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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LA SOUS-COMMISSION EST SAISIE D'UN RAPPORT SUR LA RESTITUTION DES BIENS DES RÉFUGIÉS

06 août 2002



Sous-Commission de la promotion et
de la protection des droits de l'homme
54ème session
6 août 2002
Après-midi


Elle poursuit l'examen des rapports sur le droit à l'eau potable
et la lutte contre la pauvreté ainsi que son débat général
sur les droits économiques, sociaux et culturels



La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a poursuivi, cet après-midi, son débat sur les droits économiques, sociaux et culturels en entendant la présentation du document de travail de M. Paulo Sérgio Pinheiro sur la restitution des biens des réfugiés ou personnes déplacées. De nombreux experts ainsi que plusieurs organisations non gouvernementales ont commenté le document de M. Pinheiro, ainsi que les rapports présentés ce matin s'agissant du droit à l'eau potable et de la lutte contre l'extrême pauvreté.
M. Pinheiro a rappelé que l'une des principales préoccupations qui animent les personnes qui retournent ou tentent de retourner dans leur pays d'origine réside dans la résolution des questions relatives aux biens et aux propriétés. La restitution de ces biens et propriétés temporairement perdus en raison d'un déplacement est devenue une composante de plus en plus importante des efforts visant à protéger les droits de l'homme, à restaurer la primauté du droit et à prévenir de nouveaux conflits dans les pays engagés dans un processus de reconstruction suite à un conflit, a souligné l'expert. M. Pinheiro a également souligné l'importance de tenir compte de la nécessité d'assurer un nouveau logement aux occupants qui occupaient les logements devant être restitués. M. Pinheiro a recommandé qu'une étude globale sur la restitution du logement et des biens soit menée à bien dans le contexte du retour des réfugiés et autres personnes déplacées.
MM. El Hadji Guissé, Soli Jehangir Sorabjee et Asbjørn Eide, sont intervenus s'agissant du rapport de M. Pinheiro. Le représentant de l'Égypte s'est pour sa part déclaré très intéressé de voir comment M. Pinheiro abordera la question des indemnisations dans le contexte, notamment, du droit au retour du peuple palestinien.
Dans le cadre du débat général sur les droits économiques, sociaux et culturels, Mme Christy Ezim Mbonu, experte suppléante de la Sous-Commission, a souligné que l'exercice de tous les droits, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, est entravé par le phénomène de la corruption. Elle a suggéré que soit menée une étude détaillée sur le phénomène de la corruption, ses ramifications et ses conséquences. À l'instar de Mme Mbonu, MM. El-Hadji Guissé et Fisseha Yimer ont souligné l'importance du problème de la corruption, qui ne manque pas d'avoir de graves répercussions sur les droits de l'homme et le droit au développement. Il faudrait que le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la libéralisation du commerce des services (voir la présentation dans notre communiqué de ce matin) porte aussi sur la libéralisation des échanges qui doit permettre d'obtenir des ressources financières accrues afin que les gouvernements puissent à leur tour s'occuper des pauvres, a pour sa part estimé M. Soo Gil Park. MM. Emmanuel Decaux, Asbjørn Eide, Soli Jehangir Sorabjee et José Bengoa ont aussi fait des déclarations.
Plusieurs organisations non gouvernementales ont également commenté le rapport établi par la Haut-Commissaire sur la libéralisation du commerce des services et ont fait part de leurs observations concernant l'impact de la cette libéralisation sur lesdits droits. Il a notamment été relevé que l'on continue aujourd'hui de proposer des programmes de lutte contre la pauvreté en même temps que sont promues des politiques qui la génèrent. Si ce que l'on appelle la mondialisation économique est inévitable, alors nous devons exiger que soient également mondialisées la culture, l'éducation, la santé et la politique de développement économique et social, a-t-il également été affirmé.
