Skip to main content

Communiqués de presse Organe subsidiaire du Conseil des droits de l'homme

LA SOUS-COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT SUR LE GÉNOME HUMAIN

06 août 2004

MATIN





Elle se penche sur les travaux du Groupe de travail sur les populations autochtones et
poursuit le débat sur les questions du terrorisme et des pratiques traditionnelles préjudiciables

La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a poursuivi ce matin son débat sur les questions spécifiques se rapportant aux droits de l'homme en entendant la présentation du document de travail sur le génome humain ainsi que les déclarations de plusieurs de ses membres et des représentants d'organisations non gouvernementales sur les questions se rapportant notamment au terrorisme et aux droits des femmes. Au titre de la prévention de la discrimination, la Sous-Commission a examiné le rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones.

Présentant son document de travail sur la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme en tant que contribution à la réflexion engagée par le Comité international de bioéthique sur le suivi de cette déclaration, Mme Iulia-Antoanella Motoc a notamment souligné qu'une des formes les plus courantes de la discrimination génétique est le refus d'attribuer une assurance maladie sur la base de l'héritage génétique. Elle a souligné que la discrimination affecte particulièrement les groupes vulnérables comme les femmes, les enfants et les populations autochtones.

Présentant le rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones, son président, M. Miguel Alfonso Martínez, a estimé que la dernière session a été d'une grande qualité, précisant que la question des peuples autochtones et de la résolution des conflits avait été au centre des débats. Le droit à la terre, l'exercice du droit à l'autodétermination et les contradictions entre autorités traditionnelles autochtones et autorités fédérées sont le plus souvent à l'origine des conflits a-t-il souligné.

Les experts suivants de la Sous-Commission ont participé au débat général ainsi qu'aux dialogues interactifs qui ont suivi la présentation de ces rapports: Mme Lalaina Rakotoarisoa, Mme Kalliopi Koufa, M. Gáspár Bíró, M. Miguel Alfonso Martínez, Mme Iulia-Antoanella Motoc, M. El-Hadji Guissé, Mme Halima Embarek Warzazi, M. Gudmuntur Alfredsson, M. Ibrahim Salama et M. José Bengoa.

Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes ont également pris la parole : United Nations Watch; Foundation of Japanese Honorary Debts; International Educational Development; Organisation mondiale contre la torture; Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples – MRAP; Fédération internationale des ligues des droits de l'homme; Fraternité Notre Dame; Association of World Citizens; Asian Indigenous and Tribal Peoples Network; Pax Romana; Interfaith International; Indigenous World Association; Association américaine de juristes; Conseil international de traités indiens; et l'Association mondiale pour l'école instrument de paix.

À sa prochaine séance, cet après-midi à 15 heures, la Sous-Commission poursuivra l'examen de ces questions et aura un échange de vues avec le Président du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale.


Suite du débat au titre des «questions spécifiques se rapportant aux droits de l'homme»

MME JARDENA LANDE (United Nations Watch) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le problème des mariages forcés et précoces qui touche un grand nombre de femmes et les fillettes en Afrique et en Asie, ainsi que de nombreuses jeunes filles européennes envoyées chaque année dans leurs pays d'origine pour y contracter des mariages involontaires. Elle a également appelé les Nations Unies à combattre la pratique atroce des mutilations génitales féminines dont on estime le nombre de victimes à 135 millions, auxquels s'ajoutent deux millions de victimes supplémentaires chaque année. La représentante a souligné que la plus grave attaque contre les femmes aujourd'hui se déroule actuellement au Soudan, où des milliers d'entre elles sont victimes de viol utilisé comme arme de guerre, comme l'attestent de nombreux témoignages de réfugiées. Des femmes et des fillettes au Soudan ont aussi été soumises à l'esclavage sexuel, à la torture, aux déplacements forcés et aux enlèvements, a poursuivi la représentante. Le régime de Khartoum et ses subordonnés doivent être tenus pour responsables de ces graves violations des droits de l'homme internationaux.

