Communiqués de presse Procédures spéciales
LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LES FORMES CONTEMPORAINES DE RACISME DÉNONCE LA BANALISATION DU RACISME
07 mars 2006
Partager
Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale
7 mars 2006
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale se penche sur un projet de directives harmonisées pour la présentation des rapports aux organes de traités
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entendu, ce matin, le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, M. Doudou Diène. Le Rapporteur spécial a rendu compte de ses activités et s'est penché sur la problématique entre liberté de religion et liberté d'expression, au regard notamment de la polémique apparue autour des caricatures du prophète Mahomet.
M. Diène a déclaré que l'on assiste à une recrudescence générale des manifestations de racisme, de discrimination et de xénophobie, partout dans le monde, et a déploré la banalisation du racisme, de la discrimination et de la xénophobie, estimant que cette évolution découle de la prégnance des plates formes xénophobes dans les programmes politiques de partis démocratiques. Le Rapporteur spécial a dénoncé la «démocratisation» du discours raciste, faisant observer que le discours raciste et xénophobe sort du bois et du ghetto des partis extrémistes. Il a également dénoncé l'instrumentalisation politique du racisme et de la xénophobie, imputable au fait que le discours contre l'étranger et le demandeur d'asile est un discours politiquement payant.
L'affaire des caricatures danoises est de nature à conforter ou à infirmer, suivant la manière dont elle sera traitée, la théorie du conflit entre les cultures et les civilisations, a souligné M. Diène, qu a estimé que le contexte politique danois éclaire la publication de ces caricatures. En outre, cette affaire soulève une question majeure qui est celle du multiculturalisme, à mettre en rapport avec la crise identitaire que traversent tous les pays. Un membre du Comité ayant estimé que les caricatures en elles-mêmes sont innocentes, M. Diène a fait observer que le même journal danois qui a publié les caricatures avait, quelques mois auparavant, refusé de publier des caricatures considérées comme pouvant être offensantes pour les chrétiens.
Le Comité a en outre débattu ce matin du projet de directives harmonisées concernant la procédure de présentation des rapports au titre des instruments internationaux de droits de l'homme. Le Comité a décidé de rassembler dans un document devant être soumis à la prochaine Réunion intercomités une synthèse des observations et commentaires de ses membres face au projet de directives.
La prochaine séance publique du Comité se tiendra vendredi prochain, 10 mars 2006, pour la clôture de sa soixante-huitième session. Il présentera à cette occasion ses observations finales sur les huit rapports d'États parties examinés au cours de la session.
Discussion avec le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme
M. DOUDOU DIÈNE , Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, a rappelé que ce dialogue entre le Rapporteur spécial et le Comité a été entamé il y a trois ans et est de nature à renforcer la complémentarité des mandats du Comité et du Rapporteur spécial. M. Diène a rendu compte de ses activités et s'est penché sur la problématique associant liberté de religion et liberté d'expression, au regard notamment de la polémique autour des caricatures du prophète Mahomet.
Rendant compte de ses activités, M. Diène a indiqué qu'il avait notamment visité, au cours de l'année écoulée, le Japon, le Brésil et la Suisse. Il a indiqué pouvoir affirmer, sur la base de ces visites et des informations qui lui parviennent, que l'on assiste à une recrudescence générale des manifestations de racisme, de discrimination et de xénophobie, partout dans le monde, et ce, en dépit de trois conférences mondiales sur le racisme, dont la dernière en date s'est tenue à Durban en 2001, et en dépit également du travail du Comité. Citant Brecht, M. Diène a fait observer que «le ventre est encore fécond d'où a surgi la bête immonde». La culture raciste et discriminatoire reste donc fertile, a insisté M. Diène.
M. Diène a par ailleurs fait observer que l'amalgame entre les facteurs de race, de religion et de culture fait qu'il est difficile de voir où se situent, dans les manifestations de racisme, les dimensions purement raciales et ethniques, où commence la problématique culturelle et où commence la problématique religieuse. Il est important d'éviter que cet amalgame devienne un facteur lourd, a souligné le Rapporteur spécial; aussi, est-il important de chercher à voir dans chaque manifestation de racisme où se situe le facteur purement racial.
M. Diène a relevé la banalisation du racisme, de la discrimination et de la xénophobie, estimant que cette évolution découle de la prégnance des plates formes xénophobes dans les programmes politiques des partis démocratiques. Lentement le discours raciste imprègne les programmes politiques des partis démocratiques; il y a donc démocratisation du discours raciste, a-t-il insisté. À cet égard, le combat contre le terrorisme, mais aussi les problématiques de l'immigration et de la préférence nationale, ont littéralement fait céder les barrières. Le discours raciste et xénophobe sort du bois et du ghetto des partis extrémistes, a déclaré M. Diène.