Les représentants des organisations non gouvernementales suivantes sont intervenus: Pax romana (mouvement international des intellectuels catholiques) (mouvement international des étudiants catholiques) ; Mouvement indien «Tupaj Amaru»; Mouvement international atd Quart monde ; Fédération internationale des femmes diplomées des universités ; Organisation mondiale contre la torture ; Confédération internationale des syndicats libres ; Human Rights Advocates International ; Commission internationale de juristes - cij ; Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes ; Fédération syndicale mondiale ; Association internationale des juristes démocrates.
La Sous-Commission poursuivra demain matin, à 10 heures, l'examen des questions relatives aux droits économiques, sociaux et culturels.

Suite du débat sur les droits économiques, sociaux et culturels
M. EMMANUEL DECAUX, membre de la Sous-Commission, a déclaré que des clarifications sont nécessaires s'agissant de la définition de la pauvreté et de l'extrême pauvreté, cette dernière étant fixée à moins de deux dollars par jour. Il faut affronter dans le même temps toutes les situations, quelles que soient les difficultés, sous peine de créer d'autres ségrégations entre personnes dans le besoin. Tous les droits doivent être abordés, même ceux qui pourraient sembler secondaires eu égard à l'urgence des circonstances. La différence entre droits formels et droits réels doit être enfin dépassée : c'est à travers un véritable «empowerment» de toutes les personnes concernées que la réalisation effective des droits de chaque être humain a une chance d'être atteinte.
M. JOSEPH RAJKUMAR (Pax Romana) a estimé qu'il fallait dépasser l'approche légaliste s'agissant de la question de la pauvreté et aller au devant des pauvres eux-mêmes. L'objet de l'étude du groupe spécial coordonné par M. Bengoa est un peu alarmant dans la mesure où ce travail semble avoir pour but de rechercher une définition plus précise de la pauvreté. Une fois cette définition acquise, qu'adviendra-t-il des pauvres eux-mêmes? Plus qu'un phénomène, ce sont les victimes qui nous intéressent, a rappelé le représentant.
M. ASBJØRN EIDE, membre de la Sous-Commission, a déclaré que le problème de la pauvreté est multiplié dans bien des cas par des lacunes réglementaires que les gouvernements tardent souvent à combler, concernant par exemple la protection de certaines couches socio-professionnelles.
M. SOLI JEHANGIR SORABJEE, membre de la Sous-Commission, a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la question de la corruption, qui détourne des sommes importantes au détriment de nécessaires dépenses socio-économiques. En outre, l'expérience a montré qu'il peut exister à l'encontre de certains groupes marginalisés des discriminations dans l'apport de l'aide accordée aux pauvres.
M. LAZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru») a fait observer que le document de M. Bengoa ne fait pas mention de la dette extérieure, utilisée pour transférer les richesses des pays pauvres vers les pays riches. Autre point négligé, la corruption à tous les niveaux de la société, qui résulte de la mondialisation. En Argentine, par exemple, les sociétés transnationales ont transféré des sommes astronomiques vers les pays riches, avec la complicité des autorités, a déclaré le représentant.
M. Xavier VERZAT (Mouvement international atd Quart monde) a rappelé que la pauvreté concerne l'ensemble des aspects de la vie et a souligné que l'expérience aux côtés de familles éprouvées par la misère montre que lorsque l'on est ignoré et que l'on ne connaît pas les mécanismes permettant de s'en sortir, le droit même à l'alimentation et à l'eau potable est compromis.
MME Conchita PONCINI (Fédération internationale des femmes diplomées des universités) a regretté que le document sur l'extrême pauvreté n'adopte pas une approche sexospécifique. Elle a souligné que la féminisation de la pauvreté constitue un problème crucial, en particulier dans les pays en développement, et a estimé que cette question devrait faire partie de l'étude.
M. JOSÉ BENGOA, coordonnateur du groupe spécial sur un projet de déclaration sur les droits de l'homme et l'extrême pauvreté, a déclaré être d'accord d'élargir le cadre des travaux sur la question de l'extrême pauvreté aux pays développés et d'Europe orientale. Quant à une définition plus précise, telle que demandée par Pax Romana, elle reste difficile à mettre en œuvre. La pauvreté n'est évidemment pas «moderne», mais il est capital d'analyser les conditions modernes de pauvreté, dans un contexte de mondialisation étendue. M. Bengoa a aussi dit tiendrait compte, dans la suite de ses travaux, des remarques qui ont été faites sur la place trop faible accordée à la corruption et à la parité entre les sexes.

