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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ AUDITIONNE DES ONG AU SUJET DE PAYS DONT LES RAPPORTS DOIVENT ÊTRE EXAMINÉS DURANT CETTE SESSION

04 Mai 2009



Comité des droits économiques,
sociaux et culturels

4 mai 2009


Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a procédé, cet après-midi, à l'audition d'organisations non gouvernementales concernant la situation des droits économiques, sociaux et culturels dans plusieurs pays dont les rapports seront examinés au cours de la présente session.

S'agissant du Brésil, les intervenants se sont inquiétés des conséquences de l’expansion de l’agriculture transgénique sur les droits économiques, sociaux et culturels et notamment le droit à l’alimentation. Ont aussi été abordés les problèmes liés aux inégalités et aux taux de mortalité infantile et maternelle, entre autres.

En ce qui concerne l’Australie, l’attention a particulièrement été attirée sur les droits des peuples aborigènes dont, a-t-il été souligné, l’égalité n’est toujours pas garantie. L’absence d’une protection juridique globale des droits de l'homme a également été déplorée.

Pour ce qui est du Cambodge, ont été dénoncées les conséquences des pratiques de vente de terres à des intérêts étrangers ainsi que les expulsions forcées pratiquées dans le pays.

Demain matin, à 10 heures, le Comité entamera l'examen du quatrième rapport périodique présenté par l’Australie (E/C.12/AUS/4).



Aperçu des déclarations des organisations non gouvernementales


Dans une déclaration de portée générale, un représentant de International Disability Alliance a abordé la question de l’observation générale concernant le principe de non-discrimination, sur laquelle le Comité doit se pencher durant la présente session, en rappelant que la Convention relative aux droits des personnes handicapées est récemment entrée en vigueur; aussi, a-t-il souligné, le Comité devra-t-il veiller à ce que cette observation générale soit alignée sur ce nouvel instrument. En particulier, a insisté le représentant, le concept de logement décent et l'interdiction de refuser un tel logement sur la base d’une discrimination relative au handicap devront être soulignés. Il a en outre suggéré au Comité de nommer parmi ses membres un expert chargé de suivre le travail du Comité des droits des personnes handicapées.

Un membre du Comité est alors intervenu pour faire observer que l'intervenant précédent s'est basé sur un projet de texte d'observation générale élaboré par le Comité en juillet dernier qui, depuis, a en fait été modifié. En effet, depuis juillet, un comité de rédaction s’est penché sur le projet de texte de l'observation générale susmentionnée et les points soulevés par cet intervenant ont en fait dûment été pris en compte, a précisé l’expert. Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels accorde une grande importance à la coopération avec les organes de traités nouvellement établis, a-t-il ajouté.




S'agissant du Brésil

Une représentante du Center for Reproductive Rights a souhaité attirer l’attention sur la santé des femmes au Brésil - pays qui comptabilise à lui seul environ un tiers des décès maternels d'Amérique latine. Le taux de mortalité infantile, qui n'a pas diminué, est beaucoup plus élevé au Brésil que dans d’autres pays, a-t-elle ajouté. Elle a fait observer que le taux de mortalité maternelle au Brésil est marqué par des disparités selon que l'on considère l’origine, notamment raciale, des personnes. Elle a regretté l'insuffisance de l'action gouvernementale visant à réduire cette mortalité. Elle a également dénoncé les disparités en matière d’accès aux soins de santé.

Un représentant de l'O’Neill Institute for National and Global Health Law a regretté que le Gouvernement brésilien ne respecte pas pleinement ses obligations pour ce qui est d’assurer le droit à la santé dans le contexte de la lutte contre le tabac. Chaque jour, sept décès sont imputables à la fumée passive au Brésil, a-t-il souligné. Il a rappelé qu'en vertu de la Convention-cadre de l'OMS pour la lutte antitabac, signée par le Brésil, les lieux publics doivent être sans tabac; or, tel n'est pas le cas au Brésil. Aussi, le représentant a-t-il demandé au Comité de recommander au Brésil de promulguer une loi prévoyant que tous les lieux publics clos soient non fumeurs.

Une représentante de l’Organisation mondiale contre la torture s’est inquiétée de la tendance à considérer des personnes comme criminelles ou potentiellement criminelles en raison de leur origine sociale. Elle a fait remarquer qu'au Brésil, la violence l’emporte sur le dialogue. Les communautés les plus pauvres sont exposées à la violence dès lors qu’elles se trouvent entre les mains de la police ou des gardiens de prison, a-t-elle expliqué, déplorant que ces pratiques soient tolérées depuis longtemps au nom de la sécurité. La représentante a par ailleurs dénoncé la violence contre les femmes au Brésil, expliquant que dans certaines régions, les femmes sont considérées comme étant la propriété des hommes. Par ailleurs, la police et le système judiciaire ne sont pas préparés pour faire face de manière adéquate à des cas de crimes contre des enfants ou impliquant des enfants.