M. Diène a en outre dénoncé l'instrumentalisation politique du racisme et de la xénophobie, imputable au fait que le discours contre l'étranger et le demandeur d'asile est un discours politiquement payant. Le Rapporteur spécial a également dénoncé la légitimation intellectuelle du racisme. Prolifèrent en effet dans la littérature imaginaire des livres qui prônent le racime et le défendent, a-t-il souligné. Il a en outre dénoncé la production de thèses qui légitiment le racisme et la discrimination en s'efforçant de leur donner un cadre intellectuel. Au nombre des publications contenant une telle thèse, figure le dernier livre de Samuel Huttington «Who Are We ?», a précisé M. Diène; or, il s'agit là d'un intellectuel majeur de la scène américaine dont les travaux ont un impact important.
S'agissant du problème des caricatures danoises, M. Diène a rappelé que la Commission des droits de l'homme lui a demandé depuis plusieurs années de présenter un rapport sur la situation des populations arabes et musulmanes dans le monde, rapport qu'il a lui-même souhaité ne pas réduire à l'islamophobie en l'élargissant à l'antisémitisme, à la christianophobie et à d'autres manifestations similaires. Le grand défi consiste à opérer un lien - une dialectique - entre la spécificité de chaque forme de discrimination et l'universalité de leurs causes, a souligné M. Diène. Il faut se garder de hiérarchiser le combat contre la discrimination en prétendant que lutter contre telle forme de discrimination serait plus important que lutter contre telle autre, a souligné M. Diène.
L'affaire des caricatures danoises est de nature à conforter ou à infirmer, suivant la manière dont elle sera traitée, la théorie du clash entre les cultures et les civilisations. La première question est donc de savoir quel est le lien entre cette affaire des caricatures et l'hypothèse du conflit entre les civilisations. Le fait est qu'il ne peut pas s'agir d'un conflit entre les civilisations. En effet, la réaction d'une partie du public et d'une certaine partie de la presse, notamment européenne, a été de poser ce conflit des caricatures en termes de conflit entre deux mondes, l'un acceptant la liberté d'expression et l'autre pas. Or, cette dichotomie est fausse, elle ne reflète pas la réalité. Tous les pays et tous les journaux, au sein même du monde occidental, n'ont en effet pas réagi de la même manière. Il n'y a pas deux mondes qui s'affrontent dans cette affaire, a insisté M. Diène.
Cette affaire des caricatures illustre la prégnance des plates formes racistes et xénophobes dans les partis politiques démocratiques, a poursuivi le Rapporteur spécial. Affirmant que le contexte politique danois éclaire la publication de ces caricatures, il a rappelé que le parti d'extrême droite - dont la ligne politique centrale a consisté à diaboliser les musulmans - a obtenu 13% aux élections législatives et fait partie de l'alliance qui gouverne le Danemark. Tant le développement de l'islamophobie que celui de l'antisémitisme ou d'autres manifestations de ce type se produisent dans des pays ou des contextes marqués par la force de la présence des partis d'extrême droite et par l'absence de leaders politiques, a fait observer M. Diène. La vigilance dans le combat contre le racisme n'est pas la même aujourd'hui que cela n'était le cas il y a encore cinq ou dix ans, a-t-il relevé. Le facteur politique est donc un facteur central, a-t-il insisté. La question des caricatures danoises soulève une question majeure qui est celle du multiculturalisme; en effet, dans tous les pays, un conflit est en train d'apparaître lié à la crise identitaire. C'est la crispation identitaire qui se trouve au cœur de l'ensemble de ce débat, a affirmé le Rapporteur spécial.
M. Diène a indiqué que dans son rapport à la Commission, il juge capital que la communauté internationale pose l'urgence qu'il y a à revenir sur l'articulation entre liberté d'expression et liberté de religion, dans le cadre du combat contre le racisme et la discrimination. Il y a là un exercice à réaliser qui doit s'opérer sur le long terme, a-t-il précisé.
Depuis le XVIIIe siècle, les caricaturistes n'ont eu de cesse de se moquer des religions sans que cela ne déclenche des réactions comme celles auxquelles on assiste aujourd'hui, a déclaré un membre du Comité suite à l'intervention du Rapporteur spécial; les caricatures en elles-mêmes sont innocentes et c'est en fait le fondamentalisme qui est en cause, a estimé cet expert.
