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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

VINGT ORGANISATIONS NON GOUVERNEMENTALES S'EXPRIMENT SUR DES QUESTIONS LIÉES AUX DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

07 août 2002



Sous-Commission de la promotion et
de la protection des droits de l'homme
54ème session
6 août 2002
Après-midi





La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a poursuivi, cet après-midi, son débat général sur les droits économiques, sociaux et culturels en entendant une vingtaine d'organisations non gouvernementales. La Sous-Commission a notamment été priée par plusieurs intervenants d'encourager l'adoption d'un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui rendrait ces droits justiciables. Ont également été dénoncées les conséquences néfastes, notamment du point de vue environnemental, de projets de développement d'infrastructures dans certaines régions du monde. Plusieurs orateurs ont dénoncé les lois et mesures discriminatoires dont sont victimes à travers le monde des membres de minorités ou de populations autochtones et qui entravent la jouissance par ces personnes de leurs droits économiques, sociaux et culturels.
La masse énorme de capital que concentrent les sociétés transnationales leur confère un pouvoir sans précédent dans l'histoire et il est donc indispensable de promouvoir un encadrement juridique contraignant applicable aux activités de ces sociétés, a fait observer un intervenant. Un autre orateur s'est inquiété qu'en l'état actuel d'avancement du projet de nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, les programmes envisagés se contentent de reprendre les principes des politiques prônées par les institutions de Bretton Woods. La Sous-Commission a donc été priée d'engager une étude sur la primauté des droits de l'homme dans les objectifs des aides publiques internationales et les mécanismes de coopération internationale.
Commentant un certain nombre de rapports présentés au titre des droits économiques, sociaux et culturels, Mme Françoise Jane Hampson a exprimé l'espoir que, M. El-Hadji Guissé, à qui a été confiée l'étude relative au droit à l'eau potable, examinera l'impact sur les femmes du problème de l'accès à l'eau. S'agissant de la libéralisation du commerce des services – question qui a fait l'objet d'un rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme – Mme Hampson a notamment jugé déconcertant de constater que généralement, la transition en matière de fourniture des services se fait dans le sens d'un monopole étatique vers un monopole accordé à un fournisseur privé étranger.
M. Guissé s'est pour sa part félicité des commentaires apportés par ses collègues aux différents rapports présentés au titre des droits économiques, sociaux et culturels, s'agissant notamment du droit à l'eau potable.
Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes ont fait des déclarations au cours de la séance de cet après-midi: Libération; Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques;Institut international de la paix; Parti radical transnational; Centre Europe Tiers-Monde; Interfaith International; International Educational Development; Mouvement international pour l'union fraternelle entre les races et les peuples; Women's Sports Foundation; European Union of Public Relations; Conseil international de traités indiens; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme- FIDH; Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants; Asian Centre for Organization Research and Development; ATLAS - Association tunisienne pour l'auto-développment et la solidarité; Union des juristes arabes; Pax Romana; Médecins du monde international; Minority Rights Group International et ligue internationale pour les droits et la libération des peuples.
La Sous-Commission devrait achever demain matin, à partir de 10 heures, son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels.