Un représentant de Via Campesina Brésil a attiré l’attention sur les conséquences de la tendance mondiale à adopter une agriculture transgénique. Il a expliqué qu’au Brésil, les problèmes de santé ont considérablement augmenté et les terres et les rivières ont été polluées du fait de ce type de pratiques agricoles. Il s’agit d’une violation majeure des droits économiques, sociaux et culturels, a insisté le représentant. Il a rappelé que le Brésil est le plus grand producteur de soja du monde et que la majorité de sa production est composée de soja génétiquement modifié. L’introduction du soja transgénique a eu des conséquences désastreuses pour les communautés pauvres. Déboisement, recours aux herbicides, monopole des terres arables, esclavage et pauvreté sont des conséquences de la monoculture du soja au Brésil, a-t-il souligné, arguant que cette monoculture constitue une menace pour la santé et la sécurité alimentaire de la population brésilienne.

Un représentant du Movimento nacional de direitos humanos a rappelé que les observations finales formulées par le Comité en 2003 s'agissant du Brésil avaient mis l’accent sur les facteurs et les difficultés qui entravent la mise en œuvre du Pacte et, parmi ceux-ci, sur les inégalités et l’injustice sociale. Or, de ce point de vue, la situation ne s’est pas améliorée, a-t-il affirmé. Il a déploré que le Gouvernement ait accordé la priorité au grand capital et que tout grand projet soit associé à l’idée de modernité et de progrès et non pas à la justice sociale. À titre d’exemple, il a indiqué que les ressources allouées à l'amortissement de la dette publique ont été 126 fois supérieures à celles consacrées au secteur de la santé et 262 fois supérieures à celles destinées à l’éducation. Ce type de politique pénalise les plus pauvres et bénéficie aux plus riches, approfondissant, ainsi, les inégalités, a-t-il souligné.

Une représentante du Projecto de monitoramento dos direitos humanos no Brasil a fait observer qu’au Brésil les inégalités sont davantage ressenties par les Noirs, les autochtones, les gitans, les étrangers, les femmes et les homosexuels. En 2008, 31% de la population du Brésil était considérée comme pauvre ; 20% de la population blanche se trouve sous le seuil de pauvreté, ce chiffre s’élevant à 41,7% pour la population noire. La représentante a également fait remarquer que les peuples autochtones au Brésil sont soumis à des persécutions, menaces, violences et assassinats.

Une représentante de Plateforme d’Esca a fait remarquer qu’au Brésil, il y a un grand fossé entre les normes et les politiques publiques mises en œuvre pour les réaliser. L’Etat n'ignore pas les normes, mais elles ne sont pas appliquées de manière efficace, a-t-elle expliqué. Elle a regretté que les dernières recommandations du Comité à l'attention du Brésil n’aient pas été appliquées, ni même diffusées. Le Gouvernement, a-t-elle expliqué, ne s’est pas efforcé de mettre en œuvre un système national des droits de l'homme et n’a pas su relever les défis institutionnels existants pour garantir les droits de l'homme. La représentante a toutefois reconnu qu’en effort réel est fait dans certains secteurs; mais il demeure limité, a-t-elle déclaré.

Un représentant de Parceiros Misereor do Brasil s'est penché sur la question de la participation à la vie politique pour regretter que des instruments démocratiques comme le référendum ne soient pas utilisés au Brésil. Il existe une répression historique et une criminalisation croissante des organisations et de leurs dirigeants qui s’opposent à l’État et au grand capital, a-t-il affirmé, dénonçant les campagnes de diffamation, les pratiques de persécution et les procès intentés contre ces dirigeants. S'inquiétant de la situation des défenseurs des droits de l'homme, il a souligné qu'il est très difficile de faire face à cette vague de criminalisation.

Une experte a souhaité savoir comment le Comité pourrait évaluer le mouvement national des droits de l'homme au Brésil, ainsi que les effets et l’efficacité des programmes mis en œuvre pour lutter contre la pauvreté dans ce pays. Un autre membre du Comité s’est dit surpris de voir autant de commentaires négatifs sur un pays qui a, entre autres mesures, lancé des programmes comme le programme « Faim zéro ». Peut-on en conclure que ces programmes ont été des échecs, s’est-il demandé ? Un autre expert a reconnu que le Gouvernement brésilien a axé son programme politique sur la lutte contre la pauvreté, mais a souligné que des problèmes économiques persistent. Il s’est par ailleurs demandé comment expliquer la négligence dont fait preuve le Gouvernement brésilien à l’égard de la lutte contre le tabac.

Reprenant la parole, certains représentants d'organisations non gouvernementales ont souligné que les programmes du Gouvernement ne peuvent pas être considérés comme des échecs, mais qu'il n'en demeure pas moins que leurs effets restent limités. L’hypothèse a été émise que ces programmes, notamment le programme de réforme agraire, n’ont peut-être pas été suffisamment ambitieux. Les inégalités persistent mais ne s’aggravent pas, a-t-il été affirmé. En ce qui concerne le droit à l’environnement, les principes de précaution, de durabilité et de « pollueur-payeur » ne sont pas respectés, a-t-il également été souligné.


