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Communiqués de presse Organes conventionnels

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes examine le Panama

01 Février 2010

1er février 2010

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a examiné aujourd'hui les mesures prises par le Panama pour se conformer aux dispositions de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Présentant le rapport de son pays, la Vice-Ministre du développement social du Panama, Mme Marta Susana González Ruiz de Varela, a déclaré que d'importants progrès ont été réalisés au Panama en matière d'élimination de la discrimination contre la femme depuis la présentation du précédent rapport. Toutefois, a-t-elle admis, le Panama doit encore relever de nombreux défis avant que le respect des normes existantes en matière de perspective sexospécifique et de droits des femmes n'atteigne les niveaux désirés. Elle a ensuite attiré l'attention sur la création récente de l'Institut national de la femme, chargé de coordonner et d'exécuter la politique nationale sur l'égalité des chances pour les femmes. Les femmes et filles autochtones continuent de constituer les groupes les plus vulnérables en raison du manque d'options éducatives adéquates a reconnu la Vice-Ministre. Elle a par ailleurs fait valoir que la participation des femmes aux institutions et organes du pouvoir politique a augmenté au Panama de manière significative depuis l'application des réformes du Code électoral, reconnaissant toutefois que le quota de 30% de femmes fixé par la loi de 1997 sur les quotas n'a pas été atteint. Mme González Ruiz de Varela a par ailleurs attiré l'attention sur la réforme du Code pénal et du Code judiciaire traitant de la violence domestique et des mauvais traitements.

La délégation du Panama était également composée de plusieurs représentants du Ministère du gouvernement et de la justice, du Ministère des relations extérieures et de l'Institut national de la femme. Elle a répondu aux questions soulevées par les experts du Comité s'agissant, entre autres, de la participation des femmes à la vie politique et publique; de l'augmentation des cas de meurtres de femmes; de la lutte contre les stéréotypes, contre la violence à l'égard des femmes et contre la traite de personnes; de la situation des femmes autochtones; des questions d'éducation et de santé; des questions relatives à l'emploi et au travail; ou encore du mariage.

La Présidente du Comité, Mme Naéla Gabr, a reconnu que, depuis l'examen du précédent rapport du Panama, en 1998, des progrès significatifs ont été enregistrés dans le pays. Des problèmes demeurent toutefois en ce qui concerne la surveillance de la mise en œuvre des lois qui ont été adoptées. Mme Gabr a par ailleurs indiqué avoir l'impression que le Gouvernement n'était pas très soucieux de mettre en œuvre des mesures temporaires spéciales. Il convient en outre de veiller davantage à la situation des femmes autochtones et d'ascendance africaine, qui ont besoin d'une attention particulière, a poursuivi la Présidente. Elle s'est par ailleurs dite préoccupée par la pauvreté extrême et par son impact sur les femmes, en particulier les femmes rurales. Le Comité est aussi extrêmement préoccupé par le problème de la traite d'êtres humains, a souligné Mme Gabr.

Les observations et recommandations du Comité sur le rapport du Panama seront publiées à l'issue de la session sur la page Internet du Comité, sur le site du Haut Commissariat aux droits de l'homme.

Le Comité se réunira de nouveau en séance publique vendredi prochain, 5 février, en fin de matinée, pour clore les travaux de sa session.

Présentation du rapport

MME MARTA SUSANA GONZÁLEZ RUIZ DE VARELA, Vice-Ministre du développement social du Panama, a précisé que le présent rapport couvrait la période allant de 1998 à 2008. Elle a notamment fait valoir que 49,56% du budget global de l'État sont alloués aux services sociaux, soit le meilleur taux en Amérique latine. D'importants progrès ont été réalisés au Panama pour éliminer la discrimination contre la femme depuis la présentation du précédent rapport, a-t-elle poursuivi. Ces progrès sont particulièrement notables si l'on établit une comparaison entre la législation actuellement en vigueur et celle qui prévalait il y a quelques années, a-t-elle souligné. Toutefois, a-t-elle ajouté, le Panama doit encore relever de nombreux défis avant que le respect des normes existantes en matière de perspective sexospécifique et de droits des femmes n'atteigne les niveaux désirés.