Suite du débat sur les droits économiques, sociaux et culturels
MME AMBREEN HISBANI (Libération) a déclaré que malgré la ratification par le Pakistan du Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels en 1966, ce pays n'a pas encore adopté de lois ni mis en place de mesures en vue de protéger les droits élémentaires de ses minorités religieuses et ethniques, ni des femmes. Le peuple du Sindh est ainsi victime de trois catégories de violations de ses droits. Dans le cadre général de l'accaparement du pouvoir exécutif par les autorités militaires, les provinces du Baloutchistan et du Sindh se voient refuser toute mesure d'auto-administration, en contradiction flagrante avec toutes les dispositions des traités internationaux. En outre, cette attitude augure mal de l'évolution du Pakistan vers une société réellement démocratique et pluraliste, a estimé la représentante. Libération a aussi dénoncé les conditions du percement du canal de Thal, qui doit permettre l'irrigation d'un vaste bassin dans la vallée de l'Indus supérieur, région par ailleurs dominée par des alliés politiques du gouvernement militaire de M. Musharaf, selon la représentante de Libération. Ce projet a été lancé en août 2001 sans la moindre consultation ni avec le Gouvernement de l'État du Sindh, ni avec aucun organisme consultatif technique, et sans considération pour les effets prévisibles sur l'environnement et l'écologie locaux. Enfin, il faut relever la suppression systématique de leur culture et leur langue dont sont victimes les Sindhi. Les écoles primaires en langue sindh sont fermées les unes après les autres, privant les enfants de l'apprentissage de la langue, tandis que les médias officiels ne proposent que moins de trente minutes d'émissions quotidiennes dans cette langue. Toutes ces mesures contribuent à créer un sentiment de désespoir au sein de la population sindh. La Sous-Commission doit lancer un appel au Gouvernement du Pakistan afin qu'il respecte le droit international et engage les réformes démocratiques qui permettront au peuple pakistanais de prendre son destin en main.
M. U.S SHARMA (Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques) a rappelé que le droit au développement est un processus dans le cadre duquel tous les droits de l'homme et libertés fondamentales peuvent être exercés. Il a rappelé que le Jammu-et-Cachemire était jadis le troisième État le plus riche de l'Union indienne en termes de revenu par habitant avant d'être miné par des activités terroristes parrainées de l'extérieur. Les «marchands de mort» opérant au Jammu-et-Cachemire ont détruit les moyens de subsistance de la plus grande partie de la population locale. La vaste majorité de la population du Jammu-et-Cachemire pense que le meilleur moyen d'instaurer la paix dans la région réside dans la tenue d'élections démocratiques, la cessation de la violence et la promotion du développement économique. Les trois-quarts de la population du Jammu-et-Cachemire estime que c'est en encourageant les gens, à l'extérieur du Cachemire, à investir dans la région, que pourront être reconstruites l'économie et l'industrie touristique de la région. Rappelant que des élections se tiendront au Jammu-et-Cachemire le mois prochain, le représentant a affirmé que la communauté internationale et la Sous-Commission devraient faire pression sur le Pakistan et les groupes terroristes qu'il soutient afin qu'ils ne perturbent pas le processus électoral par des actions de coercition ou d'intimidation de la population.
M. PANKAJ BHAN (Institut international de la paix) a déploré qu'au Pakistan, la structure constitutionnelle et juridique déficiente entraîne une fragmentation de la société pakistanaise. La Constitution du pays interdit ainsi l'accession à la présidence des membres des minorités. Des communautés entières, tels les Ahemidyas, sont reléguées au ban de la société, la place des femmes est réduite à la portion congrue dans une société entièrement dominée par les hommes, tandis que plus de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté. Le représentant a relevé le rôle néfaste d'une certaine culture militante, soutenue par une caste militaire au pouvoir qui, obsédée par l'anti-indianisme et tout à la poursuite de ses objectifs, néglige de se préoccuper de la situation économique du pays. La communauté internationale doit se pencher sur ces faits et en tirer les leçons qui s'imposent.
M. ENVER CAN (Parti radical transnational) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le combat pour leur survie et pour le respect de leurs droits et libertés fondamentaux que mènent les Ouïghours qui sont aujourd'hui arrêtés, emprisonnés et même exécutés par les autorités chinoises au Turkestan oriental. Les Ouïghours sont persécutés pour la seule raison qu'ils revendiquent pour eux-mêmes les mêmes droits que ceux dont jouissent les Chinois dans leur vie politique, économique et sociale. Quarante-sept années d'expérience, depuis que la terre ouïghour est devenue province coloniale chinoise sous l'appellation de région autonome ouïghour du Xinjiang, ont montré que cette prétendue autonomie n'existe que sur le papier et que ce sont les Chinois qui contrôlent totalement tous les aspects de la vie des Ouïghours. Il serait judicieux que la Sous-Commission envoie une commission d'enquête qui serait chargée de vérifier les possibilités d'accès au marché du travail et au système éducatif dont bénéficient les Ouïghours. La Sous-Commission devrait en outre exhorter la Chine à mettre un terme à la politique de contrôle des naissances imposée aux femmes ouïghour contre leur volonté. La Chine devrait aussi être priée d'abroger sa récente décision visant à abolir l'enseignement de la langue ouïghour au niveau universitaire.