M. W.K. LAMAIN (Foundation of Japanese Honorary Debts) a rappelé que son organisation a été fondée en 1990 après la décision du Gouvernement des États-Unis de dédommager les américano-japonais internés en Amérique et au Canada au cours de la deuxième guerre mondiale. La Fondation défend les intérêts de 80 000 citoyens néerlandais faits prisonniers dans les camps de concentration sous contrôle japonais en Asie du Sud est au cours de la deuxième guerre mondiale. Le représentant a estimé que le Japon a une obligation morale de rendre des comptes pour les pertes en vies humaines et les dommages physiques et moraux infligés aux victimes. Le représentant a demandé à la Sous-Commission d'intervenir auprès de la Commission des droits de l'homme afin qu'elle accorde son attention à cette question et qu'elle contribue à résoudre un problème qui n'a pas trouvé de solution depuis 60 ans.

MME KAREN PARKER (International Educational Development) s'est félicitée que le Gouvernement du Maroc ait adopté une nouvelle loi sur la famille qui améliore la situation des femmes dans tous les domaines et stipule l'égalité totale entre hommes et femmes. Il faut espérer que cette législation constituera un modèle pour que des législations similaires soient adoptées dans d'autres États, a-t-elle ajouté. Elle s'est félicitée de l'attention portée par la Sous-Commission à la question des droits de l'homme et du terrorisme et a rappelé que son organisation avait contesté à plusieurs reprises certaines mesures prises par les États-Unis dans le cadre de la lutte antiterroriste. La représentante a souligné que le terrorisme d'État à travers le monde fait davantage de victimes que le terrorisme. Elle a ainsi dénoncé le terrorisme d'État en Iran, au Sri Lanka, au Cachemire occupé par l'Inde et en Turquie, ainsi qu'en Chine, où les membres du Falun Gong sont particulièrement victimes de ce terrorisme d'État. Les efforts visant à combattre le terrorisme devraient se concentrer sur des terroristes véritables et non sur des groupes qui luttent pour l'exercice de leur droit à l'autodétermination.

MME GAËLLE CARAGON (Organisation mondiale contre la torture - OMCT) a exprimé son inquiétude face aux nombreuses allégations selon lesquelles des femmes suspectées d'adultère seraient mises à mort par les membres de leurs familles au Pakistan. Aussi, la représentante a lancé un appel à la Rapporteuse spéciale sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes de se saisir activement de la question des crimes d'honneur et de promouvoir à la fois des législations protectrices ainsi que des activités destinées à éveiller les consciences à la nécessité de prendre des mesures face aux effets néfastes de certaines idées traditionnelles et le contrôle de la sexualité des femmes. Par ailleurs, la représentante a rappelé que, bien que les États ont le devoir de lutter contre le terrorisme, il n'en demeure pas moins qu'ils sont tenus de respecter certaines normes, notamment l'interdiction absolue et permanente de la pratique de la torture. La lutte contre le terrorisme a été l'occasion de graves violations de droits de l'homme dans des zones au statut juridique flou, notamment à Guantanamo ou dans la prison d'Abu Grahib en Iraq. À ce jour, aucune enquête indépendante n'a pu voir le jour pour faire la lumière sur les exactions commises par certains militaires, et les poursuites judiciaires engagées ne semblent pas permettre de remonter la chaîne de commandement responsable, renforçant ainsi une culture d'impunité. La représentante a enfin appuyé avec force l'idée figurant dans le rapport de Mme Kalliopi Koufa sur le terrorisme et les droits de l'homme concernant la création d'un mécanisme indépendant des Nations Unies permettant de contrôler dans quelle mesure les législations nationales de lutte contre le terrorisme sont respectueuses des différentes obligations des États en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme.