La Vice-Ministre du développement social a ensuite fait part de la création, en décembre 2008, de l'Institut national de la femme, entité publique décentralisée dotée de la personnalité juridique et d'une autonomie administrative et budgétaire qui est chargée de coordonner et d'exécuter la politique nationale sur l'égalité des chances pour les femmes. Elle a en outre indiqué que la majorité des femmes panaméennes travaillent dans le secteur des services, ou secteur tertiaire de l'économie, à savoir dans les domaines des assurances, du tourisme, des activités bancaires, de la vente et de l'éducation. En 2004, seules 5% des femmes qui travaillaient exerçaient une activité dans le secteur primaire; pour le reste, 11,3% travaillaient dans le secteur secondaire et, donc, 83,6% dans le secteur tertiaire. En 2006, l'emploi informel représentait 46,3% des activités économiques, a poursuivi Mme González Ruiz de Varela. Au total, 47,1% des femmes travailleuses exercent une activité dans le secteur informel, a-t-elle ajouté; une grande quantité de femmes travaillent pour leur propre compte, ce qui reflète une condition défavorisée du fait de l'instabilité du travail et du moindre accès à la sécurité sociale que cela induit. Les dispositions des accords et conventions internationaux ainsi que la loi du 29 janvier 1999 établissant l'égalité des chances pour les femmes sont les points de référence pour poursuivre les processus de changements des conditions des femmes panaméennes, a indiqué la Vice-Ministre.

Pour ce qui est des femmes et de l'éducation, Mme González Ruiz de Varela a fait observer qu'en dépit des incroyables progrès technologiques et de la «libération de la femme», les femmes continuent d'opter majoritairement pour des carrières traditionnelles. Cela est essentiellement dû à la persistance d'une socialisation différenciée entre hommes et femmes, fondée sur les préjugés et les stéréotypes associés à ce qui est considéré comme approprié pour les uns et pour les autres. Par ailleurs, l'hypertrophie du secteur des services modèle la tendance en matière d'offres d'emplois et donc aussi la demande en matière d'études supérieures. Selon une étude réalisée en 2005, les inscriptions à l'université du Panama concernèrent 23 746 hommes et 49 003 femmes. Par ailleurs, les statistiques éducatives montrent une tendance à un taux d'achèvement des études plus grand chez les filles que chez les garçons, en particulier aux niveaux intermédiaire et supérieur. Il existe toutefois une limite à la réalisation de l'égalité des chances pour les femmes, selon ce que révèlent les indicateurs entre zones urbaines et zones rurales. En effet, les femmes et filles autochtones continuent de constituer les groupes les plus vulnérables en raison du manque d'options éducatives adéquates à leur réalité culturelle et socioéconomique. De ce point de vue, a précisé Mme González Ruiz de Varela, le Ministre de l'éducation fait la promotion de nouvelles mesures extrascolaires en faveur de l'éducation des peuples autochtones. L'analphabétisme se situe à 7,6% dans le pays, la population autochtone étant davantage touchée que la moyenne. Le taux de scolarisation étant en outre moindre pour les femmes, il existe une plus grande quantité de femmes autochtones analphabètes.

La participation des femmes aux institutions et organes du pouvoir politique a augmenté au Panama de manière significative depuis l'application des réformes du Code électoral, a poursuivi la Vice-Ministre du développement social. Entre les périodes électorales 1999-2004 et 2004-2009, le pays a presque doublé le pourcentage de ses femmes parlementaires, lequel est passé de 9,86% à 18,3%. En dépit de cette hausse, le quota de 30% de femmes fixé par la loi de 1997 sur les quotas n'a pas été atteint, a reconnu Mme González Ruiz de Varela. Dans d'autres fonctions gouvernementales, on note une présence de femmes à des postes de prise de décisions, comme en témoignent les diverses femmes ministres et vice-ministres, ainsi que le grand nombre d'institutions dirigées par des femmes, entre autres. Pour autant, dans aucune des instances politiques, n'a encore été atteint le quota de 30% fixé par la loi. Il conviendrait donc de voir si les normes actuelles sont suffisantes ou s'il convient de modifier la législation électorale à la lumière des objectifs de parité représentative, a déclaré la Vice-Ministre.