M. MALIK OZDEN (Centre Europe Tiers-Monde) a déclaré que la privatisation de tous les secteurs de l'activité humaine et la libéralisation des échanges ont des conséquences tragiques pour des centaines de millions d'êtres humains: chômage, malnutrition, dégradation des systèmes scolaires, déstructuration des sociétés - la liste est longue. Plusieurs rapporteurs de la Commission des droits de l'homme se sont d'ailleurs déjà élevés contre la privatisation des services publics. Il faut introduire un cadre juridique contraignant pour les sociétés transnationales qui profitent sans limite de ces mesures, estime le CETIM. Le représentant s'est déclaré en particulier très préoccupé par les violences policières qui ont eu lieu à Johannesburg en avril dernier, suite à une manifestation non violente contre la privatisation de l'eau par le maire de la ville. Le CETIM suivra avec attention le procès de l'activiste Trevor Ngwane qui débutera le 15 août prochain. La privatisation de l'eau à Johannesburg a rendu ce bien vital inaccessible pour de nombreux habitants qui sont obligés de boire l'eau polluée des rivières pour survivre, ce qui a provoqué une augmentation alarmante des cas de choléra, a notamment déclaré le représentant du CETIM.
MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, membre de la Sous-Commission, s'est félicitée que la Commission des droits de l'homme ait enfin autorisé la Sous-Commission à examiner la question de l'eau, qui se pose – quoique à des degrés de gravité divers – dans pratiquement toutes les régions du monde. Mme Hampson a exprimé l'espoir qu'à l'avenir, M. Guissé, à qui a été confiée l'étude de cette question, examinera l'impact sur les femmes du problème de l'accès à l'eau. Mme Hampson a indiqué qu'elle ne voit pas d'objection à opposer au principe du paiement de l'eau, à condition que les individus aient effectivement accès non seulement à l'eau potable mais aussi à l'eau courante d'usage domestique.
S'agissant du rapport sur l'extrême pauvreté, Mme Hampson a notamment rappelé qu'améliorer l'éducation des femmes et leur permettre d'avoir accès à des prêts peut faire la différence du point de vue de la richesse globale des familles. En ce qui concerne les questions liées à la libéralisation du commerce des services, Mme Hampson a notamment jugé déconcertant de constater que généralement, la transition en matière de fourniture des services se fait dans le sens d'un monopole étatique vers un monopole accordé à un fournisseur privé étranger. En ce qui concerne la fourniture de services par le biais de la présence de travailleurs étrangers dans un pays tiers, Mme Hampson a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le cas des travailleurs entrant dans cette catégorie qui sont en fait esclaves domestiques dans le pays où ils travaillent. Les États doivent trouver le moyen d'accorder une protection à ces travailleurs, a-t-elle insisté avant de préconiser l'adoption d'accords bilatéraux à cet égard. Mme Hampson a par ailleurs fait part de son inquiétude face à la tendance à la brevetabilité du vivant.