M. GIANFRANCO FATTORINI (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples – MRAP) a jugé regrettable que le rapport final de Mme Koufa sur le terrorisme ne soit disponible qu'en deux langues de travail. Il a rappelé que le MRAP condamne fermement tous les actes de terrorisme, internes et internationaux, qu'ils soient l'œuvre d'un État ou de toute autre entité. Le MRAP attire néanmoins l'attention sur la distinction fondamentale qu'il convient de faire entre terrorisme et exercice du droit à l'autodétermination, tout en ayant à l'esprit la différenciation entre acte de guerre et acte terroriste. Suite aux événements du 11 septembre 2001, la lutte contre le terrorisme est devenue la priorité de tous les systèmes intergouvernementaux, ravissant ainsi la place à la lutte contre les stupéfiants, a poursuivi le représentant. Il a souligné que des liens toujours plus forts et efficaces se nouent partout entre les organisations criminelles transnationales et les mouvements terroristes. Au nom de la lutte contre le terrorisme en Tchétchénie, l'épuration ethnique se poursuit en toute impunité, a par ailleurs relevé le représentant du MRAP. Il a en outre affirmé qu'en Turquie, «côté cour on libère des élus du peuple incarcérés pour délit d'opinion et on autorise timidement l'utilisation de la langue kurde alors que côté jardin, on renforce les opérations militaires dans le sud-est du pays». Si l'on veut que la lutte contre le terrorisme soit réellement efficace à long terme, on ne peut pas faire l'économie de l'analyse des causes profondes du développement de ce phénomène. Le MRAP appuie la démarche de la coalition des organisations non gouvernementales internationales contre la torture tendant à l'établissement d'un mécanisme chargé de contrôler et d'assurer la conformité des mesures de lutte contre le terrorisme adoptées ou envisagées par les États membres de l'ONU avec les obligations et normes internationales en matière de droits de l'homme.

MME GEMMA ZANELLATO (Fédération internationale des ligues des droits de l’homme- FIDH) a souligné que le lancement de la «campagne internationale contre le terrorisme» qui a suivi les événements tragiques du 11 septembre 2001 a changé la donne mondiale : la force prend le pas sur le droit. La FIDH souhaite alerter la communauté internationale sur les risques inhérents à l'usage de moyens liberticides par les États pour atteindre leurs objectifs en matière de lutte contre le terrorisme. La FIDH exprime sa préoccupation devant l'attitude répressive des gouvernements qui, au prétexte de la lutte antiterroriste, font voter des lois sécuritaires qui apportent des restrictions illégales au regard du droit à la liberté d'expression, d'information et de manifestation. La représentante a ensuite attiré l'attention de la Sous-Commission sur la dégradation de la situation des défenseurs des droits de l'homme dans le contexte de la lutte contre le terrorisme. La priorité donnée par les États au tout-sécuritaire se traduit par une montée de l'arbitraire et une mise en cause des droits de l'homme, en particulier le droit à un procès équitable, la présomption d'innocence et l'interdiction de la torture.

MME MARIE SABINE LEGRAND (Fraternité Notre-Dame) a déclaré que dans ses œuvres en faveur des plus démunis, Fraternité Notre-Dame se penche particulièrement sur le sort des femmes et des enfants, y compris en France où on parle en 2004 d'un million d'enfants au seuil de la pauvreté. En Haïti, au Niger, en Mongolie et aux États-Unis, des centaines d'enfants sont, dans les missions de Fraternité Notre Dame, sauvés de la mort, de la faim, de la violence, de la drogue et de la prostitution. La Fraternité Notre-Dame a à cœur d'aider les enfants des plus pauvres et de leur enseigner les valeurs morales et civiques, le sens de l'entraide, du travail bien fait, des valeurs qui ont forgé des sociétés durables, a précisé la représentante. Affirmant que l'on souffre en Europe d'un esprit sectaire qui permet de moins en moins aux chrétiens de fonder des œuvres humanitaires et charitables, elle a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation, inquiétante selon elle, d'atteinte à la liberté religieuse et à l'éducation chrétienne dans les démocraties européennes qui risquent de se détruire en persévérant dans cette voie.

MME JOËLLE PERRACHON (Association of World Citizens) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le fait qu'il existerait à l'heure actuelle 6,8 millions de personnes emprisonnées dans 1100 camps de travaux forcés en Chine. Parmi les prisonniers, on trouve des criminels de droit commun mais également des dissidents, des journalistes et des pratiquants de Falun Gong. Ces personnes sont victimes de travail forcé et doivent produire des biens de consommation destinés à l'exportation. Les camps de travail forcés n'ont aucun coût de production, ne paient pas de salaire et sont exempts de taxes à l'exportation. Ce système, a affirmé la représentante, équivalent à de l'esclavage, est entretenu par le Gouvernement chinois. Il constitue une violation de la constitution chinoise et des Conventions pertinentes de l'Organisation internationale du travail.