Mme González Ruiz de Varela a par ailleurs attiré l'attention sur l'adoption de la loi n°38 du 10 juillet 2001 qui apporte des modifications et ajoute des articles au code pénal et au code judiciaire s'agissant de la violence domestique et des mauvais traitements. Elle a en outre rappelé que la loi n°11 de 2005 interdit la discrimination au travail fondée sur la race, la naissance, le handicap, la classe sociale, le sexe, la religion ou les idées politiques.

Des changements pertinents sont intervenus au Panama, a poursuivi la Vice-Ministre. Néanmoins, les fémicides augmentent année après année; le pays en a enregistrés 26 en 2006 et 36 en 2007.

Pour ce qui est des questions de santé, Mme González Ruiz de Varela a fait observer que l'espérance de vie augmente au Panama: elle était de 75,1 ans en moyenne en 2005, soit 77,7 ans pour les femmes et 72,6% pour les hommes et 78,3 ans dans les zones urbaines contre 77,3 ans dans les zones rurales. Les zones autochtones maintiennent une différence de 5 à 9 ans de moins d'espérance de vie par rapport à la moyenne nationale, a indiqué la Vice-Ministre, faisant néanmoins observer que les programmes de santé spécifiquement destinés aux femmes ont permis dans certaines régions autochtones d'accélérer la hausse de l'espérance de vie à une vitesse supérieure à la vitesse moyenne nationale. Pour les femmes et leurs familles, le principal problème en matière d'accès aux soins de santé est économique et est lié aux coûts de transport, surtout dans les zones rurales, et aux coûts des services de santé eux-mêmes.

Au mois de septembre 2006, quelque 7931 cas cumulés de sida avaient été enregistrés au Panama, concernant 1979 femmes au total, a poursuivi Mme González Ruiz de Varela. Le Panama est, après le Honduras et le Guatemala, le troisième pays d'Amérique centrale pour ce qui est du taux d'incidence du VIH/sida, a-t-elle précisé. Ont en outre été maintenues en 2007 les dispositions prévoyant des peines pour les femmes et les personnels de santé qui réalisent des avortements en dehors des prescriptions légales, c'est-à-dire en dehors des cas d'eugénisme thérapeutique (en cas de danger pour la vie de la mère) et des cas éthiques (c'est-à-dire en cas de viol). Le Ministère de la santé a créé un département spécifiquement destiné à améliorer les conditions de vie des femmes et des hommes autochtones à travers des politiques de protection et de promotion adéquates, a ajouté Mme González Ruiz de Varela.

La Vice-Ministre a par ailleurs souligné que la prévention et la protection de toutes les personnes mineures contre l'exploitation économique et l'exploitation par le travail est garantie par les conventions internationales fondamentales que le Panama a ratifiées, au nombre desquelles la convention n°182 de l'Organisation internationale du travail. Mme González Ruiz de Varela a en outre fait part du Plan national d'éradication du travail des enfants et de protection des adolescents travailleurs (2007-2011), actuellement en cours d'exécution dans le pays. Les femmes panaméennes ont toujours fait partie intégrante du développement national, a-t-elle conclu, ajoutant que le nouveau Gouvernement panaméen est engagé à redoubler d'efforts pour faire face aux défis et promouvoir la protection des droits de la femme, en maintenant l'objectif de réaliser l'égalité entre les sexes sur l'ensemble du territoire national.

