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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DU ROYAUME-UNI

08 Juillet 2008



Comité des droits de l'homme
8 juillet 2008



Le Comité des droits de l'homme a procédé, hier après-midi et aujourd'hui, à l'examen du sixième rapport périodique du Royaume-Uni sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

À l'issue de l'examen, le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, a félicité la délégation britannique pour sa clarté et son esprit de dialogue. Il a, toutefois, évoqué les préoccupations des experts s'agissant, notamment, de la place du Pacte dans l'ordre juridique interne, des nombreuses réserves au Pacte émises par le pays, et du traitement réservé aux immigrants. Les propos de Lord Philips laissant entendre que l'État partie pourrait envisager l'application de la charia au Royaume-Uni ont été commentés par les experts qui ont critiqué ce projet et mis en évidence l'incohérence et l'incompatibilité que constituerait une telle décision avec de nombreuses dispositions du Pacte.
Parmi les questions posées, des experts se sont interrogés sur les arrangements portant sur les expulsions assorties d'assurances diplomatiques. Le délai de détention préventive de 28 jours dans le cadre de la lutte antiterroriste a également suscité des interrogations. Le Comité présentera ses observations finales concernant le rapport du Royaume-Uni au terme de la session.

Mme Rowena Collins-Rice, Directrice générale à la démocratie et au droit constitutionnel du Ministère britannique de la justice et chef de la délégation, a rappelé que le début de l'examen du rapport britannique, le 7 juillet, marquait le troisième anniversaire des attentats de Londres; elle a déclaré que l'un des principaux défis auquel se heurtent les gouvernements aujourd'hui est celui de parvenir à conjuguer la sécurité publique et le respect de la liberté des individus conformément au Pacte relatif aux droits civils et politiques.

La délégation du Royaume-Uni était également composée de collaborateurs du Ministère de la justice, au Ministère de l'intérieur, du Ministère de l'Irlande du Nord et du Ministère des affaires étrangères et du commonwealth. Les membres de la délégation ont apporté des précisions au Comité s'agissant, notamment, de l'incorporation des dispositions du Pacte dans la législation sur les mesures prises pour lutter contre la discrimination raciale et sur les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme.


À sa prochaine séance publique, demain après-midi à 15 heures, le Comité entamera l'examen du rapport de la France (CCPR/C/FRA/4).




Présentation du rapport

MME ROWENA COLLINS-RICE, Directrice générale à la démocratie et au droit constitutionnel du Ministère de la justice du Royaume-Uni, a informé le Comité que la rédaction du rapport avait donné lieu à des consultations fructueuses avec la société civile. La liberté consacrée par le droit est à la base de la Constitution britannique, a affirmé la représentante du Royaume-Uni. Elle a assuré que le Gouvernement prend très au sérieux ses obligations en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Rappelant que le 7 juillet marquait le troisième anniversaire des attentats de Londres, elle a déclaré que l'un des principaux défis auquel se heurtent les gouvernements aujourd'hui est celui de parvenir à conjuguer la sécurité publique et le respect de la liberté des individus. Le Gouvernement demeure fermement engagé à promouvoir et protéger les droits de l'homme dans le pays et à l'étranger, a insisté la représentante.

Mme Collins-Rice a reconnu qu'il est apparu que la loi sur les droits de l'homme de 1998 était trop largement méconnue parmi les fonctionnaires et a fait valoir qu'un programme de formation et de sensibilisation a été mis en place, notamment par la distribution, à 100 000 exemplaires, d'un manuel sur les droits de l'homme pour aider les fonctionnaires dans l'accomplissement de leurs tâches. Le Gouvernement a en outre préparé un nouveau matériel didactique à l'intention des jeunes, convaincu de l'utilité de ce type de mesure pour renforcer la culture des droits de l'homme. En octobre 2007, une commission permanente pour l'égalité et les droits de l'homme a été créée, qui assume des responsabilités dans les domaines des droits de l'homme, de l'égalité et de la lutte contre les discriminations. La création d'une commission similaire est en cours en Écosse.

La Directrice générale a déploré que les médias aient jeté, depuis son adoption, un éclairage négatif sur la loi de 1998 sur les droits de l'homme. Des mesures ont été prises avec l'adoption en 2006 d'une nouvelle loi pour faire diminuer la diffusion d'informations trompeuses ou incorrectes dans la presse et d'autres secteurs sur les questions liées aux droits de l'homme.