S'agissant de l'Australie

Un représentant du Human Rights Law Resource Center a souligné que le nouveau Gouvernement australien est davantage axé sur les droits de l'homme. Il a toutefois déploré qu’il n’y ait, dans ce pays, aucune protection juridique globale pour les droits de l'homme; en l'état actuel, en effet, ces droits ne sont pas vraiment justiciables et les possibilités de recours en cas de violations sont quasi-inexistantes. Le représentant a en outre regretté l’absence de loi assurant l’égalité de protection des droits économiques, sociaux et culturels pour les peuples aborigènes. Entre autres sujets de préoccupation, cet intervenant a notamment cité la protection des droits des femmes et les restrictions du droit de grève et d’association.

Une représentante de la National Association of Community Legal Centers a indiqué qu'elle était présente lors de l’examen du précédent rapport de l'Australie devant ce Comité et qu'elle revient aujourd'hui pour attirer l’attention sur les mêmes problèmes, ce qui, a-t-elle souligné, témoigne du manque de progrès réalisés par l’Australie. Elle a notamment déploré les lacunes en matière d’accès à la sécurité sociale. Soulignant par ailleurs que la pauvreté entrave le droit à des conditions de vie décente, elle a rappelé qu'en 2008, 12% de la population australienne vivaient dans la pauvreté. S'agissant des questions relatives au droit à l’éducation, la représentante a déploré la disparition des langues aborigènes et le manque de financement dont pâtit l'enseignement primaire.

Un représentant de la Foundation for Aboriginal and Islander Research Action a déploré que le rapport périodique de l’Australie ait été élaboré sans consulter les peuples aborigènes ni les insulaires du détroit de Torrès. Ce rapport n’aborde pas de manière satisfaisante la situation des Aborigènes et ne témoigne d'aucun progrès en matière de droits économiques, sociaux et culturels depuis que l’Australie est devenue partie au Pacte, a-t-il poursuivi. Le représentant a revendiqué le droit à l’égalité des peuples autochtones, leur droit à l’autodétermination et leur droit à un contrôle de l’éducation de leurs enfants. Il s’est demandé ce qui est fait pour remédier à l’oppression et à la discrimination à l’encontre des peuples autochtones.


S'agissant du Cambodge

Une représentante de 3D a attiré l’attention sur un accord actuellement négocié entre le Gouvernement du Cambodge et celui du Koweït portant sur un bail de 70 à 90 ans devant être octroyé sur des terres de la région de Kampong Thom. Ces terres, a-t-elle expliqué, seront utilisées pour cultiver du riz qui sera, ensuite, exporté au Koweït. Aussi, la représentante s'est-elle inquiétée de cette tendance de certains gouvernements à acquérir des terres dans d’autres pays afin d'assurer leur ressources alimentaires futures. Elle a attiré l’attention sur les conséquences négatives de telles pratiques pour les droits économiques, sociaux et culturels des populations locales, en particulier dans le cas du Cambodge où 4,6 millions de personnes -soit 35% de la population- vivent sous le seuil de pauvreté et souffrent d’insécurité alimentaire. La représentante a souhaité que le Comité s’enquière des mesures prises par le Gouvernement cambodgien pour veiller à ce que ce type d’accord soit compatible avec la réalisation du droit à l’alimentation. Il est en outre important de veiller à ce que les personnes qui risquent d’être affectées par de tels accords soient consultées.

Un représentant de Bridges Across Borders Southeast Asia a expliqué que l’économie de marché a fait irruption au Cambodge et qu’en l’absence d’état de droit et d’un système juridique adéquat, le pays a en fait attiré des promoteurs peu scrupuleux. Le Cambodge est aujourd'hui un «pays à vendre», a insisté le représentant. L'élite s’est enrichie en vendant les terres, les minerais et les ressources, a-t-il déploré. Il a précisé qu’un tiers des terres arables a été accordé à des personnes ou entités privés. Les communautés locales ne sont pas consultées et l’impact environnemental et social de telles mesures n’est pas évalué, a-t-il ajouté. Beaucoup de militants et d’opposants à ces pratiques sont harcelés et intimidés et les communautés autochtones, quant à elle, sont réduites au silence et doivent quitter leurs terres, a-t-il expliqué.

Une représentante du Center for Housing Rights and Evictions a souligné que le Gouvernement du Cambodge a échoué pour ce qui est de son obligation d'assurer le droit à un logement décent. Les expulsions forcées constituent un grave problème pour les Cambodgiens, a-t-elle expliqué, déplorant que les autorités nient les faits à ce sujet. Non seulement le Gouvernement échoue dans son obligation de protection en la matière, mais, de surcroît, il est aussi acteur de ces spoliations, a-t-elle insisté.
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