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Communiqués de presse Multiple Mechanisms FR

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND DES MINISTRES DU CAMEROUN, DE LA GUINÉE ÉQUATORIALE ET DE LA RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

09 Avril 2002



Commission des droits de l'homme
58ème session
9 avril 2002
Matin



Le Secrétaire général de l'OCI dénonce les déclarations
tendant à défigurer l'islam, l'accusant de nier des
droits de l'homme et prédisant une confrontation
entre l'islam et la civilisation occidentale


La Commission des droits de l'homme a entendu ce matin le Ministre d'État chargé des relations extérieures du Cameroun, le Ministre de la justice et des affaires religieuses de la Guinée équatoriale, le Ministre de la justice de la République centrafricaine et le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique. Cinq Rapporteurs spéciaux ont soumis leurs rapports sur des questions relatives aux droits civils et politiques, déplorant toutefois les contraintes de temps qui ne leur permettent pas de faire une présentation complète de leurs travaux devant la Commission.
M. François-Xavier Ngoubeyou, Ministre d'État chargé des relations extérieures du Cameroun, a déclaré que la lutte contre la pauvreté est un des plus grands défis à relever. L'extrême pauvreté est en effet un déni de tous les droits, son élimination est donc un impératif éthique, social, politique et économique, a-t-il déclaré. Il a aussi insisté sur le droit à la santé, composante capitale des droits fondamentaux. À cet égard, il a estimé qu'un partenariat actif était nécessaire entre la communauté internationale, les Nations Unies, les industries pharmaceutiques et les pays africains en vue d'éradiquer des pandémies comme le VIH/sida et le paludisme.
M. Rubén Maye Nsu Mangue, Ministre de la justice et des affaires religieuses de la Guinée équatoriale, a notamment décrit les efforts déployés par son pays pour assurer le plein respect de l'état de droit. La Guinée équatoriale évolue rapidement vers la mise en œuvre des dispositions de la Convention contre la torture et de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, qu'elle a ratifiées. Le Gouvernement compte maintenant honorer ses engagements et adhérer à d'autres instruments internationaux.
M. Marcel Metefara, Ministre de la justice de la République centrafricaine, a insisté sur le fait que la prolifération d'armes de guerre dans un contexte d'extrême porosité des frontières avait eu des conséquences désastreuses sur la vie de la population. À cet égard, il a fait savoir que son gouvernement avait adopté des mesures en vue de «réprimer sévèrement tout militaire qui aura conservé son arme en dehors des heures de service». Il s'est néanmoins déclaré gravement préoccupé par la circulation d'armes légères dans la sous-région et a indiqué que son pays s'accordait désormais à promouvoir une véritable politique de désarmement, malgré d'énormes difficultés financières.
Le Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique, M. Abdelouahed Belkekiz, a notamment déploré, dans le contexte des suites des événements du 11 septembre, les allégations erronées et préjudiciables propagées par certaines sources partiales, y compris certains médias, qui visent à défigurer l'islam en l'accusant de fanatisme, de violence et de déni des droits de l'homme ainsi qu'en prédisant une confrontation de l'islam avec la civilisation occidentale. Il a regretté que la responsabilité des attentats du 11 septembre soit attribuée par certains à l'ensemble des musulmans, contribuant à nourrir au sein des populations la haine des musulmans.
Au titre de l'examen de la question des droits civils et politiques, quatre Rapporteurs spéciaux ont présenté leurs rapports à la Commission: Mme Asma Jahangir, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires; M. Param Cumaraswamy, Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats; M. Theo van Boven, Rapporteur spécial sur la question de la torture; M. Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, et M. Louis Joinet, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur la détention arbitraire. Le représentant de la Turquie a répondu à Mme Jahangir; les représentants du Guatemala, du Royaume-Uni et du Mexique ont répondu à M. Cumaraswamy; la représentante de l'Argentine a répondu à M. Amor et le représentant du Bahreïn à M. Joinet.
Dans le cadre du débat sur les violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elles se produisent dans le monde, la Commission a entendu les déclarations des représentants de l'Éthiopie et de l'Érythrée, ainsi que les organisations non gouvernementales suivantes : Human Rights Watch, Libération, Fédération internationale des mouvements d'adultes ruraux catholiques, Amnesty International, South Asia Human Rights Documentation Centre, Organisation mondiale contre la torture.
Les délégations des pays suivants ont exercé leur droit de réponse: Inde, Azerbaïdjan, Nicaragua, Royaume-Uni, Israël, Jamaïque et Zambie.
Cet après-midi à 15 heures, la Commission poursuivra son débat sur les violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales où qu'elles se produisent dans le monde.

Déclarations de hauts dignitaires
M. FRANÇOIS-XAVIER NGOUBEYOU, Ministre d'État chargé des relations extérieures du Cameroun, a exprimé sa reconnaissance à Mary Robinson, Haut Commissaire aux droits de l'homme, pour la mise en œuvre à Yaoundé du Centre sous-régional des droits de l'homme. Avec l'installation de ce centre au Cameroun, l'Afrique centrale sera un pôle de développement de l'éducation en matière des droits de l'homme, de l'état de droit et des pratiques démocratiques, a-t-il déclaré. Rappelant les termes du Sommet du millénaire qui s'est réuni à New York en septembre 2000, le Ministre a observé que beaucoup restait à faire pour réaliser les objectifs décidés à cette occasion, notamment le partage des fruits de la mondialisation, l'avènement d'un monde exempt de pauvreté et de guerre, et la jouissance légitime, partout et pour tous, de tous les droits de l'homme. Il a donc estimé que la Commission ne devait épargner aucun effort pour promouvoir la démocratie, renforcer l'état de droit et le respect des droits de l'homme, y compris le droit au développement. Parmi les grands défis à relever, le Ministre a mis l'accent sur la lutte contre la pauvreté. L'extrême pauvreté est un déni de tous les droits, son élimination est donc un impératif éthique, social, politique et économique, a-t-il déclaré. Il a ensuite insisté sur le droit à la santé, composante capitale des droits fondamentaux. À cet égard, il a considéré qu'un partenariat actif était nécessaire entre la communauté internationale, les Nations Unies, les industries pharmaceutiques et les pays africains en vue d'éradiquer des pandémies comme le VIH/sida et le paludisme, qui hypothèquent sérieusement les efforts de développement du continent.