Le Gouvernement a par ailleurs mis en place une Commission permanente sur l'égalité et les droits de l'homme, qui est chargée de faire appliquer la législation en matière de droits de l'homme, promouvoir les droits de l'homme et l'égalité pour tous et encourager le respect au sein de la communauté.

Le sixième rapport périodique du Royaume-Uni (CCPR/C/GBR/6) rappelle que le contexte international et national dans lequel le Royaume-Uni défend les droits de l'homme a beaucoup changé à la suite de l'accroissement du nombre d'attentats terroristes dans le monde, et que la réaction du Gouvernement à l'égard de l'aggravation de cette menace terroriste est fondée sur le principe que les actes de terrorisme sont des crimes qui, en tant que tels, doivent être sévèrement punis par la loi. Le Gouvernement a présenté le cadre dans lequel a été adoptée la loi de 2001 sur l'antiterrorisme, la criminalité et la sécurité, ainsi que l'authentification et la détention de personnes soupçonnées de terrorisme en vertu de la quatrième partie de cette loi dans son rapport intérimaire au Comité des droits de l'homme en novembre 2002. Ces pouvoirs énoncés dans la quatrième partie ont été annulés depuis lors, et un nouveau système d'ordonnances de contrôle a été adopté dans la loi de 2005 sur la prévention du terrorisme. S'agissant de la question des «restitutions» de personnes soupçonnées de terrorisme, le rapport affirme que le Gouvernement n'a pas approuvé et n'approuvera pas une politique consistant à faciliter le transfert d'individus par le biais du Royaume-Uni (y compris les territoires d'outre-mer) en des lieux où l'on a de bonnes raisons de penser qu'ils courraient un risque réel d'être soumis à la torture.

Se référant aux questions des experts du Comité des droits de l'homme sur les incidents à caractère raciste dans les prisons, le rapport indique que le système de requêtes ou de dépôts de plainte ou le formulaire de compte-rendu des incidents racistes ont été beaucoup remaniés à la suite de consultations et de l'expérimentation de nouvelles procédures pendant la période 1999-2000. Le rapport apporte, par ailleurs, des informations sur les mesures prises pour lutter contre les discriminations et le racisme au niveau du service de police et de l'administration pénitentiaire. Le rapport fait également état des mesures mises en place pour favoriser l'intégration de groupes spécifiques sur le marché du travail, pour permettre un accès égal aux soins et pour assurer de meilleures perspectives d'avenir pour tous dans les services publics.

Le rapport relève, en outre, que le Ministre chargé de l'Irlande du Nord a annoncé, le 1er août 2005, un programme de mesures de normalisation de la sécurité qui devait durer deux ans, si les conditions sont favorables. La législation relative au contre-terrorisme spécifique à l'Irlande du Nord (qui inclut les dispositions régissant les tribunaux de type Diplock) doit être abrogée d'ici à la fin de l'exécution du programme de normalisation. Le rapport apporte encore des réponses aux observations finales des experts, s'agissant des Dépendances de la Couronne. À cet égard, il est notamment relevé que la peine de mort pour trahison et piraterie a été abolie dans les îles Turques et Caïques. Les négociations relatives à une révision de la constitution pour les îles Turques et Caïques se sont achevées en octobre 2005. Le projet de texte révisé a fait l'objet de consultations publiques au début de 2006 et comporte des amendements au chapitre relatif aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales destinés à garantir qu'il reflète plus fidèlement les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Renseignements complémentaires

La délégation a apporté des renseignements complémentaires en réponse aux questions qui lui avaient été adressées au préalable par le Comité (CCPR/C/GBR/Q/6).

Se référant à la question portant sur l'incorporation des dispositions du Pacte dans la législation, la délégation a déclaré que le Gouvernement estimait que les lois du Royaume-Uni couvraient les divers aspects des dispositions du Pacte et qu'une incorporation in extenso n'était pas nécessaire. S'agissant des législations des territoires d'outre-mer, elle a souligné que ces territoires avaient leur propre législation qui, pour être approuvée, devait être conforme aux obligations internationales du Royaume-Uni. Elle a indiqué, par ailleurs, que le Gouvernement examinait la pertinence de la ratification du premier Protocole facultatif au Pacte. La délégation a également fait état de la levée d'un certain nombre de réserves au Pacte. Le Gouvernement estime toutefois que d'autres, comme la réserve générale sur le maintien de la discipline militaire et pénitentiaire, doivent être maintenues. La délégation a par la suite rassuré le Comité sur le fait que le pays respecte tous ses engagements internationaux au même titre et que ses engagements en vertu du Pacte ne sont pas inférieurs à ceux qu'il a en vertu de la Convention européenne des droits de l'homme, à laquelle le Royaume-Uni est historiquement attaché du fait de son rôle dans la rédaction de ce document. Elle a par ailleurs assuré que le pays n'émettait des réserves que lorsqu'il l'estimait nécessaire.