M. SUHAS CHAKMA (Asian Indigenous and Tribal Peoples Network) a condamné sans nuance le terrorisme sous toutes ses formes et toutes ses manifestations. Depuis le 11 septembre 2001, a-t-il néanmoins relevé, il est de plus en plus difficile d'établir une distinction entre le terrorisme d'État et le terrorisme. Il a dénoncé nombre de dispositions des lois d'urgence qui ont été adoptées dans divers pays à la suite du 11 septembre 2001 et qui permettent notamment de détenir des personnes sans chef d'inculpation. Le représentant a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la question de la détention arbitraire sur la base de Guantánamo; sur la qualification de terroristes et les exécutions de Ouïgours en Chine; sur la détention prolongée de non-ressortissants, sans accusation ni jugement, au Royaume-Uni; sur les dispositions prévoyant l'immunité des fonctionnaires responsables d'abus en Inde et en Russie sous prétexte qu'ils auraient agi de bonne foi; sur le recours de plus en plus fréquent aux tribunaux militaires en Égypte pour juger des civils; sur le recours à des politiques punitives contre les réfugiés et les requérants d'asile; sur l'expulsion de présumés terroristes vers des juridictions où ils sont certains d'être torturés; ainsi que sur la réintroduction de la peine de mort pour les délits terroristes aux États-Unis, en Chine, en Jordanie, en Inde et ailleurs. Le représentant a recommandé à la Sous-Commission d'envisager l'établissement d'un groupe de travail sur la question des conséquences du terrorisme et des mesures antiterroristes sur la jouissance des droits de l'homme.


Déclarations d'experts de la Sous-Commission dans le cadre du débat général

MME LALAINA RAKOTOARISOA, experte de la Sous-Commission, a souligné la nécessité de combattre les pratiques traditionnelles affectant les femmes et les fillettes. La lutte doit être menée avec tact et patience. L'experte a dit partager pleinement la nécessité absolue d'une sensibilisation et de campagnes d'information destinées à montrer que ces pratiques peuvent mettre en danger la santé et la vie des femmes. L'experte a par ailleurs rappelé que plus de 50 millions de personnes vivent avec le Sida, soulignant qu'il s'agit là d'un véritable défi pour l'humanité. L'experte a en outre souligné l'ampleur que prend le phénomène du mariage forcé dans certains États.

MME KALLIOPI KOUFA, experte de la Sous-Commission, a commenté le rapport de Mme Halima Warzazi sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes en se disant particulièrement heureuse du nombre d'États qui ont indiqué à la Rapporteuse spéciale qu'ils étaient en train de prendre des mesures pour lutter contre ces pratiques. Nombre de conférences et réunions sont désormais organisées à travers le monde sur cette question, a-t-elle en outre relevé. Mme Koufa a souligné que l'un des éléments essentiels de l'élimination de ces pratiques réside dans le renforcement du statut des femmes. Elle a en outre apporté son soutien à la recommandation visant la prolongation du mandat de la Rapporteuse spéciale.

M. GÁSPÁR BÍRÓ, expert de la Sous-Commission, a félicité Mme Warzazi pour les efforts inlassables qu'elle a déployés pour contribuer à l'élimination des pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes. M. Bíró a souligné que l'élimination de ces pratiques ne peut intervenir du jour au lendemain; des efforts d'éducation et de sensibilisation ont un rôle crucial à jouer dans ce processus.

M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, a rendu hommage à Mme Warzazi pour son dévouement à la cause de l'élimination des pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des enfants. Les racines du problème sont liées à un espace culturel qui doit être modifié car il est dépassé, a poursuivi M. Alfonso Martínez. L'interdiction de ces pratiques ne peut se prononcer par décret et il importe, pour parvenir à leur élimination, de promouvoir les actions d'éducation et de sensibilisation; à cet égard, la Sous-Commission a fait un œuvre pionnière, a souligné l'expert.