Détaillant les progrès réalisés par son pays dans le domaine de la promotion et de la protection des droits de l'homme, le Ministre a attiré l'attention sur l'adoption d'un programme de gouvernance, d'une déclaration de stratégie de lutte contre la pauvreté et d'un plan d'action contre la corruption, sur la création d'un observatoire national des élections et d'un comité chargé d'examiner le processus de ratification du Statut de la Cour pénale internationale. S'agissant des relations du Cameroun avec les mécanismes internationaux relatifs au droit de l'homme, il a précisé que les recommandations du Rapporteur spécial sur la question de la torture avaient été intégrées dans un vaste programme national de promotion des droits de l'homme, appuyé par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et par l'Union européenne. Il a également expliqué que le Gouvernement avait pris des mesures destinées à lutter contre le grand banditisme.
Le Ministre a ensuite mis l'accent sur l'intolérance, le manque de respect d'autrui, les inégalités et toutes les formes de discrimination qui sont, entre autres, les causes des conflits d'aujourd'hui et de demain. Dans cette perspective, il a estimé que la Conférence mondiale contre le racisme, qui s'est tenue à Durban (Afrique du Sud) du 31 août au 8 septembre 2001, avait eu le mérite de rappeler les engagements déjà pris pour éradiquer ces fléaux et de jeter les bases d'une stratégie idoine pour y parvenir. Il a fait valoir que le succès de cette Conférence dépendra de la volonté des gouvernements de respecter leurs engagements et de favoriser, à l'échelle mondiale, un dialogue interculturel et interreligieux ainsi qu'une éducation fondée sur la tolérance et le respect de l'autre. Revenant en conclusion sur les événements tragiques du 11 septembre 2001, le Ministre a assuré qu'il fallait combattre le terrorisme sans altérer la détermination de la communauté internationale de poursuivre son œuvre d'édification de la paix et de promotion des droits de l'homme. Il s'est déclaré convaincu que la volonté politique de l'ensemble de la communauté internationale doit s'exprimer par une solidarité effective et une coopération qui produit des résultats concrets. Par ailleurs, le Ministre s'est déclaré favorable à l'insertion dans l'arsenal juridique relatif aux droits de l'homme de nouvelles dispositions tenant compte des évolutions sociales, scientifiques, et techniques intervenues à la fin du siècle dernier.
M. RUBÉN-MAYE NSUE MANGUE, Ministre de la justice et des affaires religieuses de la Guinée équatoriale, a expliqué que la légitimité du Gouvernement de la Guinée équatoriale et de son action est fondée sur la Constitution. C'est sur cette base que l'arbitraire des pouvoirs publics a été interdit, et que le Gouvernement a garanti l'égalité de tous devant la loi, ce qui a permis d'assurer la paix entre les peuples qui constituent la Guinée équatoriale. Le Ministre a également cité, parmi d'autres mesures en faveur de l'état de droit, un projet de loi en faveur des femmes (fin de la détention pour non-paiement de la dot) et un projet de loi mettant fin aux visas de sortie pour les ressortissants équato-guinéens. Le Gouvernement a signé le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont les dispositions sont intégrées à la législation de la Guinée équatoriale. Afin d'assurer le respect des droits de l'homme au quotidien, une Commission interministérielle pourra prendre des sanctions contre les auteurs de violations des droits de l'homme et servira d'agent de liaison avec la Commission des droits de l'homme. Parmi les autres mesures pratiques qui ont été prises, on compte la promulgation d'un code de conduite de la magistrature et la nomination de juges d'application des peines.
Pour la promotion des droits civils et politiques, le Gouvernement a contribué à l'émergence d'une opinion publique indépendante grâce à l'encouragement de la création d'organes de presse et de télévision privés. Les partis politiques ont pu organiser des congrès nationaux, avec l'appui financier et logistique du Gouvernement. Ce dernier et les partis d'opposition ont d'autre part engagé des pourparlers pour assurer l'intégration politique de toutes les forces du pays, ce qui permettra de créer les conditions économiques et sociales favorables aux prochaines élections. Le Ministre a d'autre part évoqué la place croissante de la société civile en Guinée équatoriale, où plus de soixante-dix organisations non gouvernementales sont recensées.
En tant qu'État intégré à la communauté internationale, la Guinée équatoriale évolue rapidement vers le plein respect des instruments internationaux que le Conseil des ministres a approuvés et soumis à la Chambre législative actuellement en session : la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants et la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Gouvernement compte maintenant honorer ces engagements et adhérer à d'autres instruments internationaux.
En conclusion, le Ministre a une fois encore rappelé les efforts qu'a déployés son gouvernement en faveur des droits de l'homme dans le pays. Après vingt-trois ans de surveillance de la part de la Commission, le Ministre estime que son pays peut maintenant bénéficier d'une assistance technique en matière de promotion des droits de l'homme.
M. ABDELOUAHED BELKEKIZ, Secrétaire général de l'Organisation de la Conférence islamique - OCI) a souligné que, comme cela a été rappelé lors du séminaire sur les droits de l'homme et l'islam que l'OCI a récemment organisé au Palais des Nations de Genève, le concept des droits de l'homme dans l'islam a une portée plus large que celle aujourd'hui universellement reconnue dans les relations internationales. Le concept islamique des droits de l'homme se concentre en effet sur la promotion du droit à la dignité humaine qui comprend davantage que de simples droits politiques, pour prendre en compte des considérations éthiques et morales. À cet égard, le Secrétaire général de l'OCI a déploré les allégations erronées et préjudiciables propagées par certaines sources partiales, y compris certains médias, qui visent à défigurer l'islam en l'accusant de fanatisme, de violence et de déni des droits de l'homme ainsi qu'en prédisant une confrontation de l'islam avec la civilisation occidentale. L'islam est une religion de paix, d'amour, de compréhension et de dialogue fondée sur la raison et l'amitié entre les peuples, a assuré le Secrétaire général de l'OCI. Il a estimé que la déformation du sens profond des événements du 11 septembre et de leurs causes ainsi que l'attribution de la responsabilité de ces crimes (perpétrés par un petit nombre d'éléments mal orientés soupçonnés d'être des extrémistes musulmans) à l'ensemble des musulmans ont grandement contribué à nourrir au sein des populations la haine à l'égard des musulmans.