S'agissant de la situation des droits de l'homme en Irlande du Nord, il a été rappelé que la Commission des droits de l'homme d'Irlande du Nord a été établie en 1999 et que des consultations publiques sont prévues pour réformer cet organe. Notant que la proportion de membres catholiques dans les services de police avait substantiellement augmenté, la délégation britannique a fait valoir qu'une palette de mécanismes avait été mise en place pour veiller au comportement des forces de police. En cas de plaintes, une enquête est menée par un mécanisme indépendant. Une stratégie contre la violence domestique a, par ailleurs, été mise en place; dans ce cadre, une formation spécialisée est dispensée aux policiers et une ligne téléphonique pour les victimes a été mise en service.

S'agissant des questions portant sur la représentation des femmes dans la vie publique, la délégation a fait état d'un nombre croissant de femmes occupant des postes de cadre dans tous les secteurs de la vie publique. Dans le domaine judiciaire, en 1999, seuls 24% de femmes occupaient un poste dans les tribunaux; en 2008, le pourcentage atteint 47,7%. En Écosse, un groupe de travail sur la diversité a été créé pour évaluer l'état de la question, a aussi indiqué la délégation.

Se référant aux observations émises par les experts s'agissant des mesures prises par le Royaume-Uni dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, la délégation a relevé que la pertinence des mesures édictées avait été confirmée par la Chambre des Lords. Reconnaissant l'inquiétude de certaines communautés, notamment au sein de la communauté musulmane, la délégation a fait état de la volonté du Gouvernement d'améliorer le partenariat avec cette communauté dans le cadre de la lutte antiterroriste.

La délégation s'est exprimée sur le Plan d'action relatif à l'application de l'égalité raciale dans les prisons, précisant que des cycles de formation du personnel ont été mis en place et qu'un contrôle externe est exercé pour garantir que des enquêtes sont effectivement menées en cas de plainte.

S'agissant de l'enquête menée en Irlande du Nord après la mort de Robert Hamill, Billy Wright et Rosemary Nelson, la délégation a indiqué que les départements concernés doivent présenter leur rapport en 2010, précisant que la sanction des coupables ne dépend pas d'une enquête publique puisqu'elle est décidée dans le cadre d'une procédure civile. Un travail est effectué avec les familles pour voir comment mener l'enquête tout en tenant compte de l'intérêt public, a-t-elle précisé.

En ce qui concerne l'utilisation par les forces armées en Irlande du Nord de projectiles à impact atténué, la délégation a indiqué que, conformément aux recommandations de la commission indépendante sur la police, des méthodes alternatives ont été envisagées. Elle a souligné que l'usage de ces armes était soumis à des directives très strictes.

Se référant à la question des experts portant sur la mort de Jean Charles de Menezes, abattu le 22 juillet 2005, la délégation a indiqué qu'une enquête a été menée qui a résulté en un non-lieu. Les 11 policiers concernés n'ont pas été reconnus coupables et aucune mesure disciplinaire n'a été prise. La délégation a par la suite précisé que la possibilité d'engager des poursuites à l'encontre des policiers impliqués dans la mort de M. de Menezes n'est pas écartée pour autant que de nouvelles preuves apparaissent dans cette affaire.

La délégation a par ailleurs fait valoir que la législation du Royaume-Uni condamnait la torture, ainsi que tout acte visant à obtenir des preuves par la contrainte.

Le recours à des assurances diplomatiques ne sauraient constituer une justification pour oublier nos obligations internationales, a affirmé la délégation, répondant à une question sur le recours à des mémorandums d'accords pour l'expulsion de suspects d'actes terroristes. Le Gouvernement britannique n'a nullement changé sa politique suite à la décision rendue récemment par la Commission spéciale chargée d'examiner les recours en matière d'immigration dans l'affaire DD and AS vs v. Secretary of State for the Home Department (SC/42 et 50/2005). Le Tribunal n'a pas estimé le principe d'assurances inacceptable, mais a considéré que ces assurances n'étaient pas suffisantes pour l'instant.