M. MOHAMED AHSAN (Interfaith International) a dénoncé le traitement infligé aux minorités ethniques pakistanaises par l'oligarchie du Pendjab au pouvoir. Dans le domaine économique, a relevé le représentant, la discrimination est flagrante dans le système de redistribution des richesses par les autorités fédérales pakistanaises. La province du Sindh, qui compte pour 62% de la production du pays, ne reçoit en retour que 23% des ressources nationales. Cet État est aussi en butte à un traitement injuste en ce qui concerne l'allocation des ressources en eau, en punition de l'opposition de la population aux projets hydroélectriques du gouvernement, projets qui ne bénéficieront en définitive qu'au seul Pendjab. La construction projetée d'une nouvelle autoroute provoquera encore l'expropriation de plus de vingt-cinq mille familles sindh. Le représentant a enfin dénoncé le soutien aux extrémistes de tous bords par les autorités, et en a appelé à la Sous-Commission pour qu'elle oblige le gouvernement du Pakistan à cesser ses pratiques discriminatoires contre le peuple du Sindh.
M. EL-HADJI GUISSÉ, membre de la Sous-Commission, a jugé particulièrement encourageantes les interventions de certains de ses collègues, tels M. Eide et Mme Hampson, qui ont apporté des contributions sur les rapports présentés au titre des droits économiques, sociaux et culturels, notamment sur la question du droit à l'eau potable. L'eau est d'ores et déjà source de conflit et si l'on se bat aujourd'hui pour du pétrole, il ne fait aucun doute que d'ici dix ou quinze, on se battra pour l'eau, a souligné M. Guissé.
MME KAREN PARKER (International Educational Development) a dénoncé les projets militaires des États-Unis contre l'Iraq et les moyens démesurés qui pourraient être employés en cas d'attaque contre ce pays. Les armes que se proposent d'utiliser les États-Unis conduiront à la destruction de l'héritage culturel du peuple irakien, ce qui reviendra à commettre un génocide contre le peuple iraqien. Les plans pour un «changement de régime» plongeront le pays dans un chaos total, et une destruction par contrecoup du peuple kurde. La Sous-Commission devrait dénoncer ces plans, a estimé la représentante. Elle a aussi déclaré que son organisation est consternée par l'attitude des États-Unis, qui cherchent à imposer les organismes génétiquement modifiés aux pays qui ont besoin d'une assistance alimentaire. Quant aux activités des sociétés transnationales, elle a fait observer qu'il était préoccupant de constater que des États étaient prêts à céder une part de leurs prérogatives sur leurs ressources naturelles au bénéfice de ces sociétés. La communauté internationale et la Sous-Commission devraient, selon la représentante, considérer ces accords comme nuls.
M. PAUL BEERSMANS (Mouvement international pour l'union fraternelle entre les races et les peuples) a souligné que depuis maintenant plus de douze ans, la population du Jammu-et-Cachemire est terrorisée par les activités de terroristes qui cherchent à perturber le cours normal de la vie dans la vallée. Plus de douze années de violence ont prouvé que la culture des armes ne peut porter que la destruction et non pas la paix et la sécurité dans la région, a souligné le représentant avant de déplorer les effets de cette violence sur la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels de la population cachemirienne. Le Gouvernement de l'Inde et celui du Pakistan devraient respecter leurs engagements et reprendre leurs négociations bilatérales concernant le Jammu-et-Cachemire à la lumière de l'Accord de Shimla et de la Déclaration de Lahore.
MME WILDA SPALDING (Women's Sports Foundation) a déclaré que nombre de jeunes membres de sa fondation, qui se sentent très concernées par les questions du développement durable, se sont récemment réunies pour définir une liste de demandes qu'elles adressent aujourd'hui à la Sous-Commission. Parmi ces demandes, Women's Sports Foundation appelle notamment à la rédaction et à la large diffusion d'une version simplifiée de la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui soit compréhensible par le plus grand nombre; à l'appui des initiatives du Programme des Nations Unies pour le développement en faveur de la diffusion des nouvelles technologies de l'information; et enfin à l'application d'une «taxe Tobin» comme moyen de réduire la pauvreté.