Présentation d'un rapport sur la restitution des biens des réfugiés ou des personnes déplacées
Présentant son document de travail relatif à la restitution des biens des réfugiés ou des personnes déplacées, M. Paulo Sérgio Pinheiro, Président de la Sous-Commission, a souligné que l'une des principales préoccupations qui animent les personnes qui retournent ou tentent de retourner dans leur pays d'origine réside dans la résolution des questions relatives aux biens et aux propriétés. La restitution de ces biens et propriétés temporairement perdus en raison d'un déplacement est devenue une composante de plus en plus importante des efforts visant à protéger les droits de l'homme, à restaurer la primauté du droit et à prévenir de nouveaux conflits dans les pays engagés dans un processus de reconstruction suite à un conflit.
Les conditions dans lesquelles des personnes perdent leurs maisons diffèrent selon les cas mais impliquent souvent des déplacements arbitraires, des conflits civils, des nettoyages ethniques, des expropriations sans indemnisation ou des confiscations discriminatoires. Assurer la restitution des logements et des biens est essentiel pour la reconnaissance du droit à un retour en toute sécurité et dans la dignité. M. Pinheiro a rappelé que les États sont tenus de faciliter une telle restitution, c'est-à-dire de prendre des mesures positives pour mettre en œuvre ce droit à restitution. Il a souligné que la restitution de leurs biens et propriétés n'est malheureusement pas une réalité pour des millions de personnes à travers le monde qui souhaitent retourner dans leurs foyers en toute sécurité et dans la dignité. M. Pinheiro a souligné que l'une des entraves à la réalisation du droit à restitution réside dans le problème de l'«occupation secondaire». Il convient en effet de noter qu'en cas d'occupation secondaire d'un logement, il devra être tenu compte de la nécessité de protéger les nouveaux occupants éventuellement expulsés contre tout risque de se retrouver sans logement. M. Pinheiro a recommandé qu'une étude globale sur la restitution du logement et des biens soit menée à bien dans le contexte du retour des réfugiés et autres personnes déplacées.
Dans son document de travail (E/CN.4/Sub.2/2002/17), M. Pinheiro souligne l'importance de la restitution des logements, qui est un élément essentiel du droit des réfugiés et des personnes déplacées de regagner leur foyer et l'une des composantes nécessaires de toute solution permanente supposant le rapatriement volontaire, durable, en toute sécurité et dans la dignité, des réfugiés et des personnes déplacées. Dans la plupart des cas, précise M. Pinheiro, les conditions requises pour l'exercice du droit de retour ne pourront pas être remplies sans que soient mis en place des garanties et des mécanismes destinés à protéger et à concrétiser ce droit. Au nombre de ces garanties devraient figurer des procédures juridiques, administratives et autres assurant l'exercice libre et équitable du droit de regagner son foyer.
Les problèmes liés à la restitution de leur logement et de leurs biens aux personnes déplacées qui souhaitent regagner leur foyer sont au nombre des principaux dilemmes que doivent résoudre les législateurs et les responsables politiques des pays de retour. Si des progrès considérables ont été accomplis en termes de mise en place d'un cadre institutionnel à l'appui de la restitution, il est loin d'en être de même pour ce qui est de la restitution effective des logements et des biens.