Présentation du document de travail sur la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme

MME IULIA-ANTOANELLA MOTOC, membre de la Sous-Commission et Rapporteuse spéciale sur les droits de l’homme et le génome humain, a présenté son document de travail sur la Déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme, en tant que contribution à la réflexion engagée par le Comité international de bioéthique sur le suivi de cette déclaration (E/CN.4/Sub.2/2004/38, à paraître). Mme Motoc a souligné que les découvertes récentes dans le domaine de la génétique semblent avoir donné naissance à de nouveaux conflits entre le droit de la santé, le droit de propriété intellectuelle et les régimes des droits de l'homme. L'étude tente d'analyser une partie de ces conflits dans une perspective des droits de l'homme, en prenant en compte quatre questions : le génome humain; la manipulation génétique et le droits de l'homme; la discrimination; et la propriété intellectuelle et la génétique.

Mme Motoc a notamment déclaré que l'une des formes les plus courantes de la discrimination génétique est le refus d'attribuer une assurance maladie sur la base de l'héritage génétique de la personne. Plusieurs enquêtes dans les pays développés montrent qu'un grand pourcentage des personnes ayant des troubles génétiques dans leurs familles ont été victimes de discrimination par les assureurs. Il devrait être interdit aux employeurs, aux organisations du travail ou aux programmes de formation d'embaucher ou de licencier ou d'imposer des conditions ou des privilèges aux individus sur la base de l'information génétique, a estimé Mme Motoc. La discrimination affecte particulièrement les groupes vulnérables comme les femmes, les enfants et les populations autochtones. Mme Motoc a souligné qu'il est possible d'éviter les effets négatifs des bénéfices que peut apporter l'information génétique. Il faut pour cela réguler ou interdire l'utilisation ultérieure de l'information génétique collectée pour répondre aux besoins de santé du patient. Par ailleurs, l'éducation publique est nécessaire afin de protéger la confidentialité des données génétiques humaines et afin d'éviter la discrimination. Mme Motoc a enfin estimé qu'il faudrait évaluer les implications des tests génétiques dans une perspective de santé publique.


Dialogue interactif

M. EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a remercié Mme Motoc pour avoir fait le tour de la question faisant l'objet de son étude et avoir mis l'accent sur l'intérêt qu'il y a pour l'humanité de procéder à des recherches sur le génome humain et sur la génétique. M. Guissé a néanmoins attiré l'attention sur certaines pratiques qui mettent en danger certains pans de la population. La recherche ici s'adresse à des catégories de personnes particulièrement vulnérables: soit parce qu'elles sont handicapées physiques, soit parce qu'elles ignorent l'objectif visé, de sorte que l'avis préalable éclairé devient difficile à donner, a souligné M. Guissé. Il existe donc non seulement un risque d'atteinte aux droits individuels, s'agissant notamment de la santé et de la vie, mais aussi un risque de ne jamais savoir pourquoi tel chercheur s'est présenté un jour pour effectuer un prélèvement. Le Nord monopolise la recherche dans tous les domaines, a par ailleurs fait observer M. Guissé. C'est pourquoi Mme Motoc, dans ses directives, doit notamment chercher les moyens de faire partager les résultats de la recherche. M. Guissé a insisté sur la nécessité, s'agissant de toutes ces questions, de protéger le droit à la vie de chacun.

MME KALLIOPI KOUFA, experte de la Sous-Commission, a rappelé que l'utilisation des connaissances tirées de la recherche sur le génome humain dans le domaine de la procréation crée de grands dilemmes moraux.

M. GÁSPÁR BÍRÓ, expert de la Sous-Commission, a souligné qu'en ce qui concerne les risques potentiels de l'ingénierie génétique, on reste en terrain inconnu. Il a rappelé que la communauté internationale est sur le point d'être confrontée à la problématique de l'eugénisme, ce qui est préoccupant. La Sous-Commission doit demander davantage de ressources pour aider Mme Motoc à rédiger son rapport final, lequel pourrait devenir la base de l'élaboration d'un instrument de droits de l'homme traitant de ces questions.

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, experte de la Sous-Commission, a estimé que l'étude de Mme Motoc doit aboutir à des recommandations adressées aux gouvernements pour qu'ils prennent des mesures afin de prévenir les discriminations à l'encontre des individus visés par son rapport. Toute tentative de dévoyer la science doit être combattue, a insisté Mme Warzazi. Elle a apporté son soutien à la recommandation de Mme Motoc visant à ce que les groupes vulnérables soient protégés, en particulier les populations autochtones.