M. MOHAMMED KHAN (European Union of Public Relations) a souligné que le Jammu-et-Cachemire est une région où les droits économiques, sociaux et culturels sont bafoués. Dans la partie du Jammu-et-Cachemire contrôlée par l'Inde, si les droits économiques, sociaux et culturels ont été violés ces treize dernières années par les forces de sécurité indiennes, les groupes extrémistes ont causé encore davantage de dégâts sur l'infrastructure économique et de souffrances pour la population civile. La situation des droits économiques, sociaux et culturels dans l'Azad Cachemire et le Gilgit Baltistan sous contrôle du Pakistan est tout aussi déplorable. Le représentant a dénoncé l'exploitation économique de la région – très riche en ressources naturelles – par les autorités d'Islamabad, et les faibles taux de scolarisation des enfants.
M. ANTONIO GONZALES (Conseil international de traités indiens) a déclaré que les peuples autochtones se caractérisent par leur attachement spirituel et matériel particulièrement profond à leur environnement. Si les sociétés autochtones sont conscientes de la nécessité de changer et de s'adapter aux conditions du monde moderne qui les entoure, elles persistent néanmoins dans leur volonté de maintenir le lien à la terre qui les fait vivre. Ce droit leur est d'ailleurs reconnu par les conventions internationales. Or, les mesures d'ajustement économique préconisées par les organismes financiers internationaux, avec leur cortège de répercussions sur la vie quotidienne des populations autochtones, constituent une menace directe contre ce droit à un mode de vie traditionnel, a expliqué le représentant. Il s'est par ailleurs inquiété de la privatisation des ressources, notamment de l'eau, au profit de sociétés qui utilisent cet élément vital à la survie des populations autochtones à des fins mercantiles. Plusieurs exemples de ce qui est en passe de devenir «une véritable guerre de l'eau» au Chili, aux États-Unis et en Bolivie, où le prix et la disponibilité même de l'eau sont menacés, ont été cités par le représentant.
M. ANTOINE MADELIN (Fédération internationale des ligues de droits de l'homme, FIDH) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation dramatique que connaît actuellement l'Argentine, où la récession qui dure depuis 1997 alimente à la fois une inégalité accrue des revenus, une augmentation du chômage, une dégradation sensible de l'ensemble des services publics. La transformation de cette récession en crise politique et économique ouverte depuis fin décembre 2001 a précipité ces tendances lourdes et provoqué un choc de pauvreté. La FIDH a publié le mois dernier un rapport de mission qui conclut que la responsabilité principale des violations flagrantes des droits économiques, sociaux et culturels et la détérioration considérable des conditions de vie incombe aux gouvernants et à la minorité qui a profité des politiques économiques mises en place. L'attitude inflexible du FMI a contribué à aggraver les violations, a ajouté M. Madelin. Il a par ailleurs attiré l'attention de la sur la situation des droits économiques, sociaux et culturels en Albanie où une mission d'enquête de la FIDH a conclu à de graves violations de ces droits, notamment du droit à la santé. À cet égard, M. Madelin a souligné la situation de pays qui, tels l'Albanie, sont parmi les plus importants récipiendaires d'aide internationale et dont les obligations minimales en matière de droits économiques et sociaux fondamentaux ne sont même pas respectées.
La FIDH tient à rappeler que toute politique liée au développement et aux questions économiques et commerciales doit être menée dans le strict respect de la Déclaration universelle des droits de l'homme et des autres instruments en matière de droits de l'homme. Il appartiendra donc aux partenaires du Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) de faire en sorte que cet ancrage dans les droits de l'homme ne reste pas lettre morte. Or, en l'état actuel d'avancement de ce projet de partenariat, les programmes envisagés se contentent de reprendre les principes des politiques prônées par les institutions de Bretton Woods. La FIDH demande donc à la Sous-Commission d'engager une étude sur la primauté des droits de l'homme dans les objectifs des aides publiques internationales et les mécanismes de coopération internationale.