M. Belkekiz a déclaré qu'il est largement reconnu que l'occupation par la force de la terre d'un autre peuple constitue la pire forme de déni des droits de l'homme. En Palestine, a-t-il poursuivi, Israël persiste dans son occupation des territoires palestiniens occupés depuis 1967 et refuse aux Palestiniens leur droit inaliénable à l'autodétermination, principe de base du droit international. Il faut donc espérer que la résolution 1397 du Conseil de sécurité sera appliquée et que la Commission assumera sa responsabilité officielle et morale d'accorder au peuple palestinien son droit à l'autodétermination et au retour sur ses territoires, conformément à la résolution 194 du Conseil de sécurité. Dans ce contexte, l'OCI condamne toute tentative visant à diffamer la lutte nationale palestinienne en la qualifiant de terroriste, a souligné le Secrétaire général de l'OCI.
M. Belkekiz a par ailleurs déclaré que la situation au Jammu-et-Cachemire a atteint un tel degré de détérioration ces derniers mois que, du point de vue de leurs relations, l'Inde et le Pakistan étaient au bord d'une guerre nucléaire. Cette situation témoigne de la gravité de cette question et de la nécessité de ne ménager aucun effort afin de la résoudre. Le refus de l'Inde d'accepter dans ce contexte le droit à l'autodétermination et la mise en œuvre des résolutions représentant la légitimité internationale a abouti à des actes de violence et de contre-violence qui ont coûté la vie à des milliers d'innocents. Nous pensons que l'acceptation par l'Inde du principe d'autodétermination renforcerait la position de ce pays comme l'un des États démocratiques les plus importants du monde, a déclaré le Secrétaire général de l'OCI.
La préservation de l'identité religieuse et culturelle des communautés musulmanes à travers le monde est l'une des préoccupations fondamentales de l'OCI, a souligné M. Belkekiz. À cet égard, il a indiqué suivre avec préoccupation la tragique situation humanitaire dans laquelle se trouve le peuple tchétchène. Le Secrétaire général de l'OCI a également attiré l'attention de la Commission sur les conditions humanitaires inacceptables dans lesquelles vivent des musulmans dans de nombreuses parties du monde, en particulier en Azerbaïdjan, dans la région du Nagorno-Karabakh et dans de nombreuses autres régions dans les Balkans, au Myanmar et ailleurs. M. Belkekiz a également attiré l'attention de la Commission sur la terrible situation humanitaire à laquelle sont confrontées des populations musulmanes en raison de blocus et de sanctions injustes qui leur sont imposés sous divers prétextes, comme cela est le cas en Iraq. Une attention particulière doit également être accordée au sort des Koweïtiens disparus, a ajouté le Secrétaire général de l'OCI.
M. MARCEL METAFARA, Ministre de la justice de la République centrafricaine, a tout d'abord fait part des actions réalisées dans son pays pour assurer une place prépondérante aux droits de l'homme, notamment par la création d'un haut-commissariat aux droits de l'homme rattaché à la Primature. Il a également détaillé les actions entreprises avec l'appui du Bureau des Nations Unies en République centrafricaine, dans le cadre de la Décennie des Nations Unies pour l'éducation dans le domaine des droits de l'homme 1995-2004. En dépit de ces avancées, il a reconnu que de nombreux défis restaient à relever, notamment en ce qui concerne la ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme et la soumission des divers rapports périodiques aux organes compétents. À cet égard, il a lancé un appel en faveur de l'appui du Haut-Commissariat aux droits de l'homme à travers ses programmes d'assistance technique.
Se félicitant des récentes visites d'Amnesty International et d'autres organisations non gouvernementales, le Ministre a toutefois souhaité apporter quelques clarifications. Il a notamment rappelé que la République centrafricaine était en proie à de graves crises socioéconomiques et avait été le théâtre d'une tentative de coup d'État manqué le 26 mai 2001. Il a ensuite expliqué que les bavures commises contre certains citoyens n'avaient jamais constitué une politique délibérée et planifiée du Gouvernement. Il a insisté sur le fait que toute lecture de la situation actuelle des droits de l'homme en République centrafricaine devait absolument prendre en compte cette nouvelle donne au risque de se tromper. Le Ministre a ensuite assuré que la prolifération d'armes de guerre dans un contexte d'extrême porosité des frontières avait eu des conséquences désastreuses sur la vie de la population. À cet égard, il a fait savoir que le Gouvernement avait adopté des mesures en vue de «réprimer sévèrement tout militaire qui aura conservé son arme en dehors des heures de service». Il s'est néanmoins déclaré gravement préoccupé par la circulation d'armes légères dans la sous-région et a indiqué que son pays s'accordait désormais à promouvoir une véritable politique de désarmement, mais qu'il devait faire face à d'énormes difficultés financières dans la mise en œuvre de cette politique, surtout dans ses volets de démobilisation et de réinsertion.
S'agissant du retour des réfugiés et des personnes déplacées, le Ministre a fait savoir que le Gouvernement avait créé une commission tripartite composée d'un membre de la Commission mixte d'enquête judiciaire, d'un membre des missions diplomatiques et d'un membre du Bureau des Nations Unies en République centrafricaine. Il a estimé qu'à ce jour, une bonne partie des civils étaient rentrés dans le pays même si la majorité des militaires expriment encore quelques réserves. Revenant sur les recommandations formulées par le Rapporteur spécial sur les conditions de détention, il a précisé que la reconstruction de la maison d'arrêt de Ngaragba (la seule détruite après les mutineries) avait été entreprise, mais que la poursuite de ce programme se heurtait à des difficultés financières. Il a sollicité l'aide de la communauté internationale dans ce sens. En dernier lieu, le Ministre s'est félicité de l'action du Bureau des Nations Unies pour la consolidation de la paix en Centrafrique et a insisté sur le fait que le renforcement des institutions démocratiques va de pair avec le renforcement de l'état de droit, sans lequel il ne saurait y avoir de respect des droits de l'homme. Il a conclu en rappelant que la réalisation du droit au développement est intimement lié aux droits de tous les peuples.