Affirmer qu'une caricature est innocente est contraire à l'esprit même de la caricature, a tenu à souligner M. Diène. Le Rapporteur spécial a rappelé que le même journal danois qui a publié les caricatures avait, quelques mois auparavant, refusé de publier des caricatures considérées comme pouvant être offensantes pour les chrétiens. En outre, cette affaire ne doit pas être dissociée du contexte politique particulier du Danemark, a souligné M. Diène.
M. Diène a enfin indiqué qu'il allait prochainement effectuer des visites en Fédération de Russie, en Italie et en Mauritanie.
Examen du projet de directives harmonisées pour la présentation des rapports
Le projet de directives harmonisées concernant la procédure de présentation des rapports au titre des instruments internationaux de droits de l'homme comprend des directives pour un document de base commun que les États parties présenteraient à tous les organes conventionneles dans le domaine des droits de l'homme ainsi que des directives pour des documents spécifiques qu'ils adresseraient à chacun desdits organes.
M. Patrick Thornberry, membre du Comité, a présenté son rapport sur la réunion qu'a tenue, en décembre dernier, le Groupe de travail chargé d'élaborer ce projet de directives harmonisées, qui avait été créé à l'issue de la quatrième Réunion intercomités et de la septième Réunion des Présidents d'organes de traités relatifs aux droits de l'homme, en juin 2005. Il a notamment souligné qu'à sa session de décembre, ce Groupe de travail technique a réuni des représentants de chacun des sept organes conventionnels concernés. Le Groupe de travail s'est uniquement penché sur le texte lui-même du projet de directives harmonisées, sans aborder les questions plus générales concernant la réforme en cours aux Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme.
Le projet prévoit que le document de base inclue des informations sur les questions relatives à la non-discrimination, à l'égalité et aux remèdes apportés en cas de problèmes dans ces domaines, a fait observer M. Thornberry. Le principe de non-discrimination est en effet commun à tous les traités de droits de l'homme, a-t-il souligné.
M. Thornberry a estimé qu'il vaudrait mieux ne pas amender ce projet sous peine de voir la prochaine Réunion intercomités être saisie de sept projets amendés distincts émanant de chacun des organes conventionnels.
Aussi, conformément à la suggestion de M. Thornberry, le Comité a-t-il décidé de rassembler dans un document distinct - devant être soumis à la prochaine Réunion intercomités - une synthèse des observations et commentaires de ses membres face au projet de directives.
* *** *
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
de la discrimination raciale
7 mars 2006
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale se penche sur un projet de directives harmonisées pour la présentation des rapports aux organes de traités
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a entendu, ce matin, le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, M. Doudou Diène. Le Rapporteur spécial a rendu compte de ses activités et s'est penché sur la problématique entre liberté de religion et liberté d'expression, au regard notamment de la polémique apparue autour des caricatures du prophète Mahomet.
M. Diène a déclaré que l'on assiste à une recrudescence générale des manifestations de racisme, de discrimination et de xénophobie, partout dans le monde, et a déploré la banalisation du racisme, de la discrimination et de la xénophobie, estimant que cette évolution découle de la prégnance des plates formes xénophobes dans les programmes politiques de partis démocratiques. Le Rapporteur spécial a dénoncé la «démocratisation» du discours raciste, faisant observer que le discours raciste et xénophobe sort du bois et du ghetto des partis extrémistes. Il a également dénoncé l'instrumentalisation politique du racisme et de la xénophobie, imputable au fait que le discours contre l'étranger et le demandeur d'asile est un discours politiquement payant.
L'affaire des caricatures danoises est de nature à conforter ou à infirmer, suivant la manière dont elle sera traitée, la théorie du conflit entre les cultures et les civilisations, a souligné M. Diène, qu a estimé que le contexte politique danois éclaire la publication de ces caricatures. En outre, cette affaire soulève une question majeure qui est celle du multiculturalisme, à mettre en rapport avec la crise identitaire que traversent tous les pays. Un membre du Comité ayant estimé que les caricatures en elles-mêmes sont innocentes, M. Diène a fait observer que le même journal danois qui a publié les caricatures avait, quelques mois auparavant, refusé de publier des caricatures considérées comme pouvant être offensantes pour les chrétiens.
Le Comité a en outre débattu ce matin du projet de directives harmonisées concernant la procédure de présentation des rapports au titre des instruments internationaux de droits de l'homme. Le Comité a décidé de rassembler dans un document devant être soumis à la prochaine Réunion intercomités une synthèse des observations et commentaires de ses membres face au projet de directives.
La prochaine séance publique du Comité se tiendra vendredi prochain, 10 mars 2006, pour la clôture de sa soixante-huitième session. Il présentera à cette occasion ses observations finales sur les huit rapports d'États parties examinés au cours de la session.