MME NORCEA ARIF (Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la mobilisation à grande échelle des forces armées indiennes et son impact désastreux sur le développement du peuple indien. Il s'agit en effet d'évaluer les coûts de près d'un demi million de soldats postés aux frontières internationales de l'Inde. La représentante a estimé que le retrait de ces troupes pourrait bénéficier au développement de l'Inde. Une telle mesure aurait en outre pour effet de mesures similaires de la part du Gouvernement pakistanais en faveur de sa population.
MME KIRON WADHERA (Asian Centre for Organization Research and Development) a souligné que les sociétés démocratiques sont ouvertes, et de ce fait vulnérables, mais préfèrent assumer le risque de la vulnérabilité afin de promouvoir la vision libérale des droits de l'homme qui est la leur, y compris en ce qui concerne les droits économiques, sociaux et culturels. Par le passé, l'une des principales menaces qui pesaient sur ces sociétés était la guerre. Aujourd'hui, l'une des principales menaces qui pèsent sur elles réside dans la théocratie. En effet, les États théocratiques cherchent à devenir monoculturels et monoreligieux. Au plan interne, leurs citoyens sont soumis à une différenciation des droits en fonction du sexe, les droits des hommes n'étant pas les mêmes que ceux des femmes. Dans les États théocratiques, la liberté d'expression et la liberté religieuse sont gravement bafouées, a insisté la représentante.
M. MONCEF BALTI (ATLAS - Association tunisienne pour l'auto-développment et la solidarité) a déploré que les organismes des Nations Unies soient le lieu de prises de position en contradiction avec les engagements pris en faveur du respect des droits de l'homme et de l'intérêt des minorités. On constate que ce sont des «intérêts» économiques privés qui sont défendus, plutôt que de véritables principes, a encore déclaré le représentant. Il a aussi fait valoir qu'il n'était pas mauvais d'associer les organisations non gouvernementales aux structures et activités de l'Organisation mondiale du commerce, à titre consultatif et participatif, comme c'est déjà le cas avec les organismes des Nations Unies. Dans le même ordre d'idées, le représentant a incité les défenseurs de la mondialisation à ne pas en ignorer les aspects sociaux, et a insisté sur la nécessité de mettre en place rapidement le Fonds mondial de solidarité, approuvé par l'Assemblé générale des Nations Unies.
M. ELIAS KHOURI (Union des juristes arabes )a souligné que depuis sa création, Israël n'a eu de cesse que d'occuper les terres des pays voisins. Les guerres et les conflits participent incontestablement à la violation des droits économiques, sociaux et culturels, a rappelé le représentant. Le représentant a par ailleurs dénoncé la politique d'embargo et les actes d'agression qui continuent d'être imposés à l'Iraq par les États-Unis et leurs alliés britanniques et qui ont eu des conséquences désastreuses sur la situation économique et sociale de la population iraquienne. Le représentant a demandé à la Sous-Commission d'adopter une résolution afin d'accorder sa protection au peuple palestinien jusqu'à ce qu'il recouvre tous ses droits inaliénables. La Sous-Commission devrait également adopter une résolution demandant la levée de l'embargo contre l'Iraq. (le Président a interrompu l'orateur à plusieurs reprises lui demandant de limiter son intervention aux questions intéressant directement les droits économiques, sociaux et culturels)
M. SIPHO MNGUNI (Pax Romana) a estimé que de nombreux gouvernements ne prennent pas suffisamment de mesures pour assurer l'accès à l'eau potable. Il s'agit là d'une violation du droit à la vie, aggravée encore par la privatisation des ressources en eau au bénéfice d'intérêts privés. En Afrique, l'essentiel de l'eau provient des rivières et des puits. Les industries ont pollué nombre de ces sources, les égouts et installations d'épuration sont insuffisants. Les maladies liées à la qualité de l'eau sont en augmentation; 35 000 enfants meurent chaque année de ces maladies. C'est dans les villes que les conditions sont les plus graves, et il faut bien constater que les autorités sont incapables de faire face à cet état de fait, quand elles admettent même son existence. Pax Romana demande instamment aux gouvernements de revenir sur les privatisations des ressources en eau, et de ne pas se décharger de leurs responsabilités en la matière, même quand il n'y a pas d'avantages financiers à en retirer. Quant à la Sous-Commission, elle devrait étudier la question de la privatisation de l'eau de façon approfondie et évaluer comment le droit à l'eau potable pourrait être intégré aux travaux des gouvernements et des Nations Unies et de ses organismes spécialisés.