Présentation de rapports sur les droits civils et politiques et réponses de pays concernés
MME ASMA JAHANGIR, Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, présentant son rapport, a invité les délégations, pour épargner le temps de la Commission, à prendre connaissance du texte de sa déclaration qui a été distribué en salle. Dans son rapport (A/CN.4/2002/74 et Add.1), qui couvre la période allant du 11 décembre 2000 au 1er décembre 2001, elle indique que pour ses deux dernières missions, elle a séjourné en Turquie du 19 février au 1er mars 2001 et au Honduras du 6 au 10 août 2001. Elle rend également compte du suivi de ses recommandations après sa visite au Timor oriental du 4 au 10 novembre 1999. Elle informe aussi la Commission de la situation au Népal qu'elle considère de plus en plus préoccupante, notamment depuis la proclamation de l'état d'urgence le 26 novembre 2001 et le meurtre du Roi Birendra Bir Bikram Shah Dev, le 1er juin 2001.
Au titre de ses recommandations concernant les actes de génocide, elle estime nécessaire qu'un mécanisme permanent soit chargé de poursuivre les auteurs d'actes de génocide, à quelque moment et en quelque lieu qu'ils se produisent sans laisser la place à la sélectivité. Elle engage les États à accélérer la mise en place de la Cour pénale internationale.
S'agissant de l'emploi excessif de la force par les responsables de l'application des lois, elle recommande que les gouvernements veillent à ce que le personnel des forces de police reçoive une formation poussée dans le domaine des droits de l'homme ; que les cas de recours excessif à la force par des agents de l'État fassent l'objet d'une enquête approfondie ; et que les responsables soient traduits en justice, même en période de troubles politiques. De la même manière, tous les décès en détention devraient faire l'objet d'une enquête approfondie et menée dans les meilleurs délais par un organe indépendant des forces de police et des autorités pénitentiaires.
En ce qui concerne le statut des réfugiés, elle considère que les gouvernements devraient en toutes circonstances s'abstenir d'expulser une personne lorsque le respect de son droit à la vie n'est pas pleinement garanti. Le refoulement de réfugiés ou de personnes déplacées à l'intérieur d'un pays vers des pays ou des régions où le respect de leur droit à la vie n'est pas garanti doit en toutes circonstances être interdit. Dans ce contexte, la communauté internationale devrait, si nécessaire, être prête à apporter une aide aux pays confrontés à un afflux massif de réfugiés dont la vie peut être menacée, pour leur permettre d'accueillir ces personnes en toute sécurité.
Par ailleurs, la Rapporteuse spéciale se déclare préoccupée par le manque de transparence et d'information sur la peine capitale et l'exécution des condamnation à mort. Par conséquent, elle invite tous les gouvernements des pays dans lesquels la peine capitale existe encore à instituer un moratoire sur les exécutions et, avant que celles-ci ne reprennent, à mettre en place des commissions nationales pour rendre compte de la situation à la lumière des normes et des résolutions internationales. En outre, la Rapporteuse spéciale engage les quelques États qui exécutent encore des enfants à abolir cette pratique. Afin de s'assurer que les garanties entourant l'imposition de la peine capitale sont bien respectées, il est instamment demandé que toute décision de justice condamnant à cette peine comporte une liste de garanties à respecter et soit rendue publique.
M. ERDOGAN ISCAN (Turquie) a commenté le rapport de Mme Jahangir en notant que la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires reconnaît dans son rapport la coopération que lui a apporté le Gouvernement turc. La Turquie entend poursuivre cette coopération pour progresser sur la voie de la pleine et entière réalisation de tous les droits de l'homme. Le rapport de Mme Jahangir comporte quelques commentaires superficiels et généraux sur le système juridique et politique de la Turquie. La Constitution turque garantit le droit à la vie et il ne saurait être question de prétendre que la loi turque accorde une quelconque impunité à ceux qui ont recours à la force ou qu'elle autorise les exécutions extrajudiciaires. Pour des raisons de calendrier, le rapport de Mme Jahangir n'a pas pu prendre en compte les amendements apportés le 3 octobre 2001 à la Constitution turque, a en outre regretté le représentant.
M. PARAM CUMARASWAMY, Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, a très brièvement présenté les quatre rapports qu'il a préparés pour la Commission et a renvoyé à leur lecture, ainsi qu'à la déclaration qu'il a préparée et qui a été distribuée en salle. Dans son rapport (E/CN.4/2002/72, et add. 1 à 3), le Rapporteur spécial rend compte de ses activités dans quarante-neuf pays. D'une façon générale, le Rapporteur s'inquiète des tentatives de certains gouvernements de porter atteinte à l'indépendance de la justice en prenant des mesures qui sont allées jusqu'à la révocation de magistrats. Le Rapporteur rappelle aussi que dans certains pays la sécurité même de la magistrature est menacée. M. Cumaraswamy a également donné des informations sur quelques pays en particulier. Ainsi, la situation au Zimbabwe s'est constamment détériorée depuis décembre 2000, avec des menaces directes contre la Cour suprême, entre autres, qui mettent en péril l'état de droit. Les tensions entre l'indépendance de la justice et la responsabilité qu'elle devrait assumer sont aussi très fréquentes. A ce titre, le Rapporteur travaille à l'élaboration d'un code d'éthique judiciaire qui serait universellement applicable. Le Rapporteur estime aussi que l'instauration par le Gouvernement américain de commissions militaires pour le jugement des présumés terroristes est une menace contre l'état de droit.
Parmi d'autres cas, le Rapporteur évoque le Mexique dans les institutions judiciaires duquel, déplore-t-il, la société mexicaine en général n'éprouve aucune confiance, malgré quelques progrès constatés. Un écart important est par ailleurs observable entre la qualité de la justice rendue au niveau fédéral et celle qui est rendue au niveau local, écart dû à la différence dans la disponibilité des ressources. D'autre part, il n'y a au Mexique ni organisation professionnelle d'avocats, ni mécanismes disciplinaires, ni critères uniformes de qualification professionnelle. Le Rapporteur s'est également rendu en Italie, où il a constaté que la tension entre le Gouvernement et le système judiciaire est due à un ensemble de facteurs qui devraient être examinés de façon complète par un comité de coordination, et non par le Gouvernement, comme c'est le cas actuellement; ce principe a été accepté par les autorités, note le Rapporteur avec satisfaction.