Discussion avec le Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme
M. DOUDOU DIÈNE , Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l'intolérance qui y est associée, a rappelé que ce dialogue entre le Rapporteur spécial et le Comité a été entamé il y a trois ans et est de nature à renforcer la complémentarité des mandats du Comité et du Rapporteur spécial. M. Diène a rendu compte de ses activités et s'est penché sur la problématique associant liberté de religion et liberté d'expression, au regard notamment de la polémique autour des caricatures du prophète Mahomet.
Rendant compte de ses activités, M. Diène a indiqué qu'il avait notamment visité, au cours de l'année écoulée, le Japon, le Brésil et la Suisse. Il a indiqué pouvoir affirmer, sur la base de ces visites et des informations qui lui parviennent, que l'on assiste à une recrudescence générale des manifestations de racisme, de discrimination et de xénophobie, partout dans le monde, et ce, en dépit de trois conférences mondiales sur le racisme, dont la dernière en date s'est tenue à Durban en 2001, et en dépit également du travail du Comité. Citant Brecht, M. Diène a fait observer que «le ventre est encore fécond d'où a surgi la bête immonde». La culture raciste et discriminatoire reste donc fertile, a insisté M. Diène.
M. Diène a par ailleurs fait observer que l'amalgame entre les facteurs de race, de religion et de culture fait qu'il est difficile de voir où se situent, dans les manifestations de racisme, les dimensions purement raciales et ethniques, où commence la problématique culturelle et où commence la problématique religieuse. Il est important d'éviter que cet amalgame devienne un facteur lourd, a souligné le Rapporteur spécial; aussi, est-il important de chercher à voir dans chaque manifestation de racisme où se situe le facteur purement racial.
M. Diène a relevé la banalisation du racisme, de la discrimination et de la xénophobie, estimant que cette évolution découle de la prégnance des plates formes xénophobes dans les programmes politiques des partis démocratiques. Lentement le discours raciste imprègne les programmes politiques des partis démocratiques; il y a donc démocratisation du discours raciste, a-t-il insisté. À cet égard, le combat contre le terrorisme, mais aussi les problématiques de l'immigration et de la préférence nationale, ont littéralement fait céder les barrières. Le discours raciste et xénophobe sort du bois et du ghetto des partis extrémistes, a déclaré M. Diène.
M. Diène a en outre dénoncé l'instrumentalisation politique du racisme et de la xénophobie, imputable au fait que le discours contre l'étranger et le demandeur d'asile est un discours politiquement payant. Le Rapporteur spécial a également dénoncé la légitimation intellectuelle du racisme. Prolifèrent en effet dans la littérature imaginaire des livres qui prônent le racime et le défendent, a-t-il souligné. Il a en outre dénoncé la production de thèses qui légitiment le racisme et la discrimination en s'efforçant de leur donner un cadre intellectuel. Au nombre des publications contenant une telle thèse, figure le dernier livre de Samuel Huttington «Who Are We ?», a précisé M. Diène; or, il s'agit là d'un intellectuel majeur de la scène américaine dont les travaux ont un impact important.
S'agissant du problème des caricatures danoises, M. Diène a rappelé que la Commission des droits de l'homme lui a demandé depuis plusieurs années de présenter un rapport sur la situation des populations arabes et musulmanes dans le monde, rapport qu'il a lui-même souhaité ne pas réduire à l'islamophobie en l'élargissant à l'antisémitisme, à la christianophobie et à d'autres manifestations similaires. Le grand défi consiste à opérer un lien - une dialectique - entre la spécificité de chaque forme de discrimination et l'universalité de leurs causes, a souligné M. Diène. Il faut se garder de hiérarchiser le combat contre la discrimination en prétendant que lutter contre telle forme de discrimination serait plus important que lutter contre telle autre, a souligné M. Diène.
L'affaire des caricatures danoises est de nature à conforter ou à infirmer, suivant la manière dont elle sera traitée, la théorie du clash entre les cultures et les civilisations. La première question est donc de savoir quel est le lien entre cette affaire des caricatures et l'hypothèse du conflit entre les civilisations. Le fait est qu'il ne peut pas s'agir d'un conflit entre les civilisations. En effet, la réaction d'une partie du public et d'une certaine partie de la presse, notamment européenne, a été de poser ce conflit des caricatures en termes de conflit entre deux mondes, l'un acceptant la liberté d'expression et l'autre pas. Or, cette dichotomie est fausse, elle ne reflète pas la réalité. Tous les pays et tous les journaux, au sein même du monde occidental, n'ont en effet pas réagi de la même manière. Il n'y a pas deux mondes qui s'affrontent dans cette affaire, a insisté M. Diène.