M. ALEXANDRE KAMAROTOS (Médecins du monde international) a fait part de sa satisfaction face à la décision prise par la Commission des droits de l'homme lors de sa dernière session visant à désigner un rapporteur spécial sur le droit à la santé. Il a néanmoins attiré l'attention de la Sous-Commission sur les violations répétées du droit à la santé et sur la nécessité d'une meilleure prise en compte de ce droit fondamental, notamment dans le contexte actuel de la mondialisation économique et financière. Le cas de l'Argentine illustre de manière particulièrement dramatique l'incidence de la mondialisation économique sur le droit à la santé, a poursuivi le représentant avant de faire observer que la population argentine n'a aujourd'hui quasiment plus accès aux services sanitaires de base et notamment aux médicaments. Face à cette situation intolérable, Médecins du monde-Argentine a demandé aux entreprises de l'industrie pharmaceutique d'assumer leur responsabilité – morale et légale – de respecter le droit à la vie des personnes et a exigé de l'État argentin qu'il prenne les mesures nécessaires pour garantir l'approvisionnement en médicaments hospitaliers. L'exemple argentin démontre les conséquences négatives d'une politique nationale qui ne considère pas le médicament comme un bien social mais comme une marchandise. Aujourd'hui, a par ailleurs fait observer le représentant de Médecins du monde, la tuberculose tue trois millions de personnes par an et les traitements existants sont inaccessibles à l'immense majorité des malades. Le représentant a prié la Sous-Commission d'encourager l'adoption d'un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui rendrait ces droits justiciables. Il a par ailleurs proposé à la Sous-Commission de faire du droit à la santé le thème du prochain Forum social.
M. CHRISTOPHER CHAPMAN (Minority Rights Group International) a regretté le recul que constitue, selon lui, l'omission de la mention des minorités et des peuples autochtones dans le texte de la résolution sur le droit au développement, adoptée lors de la dernière session de la Commission des droits de l'homme. Mentionner explicitement ces groupes est essentiel pour qu'ils puissent faire valoir leurs droits. Ces deux groupes sont en effet les premières victimes des violations des droits de l'homme et du racisme, et devraient être les premiers bénéficiaires des efforts qu'il faut consentir pour la lutte contre le racisme. Les États, a déploré le représentant, peuvent aussi détourner les ressources en toute impunité et au détriment des minorités, il n'existe en effet pas de garde-fou. Les obstacles à la généralisation de l'instruction primaire obligatoire sont également un frein au développement des minorités. Il est donc nécessaire de donner des directives précises sur la stratégie de mise en place des objectifs de développement. La Sous-Commission pourrait inviter les gouvernements et les institutions des Nations Unies à lui soumettre des informations sur la façon dont ils comptent mettre en application les directives du Millénaire du développement. MRG demande aussi au Haut Commissaire d'intégrer les droits des minorités dans son programme de travail, et à l'Expert indépendant sur le droit au développement d'accorder une plus grande importance à ce sujet dans ses travaux futurs.
M. JULIEN MENDOZA (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a plaidé en faveur de la réalisation d'une étude qui pourrait mener à la création d'un observatoire spécialisé, sous les auspices des Nations Unies, qui serait chargé d'examiner les activités des sociétés transnationales en se concentrant sur les pratiques de bon investissement éthique favorable au respect des normes minimales de droits de l'homme. Dans ce contexte, le représentant a rappelé que le droit à l'autodétermination constitue un droit collectif et universel.



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