M. ARTURO HERNANDEZ BASAVE (Mexique) a déclaré qu'il ne saurait être question pour la Commission d'accepter un quelconque arrangement concernant ses méthodes de travail qui amènerait les rapporteurs spéciaux à ne pas pouvoir, faute de temps, présenter leurs rapports. Le représentant mexicain a par ailleurs rappelé que l'indépendance du pouvoir judiciaire est l'un des piliers démocratique de tout État de droit. Répondant à l'invitation permanente adressée par le Gouvernement mexicain à tous les mécanismes de la Commission, M. Cumaraswamy a effectué en 2001 une mission au Mexique au cours de laquelle il a notamment rencontré des représentants du pouvoir judiciaire, de la société civile et du barreau mexicain. Tout en prenant note de l'évaluation de M. Cumaraswamy, estimant qu'il reste un long chemin à parcourir au Mexique en matière notamment de lutte contre l'impunité, le représentant mexicain a rappelé que le Rapporteur spécial a pris note de la volonté politique manifestée par les pouvoirs publics mexicains et l'ensemble de la société pour prendre les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les recommandations du Rapporteur spécial. Le Gouvernement mexicain encourage la promotion d'une culture des droits de l'homme dans le pays.
MME CARLA RODRIGUEZ (Guatemala) a également déploré que les limites du temps de parole affectent le dialogue avec les rapporteurs spéciaux et a espéré que cela ne créerait pas de précédent. Elle a expliqué que son gouvernement s'employait à mettre en œuvre les recommandations formulées par le Rapporteur spécial. Elle a ensuite rendu compte des mesures qui ont été prises pour renforcer l'indépendance du pouvoir judiciaire et améliorer son fonctionnement. À cet égard, elle a fait savoir que l'accès à la justice s'était amélioré et que la nomination des magistrats était plus libre. Elle s'est félicitée du fait que le Guatemala entre dans une phase de changements qui permettront d'assurer la primauté du droit.
M. THEO VAN BOVEN, Rapporteur spécial sur la question de la torture, compte tenu des contraintes de temps, a renvoyé les membres de la Commission à la documentation écrite qu'il a présentée et dont il a demandé la distribution. Dans son rapport (E/CN.4/2002/137), M. Theo van Boven, qui a succédé le 28 novembre 2001 à M. Nigel Rodley en tant que le Rapporteur spécial sur la question de la torture, rend compte des premières activités qu'il a menées depuis sa nomination. Il informe la Commission qu'il a fait part dans des lettres datées du 25 janvier 2002 de son souhait de se rendre, dans le cadre de son mandat, dans les pays suivants : Algérie, Égypte, Fédération de Russie (en ce qui concerne la République de Tchétchénie), Géorgie, Inde, Indonésie, Israël, Népal, Ouzbékistan et Tunisie. Il a également répondu aux invitations reçues par son prédécesseur de la part des Gouvernements bolivien, équato-guinéen et togolais, ainsi qu'à l'invitation que lui a confirmée le Gouvernement chinois.
S'agissant de l'étude que lui a confiée la Commission sur le commerce et la production du matériel conçu pour infliger des actes de torture et des mauvais traitements, en vue de trouver le meilleur moyen d'interdire un tel commerce et une telle production et de combattre leur expansion, le Rapporteur spécial indique qu'il commençait à recevoir des informations et des informations suite à la note verbale adressée en août 2001 à toutes les missions permanentes auprès de l'ONU. Il estime que des informations supplémentaires lui sont nécessaires afin qu'il puisse s'acquitter efficacement de cette tâche.
M. ABDELFATTAH AMOR, Rapporteur spécial sur la liberté de religion et de conviction a regretté que les documents qu'il avait préparés à l'intention de la Commission, notamment son rapport qui doit paraître sous la cote E/CN.4/2002/73, n'aient malheureusement pas été distribués ni traduits. Il a expliqué qu'il avait pensé remédier à ce problème lors de sa présentation orale qu'il est aujourd'hui contraint de faire distribuer sous forme de document en raison des contraintes de temps auxquelles est soumise la Commission.
L'additif 1 au rapport de M. Amor (E/CN.4/2002/73/Add.1) concerne la visite qu'il a effectuée en Argentine en avril 2001. Le Rapporteur spécial tient à rappeler, en ce qui concerne la disposition constitutionnelle relative au soutien de l'État à l'Église catholique, que ce lien privilégié entre l'État et une religion déterminée n'est pas en soi en contradiction avec les droits de l'homme. Au total, le Rapporteur spécial estime que la législation argentine comporte des bases constitutionnelles solides et des données juridiques importantes pour la garantie de la liberté de religion ou de conviction. Cependant, des problèmes sont soulevés par les minorités religieuses, du moins par certaines d'entre elles, ayant trait principalement au principe de l'égalité de traitement et aux attaques sous différentes formes (physiques ou symboliques) contre certaines confessions. D'autre part, le Rapporteur spécial a pu constater une islamophobie doublée d'une arabophobie entretenues par certains médias de la presse écrite et audiovisuelle, surtout populaires, consistant à associer les Arabes en général et l'islam en particulier à l'intolérance et à la discrimination. Quant aux populations autochtones, le problème majeur reste leur marginalisation par rapport à la société argentine, à tel point que leur importance numérique demeure une énigme, affirme le rapport avant de préciser que l'identité autochtone comprend bien entendu une dimension religieuse.
Tout en comprenant la position particulière de l'Église catholique majoritaire en raison de données historiques et sociologiques, le Rapporteur spécial estime qu'un certain nombre de mesures devraient être prises afin de s'assurer de la pleine égalité de traitement à l'égard de l'ensemble des communautés de religion ou de conviction. Le Rapporteur spécial recommande en outre que l'État décide des allocations financières en faveur des communautés religieuses ou de conviction sur la base du principe d'égalité par équivalence. Concernant les attaques ayant affecté les communautés juive, musulmane et chrétiennes, le Rapporteur spécial recommande que les enquêtes se poursuivent afin d'identifier les responsables de ces actes et que la justice suive son cours dans des délais raisonnables. Concernant l'accès des autochtones à leurs sites sacrés et aux sépultures ayant une signification religieuse, le rapport souligne qu'il s'agit d'un droit fondamental dans le domaine de la religion et dont l'exercice doit être garanti conformément aux dispositions du droit international en la matière. Sur la question spécifique de la restitution des restes humains ayant une dimension religieuse pour les autochtones et se trouvant dans les musées et autres institutions similaires, il est nécessaire que l'État coopère afin que tout obstacle soit levé, de sorte que cette restitution ait lieu le plus rapidement possible.