En ce qui concerne les personnes détenues dans des centres de détention britanniques à l'étranger, la délégation a affirmé que les troupes étaient formées pour respecter le droit interne qui interdit tout acte de torture ou abus et qui s'applique dans le cadre des activités des troupes, où que ce soit dans le monde. Elle a précisé qu'en cas de violations, des indemnisations aux victimes sont prévues par la loi.

S'agissant de la prolongation de la durée maximale de détention sans inculpation, dans le cas de personnes soupçonnées de terrorisme, prévue par la loi de 2006 sur le terrorisme, la délégation a estimé que la limite de 28 jours n'est pas incompatible avec les dispositions du Pacte, précisant que la détention n'est exceptionnellement prolongée que s'il y a véritablement des preuves. S'agissant des ordonnances de contrôle, la délégation a indiqué que lorsque la poursuite et l'arrestation ne sont pas possibles, des ordonnances de contrôle qui concernent un groupe restreint et ciblé de personnes peuvent être adoptées; seules 37 personnes ont fait l'objet de ces ordonnances depuis l'introduction de la loi et ces ordonnances ne sont pas mises en œuvre de manière arbitraire, a-t-elle insisté. En octobre 2007, la Chambre des Lords a confirmé le régime des ordonnances de contrôle. L'idée d'un couvre-feu a toutefois été rejetée par la Chambre des Lords. La délégation a par la suite précisé que les ordonnances de contrôle ne sont pas des dispositions de droit et s'appliquent autant aux britanniques qu'aux étrangers. Il ne s'agit pas de mesures pénales mais de mesures de droit civil. Il convient de noter que l'ordonnance doit être proportionnelle à la menace que constitue l'individu, a souligné la délégation. Dans le cadre des ordonnances de contrôle, l'interpellation et la fouille ne sont pratiquées que lorsqu'il y a suspicion de terrorisme.

La délégation a affirmé que la détention des demandeurs d'asile constituait une mesure essentielle pour contrôler l'immigration illégale. Bien qu'en droit britannique il n'y ait pas de limite, elle est maintenue au minimum et des mesures sont prises pour assurer que la détention soit décidée de manière appropriée et justifiée. La délégation a précisé que dans tous les cas, les détenus sont dûment informés de leurs droits.

S'agissant des statistiques du Ministère de l'intérieur sur les cas de mauvais traitements infligés à des personnes privées de liberté, la délégation a indiqué que les chiffres, en 2007, font état de 187 inculpées sur plus de 48 000 collaborateurs employés dans les services pénitenciers. Ces chiffres incluent tous types d'actes répréhensibles, de l'abus de congé maladie à l'usage de la force à l'encontre de détenus, a précisé la délégation, soulignant encore que des mesures ont également été prises pour lutter contre la corruption dans les prisons.

Répondant à une question des experts sur la protection contre les expulsions arbitraires et en particulier sur la situation prévalant aux Îles Caïmanes, la délégation a relevé que l'expulsion relève de la politique d'immigration de ce territoire et qu'elle est soumise à une procédure qui prévoit un droit de recours.

S'agissant du droit à un procès équitable, la délégation a indiqué que la loi de 2000 sur le terrorisme exige que le détenu ait accès à un avocat dès le moment qu'il le demande. Le code offre exceptionnellement à la police le droit de retarder l'accès à un avocat, mais uniquement s'il y a des raisons de penser que l'accès à un avocat pourrait interférer dans la collecte d'informations.

Répondant au Comité qui a exprimé sa préoccupation que les ordonnances pour comportements antisociaux ne conduisent à arrêter des enfants, la délégation a souligné qu'une étude a conclu que le recours à ces ordonnances n'amenait pas à incarcérer de nouveaux jeunes; ceux qui ont été arrêtés étaient des récidivistes. La délégation a précisé que le nombre d'ordonnances avait considérablement diminué au cours de ces dernières années et que des mesures alternatives étaient de plus en plus fréquemment considérées. Répondant à des questions complémentaires, la délégation a expliqué que ce type d'ordonnances n'est pas fait pour pointer du doigt les individus, mais pour protéger les communautés et susciter une prise de conscience collective. L'ordonnance implique des mesures de soutien positives pour aider l'individu à modifier son comportement.