Le rapport périodique du Panama (document CEDAW/C/PAN/7 regroupant les quatrième à septième rapports) souligne que La loi n° 4 du 29 janvier 1999 est l'instrument qui réglemente et définit la politique de l'État panaméen à l'égard des femmes, à savoir une politique fondée sur le principe «de non discrimination pour des raisons de sexe, d'égalité devant la loi, d'équité, de protection des droits humains, d'égalité des chances et de traitement et de condamnation de toutes les formes de violence», tel que consacré dans les instruments régionaux et internationaux sur cette question, ratifiés par le Panama. Il indique aussi que la Loi de 1998 sur la protection des victimes d'un délit accorde aux victimes d'un délit un rôle essentiel dans les poursuites pénales, en reconnaissant pleinement leurs droits à engager une action pénale contre l'accusé, ainsi qu'à être indemnisées pour les dommages et préjudices résultant du délit. Une loi de 1999 sur la réforme du régime d'assurance volontaire de la caisse d'assurance sociale stipule pour sa part que l'homme ou la femme majeure ainsi que les personnes émancipées qui se consacrent de manière exclusive à leur famille peuvent être affiliés au régime volontaire de la sécurité sociale. Le rapport attire également l'attention sur la loi de mai 2000 rendant obligatoire l'utilisation d'une langue, d'un contenu et d'illustrations non sexistes dans les œuvres et les manuels scolaires. Un autre texte de loi a apporté en 2001 des modifications et ajouté des articles au code pénal et au code judiciaire concernant la violence domestique et le mauvais traitement des enfants et des adolescents.

Le rapport évoque par ailleurs la loi de décembre 2001 établissant l'attribution conjointe de titres de propriété pour l'acquisition de terres et modifiant les articles du code agraire ainsi que la loi de juin 2002 garantissant la santé et l'éducation de l'adolescente enceinte. Alors qu'auparavant, les homicides étaient considérés comme aggravés lorsque l'agresseur était un proche parent de la victime, désormais - en vertu du nouveau Code pénal de 2007 - un agresseur causant une blessure physique à une autre personne est passible d'une punition plus grave en cas de violence domestique.

En mai 2007, poursuit le rapport, a été établie la Commission de la parité et du travail du Ministère du travail et du développement de l'emploi, qui est chargée de renforcer la capacité institutionnelle d'intégration d'une perspective sexospécifique sur le lieu de travail, afin d'assurer l'égalité des chances dans la pratique.

Examen du rapport

Cadre général d'application de la Convention, développement et progrès des femmes

Il semblerait que l'un des problèmes qui subsiste au Panama aujourd'hui ait trait à la mise en œuvre des lois existantes, a relevé un expert du Comité. La Loi de 1999 sur l'égalité des chances inclut-elle une définition relative à non-discrimination, directe comme indirecte, conformément à l'article premier de la Convention, a par ailleurs demandé cet expert? Existe-t-il un ombudsman pour les cas de discrimination fondée sur le sexe et, le cas échéant, combien de cas de discrimination de ce type lui ont-il été soumis? Qu'en est-il des programmes de formation à la prise en compte des normes de la Convention à destination des personnels judiciaires et des agents chargés de l'application des lois?

Quelle est précisément l'institution principale chargée de l'émancipation de la femme au Panama, a demandé une experte?

Les autorités envisagent-elles de prendre des mesures temporaires spéciales afin d'assurer une représentation politique adéquate des femmes, sans attendre que les partis politiques eux-mêmes se conforment aux exigences de la loi qui fixe à 30% le quota de femmes dans ce domaine, a demandé un membre du Comité?

Il semblerait que l'un des problèmes qui subsiste au Panama aujourd'hui ait trait à la mise en œuvre des lois existantes, a relevé un expert du Comité. La Loi de 1999 sur l'égalité des chances inclut-elle une définition relative à non-discrimination, directe comme indirecte, conformément à l'article premier de la Convention, a par ailleurs demandé cet expert? Existe-t-il un ombudsman pour les cas de discrimination fondée sur le sexe et, le cas échéant, combien de cas de discrimination de ce type lui ont-il été soumis? Qu'en est-il des programmes de formation à la prise en compte des normes de la Convention à destination des personnels judiciaires et des agents chargés de l'application des lois?

Quelle est précisément l'institution principale chargée de l'émancipation de la femme au Panama, a demandé une experte?

Les autorités envisagent-elles de prendre des mesures temporaires spéciales afin d'assurer une représentation politique adéquate des femmes, sans attendre que les partis politiques eux-mêmes se conforment aux exigences de la loi qui fixe à 30% le quota de femmes dans ce domaine, a demandé un membre du Comité?