M. GUDMUNTUR ALFREDSSON, expert de la Sous-Commission, a dit attendre avec impatience la suite du travail de Mme Motoc. Il a estimé que Mme Motoc n'a pas été assez critique à l'égard de l'Islande dans son rapport.

M. IBRAHIM SALAMA, expert de la Sous-Commission, a notamment relevé que le débat sur le génome humain mêle des impératifs en matière de droits de l'homme et des considérations commerciales. Mme Motoc pourrait, au-delà de la discrimination entre personnes, aborder la question de la discrimination entre pays développés et pays en développement, a-t-il suggéré.

M. JOSEPH RAJKUMAR (Pax Romana) a souligné le manque de règles internationales en matière de bioéthique. Il a fait remarquer que la plupart de données génétiques se trouvent entre les mains des grandes sociétés et qu'il serait utile que Mme Motoc s'intéresse aux normes relatives aux sociétés transnationales organisées. Il serait bon de s'interroger sur les liens entre le principe de précaution, les droits de l'homme et le génome humain. Enfin, a affirmé le représentant, il importe de lutter contre le bio-trafic.

Présentation du rapport du Groupe de travail sur les populations autochtones

M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, membre de la Sous-Commission et Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les populations autochtones , a rendu compte des travaux de la vingt-deuxième session du Groupe de travail, qui s'est tenue du 19 au 23 juillet dernier (le rapport paraîtra sous la cote E/CN.4/Sub.2/2004/28). M. Alfonso Martínez s'est félicité de la coopération des experts de la Sous-Commission avec le Groupe de travail. Il a remercié tous les gouvernements et tous les représentants des Groupes autochtones qui ont participé à la session. M. Alfonso Martínez a estimé que la dernière session a été d'une grande qualité. Il a souligné que la question des peuples autochtones et de la résolution des conflits a été au centre des débats. Très souvent, a souligné le Président-Rapporteur, les rapports entre les peuples autochtones et les autres entités de la société entraînent des conflits. Le Groupe de travail s'est attaché à en comprendre les causes et à examiner la question de la prévention. Le droit à la terre, l'exercice du droit à l'autodétermination et les contradictions entre autorités traditionnelles autochtones et autorités fédérées sont souvent à l'origine de conflits, a souligné M. Alfonso Martínez.

Le Président-Rapporteur du Groupe de travail a par ailleurs salué la décision par laquelle le Conseil économique et social a recommandé à l'Assemblée générale de proclamer une deuxième Décennie des Nations Unies relatives aux droits des populations autochtones. M. Alfonso Martínez a en outre souligné que le Groupe de travail a demandé au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme de bien vouloir organiser en 2005 un séminaire ou un atelier sur la question des possibilités de mettre en place un système de protection et de prévention de conflits.


Dialogue interactif

M. IULIA-ANTOANELLA MOTOC, experte de la Sous-Commission, a rappelé que le débat au sein du Groupe de travail sur les populations autochtones a été interactif, avec une forte participation des organisations non gouvernementales. Elle a souligné que les autochtones souhaitent que le Groupe de travail continue d'exister car l'accent y est mis sur les droits de l'homme et sur l'élaboration de normes.

M. EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a précisé que si le Groupe de travail sur les populations autochtones a cette santé et cette approche des questions à son ordre du jour, il le doit à Mme Erica-Irene Daes et à M. Alfonso Martínez, deux personnes qui non seulement se sont impliquées pour engager des études mais sont aussi parvenues à innover. Il faut que le Groupe de travail sur les populations autochtones continue de travailler en symbiose avec les organisations non gouvernementales, a souligné M. Guissé.

M. JOSÉ BENGOA, expert de la Sous-Commission, a mis l'accent sur l'importance que continue d'avoir le Groupe de travail sur les populations autochtones. Il est impressionnant de voir le nombre de personnes de premier plan qui ont participé aux réunions du Groupe de travail, lequel reste l'instance principale en matière de droits de l'homme des populations autochtones au sein de la Sous-Commission. M. Bengoa a jugé particulièrement pertinentes les recommandations du Groupe de travail concernant la résolution des conflits, s'agissant notamment des systèmes de médiation et d'arbitrage évoqués.