Concernant les procès sans jurés qui se déroulent en Irlande du Nord, le Gouvernement regrette que les groupes paramilitaires continuent à contrôler certaines communautés. Des procès sans jurés demeurent parfois nécessaires pour pallier la pression exercée par ces groupes sur les jurés a expliqué la délégation. Ce n'est que dans des circonstances très particulières que ces dispositions sont prises et elles seront réévaluées pour possiblement être abrogées en juillet 2009. Cette procédure est très différente des tribunaux Diplock, a souligné la délégation. Répondant à des questions complémentaires, la délégation a expliqué qu'en vertu de la loi de 2007 sur la justice et la sécurité, la procédure relative aux procès sans jurés est décidée uniquement si cela est nécessaire pour assurer l'administration de la justice. Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, 25 certificats de procès sans jurés ont été rendus par le directeur des poursuites pénales.

Abordant des questions relatives à la liberté religieuse, la délégation a indiqué que l'infraction de blasphème avait été abolie du fait qu'elle était considérée comme obsolète. Le Gouvernement a consulté l'Église anglicane et d'autres communautés religieuses avant de prendre cette décision. L'introduction d'un nouveau crime d'incitation à la haine religieuse, en 2006, garantit une protection à tous les groupes religieux.

S'agissant des allégations d'augmentation de l'islamophobie, la délégation a assuré qu'elle était déterminée à lutter contre toutes les formes de racisme et de discrimination religieuse. Elle a noté que, d'après des données recueillies récemment, 87% de personnes d'origine pakistanaise estiment qu'ils appartiennent vraiment à leur communauté locale. Le Gouvernement, a ajouté la délégation, est déterminé à travailler avec les diverses communautés pour créer une société cohérente et tolérante.

Répondant à des questions complémentaires sur la lutte contre le racisme et l'intolérance religieuse, la délégation a attiré l'attention sur les mesures positives prises dans ce domaine, évoquant notamment la stratégie transversale du Gouvernement pour parvenir à l'égalité entre les races. La stratégie bénéficie d'un budget de 18 millions de livres qui sert, notamment, au financement de programmes d'éducation à la diversité dans les écoles. Le Forum sécurité musulman a lancé une campagne pour dénoncer les crimes raciaux et le Muslim Heritage Center prévoit de rassembler des personnes de différentes religions pour sensibiliser les jeunes aux crimes haineux. Un accent particulier sera mis sur l'islamophobie. La délégation a indiqué qu'elle fournirait plus de détails par écrit.

Répondant aux vives craintes, exprimées par certains experts, de ce que la charia puisse être appliquée au Royaume-Uni, la délégation a estimé que ces préoccupations ont pour point de départ des propos tenus par Lord Philips et l'archevêque de Canterbury, qui ont fait l'objet d'une couverture médiatique exagérée. La politique du Gouvernement, a assuré la délégation, ne vise pas à importer la charia aux dépens de la législation britannique et il n'est pas question de faire quelque exception que ce soit à l'application des dispositions relevant des droits de la personne.

En relation avec les questions des experts sur la liberté de pensée et d'expression, la délégation a indiqué que la loi sur le terrorisme 2006 exprime la conviction du Royaume-Uni que ceux qui incitent aux actes terrorisme doivent être poursuivis. Cette loi n'a toutefois, du point de vue du Royaume-Uni, pas d'incidence sur la liberté de pensée et d'expression, ni sur la liberté d'association, si elle s'exerce de manière raisonnable. La délégation a indiqué, en réponse à des questions complémentaires, qu'elle pensait que deux arrestations avaient eu lieu pour délit d'incitation d'actes terroristes. En théorie, ces arrestations pourraient conduire à une période de détention mais, en pratique, cela n'a pas été le cas.

Le Gouvernement ne place pas à la légère des enfants immigrés en détention, a assuré la délégation, indiquant qu'il s'agit d'une mesure qui peut être prise dans certains cas, dans le cadre de l'application de la politique de contrôle de l'immigration. Des mesures alternatives sont toutefois habituellement recherchées. La délégation a précisé que le concept de comportements antisociaux, s'il ne faisait pas l'objet d'une définition écrite, était bien compris dans la société britannique. Informant le Comité que le Gouvernement est en train de revoir ses réserves à la Convention internationale pour les droits de l'enfant, la délégation a par la suite indiqué que l'intérêt supérieur de l'enfant est bien pris en compte dans le cadre des décisions de renvoi des migrants illégaux et que les familles ne sont pas gardées en détention plus de 7 jours.