La délégation a rappelé que le Panama avait adopté, en 1999, la Loi-cadre sur l'égalité des chances, dont l'article 3 reprend les normes énoncées dans la Convention et stipule qu'aucune discrimination fondée sur le sexe ne doit être établie. Par ailleurs, la Constitution panaméenne stipule que le pays applique les normes du droit international, de sorte que toute convention dûment ratifiée par le Panama jouit du même statut que la loi interne. En outre, le Panama a ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention, a par ailleurs souligné la délégation.

Aujourd'hui, le pays ne compte pas moins de 25 mécanismes institutionnels visant à promouvoir les droits de la femme et une politique d'égalité entre hommes et femmes, a indiqué la délégation, citant notamment l'Institut national de la femme. Le Panama dispose de normes importantes, mais il lui reste à réorganiser un certain nombre de structures, a-t-elle ajouté, admettant que le pays rencontre quelques difficultés pour recruter le personnel technique nécessaire, à un moment où le Panama aurait besoin d'un système statistique adéquat.

Les autorités estiment que le pays dispose de suffisamment de normes au regard des exigences de la Convention et qu'il n'est pas nécessaire d'en créer de nouvelles; mieux vaudrait se concentrer sur la coordination globale de l'action en faveur des femmes, a ajouté la délégation.

La loi prévoit qu'un certain budget soit alloué à la participation politique des femmes, a par ailleurs rappelé la délégation. L'Institut national de la femme veille au respect des dispositions de la Convention relatives à l'autonomie politique des femmes, a-t-elle ajouté. La délégation a fait part de l'intention des autorités panaméennes d'atteindre d'ici 2014 l'objectif de 30% qui a été fixé par la loi pour la participation politique des femmes.

Lutte contre les stéréotypes et contre toutes les formes de violence à l'égard des femmes

Une experte s'est enquise du degré de mise en œuvre du plan national de lutte contre la violence au foyer. Qu'en est-il du nombre de victimes à cet égard, a-t-il été demandé? Par ailleurs, les centres de détention de femmes sont surpeuplés et les conditions dans ces centres sont pour le moins inadéquates, a-t-il été souligné.

Persistent au Panama de nombreux stéréotypes sexistes, auxquels s'ajoutent des stéréotypes associés aux discriminations fondées, entre autres, sur l'orientation sexuelle ou l'âge, a souligné une experte. Le Panama est un important pays de destination et de transit commercial et touristique; aussi, est-il important de s'assurer qu'en promouvant le tourisme, on n'utilise pas l'image des femmes panaméennes sous un angle érotique, par exemple, pour attirer un plus grand nombre de touristes, a-t-il été souligné.

Qu'en est-il des poursuites engagées face aux cas de «fémicides», a demandé une experte?

Quelle définition la législation panaméenne retient-elle de la traite de personnes, a demandé un membre du Comité? La prostitution est une pratique répandue au Panama, où il arrive fréquemment que les femmes soient traitées comme des esclaves, alors que de très jeunes filles, âgées parfois de 10 à 14 ans, entrent dans la prostitution avec la complicité de leurs parents: que font les autorités pour remédier à cette situation, a demandé cette experte?

La délégation a indiqué que les autorités espéraient mieux être en mesure de lutter contre la violence familiale grâce à la mise en place de réseaux, dont le pays a déjà commencé à se doter. La délégation a par ailleurs fait état de la création de l'Observatoire sur la violence, qui fait partie du bureau du défenseur du peuple.

En ce qui concerne les fémicides, la délégation a indiqué que le Panama en avait enregistré 46 en 2008 et 71 en 2009. La situation se détériore, a-t-elle reconnu, ajoutant que cette hausse est notamment à mettre en rapport avec l'augmentation générale de la violence. D'une manière générale, on constate que très peu de condamnations sont prononcées dans les affaires d'homicides, a par ailleurs reconnu la délégation, statistiques à l'appui.

Le Code pénal ne reconnaît pas en tant que tel le fémicide comme un délit pénal distinct; le fémicide est en fait considéré comme un homicide comme les autres, a précisé la délégation. Les autorités s'efforcent néanmoins de faire évoluer les attitudes, mais elles se heurtent à une société phallocrate et machiste, a-t-elle reconnu. Il n'en demeure pas moins que les autorités sont persuadées qu'elles parviendront finalement à faire changer les mentalités à cet égard.