L'adoption ou l'application par les États de lois visant à faciliter ou entraîner de quelque autre façon la perte ou la privation du droit à un logement ou à un bien ; la révocation active du droit de résider dans un lieu particulier; ou l'utilisation de lois relatives à l'abandon à l'encontre des réfugiés ou des personnes déplacées sont autant d'obstacles de taille à leur retour et à leur réintégration, ainsi qu'à la reconstruction et à la réconciliation. Le droit international reconnaît que l'indemnisation en tant que forme de réparation ne devrait être utilisé que lorsque la restitution est factuellement impossible ou lorsque la partie lésée accepte librement et en toute connaissance de cause que l'indemnisation remplace la restitution. La Sous-Commission devrait donc prier le Conseil économique et social, par l'intermédiaire de la Commission des droits de l'homme, de l'autoriser à entreprendre une étude approfondie sur la restitution des logements et des biens dans le cadre du retour des réfugiés et des personnes déplacées.
M. EL HADJI GUISSÉ, membre de la Sous-Commission, a souligné que la restitution des biens expropriés peut être impossible s'ils sont occupés par les spoliateurs eux-mêmes. La restitution est cependant une forme de réparation d'un préjudice. Encore faut-il se mettre d'accord sur la nature de la restitution : précisément, doit-elle comprendre une réparation? Et où se situe la responsabilité de la restitution? Cette question prend une importance croissante avec l'augmentation du nombre des réfugiés, en Afrique notamment.
M. SOLI JEHANGIR SORABJEE, membre de la Sous-Commission, a souligné qu'il importe de faire en sorte que le droit de revenir chez soi ne devienne pas un droit illusoire. Aussi est-il essentiel de garantir le droit au retour des réfugiés ou personnes déplacées dans la sécurité et dans la dignité. Toute protection ou sollicitude à l'égard des occupants secondaires doit veiller à établir une distinction les occupants secondaires qui d'une manière générale doivent être protégés contre tout risque de se retrouver sans abri et ceux qui veulent poursuivre leur occupation secondaire du logement par la force ou la menace.
M. ASBJØRN EIDE, membre de la Sous-Commission, a estimé qu'il fallait également examiner la question des logements délibérément détruits, dans le cadre d'opérations d'épuration ethnique par exemple.
M. Mohamed LOUFTY (Égypte) s'est déclaré très intéressé de voir comment M. Pinheiro abordera la question des indemnisations dans le contexte, notamment, du droit au retour du peuple palestinien.
M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, auteur du document de travail relatif à la restitution des biens des réfugiés ou des personnes déplacées, a répondu aux commentaires présentés au sujet de ce document et déclaré que la responsabilité des États est clairement établie dans ce domaine. La notion de «droit illusoire» évoquée par M. Soli Jahangir Sorabjee est très pertinente dans ce contexte. La simple promotion du retour n'est évidemment pas le dernier mot de l'affaire. Quant aux occupations illégales et à la situation des biens à restituer, il reste quelques précisions à apporter, a reconnu M. Pinheiro. Il a demandé aux membres de la Sous-Commission des points de référence pour approfondir l'étude s'agissant, notamment, de la responsabilité subsidiaire des auteurs de destructions d'habitations.

Débat général sur les droits économiques, sociaux et culturels
MME CONCHITA PONCINI (Fédération internationale des femmes diplomées des universités, au nom d'autres organisations non gouvernementales) a déploré la tendance consistant à associer le terme de «sexospécificité» aux femmes et le terme de «droits de l'homme» aux hommes. Elle a rappelé que la discrimination fondée sur le sexe peut être directe ou indirecte. Directe, elle trouve son origine dans le fait que l'établissement des différentes normes internationales fut historiquement biaisé par la perception que l'on se faisait alors des femmes, considérées comme le sexe faible du point de vue physique et social. Quant à la discrimination indirecte en matière de droits économiques, sociaux et culturels, elle est due au fait que les terminologies socioéconomiques furent historiquement fondées sur la division du travail entre les sexes. L'adoption de législations et de politiques sensibles à la sexospécificité constitue un important préalable pour garantir et protéger les droits économiques, sociaux et culturels des femmes. Si le contenu de ces législations et politiques doit être adapté à la situation de chaque pays, il convient de s'assurer qu'il soit conforme aux normes internationales des droits de l'homme telles que la Plate-forme d'action de Beijing. Aussi, la Sous-Commission devrait-elle entreprendre des études sur ce processus.
M. LAZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru», au nom d'autres organisations non gouvernementales) a déclaré qu'il était nécessaire de réglementer politiquement l'activité des sociétés transnationales. Ce besoin n'est pas récent, selon le représentant, mais revêt une actualité particulière étant donné le pouvoir énorme dont disposent aujourd'hui ces sociétés pour modifier l'ordre juridique et économique mondial, sans oublier leurs ingérences incontrôlées dans les politiques nationales. Les sociétés transnationales sont, de fait, devenues de véritables sujets de droit international (privé et public), dotés de droits mais également d'obligations au regard du droit international. Elles peuvent donc être tenues pour «responsables de leurs actes en cas de banqueroute de l'économie mondiale», selon le représentant. M. Pary a par ailleurs estimé que préconiser l'autocontrôle des transnationales revient à tromper les pays pauvres. Ceux-ci proposent au contraire un instrument normatif à teneur obligatoire, afin de responsabiliser les auteurs de violations des droits économiques, sociaux et culturels. Un tel cadre est impératif, étant donné la libéralisation effrénée de tous les secteurs de la vie économique. Ces sociétés, véritables sangsues, entraînent crises financières et menaces contre la sécurité économique, se comportent de façon anarchique et amorale, a ajouté M. Pary. Divers autres facteurs rendent indispensable l'application d'un code de conduite, entre autres la perte, par les États hôtes, de tout moyen d'action contre ces sociétés, a-t-il conclu.
MME CHRISTY EZIM MBONU, experte de la Sous-Commission, a souligné que l'exercice de tous les droits, y compris les droits économiques, sociaux et culturels, est entravé par la corruption. Elle a attiré l'attention de la Sous-Commission sur le phénomène des individus qui prennent avantage de leur position privilégiée au niveau national pour s'enrichir en profitant d'ailleurs de l'existence de paradis fiscaux. Mme Mbonu a rappelé que la corruption génère la pauvreté qui à son tour ne manque pas d'avoir des conséquences sur les droits économiques, sociaux et culturels. La Sous-Commission pourrait envisager une étude détaillée sur le phénomène de la corruption, ses ramifications et ses conséquences. Une telle étude devrait notamment envisager des systèmes de sanction contre les pratiques de corruption.
Pour Mme MME Nathalie MIVELAZ (Organisation mondiale contre la torture, OMCT), les conséquences de la mondialisation sur les droits de l'homme sont un sujet de préoccupation constante. Il existe un risque précis que le principe de non-discrimination appliqué à la législation sur le commerce empêche les États d'entreprendre des mesures d'action affirmative en faveur des plus démunis. L'OMCT estime qu'il faut prendre des mesures pour garantir l'«approche droits de l'homme» dans l'élaboration des réglementations commerciales. Quant aux investissements étrangers directs, principal vecteur de la mondialisation du commerce, ils peuvent avoir un effet négatif sur l'application de tous les droits de l'homme, avec des conséquences graves pour les conditions de la vie quotidienne, quand ils n'entraînent pas grèves massives ou émeutes parfois violemment réprimées. L'OMCT demande donc que l'Organisation mondiale du commerce (OMC) adopte une approche soucieuse du respect des droits de l'homme dans la libéralisation du commerce des services. L'OMCT demande également au Haut Commissaire aux droits de l'homme qu'il prépare un rapport sur «les droits de l'homme, le commerce et les investissements».