Observations et questions des membres du Comité

Un membre du Comité a souhaité disposer de plus d'informations s'agissant des différences alléguées entre la situation des droits de l'homme en Irlande du Nord et au Royaume-Uni. En quoi la situation en Irlande du Nord est-elle spécifique? Se référant au régime de protections statutaires, il a demandé si la nature de ces protections pouvait être précisée. Le rapporteur a aussi souhaité avoir plus d'informations et des chiffres sur les crimes sectaires perpétrés en Irlande du Nord. Il a, par ailleurs, demandé pourquoi il a fallu autant de temps pour initier les enquêtes sur la mort de Hamill, Wright, Nelson et Finucane.

S'agissant de l'utilisation de projectiles à impact atténué, il a noté que le rapport ne fait aucune mention des tasers. Il a mentionné les allégations d'une organisation non gouvernementale qui a fait état de 14 cas de blessures traités dans un hôpital de Belfast suite à l'emploi de projectiles à impact atténué – ce qui ne correspond pas aux affirmations de la délégation.

Évoquant la mort de M. de Menezes, ce jeune brésilien soupçonné par erreur d'acte terroriste et tué par balles, il s'est étonné de la sanction prise, à savoir une amende infligée au titre de la loi sur la santé et sur la sécurité. Il a souhaité savoir si quelque chose avait changé dans la sensibilisation des policiers suite à cette affaire tragique.

Face au problème de la surpopulation pénitentiaire, l'expert a souhaité connaître l'état des progrès réalisés pour trouver des alternatives à la détention. Des mesures ont-elles été prises pour faire baisser le taux de suicides et d'automutilations, a-t-il également voulu savoir?

Un autre membre du Comité a dit son impression que le Pacte bénéficiait, au Royaume-Uni, d'une place secondaire par rapport à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il a également relevé que la législation britannique comporte des lacunes s'agissant de certains aspects touchant aux discriminations. Il a, par ailleurs, souhaité savoir si l'opération de vérification des législations des territoires d'outre-mer se faisait en regard des dispositions du Pacte ou seulement de la Convention européenne.

Quelle est la situation actuelle des anciens habitants des îles Chagos, a encore souhaité savoir l'expert, et quelles solutions ont été trouvées à leur problème? Quels sont, aujourd'hui, les fondements juridiques à l'occupation de ce territoire de l'Océan indien?

Relevant que la recherche médicale est menée de manière très libre au Royaume-Uni et souvent destinée à un usage commercial, cet expert a mis en garde le Royaume-Uni contre le risque de dérapage des sciences biomédicales et les possibles répercussions sur les droits de l'homme. Aujourd'hui nous pouvons agir, il n'est pas sûr qu'on puisse le faire demain.

L'expert a par ailleurs fait état d'allégations sur le renvoi dans son pays d'un ressortissant algérien détenu sans jugement pendant deux ans et apparemment torturé au cours de sa détention.

Une autre experte s'est interrogée sur la stratégie générale du Royaume-Uni s'agissant des réserves à différents articles et s'est demandée quelle était la justification de ces réserves portant, notamment sur les articles 20, 21 et 23. Elle a aussi interrogé le Royaume-Uni sur la représentativité des femmes dans la magistrature et notamment des femmes noires. Qu'en est-il de la situation des ordonnances de contrôle dans le domaine statutaire, a-t-elle encore souhaité savoir; sur quels critères se fondent ces ordonnances, a-t-elle demandé, soulignant que le texte est vague et semble conférer un pouvoir discrétionnaire très large aux fonctionnaires et aux tribunaux.

Comment l'État partie justifie-t-il le fait qu'il n'est pas nécessaire d'avoir des soupçons raisonnables pour exercer les pouvoirs de contrôle et de fouille? Qu'en est-il des éventuelles plaintes qui seraient présentées, a demandé un autre membre du Comité qui a également souhaité savoir quelles sont les mesures effectives prises par le Royaume-Uni pour mettre en œuvre les recommandations du Comité s'agissant de la discrimination raciale.

En quoi consistent les arrangements portant sur les expulsions assorties d'assurances diplomatiques, a demandé un autre expert. S'il existe un risque de torture pour la personne visée, le Gouvernement reste-il tenu d'expulser cette personne en vertu d'accords bilatéraux?

Un autre membre du Comité a demandé si le Royaume-Uni envisage de revoir à la baisse l'actuel délai de détention préventive de 28 jours.