Cette affaire des caricatures illustre la prégnance des plates formes racistes et xénophobes dans les partis politiques démocratiques, a poursuivi le Rapporteur spécial. Affirmant que le contexte politique danois éclaire la publication de ces caricatures, il a rappelé que le parti d'extrême droite - dont la ligne politique centrale a consisté à diaboliser les musulmans - a obtenu 13% aux élections législatives et fait partie de l'alliance qui gouverne le Danemark. Tant le développement de l'islamophobie que celui de l'antisémitisme ou d'autres manifestations de ce type se produisent dans des pays ou des contextes marqués par la force de la présence des partis d'extrême droite et par l'absence de leaders politiques, a fait observer M. Diène. La vigilance dans le combat contre le racisme n'est pas la même aujourd'hui que cela n'était le cas il y a encore cinq ou dix ans, a-t-il relevé. Le facteur politique est donc un facteur central, a-t-il insisté. La question des caricatures danoises soulève une question majeure qui est celle du multiculturalisme; en effet, dans tous les pays, un conflit est en train d'apparaître lié à la crise identitaire. C'est la crispation identitaire qui se trouve au cœur de l'ensemble de ce débat, a affirmé le Rapporteur spécial.
M. Diène a indiqué que dans son rapport à la Commission, il juge capital que la communauté internationale pose l'urgence qu'il y a à revenir sur l'articulation entre liberté d'expression et liberté de religion, dans le cadre du combat contre le racisme et la discrimination. Il y a là un exercice à réaliser qui doit s'opérer sur le long terme, a-t-il précisé.
Depuis le XVIIIe siècle, les caricaturistes n'ont eu de cesse de se moquer des religions sans que cela ne déclenche des réactions comme celles auxquelles on assiste aujourd'hui, a déclaré un membre du Comité suite à l'intervention du Rapporteur spécial; les caricatures en elles-mêmes sont innocentes et c'est en fait le fondamentalisme qui est en cause, a estimé cet expert.
Affirmer qu'une caricature est innocente est contraire à l'esprit même de la caricature, a tenu à souligner M. Diène. Le Rapporteur spécial a rappelé que le même journal danois qui a publié les caricatures avait, quelques mois auparavant, refusé de publier des caricatures considérées comme pouvant être offensantes pour les chrétiens. En outre, cette affaire ne doit pas être dissociée du contexte politique particulier du Danemark, a souligné M. Diène.
M. Diène a enfin indiqué qu'il allait prochainement effectuer des visites en Fédération de Russie, en Italie et en Mauritanie.
Examen du projet de directives harmonisées pour la présentation des rapports
Le projet de directives harmonisées concernant la procédure de présentation des rapports au titre des instruments internationaux de droits de l'homme comprend des directives pour un document de base commun que les États parties présenteraient à tous les organes conventionneles dans le domaine des droits de l'homme ainsi que des directives pour des documents spécifiques qu'ils adresseraient à chacun desdits organes.
M. Patrick Thornberry, membre du Comité, a présenté son rapport sur la réunion qu'a tenue, en décembre dernier, le Groupe de travail chargé d'élaborer ce projet de directives harmonisées, qui avait été créé à l'issue de la quatrième Réunion intercomités et de la septième Réunion des Présidents d'organes de traités relatifs aux droits de l'homme, en juin 2005. Il a notamment souligné qu'à sa session de décembre, ce Groupe de travail technique a réuni des représentants de chacun des sept organes conventionnels concernés. Le Groupe de travail s'est uniquement penché sur le texte lui-même du projet de directives harmonisées, sans aborder les questions plus générales concernant la réforme en cours aux Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme.
Le projet prévoit que le document de base inclue des informations sur les questions relatives à la non-discrimination, à l'égalité et aux remèdes apportés en cas de problèmes dans ces domaines, a fait observer M. Thornberry. Le principe de non-discrimination est en effet commun à tous les traités de droits de l'homme, a-t-il souligné.
M. Thornberry a estimé qu'il vaudrait mieux ne pas amender ce projet sous peine de voir la prochaine Réunion intercomités être saisie de sept projets amendés distincts émanant de chacun des organes conventionnels.
Aussi, conformément à la suggestion de M. Thornberry, le Comité a-t-il décidé de rassembler dans un document distinct - devant être soumis à la prochaine Réunion intercomités - une synthèse des observations et commentaires de ses membres face au projet de directives.
* *** *
Ce document est destiné à l'information; il ne constitue pas un document officiel
Mots-clés
VOIR CETTE PAGE EN :