MME NORMA NASCIMBENE DE DUMONT (Argentine) a déploré la situation dans laquelle se trouve la Commission et qui ne permet pas à cet organe d'examiner les rapports des rapporteurs spéciaux de manière appropriée. Elle a souligné que dans cette période d'après le 11 septembre, il semble particulièrement judicieux d'accorder une importance spéciale au rapport de M. Amor, Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de conviction, qui affirme dans son rapport que la déclaration de non-agression signée par les représentants des communautés arabe, chrétienne, musulmane et juive constitue à l'échelle internationale un exemple de ce qu'il convient de faire en matière de prévention des conflits. La représentante argentine s'est dite surprise par les objections de certains qui prétendent éliminer tout vestige de religiosité dans le domaine public. Elle a toutefois ajouté que l'Argentine respecte la faculté de chaque habitant de n'avoir aucune religion ou croyance.
M. LOUIS JOINET, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur la détention arbitraire, a présenté le rapport du Groupe en indiquant qu'il comprend les difficultés liées à la crise, notamment financière, que traverse la Commission mais en protestant contre le fait que 4 mois après la soumission de son rapport, celui-ci n'a toujours pas été publié en anglais. M. Joinet a souligné qu'il ne serait pas sérieux de prétendre présenter en quelques secondes le rapport du Groupe de travail. Il a précisé à l'attention des délégations que son rapport ne comporte que 18 pages et a invité chacun à prendre le temps de le lire.
M. Joinet a salué la coopération dont a fait preuve le Bahreïn (pays où le Groupe de travail a effectué une mission faisant l'objet d'un additif au rapport) et a indiqué que ce rapport fait date dans l'histoire du Groupe de travail. M. Joinet a rappelé que c'est la dernière fois qu'il prend la parole en tant que Président du Groupe de travail car son mandat prend fin cette année. Jamais le Groupe de travail n'a interrompu le dialogue, même en période de tension, a souligné M. Joinet. Après toutes ces années passées à la présidence du Groupe de travail, M. Joinet a indiqué pouvoir conclure que «mieux vaut courir le risque de s'exposer à des critiques en coopérant que de s'exposer à des critiques parce qu'on ne coopère pas».
Le rapport du groupe de travail sur la détention arbitraire (E/CN.4/2002/77) préconise que les gouvernements réduisent au maximum les cas de mise en détention pour des causes liées à l'extrême pauvreté. Il recommande l'abrogation des textes prévoyant des peines de prison pour dette contractuelle (d'ailleurs prohibée par l'article 11 du Pacte), la prise en compte, dans la fixation du montant des cautions, des capacités financières des justiciables, étant entendu que la mise en liberté doit rester la règle et la détention l'exception, et que le montant des amendes infligées tienne compte des mêmes facteurs, pour éviter que des personnes soient incarcérées faute de revenus suffisants. Enfin, le groupe de travail estime que le recours à la privation de liberté pour protéger les victimes ne doit être employé qu'à la demande expresse des victimes et, en tout état de cause, supervisé par une autorité judiciaire.
Dans un additif à son rapport (E/CN.4/2002/77/Add.2), consacré à la visite qu'il a effectuée à Bahreïn en octobre 2001, le Groupe de travail sur la détention arbitraire considère que cette mission au Bahreïn est l'une des plus positives effectuées par ses membres. Cette réussite est notamment due à l'exceptionnel esprit de coopération dont ont fait preuve les autorités tant avant que pendant la visite ainsi qu'au sens des responsabilités montré par les ONG, précise le rapport. Ajoutons à cela que - fait sans précédent dans l'histoire du Groupe de travail - la libération totale des prisonniers, notamment de ceux sur le sort desquels le Groupe s'était prononcé, ne pouvait que consacrer cette réussite. Le Groupe de travail tient à nouveau à manifester sa grande satisfaction devant l'importance et l'ampleur décisive des réformes entreprises et des mesures de clémence dont elles sont assorties.
Le Groupe de travail indique cependant avoir constaté l'extrême fréquence de la détention pour non-versement d'une caution ou non-paiement d'une amende. Aussi, le Gouvernement devrait-il prendre les mesures nécessaires pour que soit prise en considération la bonne foi du débiteur insolvable et qu'il soit tenu compte d'une manière équitable de la faiblesse des revenus des personnes défavorisées. Le Gouvernement devrait également faire en sorte que les dispositions qui autorisent l'incarcération pour non-paiement de dette civile soient abrogées. Il est par ailleurs recommandé au Gouvernement de revoir le dispositif régissant les tribunaux militaires afin de le mettre en conformité avec les normes universelles, notamment en soumettant les décisions rendues par ces juridictions à un recours devant la Cour de cassation. Le Groupe de travail recommande également au Gouvernement d'étendre la compétence du Tribunal pour mineurs aux mineurs âgés de plus de 15 ans et de moins de 18 ans. Il est également recommandé au pays de prévoir un dispositif juridique efficace pour prévenir et punir les violences contre les femmes, et particulièrement les violences domestiques qui souvent restent impunies parce que le mode d'établissement de la preuve ne tient pas compte de la fragilité du statut social de la femme.
M. SAEED MOHAMED AL-FAIHANI (Bahreïn) a précisé que la visite de M. Joinet, Rapporteur spécial sur la détention arbitraire, s'est faite avec la pleine coopération du Gouvernement du Bahreïn et dans le respect de la liberté de travail du Groupe. La visite a pu montrer que le Bahreïn respecte, dans le traitement de ses détenus, les principes des droits de l'homme. Le Bahreïn a en outre entrepris des réformes dans sa législation, et des efforts sont déployés par les organisations non gouvernementales locales dans le domaine de la promotion des droits de l'homme. Le représentant bahreïnite a fait valoir que les droits des femmes, en particulier, ont été favorisés par des réformes constitutionnelles et législatives. Le représentant s'est enfin félicité de l'attitude très constructive du Groupe de travail de M. Joinet.