En ce qui concerne la réhabilitation sociale des femmes privées de liberté, la délégation a fait part d'un nouveau programme permettant d'étudier de près la situation de ces femmes afin de mieux leur venir en aide et de mieux les motiver en leur faisant comprendre qu'avec une meilleure formation, elles pourraient avoir accès à une vie meilleure. Une «cité pénitentiaire pour femmes» va être créée afin que les femmes privées de liberté puissent purger leur peine dans un endroit digne, a par la suite indiqué la délégation, ajoutant qu'en attendant l'ouverture de cet établissement, des mesures seront prises pour améliorer les conditions actuelles de détention des femmes. Le système pénitentiaire du Panama est loin d'être parfait. Les autorités sont conscientes de la situation et mettent tout en œuvre pour en améliorer les conditions, a insisté la délégation.

Pour ce qui est de la lutte contre la traite de personnes, la délégation a souligné que le Code pénal a été dûment modifié de manière à identifier clairement ce délit. Par ailleurs, le délit de l'exploitation sexuelle des enfants et adolescents dans le cadre du tourisme est également prévu par le Code pénal, a précisé la délégation. Le Gouvernement et le Ministère de la justice se sont rendus compte que le Panama était un lieu de transit de la traite de personnes à des fins, notamment, d'exploitation sexuelle, a poursuivi la délégation. Souvent, ce phénomène est négligé car les victimes refusent de se faire connaître, ce qui ne facilite bien évidemment pas la tâche des autorités pour remonter les filières du trafic, a expliqué la délégation. Elle a par ailleurs fait part de la création d'une unité d'aide aux victimes de la traite de personnes. Une grande partie de la traite est liée au trafic illicite des migrants qui cherchent à gagner les pays plus septentrionaux du continent, en provenance de l'Amérique du Sud, a ajouté la délégation. Elle a souligné qu'un plan d'éradication de l'exploitation sexuelle à des fins commerciales a été mis en place par le pays.

Situation des femmes autochtones et appartenant à des groupes minoritaires

En dépit de la volonté des autorités, il subsiste au Panama une réalité encore très préoccupante, liée à l'extrême pauvreté d'un certain nombre de populations certes, mais aussi à la persistance d'inégalités et de violences, a relevé une experte. Il subsiste au Panama un certain nombre de situations extrêmement préoccupantes, en particulier pour ce qui est des populations autochtones, a ajouté l'experte. Les femmes autochtones et les femmes d'origine africaine se trouvent dans des situations très difficiles, a insisté une autre experte.

Plusieurs membres du Comité ont relevé que près de 90% des femmes autochtones vivent dans la plus extrême pauvreté; il existe sur le plan économique des disparités énormes dans le pays et, bien entendu, ces disparités influent de manière importante sur la condition de ces femmes, a-t-il été souligné. L'éradication de la pauvreté ne peut se faire sans apporter des changements dans la structure économique afin d'assurer l'accès de toutes les femmes aux ressources et services adéquats, a rappelé une experte.

La délégation a reconnu qu'un écart important sépare la population autochtone du reste de la population. Pendant des années, en effet, la population autochtone s'est trouvée éloignée du développement global du pays. Un plan de développement général des régions autochtones dans tous les domaines (santé, formation, travail..) a donc été prévu dans le Plan stratégique social pour les années 2009-2014. Il existe donc une volonté d'intégration de ce groupe de la population, a insisté la délégation. Un atelier va être organisé à l'intention de tous les hauts fonctionnaires des régions où vivent les populations autochtones. Construction d'un hôpital, programmes d'éducation bilingue, programmes de préscolarisation, promotion des services de santé figurent au nombre des actions planifiées en faveur des populations autochtones du Panama, a précisé la délégation.

La délégation a par ailleurs assuré qu'en dépit des difficultés, les autorités entendent donner davantage de moyens aux femmes autochtones et promouvoir leurs capacités afin qu'elles puissent s'organiser au niveau communautaire et identifier les solutions aux problèmes qu'elles rencontrent.

