Comité, le pays aura pu donner suite aux recommandations qui lui auront été adressées à la présente session.
Nombre d'aspects positifs sont ressortis de ce dialogue, à commencer par l'attachement du Cambodge à la Convention et la transparence qui a caractérisé le dialogue avec le Comité, a poursuivi M. Prosper, relevant en outre que ces dernières années, le pays travaille en étroite collaboration avec la communauté internationale - et les Nations Unies en particulier - afin de promouvoir la démocratie. Bien sûr, certaines préoccupations se sont profilées durant ce dialogue, notamment en ce qui concerne le respect de l'état de droit, au sujet duquel le Comité ne ménagera aucun effort pour aider le pays à faire en sorte qu'il soit dûment appliqué, dans tous les domaines, a poursuivi M. Prosper. Le Comité attache une grande importance à ce que l'état de droit soit appliqué de manière uniforme, s'agissant notamment des réfugiés ou de différents groupes mentionnés durant le dialogue, a-t-il insisté.
Pour ce qui est de la définition de la discrimination raciale au Cambodge, certains éléments sont restés relativement flous, a en outre fait observer l'expert. Il a par ailleurs rappelé que des questions ont été soulevées, durant ce dialogue, s'agissant de la question de l'appropriation des terres, au sujet de laquelle, si des lois existent certes, elles ne semblent pas être dûment appliquées dans la pratique. Il faudra également que le pays se penche sérieusement sur la situation des Khmers kroms et de leur nationalité. Il faut en effet veiller à ce que les Khmers kroms et autres groupes minoritaires bénéficient de l'égalité de droit dans les domaines de l'éducation, de la santé et du logement – domaines qui sont si essentiels à la vie, a conclu le rapporteur.
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