MME MARIE-THERESE BELLAMY (Confédération internationale des syndicats libres, CISL) a félicité la Haut-Commissaire aux droits de l'homme pour son rapport sur la libéralisation du commerce des services et les droits de l'homme, dans lequel Mme Mary Robinson insiste sur la nécessité d'adopter une approche «qui place la promotion et la protection des droits humains comme objectifs de la libéralisation du commerce et non pas comme exceptions». Souhaitant illustrer l'impact de la mondialisation sur les droits humains et particulièrement sur les droits des travailleurs et les droits sociaux, la représentante de la CISL a notamment souligné que d'après le PNUD, 66 pays sont plus pauvres maintenant qu'il y a une dizaine d'années. En outre, a-t-elle poursuivi, l'expansion de zones franches d'exportation s'est généralement appuyée sur un travail féminin peu rémunéré, exercé dans des conditions inacceptables sans aucune protection du droit de s'organiser en syndicat. La représentante a indiqué ne pas avoir le temps de parler plus en détail des plus de 15 millions d'enfants qui travaillent dans la production à l'exportation comme dans les mines, l'habillement, le textile, l'agriculture, la fabrication de tapis, de chaussures ou d'instruments chirurgicaux, ni des plus de dix millions de personnes qui sont contraintes au travail forcé ou à une forme contemporaine d'esclavage. Rappelant que les 144 gouvernements membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sont engagés dans des négociations sur le commerce des services dans le cadre de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS), la représentante de la CISL a affirmé que ces négociations tendant à la libéralisation pourraient restreindre drastiquement l'accès aux services vitaux et autres services d'intérêt général. Aussi a-t-elle affirmé que les services publics comme, par dessus tout, l'éducation, la santé et les biens publics essentiels ainsi que les activités des secteurs des services sociaux ne doivent pas être sujets à privatisation. La représentante a par ailleurs attiré l'attention de la Sous-Commission sur la question de la responsabilité sociale des entreprises.
M. EL-HADJI GUISSÉ, membre de la Sous-Commission, a déclaré que la corruption implique nécessairement deux coupables. Le rôle de l'argent est déterminant dans la commission de ce type de délit. C'est pourquoi M. Guissé demande que cet aspect soit pris en compte. La prévarication des fonctionnaires et la fraude sont cependant d'autres adjuvants de ce genre de délits, qu'il faut aussi prendre en compte.
M. FISSEHA YIMER, membre de la Sous-Commission, a souligné que la question de la corruption est d'une actualité brûlante et ne manque pas d'avoir de graves répercussions sur les droits de l'homme et le droit au développement. Aussi, ce thème mérite-t-il d'être examiné plus avant par la Sous-Commission, a estimé M. Yimer. En ce qui concerne la question de la libéralisation du commerce des services, M. Yimer s'est réjoui du rapport présenté sur ce thème par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme mais a regretté que ce rapport n'attire pas davantage l'attention sur l'impact de cette libéralisation sur les droits de l'homme.
MME KATHY ROBERTS (Human Rights Advocates International) a déclaré que son organisation appuie l'adoption de normes de droits de l'homme applicables aux sociétés transnationales, étant donné l'étendue de leur influence. Elle a estimé que ces normes doivent aussi s'étendre à la protection des travailleurs migrants. Elles devraient encore impliquer une obligation faite aux sociétés multinationales de révéler la localisation géographique des leurs sous-traitants et contracteurs. Cette information est nécessaire pour garantir une surveillance efficace. Enfin, elle a demandé à la Sous-Commission de prévoir aussi bien des procédures de surveillance locales qu'une supervision de ces normes par les Nations Unies. Il est en effet important que les victimes connaissent leurs droits et les voies de recours qui s'offrent à eux. La participation de l'ONU pourrait permettre la coordination des ressources locales disponibles, qu'elles soient gouvernementales ou non. Leur proximité de la réalité du terrain en font des interlocuteurs privilégiés. La Sous-Commission devrait en outre autoriser le Groupe de travail sur les sociétés transnationales à envisager l'élaboration de mécanismes permettant aux communautés de présenter des rapports sur les activités de ces sociétés.