Un projet d'alphabétisation des adultes autochtones a été entrepris au Panama, a par ailleurs fait valoir la délégation. Ce projet a permis l'alphabétisation de 45 000 adultes autochtones, dont plus de 60% étaient des femmes, a-t-elle précisé.

La Cour suprême de justice a été présidée par une femme noire, a notamment fait valoir la délégation. Quasiment tous les partis politiques ont intégré dans leur statut la reconnaissance de la participation politique des femmes, a-t-elle par ailleurs rappelé; mais lorsqu'il s'agit d'entrer en lice dans une campagne électorale, les femmes se heurtent à nombre de problèmes en raison, en particulier, des difficultés économiques qu'elles rencontrent pour faire face aux dépenses électorales induites par leur candidature. Le Conseil national des femmes, les partis politiques et l'association parlementaire de Panama ont effectivement proposé que l'on parle de véritable parité, a poursuivi la délégation; mais il est difficile de parler de parité alors que l'objectif de 30% de représentation féminine n'est pas encore atteint dans de nombreux domaines, a-t-elle souligné.

Questions d'éducation et de santé et questions relatives à l'emploi et au travail

Une experte du Comité a fait observer que certaines filières éducatives, notamment l'ingénierie, restent des bastions masculins. Qu'en est-il des efforts de l'État pour garantir réellement le droit à l'éducation des autochtones, en particulier pour les femmes autochtones, a demandé cette experte? Cette experte s'est également enquise de l'impact du taux élevé de grossesses d'adolescentes sur la scolarité des jeunes filles concernées. Le travail des enfants concerne 11% des enfants âgés de 8 à 17 ans, a-t-il en outre été relevé. Une autre experte a relevé que l'écrasante majorité (72,7%) de la population non active sur le plan économique est composée de femmes. Il a en outre été rappelé que l'Organisation internationale du travail a recommandé au Panama d'introduire le principe de salaire égal à travail égal: qu'en est-il de la prise en compte de cette recommandation? Un membre du Comité a relevé que le Code pénal a été amendé aux fins de la criminalisation du harcèlement sexuel: aussi, qu'en est-il de l'application pratique de ces nouvelles dispositions pénales et de la jurisprudence en la matière? Cet expert s'est en outre inquiété d'informations indiquant que sont parfois pratiqués des tests de grossesses avant d'accorder un emploi à une personne, ce qui est parfaitement contraire à la Convention. Cet expert s'est également inquiété d'autres informations selon lesquelles le travail domestique des enfants, en particulier des jeunes filles, serait en hausse.

Qu'en est-il de la mortalité infantile et des données ventilées par causes concernant les taux de morbidité, a demandé une experte? Qu'en est-il de la politique suivie par l'État en matière de santé génésique et de la coordination de cette politique, a demandé une autre experte? Plusieurs experts se sont inquiétés des taux élevés de grossesses d'adolescentes et de l'importante augmentation des taux relatifs aux VIH/sida chez les enfants et les adolescents. Est-il vrai qu'il existe des directives pour que les femmes se fassent ligaturer les trompes lorsqu'elles ont déjà eu cinq enfants et qu'elles ont plus de 35 ans?

Qu'en est-il de la sécurité sociale pour les femmes rurales et autochtones, a demandé une experte?

S'agissant des questions d'éducation et d'emploi, la délégation a expliqué que l'une des principales préoccupations des autorités dans ce domaine avait trait à l'accès aux différentes carrières pour les hommes et les femmes; le Gouvernement travaille actuellement à une réforme des cursus universitaires dans une perspective sexospécifique, afin de corriger la situation actuelle où les femmes ont en fait accès à des carrières qui reproduisent les stéréotypes traditionnels. À l'heure de la recherche d'un emploi, les femmes ne jouissent pas de l'égalité des chances puisqu'il existe, à travail égal, une différence de salaire en faveur des hommes d'environ 100 dollars, a indiqué la délégation. Le secteur domestique est celui qui occupe le plus grand nombre de femmes, a-t-elle en outre rappelé.

