Skip to main content

Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT INITIAL DE LA NAMIBIE

15 Juillet 2004

Comité des droits de l'homme
15 juillet 2004

Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier et aujourd'hui, le rapport initial de la Namibie en portant son attention notamment sur les discriminations dont les Namibiennes continuent de souffrir, sur les cas de disparitions et d'arrestations arbitraires, notamment dans le nord du pays, sur le droit d'être jugé dans un délai raisonnable et sur la violence à l'égard des femmes et des enfants.

M. Utoni Nujoma, Coordinateur des droits de l'homme du Gouvernement de la Namibie, présentant le rapport de son pays, a rappelé que les pères de l'indépendance namibienne, obtenue en 1990, ont fait reposer la vie nationale et la gouvernance sur les principes de la démocratie, de la primauté du droit et de la justice pour tous et que depuis, la Namibie s'est engagée à suivre ces principes. Il a toutefois demandé que soient prises en compte les contraintes auxquelles le pays est confronté.

La délégation namibienne était également représentée par Mme Martha Nuujoma du Ministère de la justice et M. Peter Katjavivi, Ambassadeur auprès de l'Union européenne et de la Belgique. Répondant aux questions du Comité, notamment sur les discriminations pouvant résulter de l'application du droit coutumier, la délégation a notamment rappelé que le droit coutumier est guidé par les principes directeurs contenus dans la Constitution, la Charte des droits et les droits consacrés par le Pacte. La délégation a par ailleurs cité deux lois adoptées ces dernières années visant à réduire la violence contre les femmes et les enfants, la loi contre le viol et la loi sur la violence domestique.

Interrogée sur le déroulement du procès collectif engagé pour trahison dans la région de Caprivi, la délégation a fourni des renseignements au sujet des retards intervenus dans la procédure, notamment du fait d'une controverse au sujet de l'aide juridictionnelle qui a considérablement retardé le procès. Elle a estimé que ces retards ne sauraient être imputables au Gouvernement.

En vertu de la Constitution, personne ne peut être soumis à une arrestation ou une détention arbitraire et personne ne peut être gardé en détention au-delà de 48 heures sans être déféré devant un juge, a par ailleurs indiqué la délégation. Elle a toutefois reconnu que les retards dans les procédures demeurent un problème, notamment du fait du manque de ressources. Elle a également fait valoir qu'un tribunal namibien a estimé que tous les châtiments corporels étaient contraires à la loi.

Les experts du Comité ont jugé le rapport de la Namibie encourageant. Dans ses observations préliminaires, M. Abdelfattah Amor, Président du Comité, a estimé que la Namibie mérite le soutien et l'assistance de la communauté internationale en matière de renforcement de ses capacités, du fait de sa volonté manifeste d'améliorer les choses. Des préoccupations ont été toutefois été exprimées, notamment s'agissant de l'application du droit coutumier, au nom duquel bien des outrages peuvent être commis à l'endroit des droits de l'homme. En outre, des interrogations demeurent sur les efforts du Gouvernement pour assurer une meilleure protection des femmes et des enfants battus ainsi que pour prévenir et remédier à la violence policière.

Les observations finales du Comité concernant le rapport de la Namibie et les autres rapports qui seront examinés au cours de la session seront adoptées en séance privée et rendues publiques à la fin de la session.

Le Comité entamera demain, à partir de 10 heures, l'examen du rapport initial du Liechtenstein (CCPR/C/LIE/2003/1).


Présentation du rapport de la Namibie

M. UTONI NUJOMA, Coordinateur des droits de l'homme du Gouvernement de la République de Namibie, présentant le rapport initial de son pays, a rappelé que son pays a accédé à l'indépendance en 1990. Les pères de l'indépendance ont fait reposer la vie nationale et la gouvernance sur les principes de la démocratie, de la primauté du droit et de la justice pour tous. Depuis lors, la Namibie s'est engagée à suivre ces principes, comme en témoigne la Charte des droits inscrite dans la Constitution. Devenir partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques était dès lors naturel et offrait l'occasion à la Namibie de contribuer aux efforts de la communauté internationale en vue de promouvoir une culture du respect des droits de l'homme dans le monde.

M. Nujoma a également souligné l'importance accordée par son pays à l'obligation de faire rapport aux organes conventionnels et aux discussions avec les comités qui permettent d'évaluer les efforts nationaux visant à institutionnaliser une culture des droits de l'homme. M. Nujoma a par ailleurs informé le Comité que les dernières élections locales qui ont eu lieu en mai se sont déroulées avec succès, soulignant le fait que depuis l'indépendance, la Namibie a tenu des élections démocratiques de façon régulière, illustrant ainsi son attachement à la démocratie et à la bonne gouvernance.