Suite du débat sur la violation des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans le monde
M. TILAHUN GIZAW (Éthiopie) a dressé le bilan de la collaboration de son pays avec la Mission des Nations Unies en Éthiopie et en Érythrée (MNUEE) et a regretté que l'Érythrée ait continué à restreindre la liberté de mouvement de la MNUEE, comme en témoigne le rapport du Secrétaire général en date du 8 mars 2002. Il a fait savoir que, conformément à l'Accord sur les forces armées, son pays avait démobilisé plus de 64 000 hommes de troupes en deux phases, alors que l'Érythrée ne prenait aucune mesure dans le même sens. En outre, la zone temporaire de sécurité a été maintes fois violée par l'Érythrée qui y déploie des troupes sous forme de milices ou de policiers, a-t-il précisé. Il a également expliqué que le processus d'échange des prisonniers de guerre avait été stoppé par la faute du manque de volonté manifeste de l'Érythrée. En outre, a-t-il ajouté, poursuivant sa politique d'intimidation des Éthiopiens, le régime érythréen a fermé tous les commerces éthiopiens d'Asmara, gelé les comptes en banque appartenant à des Éthiopiens et saisi leurs avoirs. Selon lui, ces actes d'intimidation ont conduit de nombreux Éthiopiens à quitter le territoire érythréen en prétextant un retour volontaire. En conclusion, il a dénoncé l'agression érythréenne comme un crime contre l'humanité, un génocide et a appelé la Commission à exhorter l'Érythrée à mettre fin à ses violations des droits des nationaux éthiopiens.
M. AMARE TEKLE (Érythrée) a souligné que la Commission de la frontière doit annoncer sa décision le 13 avril, c'est-à-dire dans quatre jours. Le Gouvernement érythréen a déjà annoncé qu'il mettrait en œuvre en toute bonne foi les décisions de cette Commission de la frontière. Alors que nous attendons cette décision, le régime éthiopien continue de déporter des Érythréens et des Éthiopiens d'origine érythréenne. Il garde en prison quelque 1800 prisonniers de guerre érythréens ainsi que, dans des camps de concentration, quelque 200 civils bien que l'Érythrée ait pour sa part relâché tous les civils éthiopiens détenus, conformément à l'Accord de paix global. Le régime éthiopien continue en outre à confisquer des biens et des maisons appartenant à des Érythréens et à des Éthiopiens d'origine érythréenne.
MME JOANNA WESCHLER (Human Rights Watch) a dénoncé les nombreuses violations des droits de l'homme en Tchétchénie du fait des forces russes. Lors de nombreuses opérations militaires, ces dernières ont commis des crimes contre les civils, au prétexte de lutter contre le terrorisme. Human Rights Watch demande à la Commission d'agir sur la Russie pour qu'elle reconnaisse l'applicabilité du droit international humanitaire dans ce conflit, et qu'à défaut de progrès, la Commission dépêche sur place une commission d'enquête. En ce qui concerne la Chine, la déléguée a stigmatisé les détentions arbitraires, les poursuites pour délit d'opinion, l'exécution de prétendus terroristes, les pressions exercées contre les adeptes du Falun Gong, ou encore les abus contre de prétendus «séparatistes». Human Rights Watch demande à la Chine de respecter ses obligations dans le cadre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
MME MARGARET BOWDEN (Libération) a dénoncé les violations des droits des Kurdes et des autres Iraquiens commises par le régime de Saddam Hussein. Elle s'est également opposée à toute nouvelle opération militaire des États-Unis contre l'Iraq qui ne ferait qu'infliger des souffrances supplémentaires à un peuple iraquien qui pâtit déjà des conséquences des bombardements et des sanctions. Libération est favorable à l'adoption d'un embargo sévère sur les livraisons d'armes mais estime qu'il faut lever les restrictions imposées aux importations humanitaires. La représentante de Libération a également plaidé en faveur d'une levée des sanctions économiques contre Cuba. S'agissant de la Colombie, elle s'est insurgée contre l'impunité dont jouissent les responsables de violations des droits de l'homme dans un contexte de rupture des pourparlers de paix entre le Gouvernement et les FARC. La représentante de Libération a également dénoncé les attaques perpétrées par des partisans du Parti national du Bangladesh (qui a remporté les élections générales d'octobre 2001) à l'encontre des groupes minoritaires au Bangladesh, notamment contre des membres des minorités hindoue, bouddhiste et chrétienne. La représentante de Libération est par ailleurs profondément préoccupée par le niveau élevé de violations des droits de l'homme commises par les forces de sécurité indonésiennes en Aceh et en Papouasie occidentale. En conclusion, Mme Bowden a estimé que la Commission devrait adopter une résolution condamnant les violations des droits de l'homme en Colombie, ainsi qu'une résolution condamnant les violations des droits de l'homme perpétrées par les forces de sécurité indonésiennes en Aceh et en Papouasie occidentale, à Maluku et au centre de l'île de Sulawesi.
M. PIERRE MIOT (FIMARC) a mis l'accent sur le droit à l'eau, qui est un élément essentiel du droit à la santé et au développement. Il a estimé que la Commission se devait de prendre les mesures nécessaires pour se saisir de cette question et aider à la prise de conscience de toute l'humanité de la gravité de la situation et de l'urgence des remèdes à proposer. Insistant sur l'aspect essentiel de l'eau, il a rappelé que 25 millions de personnes avaient abandonné leur lieu de vie en 1998 du fait de la réduction et de la contamination des bassins fluviaux. Il a également attiré l'attention sur le rôle des femmes et des jeunes filles qui doivent transporter l'eau lorsqu'elle n'est pas à proximité, ce qui les empêche d'aller à l'école et d'acquérir la formation nécessaire à leur indépendance économique. Dénonçant l'agriculture intensive, grosse consommatrice d'eau, il a expliqué que les mouvements de la FIMARC avaient fait le choix d'une agriculture paysanne durable qui utilise les ressources en eau de manière mesurée. Soulignant que l'eau est une ressource essentielle qui ne peut passer sous le contrôle de l'Organisation mondiale du commerce, le représentant en a appelé aux États pour qu'ils accordent à l'examen de la question du droit à l'eau avec toute l'importance qu'elle mérite et a demandé à la Commission d'autoriser M. El-Hadji Guissé, Expert à la Sous-Commission, à poursuivre son étude sur le droit d'accès à l'eau potable pour tout être humain et toute communauté humaine.