Le Code du travail interdit le harcèlement sexuel, a poursuivi la délégation. Mais si des sanctions sont effectivement prévues pour ce nouveau délit, il y a dans les faits paralysie de l'application de ces nouvelles dispositions parce que le nouveau code de procédure pénale n'est pas encore, lui, entré en vigueur – ce qui devrait intervenir cette année et ne manquerait pas, alors, d'avoir un effet sur les poursuites engagées pour harcèlement sexuel.

Le Panama est très préoccupé par les données concernant le travail des enfants dans le pays, a assuré la délégation. Aussi, a-t-il été décidé de lancer une politique sérieuse et cohérente afin d'éliminer ce phénomène dans le pays, a-t-elle indiqué.

En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a notamment souligné que la loi exige que les grossesses d'adolescentes fassent l'objet d'un suivi adéquat. Le programme de santé génésique comporte des volets importants concernant l'éducation, a par ailleurs indiqué la délégation.

La délégation a ensuite attiré l'attention sur les nombreux nouveaux centres de santé mis en place dans les régions autochtones.

Divers programmes mis en place par les autorités ont permis de réduire l'incidence de la pauvreté extrême, a par ailleurs fait valoir la délégation. Une étude menée en 2008 a permis de constater que le groupe le plus défavorisé de la population panaméenne était celui des personnes âgées de 0 à 6 ans; d'où l'attention portée par le Gouvernement à ce groupe laissé en marge, a-t-elle ajouté.

Questions relatives au mariage

Une experte a déploré le maintien d'une distinction entre les sexes pour ce qui est de l'âge minimum du mariage, fixé à 14 ans pour les filles alors qu'il est de 16 ans pour les garçons. Qu'en est-il des régimes matrimoniaux et des modalités de garde d'enfants en cas de séparation, a-t-il été demandé?

Au Panama, le mariage est un acte librement consenti, a rappelé la délégation. Lorsqu'il y a rupture de l'engagement matrimonial et si tel a été le régime adopté au moment du mariage, la répartition des biens acquis pendant le mariage se fait à part égale entre l'homme et la femme, a indiqué la délégation.

Actuellement, la législation n'autorise le mariage qu'entre personnes de sexe opposé, a précisé la délégation.

Généralement, la garde de l'enfant est confiée à la mère, tout simplement parce que lorsqu'ils sont en bas âge, c'est avec elle que les enfants se sentent généralement le mieux, a fortiori à l'issue d'une procédure de divorce souvent traumatisante, a en outre indiqué la délégation.

Conclusions

MME NAÉLA GABR, Présidente du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, a relevé que depuis l'examen du précédent rapport du Panama, en 1998, des progrès significatifs ont été enregistrés dans le pays. Mme Gabr s'est notamment réjouie que le pays ait souscrit au Protocole facultatif se rapportant à la Convention et ait adopté de nombreuses lois dans ce domaine. Des problèmes demeurent toutefois en ce qui concerne la surveillance de la mise en œuvre de ces lois et le Comité recommande au Gouvernement panaméen d'y veiller attentivement, a déclaré la Présidente du Comité. En ce qui concerne les mesures temporaires spéciales, Mme Gabr a indiqué avoir l'impression que le Gouvernement n'était pas très enthousiaste à l'idée de l'application de ces mesures. Il convient en outre de veiller davantage à la situation des femmes autochtones et d'ascendance africaine, qui ont besoin d'une attention particulière, a poursuivi la Présidente. Elle s'est par ailleurs dite préoccupée par la pauvreté extrême et par son impact sur les femmes, en particulier les femmes rurales. Le Comité est aussi extrêmement préoccupé par le problème de la traite d'êtres humains, en particulier de jeunes enfants, et de l'exploitation de femmes pauvres.

Mme Marta Susana GonZález Ruiz de Varela, Vice-Ministre du développement social du Panama, a pour sa part affirmé qu'il est clair que le Panama a fait d'énormes progrès. Il n'en demeure pas moins que le pays est conscient des défis qu'il lui reste à relever et qui ont été mentionnés par les membres du Comité. À son retour, la délégation procèdera aux consultations nécessaires pour engager des programmes dans les domaines où subsistent des carences en ce qui concerne la situation de la femme, a assuré la Vice-Ministre.
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Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel

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