M. GUDMUNTUR ALFREDSSON, expert de la Sous-Commission, a insisté sur la nécessité de conserver le Groupe de travail sur les populations autochtones, qui est différent de l'Instance permanente.

M. SHARUKH (Interfaith International) s'est félicitée de l'appui accordé par M. Alfonso Martínez à la proclamation d'une deuxième décennie des Nations Unies sur les droits des populations autochtones. Toutefois, cela ne doit pas cacher qu'il n'y a guère eu d'amélioration de la situation des populations autochtones, a regretté la représentante. Elle a remercié M. Alfonso Martínez sur la façon dont il a présidé aux débats du Groupe de travail.

M. CARLOS ARROYAVE (Guatemala) a appuyé sans réserve le Groupe de travail sur les populations autochtones. Le représentant a appuyé la décision prise par l'ECOSOC de recommander à l'Assemblée générale de proclamer une nouvelle décennie des Nations Unies sur les droits des populations autochtones. Il a appelé de ses vœux l'élaboration d'un plan d'action et l'organisation de séminaires de formation pour les dirigeants autochtones. Le Guatemala continuera de collaborer avec les instances pertinentes des Nations Unies pour mettre fin aux discriminations persistantes dans le pays.

M. RONALD BARNES (Indigenous World Association) a apporté son soutien à la poursuite des travaux du Groupe de travail sur les populations autochtones. Il a soutenu l'idée de voir le Groupe de travail poursuivre l'an prochain ses discussions sur la question de la résolution des conflits. Le représentant a également souligné que le travail de protection des droits des populations autochtones n'est pas effectué aux Nations Unies. Il a préconisé d'engager un travail plus orienté vers la résolution des conflits auxquels sont aujourd'hui confrontés les peuples autochtones. Le représentant a en outre jugé important d'examiner l'impact positif que pourrait avoir l'exemple du Sahara occidental pour tous les peuples autochtones.

M. JAIME VALDÉS A. (Association américaine de juristes) a souligné le manque de volonté politique du Gouvernement chilien d'améliorer la situation du peuple mapuche. Le Chili favorise l'exécution de grands projets d'investissements sur les terres et les propriétés des populations autochtones. Entre 1881 et 2004, a souligné le représentant, le peuple mapuche s'est vu priver de 95% de son territoire historique. Il s'agit là d'une menace pour la survie culturelle des populations autochtones. Le recours à la violence est malheureusement constant contre les membres des populations autochtones qui tentent de se défendre. Les autorités arguant de la nécessité de lutter contre le terrorisme pour exercer leur répression. Le représentant a lancé un appel à la Sous-Commission afin qu'elle prenne acte de la situation désastreuse des peuples autochtones au Chili.

M. ANTONIO GONZALES (Conseil international de traités indiens) a notamment préconisé d'organiser un séminaire dans la région Pacifique afin d'analyser l'ampleur de la problématique à laquelle sont confrontés les peuples autochtones dans le contexte des territoires menacés d'extinction pour des raisons écologiques. Le représentant a par ailleurs estimé qu'il faudrait prévoir une fréquence radio pour les peuples autochtones du monde entier. Il a demandé au Haut Commissariat aux droits de l'homme d'organiser un séminaire sur la question de l'application des traités et accords avec les peuples autochtones. Le représentant a apporté son soutien au projet actuel de déclaration sur les droits des peuples autochtones et a prié les gouvernements de bien vouloir accepter leur destin. Il a enfin apporté son soutien à la poursuite des travaux du Groupe de travail sur les populations autochtones.

M. JOSHUA COOPER (Association mondiale pour l'école instrument de paix) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la question de la disparition d'États pour des causes environnementales et s'est félicité du rapport sur ce point. Le représentant s'est inquiété du sort des peuples autochtones du Pacifique menacés de déplacement en raison de la disparition de leurs terres. Que va-t-on faire pour les doits fondamentaux des populations autochtones déplacées? Est-ce que leurs droits collectifs continueront à être respectés ? Les pays voisins vont-ils fournir une zone terrestre pour qu'ils puissent vivre? Le représentant a plaidé en faveur de la création d'un fonds d'affectation spécial pour venir en aide aux populations autochtones des États insulaires menacés de disparition.

VOIR CETTE PAGE EN :