MME LUCIA WITHERS (Amnesty International) a dénoncé les graves violations des droits de l'homme en Indonésie commises par des institutions d'État, notamment en Papouasie et à Aceh. Amnesty International souhaite que les procès des personnes suspectées de crimes lors des événements du Timor oriental se déroulent dans le respect des normes internationales. D'autre part, les forces russes et tchétchènes commettent de graves violations des droits de l'homme, avec des cas de torture et de mauvais traitements, notamment contre les femmes: la Commission, estime Amnesty International, doit adopter une résolution qui condamne ces crimes et établir une commission d'enquête qui rendrait son rapport lors de la prochaine session. Le système de justice pénale en Arabie saoudite donne aussi matière à inquiétude: le pays doit respecter les engagements qu'il a pris lors de la 57e session de la Commission. Amnesty International s'est enfin émue des violences constatées au Zimbabwe après les élections du mois de mars 2002, et demande au Gouvernement d'agir sans tarder pour empêcher les milices d'intimider et d'attaquer les opposants et les paysans, et de laisser les Rapporteurs de la Commission se rendre dans le pays.
MME ANDREA COOMBER (South–Asia Human Rights Documentation Centre) a dénoncé la loi sur la prévention du terrorisme en vigueur en Inde . En effet, cette loi, qui ne pourra être révisée dans les trois années qui ont suivi son entrée en vigueur, entérine une définition élargie du terrorisme de sorte qu'elle s'applique également dans des cas de meurtres, de vol et autres délits. Cette loi n'offre pas les garanties fondamentales permettant d'assurer le droit à un procès équitable, a insisté la représentante.
M. MICHAEL ANTHONY (OMCT) a attiré l'attention de la Commission sur la situation en Tchétchénie, qui s'est détériorée depuis le début de la «guerre contre le terrorisme» et a dénoncé les violations des droits de l'homme commises, pour une large part, par les forces de sécurité russes. Il a appelé la Commission a adopter une résolution qui prévoie la création d'une commission internationale d'enquête et a appelé la Fédération de Russie à inviter les mécanismes des droits de l'homme appropriés. En République démocratique du Congo, il a observé que les violations des droits de l'homme étaient perpétrées aussi bien par le Gouvernement que par le Rassemblement congolais pour la démocratie, soutenu par le Rwanda et l'Ouganda. Il a appelé les parties à lancer des enquêtes immédiates sur les violations des droits de l'homme et à traduire leurs auteurs en justice, et à coopérer avec le nouveau Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme en République démocratique du Congo. M. Anthony a regretté que l'Algérie n'ait pas répondu aux demandes d'invitation des Rapporteurs spéciaux sur la torture et les exécutions extrajudiciaires, ni au Groupe de travail sur les disparitions forcées. Il a estimé qu'en tant que membre de cette Commission, l'Algérie se devait de respecter ses obligations et de démontrer sa volonté de coopérer avec les mécanismes de la Commission. Se félicitant ensuite de la création d'un tribunal international spécial pour la Sierra Leone, il a appelé les États Membres des Nations Unies à doter cette institution des fonds nécessaires à son fonctionnement.

Droit de réponse
Le représentant de l'Inde, répondant au Pakistan, a affirmé que ce pays est une dictature militaire et que les conditions démocratiques y sont précaires. Le Cachemire n'est pas la seule région où le terrorisme bénéficie du soutien des services secrets pakistanais.
Le représentant de l'Azerbaïdjan, en réponse à la déclaration écrite de l'Espagne, se déclare surpris d'apprendre que son pays détient des prisonniers pour des motifs politiques. L'Azerbaïdjan réprouve totalement cette pratique, et est d'ailleurs partie à tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. De nombreux textes de lois garantissent les droits des citoyens. Chaque année, des grâces présidentielles sont accordées, a en outre indiqué le représentant.
La représentante du Nicaragua a répondu aux accusations faites hier par la délégation cubaine, qui parlait de corruption au Nicaragua, en indiquant que son pays est démocratique et que, contrairement à ce qui se serait passé à Cuba, où l'indépendance du judiciaire n'existe pas, des enquêtes ont été engagées au Nicaragua concernant des allégations de corruption. Contrairement à ce qui se serait passé à Cuba, les médias enquêtent eux aussi sur ces allégations, a insisté la représentante du Nicaragua.
La représentante du Royaume-Uni a répondu au rapport de M. Cumaraswamy en remerciant le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats de continuer à s'intéresser à l'Irlande du Nord. La représentante britannique a indiqué qu'afin de gagner du temps, elle transmettait l'intégralité de sa déclaration au Secrétariat de la Commission.
Le représentant d'Israël a insisté sur le fait que le Liban doit respecter sa partie des obligations et a observé que le Hezbollah opérait librement dans ce pays, comme en témoigne le récent enlèvement par ce groupe d'un soldat israélien. Il a rapporté des actes terroristes commis par ce groupe terroriste agissant depuis le Liban. Il a détaillé une attaque du Hezbollah menée le 4 avril contre des fonctionnaires de la FINUL. Il a attiré l'attention sur les violations flagrantes de la ligne bleue. Le représentant a demandé au Liban de contrôler les groupes qui agissent au sud de son territoire et a déclaré qu'en attendant, Israël se défendrait.
La représentante de la Jamaïque a répondu à la présentation du rapport sur les exécutions sommaires en expliquant que son pays s'employait à prendre les mesures nécessaires en vue de respecter ses engagements internationaux. Elle a toutefois demandé au Groupe de travail de maintenir une réelle équité dans ses travaux. Elle a regretté de ne pas disposer des informations nécessaires pour répondre à certaines allégations du rapport et s'est étonnée de ces allégations contre un État qui a toujours fait preuve de bonne volonté dans ses relations avec les mécanismes internationaux relatifs aux droits de l'homme. S'agissant de ces 16 prisonniers qui auraient, il y a cinq ans, été agressés du fait de leur appartenance à une minorité sexuelle, elle a rappelé qu'aucune preuve n'avait été apportée à ce dossier.
Le représentant de la Zambie a estimé que les craintes exprimées par l'Union européenne sur la situation de la justice dans son pays relèvent du préjugé plus que de la réalité. Ces condamnations montrent que, bien souvent, les enjeux africains ne sont pas compris en Europe. Il est temps, a estimé le représentant, que l'Europe se préoccupe du problème de la pauvreté, qui est le véritable frein à l'application des droits de l'homme. Quant aux recommandations sur la torture, le représentant a rappelé que son gouvernement a déjà pris des mesures ce sujet.



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