Dans quelle mesure la pratique de détention d'inculpés irlandais en Écosse est-elle conforme avec la nécessité pour les détenus d'avoir continuellement accès à leur avocat, a encore demandé l'expert. Il a aussi mentionné une information faisant état de la détention préventive pendant huit jours d'un enfant de quinze ans.

Évoquant la question des châtiments corporels, un membre du Comité a demandé si ces pratiques restent courantes dans les foyers. Les châtiments corporels sont-ils interdits dans les écoles et les prisons des territoires d'outre-mer?

Une autre experte a estimé qu'un État partie à la Convention contre la torture et au Pacte, comme l'est le Royaume-Uni, ne peut invoquer à l'égard de l'interdiction totale et absolue de la torture la notion «d'équilibre». Le Royaume-Uni compte-t-il renoncer à l'interdiction relative de la pratique de la torture?

Un membre du Comité a rappelé que le Parlement européen avait récemment adopté une directive générale sur la situation des immigrants en Europe, qui devrait conduire à un durcissement de la situation. Cette directive stipule, par exemple, qu'un immigré sans papier pouvait être détenu jusqu'à 18 mois et énonce des mesures empêchant les personnes expulsées de revenir dans le pays. Cette directive va à l'encontre des principes du droit international, a souligné l'expert, demandant à la délégation si le Royaume-Uni prévoit aussi d'adapter ses lois dans ce sens. Il a aussi exprimé son inquiétude à l'égard de la tendance qui s'exprime au Royaume-Uni d'un déni des droits fondamentaux des requérants d'asile.

Qu'est ce qui a été prévu dans le domaine médical et dans celui de la détention des immigrés, dans un contexte qui voit de plus en plus de sociétés privées s'occuper de ces personnes, a encore demandé une experte.

Un expert a exprimé le sentiment que l'État partie oubliait le principe d'intérêt supérieur de l'enfant lorsque les politiques de contrôle de l'immigration autorisaient de placer des enfants immigrés en détention pendant plus de 28 jours.

Le Gouvernement a-t-il pris des mesures positives pour éduquer le public dans le cadre de la lutte contre la haine raciale, a demandé un expert, et si oui, lesquelles? Les mesures de protection des informations sont-elles définitives?

Les experts ont regretté que le Royaume-Uni n'ait pas encore ratifié le Protocole facultatif au Pacte et ont fait part de leur étonnement à cet égard. Ils ont également engagé le Royaume-Uni a re-évaluer ses réserves.

Une experte a encore souhaité savoir, s'agissant de la détention avant inculpation, à quel moment un examen médical et un contact avec la famille étaient possibles.
Les personnes détenues à l'étranger peuvent-elles interjeter un recours, a encore demandé une experte?

Quelle est la législation en matière de recherche génétique, a encore souhaité savoir une experte, demandant au Royaume-Uni d'apporter une réponse plus précise à cette question.


Réponses de la délégation britannique aux questions complémentaires des experts

Se référant aux observations d'un expert relativement à la proportion très faible de femmes noires au niveau du pouvoir judiciaire, la délégation a indiqué que des mesures étaient prises afin d'augmenter cette proportion. Elle d'autre part fait valoir qu'une femme noire occupait une fonction dirigeante à Scotland Yard.

La délégation, répondant aux préoccupations s'agissant de possibles abus liés à la recherche biomédicale, a assuré le Comité que le Royaume-Uni considère les questions d'éthique et de bioéthique avec le plus grand sérieux.


Sur le sujet de l'expulsion assortie d'assurances, la délégation a dit que ce sont des organismes indépendants qui vérifient ces assurances. Elle a, par ailleurs, assuré que s'il apparaît qu'il y a un risque de torture, il ne peut y avoir d'expulsion.

Répondant à la question sur l'allégation de torture d'un ressortissant algérien, la délégation a affirmé que la torture n'est pas pratiquée au Royaume-Uni.

En réponse à des questions complémentaires, elle a par ailleurs démenti l'affirmation d'un expert notant que le délai de détention avant inculpation au Royaume-Uni était le plus long d'Europe. La période de détention avant inculpation est une période consacrée à l'enquête et n'est pas une détention préventive, a précisé la délégation.

La délégation a assuré le Comité que la question des crimes sectaires est prise très au sérieux en Irlande du Nord et que les plaintes concernant les crimes sectaires sont enregistrées séparément. En 2007, 1200 crimes sectaires ont été enregistrés, contre 1500 en 2006 a indiqué la délégation.