M. SOO GIL PARK, membre de la Sous-Commission, a mis l'accent sur la nécessité d'assurer un bon équilibre entre les impératifs des affaires, des entreprises et des droits de l'homme. La question est de savoir comment incorporer le respect des droits de l'homme dans les négociations au sein de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Il faudrait que le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la libéralisation du commerce des services et les droits de l'homme porte aussi sur la libéralisation des échanges qui doit permettre d'obtenir des ressources financières accrues afin que les gouvernements puissent à leur tour s'occuper des pauvres, a estimé M. Park. D'une manière générale, l'extension des échanges s'avère être un meilleur remède que la simple aide économique, a également déclaré l'expert. La libéralisation des échanges est donc la meilleure clef du développement, a-t-il insisté. Chaque pays doit néanmoins pouvoir décider librement des secteurs dans lesquels il entend promouvoir la libéralisation. Les États ont la responsabilité d'assurer le bien-être de leur peuple, mais il ne faut pas pour ce faire compter sur les seules forces du marché, a-t-il ajouté.
MME H. SHARFELDDIN (Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale) a déploré qu'un tiers des efforts de l'humanité soit tourné vers la fabrication d'armements de toutes sortes. Des efforts méritoires sont aujourd'hui déployés pour le contrôle des armements existants, nucléaire, biologiques ou chimiques. Il faut poursuivre et étendre cet effort vers l'interdiction de la fabrication des armes offensives. Un embargo décrété par les pays de l'OPEP contre les États producteurs de ces armes pourrait permettre d'atteindre cet objectif, a suggéré la représentante.
M. Edwin BERRY (Commission internationale de juristes) a indiqué que son organisation considère le protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont la Commission des droits de l'homme a confié l'examen à un Groupe de travail, comme un outil indispensable pour préciser davantage le contenu et la portée des droits énoncés dans le Pacte et contribuer à leur mise en œuvre. Aussi, la Sous-Commission devrait-elle envoyer un message à la cinquante-neuvième session de la Commission afin que le Groupe de travail progresse dans son processus de rédaction du projet de protocole facultatif.
M. Khalid JAHANGER (Fondation de recherches et d'études culturelles himalayennes) a déclaré que les aspects sociaux et culturels souffrent quelque peu de l'intérêt quasi exclusif accordé aux aspects économiques du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Les hommes ne se nourrissent pas que de pain, et ignorer les valeurs culturelles peut aboutir à favoriser une homogénéité idéologique néfaste aux droits sociaux. Une telle dégradation, a déploré le représentant, est clairement à l'œuvre au Cachemire, où des mouvements terroristes extrémistes d'inspiration religieuse mettent quotidiennement en péril les conditions de vie de milliers d'êtres humains.
M. Ramon CARDONA (Fédération syndicale mondiale) a fait observer que les progrès enregistrés par l'humanité en matière de maturité politique, de justice sociale et de coexistence pacifique sont restés très en deçà des extraordinaires progrès réalisés sur les plans scientifiques et techniques. Les droits du travail acquis de longue lutte sont aujourd'hui bafoués et ceux qui luttent pour leur sauvegarde sont persécutés, a par ailleurs souligné le représentant. Il a relevé que l'on continue aujourd'hui de proposer des programmes de lutte contre la pauvreté en même temps que sont promues des politiques qui la génèrent. Si ce que l'on appelle la mondialisation économique est inévitable, alors nous devons exiger que soient également mondialisées la culture, l'éducation, la santé et la politique de développement économique et social, a déclaré le représentant. Il convient alors d'exiger une mondialisation de la solidarité, a-t-il insisté.
M. Osamu NIKURA (Association internationale des juristes démocrates - aijd) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la mondialisation de la criminalité et souligné qu'il fallait y apporter une réponse. Plusieurs propositions ont été ainsi émises pour le contrôle des flux financiers et la lutte contre le blanchiment d'argent. Or, certaines des mesures prises dans ce cadre peuvent aller à l'encontre de la protection des droits de l'homme. Il faut que la Sous-Commission recommande que la mondialisation de la lutte contre le crime organisé s'effectue dans le cadre plus large des droits de l'homme. Le Conseil des droits de l'homme du Japon, censé surveiller l'application des droits de l'homme, n'est investi en définitive que des compétences assez faibles, ce qui le rend peu à même d'assurer le respect de la loi. Il faudrait donc qu'un Protocole additionnel au Pacte sur les droits économiques incorpore des mesures effectives qui pourraient être incluses dans les législations nationales.



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