Abordant les questions des experts sur les enquêtes publiques, la délégation a évoqué la complexité des dossiers relatifs à la mort de Robert Hamill, Billy Wright, Rosemary Nelson et Patrick Finucane, qui explique la longueur de la procédure d'enquête.

S'agissant des questions portant sur la nationalité britannique en lien avec la réserve émise sur l'article 12 du Pacte, la délégation a dit que cette réserve reflète le fait que seuls les citoyens britanniques ont le droit de séjourner sur le territoire britannique de manière permanente. La délégation a, par ailleurs, indiqué qu'un projet de loi sur la citoyenneté prévoyait de généraliser les conditions d'obtention de la citoyenneté à tous les enfants nés d'une mère du Commonwealth.

Répondant aux observations et questions du Comité s'agissant de la détention des requérants d'asile et des immigrés, la délégation a indiqué que des principes généraux déterminent la durée de détention, fondés sur la nécessité de respecter une période raisonnable. La durée précise n'est pas précisée car elle dépend des circonstances. S'agissant des requérants d'asile déboutés et sans ressources, la délégation a expliqué qu'ils étaient pris en charge pour leurs besoins quotidiens, conformément à la législation en vigueur depuis 1999. Le Royaume-Uni a également déclaré suivre avec intérêt l'évolution des dispositions européennes relatives à l'immigration, tout en ne pouvant se prononcer encore sur l'impact de ces dispositions sur la législation interne.

La délégation a mis en question la corrélation évoquée par un expert entre la surpopulation carcérale et le taux de suicide et d'automutilation.

La délégation a indiqué que le Gouvernement britannique procédait bien à la vérification de l'application du Pacte dans les territoires d'outre-mer. Les châtiments corporels existent dans certains territoires d'outre-mer, a reconnu la délégation, notant que cela était le cas dans les Caraïbes, mais pas dans tous les territoires. S'agissant de la législation sur l'égalité dans les territoires d'outre-mer, la délégation a indiqué qu'il appartient aux Territoires de mettre en place ces mesures et que le Gouvernement britannique n'avait pas l'intention de les y contraindre.

Le Royaume-Uni estime que le Pacte ne peut avoir d'application hors de son territoire que dans des circonstances absolument exceptionnelles. C'est le cas dans les lieux de détentions, mais les circonstances particulières du contexte doivent être prises en considération. La délégation a souligné que le Comité international de la Croix-rouge a toujours accès aux centres de détention britanniques, où qu'ils se trouvent. Un corps d'inspection indépendant est, par ailleurs, en charge d'enquêter sur les opérations militaires à l'étranger.

S'agissant des remises de prisonniers à un pays tiers (les «restitutions», ou renditions en anglais), la délégation a affirmé que le cas qui concerne la base de Diego García dans l'Océan indien avait fait l'objet d'une enquête et constituait le seul cas connu et avéré. À la suite de cette enquête, le Secrétaire d'État du Royaume-Uni a déclaré qu'il n'y aurait plus de cas de ce genre, a souligné la délégation, rappelant que le Royaume-Uni condamne fermement toute pratique de remise de détenus assortie de torture.

La délégation a indiqué que les détenus sont informés sans délais de leurs droits et que toute personne détenue depuis plus de 4 jours a le droit de voir un médecin et de contacter sa famille.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires sur la mise en œuvre du Pacte au Royaume-Uni, le Président du Comité, M. RAFAEL RIVAS POSADA, a notamment souligné, parmi les questions récurrentes, la place constitutionnelle du Pacte et les nombreuses réserves émises par l'État partie et dont les motifs n'apparaissent pas toujours clairement, a-t-il dit.

Le Président a par ailleurs estimé que les raisons exposées pour maintenir un cadre assez large à la détention préventive ne se justifiaient pas et démontraient les effets pervers de la lutte contre le terrorisme.

Les questions du droit d'asile et du traitement réservé aux immigrants sont des sujets qui continuent de préoccuper le Comité, a-t-il dit, rappelant que certaines mesures prises par le Royaume-Uni ont suscité des critiques dans le monde. M. Rivas Posada a ajouté que le Comité manque d'éléments pour comprendre le phénomène migratoire au Royaume-Uni et a exprimé le souhait que le pays serait à l'avenir en mesure d'apporter des informations d'ordre statistique et quantitatif.

Le Président du Comité a remercié la délégation britannique pour le soin et la clarté avec laquelle elle avait participé à ce dialogue.

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