Le rapport initial de la Namibie (CCPR/C/NAM/2003/1) fait notamment état des progrès réalisés dans les domaines de la santé, de l'éducation, de l'éradication de la pauvreté, de l'égalité des sexes, de la protection des enfants et de la gouvernance, notamment. Il reconnaît toutefois que les niveaux de nutrition sont bien inférieurs à ceux d'un pays à revenu moyen, les résultats du système éducatif laissent beaucoup à désirer. Le rapport précise que les femmes on fait des progrès en matière d'éducation mais leur statut n'a pas beaucoup changé. Il souligne en outre la menace sans précédent que fait peser sur la population le VIH/sida. Le gouvernement, indique en outre le rapport, a pris des mesures d'action positive en faveur des femmes et des groupes vulnérables. Depuis l'indépendance, les droits de l'homme et les libertés fondamentales de l'individu sont placés au centre du système juridique et sont consacrés dans la Charte des droits qui constitue le Chapitre 3 de la Constitution. Ces droits sont opposables non seulement aux particuliers mais aussi et avant tout à tous les organes des l'État. Les personnes qui s'affirment victimes d'une violation de leurs droits peuvent demander réparation en saisissant les tribunaux ou des organes quasi judiciaires tels que le Bureau du Médiateur. La Constitution namibienne interdit catégoriquement la mise en détention provisoire pour une durée indéfinie et un inculpé doit être présenté à un juge dans les 48 heures qui suivent sont arrestation. À ce sujet, le rapport relève qu'en raison de la faiblesse des ressources, cette règle n'a pas toujours été appliquée. En outre, la Constitution exclut l'application de cette règle dans le cas d'immigrants illégaux placés en rétention. Le rapport note également que la peine de mort a été totalement abolie.

En ce qui concerne la mise en oeuvre des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, le rapport note que la Namibie a ratifié tous les grands instruments internationaux et régionaux. Le Bureau du Médiateur joue un rôle déterminant dans la protection et la promotion des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le Ministère de la justice joue également un rôle utile dans la protection des droits de l'homme, notamment à travers l'aide juridictionnelle. En vertu de la Constitution, les accords internationaux qui lient la Namibie font partie de la législation namibienne et sont directement applicables. En outre, le Gouvernement namibien s'est engagé à instaurer durablement une culture des droits de l'homme, notamment à travers des programmes de formation et d'éducation aux droits de l'homme.


Examen du rapport

La délégation namibienne a fourni des renseignements complémentaires demandés par les membres du Comité concernant la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

La délégation a assuré le Comité de la détermination de la Namibie de promouvoir une société régie par la primauté du droit et le respect des droits de l'homme, et a souligné le chemin parcouru depuis l'indépendance tout en appelant à prendre en compte les contraintes auxquelles le pays fait face.

En réponse à la question de savoir si le Pacte a été invoqué devant les tribunaux, la délégation a cité deux cas au cours desquels la Cour suprême a considéré que les accords internationaux doivent faire partie intégrante de la loi de la Namibie et que le Pacte devait s'appliquer lors de procès. Par ailleurs, la délégation a indiqué qu'une loi sur la justice des mineurs sera prochainement présentée au Parlement. La délégation a en revanche déclaré que la Namibie n'a pas pour projet de créer une commission nationale des droits de l'homme, expliquant que le Gouvernement considère que le rôle étendu de l'Ombudsman ainsi que les fonctions de surveillance exercées par la Haute Cour et la Cour suprême en matière de promotion et de protection des droits de l'homme sont suffisants.

La délégation a en outre indiqué que l'Ombudsman, dont les attributions vont au-delà du rôle traditionnel de contrôle de l'administration, a examiné 35 plaintes pour violations des droits de l'homme en 2003. Elle a précisé que l'Ombudsman est désigné par le Président sur proposition de la Commission du service judiciaire. L'Ombudsman peut initier des enquêtes et recommander des poursuites, notamment s'agissant d'affaires de corruption, comme cela a été le cas récemment au sujet de la sécurité sociale ou encore dans des affaires de mauvais traitements. La Commission du service judiciaire nomme également les juges.

En réponse à une question sur la question de l'indemnisation pour les dommages subis par une personne dont les droits ont été lésés ou qui aurait été torturée, la délégation a cité certains cas de poursuites qui ont donné lieu à des indemnisations.

S'agissant du rôle du Comité interministériel sur les droits de l'homme, la délégation a indiqué que celui-ci s'occupe de promouvoir et protéger les droits de l'homme, d'assurer la formation des forces de police, des forces armées, des juges et des magistrats, de promouvoir l'éducation aux droits de l'homme et leur diffusion.

Au sujet de l'affaire Diergaardt et consorts contre Namibie, la délégation a précisé que son pays a répondu, bien qu'un peu tardivement, aux questions du Comité et a réaffirmé que même si la langue officielle est l'anglais, aucune loi n'empêche les plaignants d'utiliser une des 11 principales langues utilisées dans le pays devant les tribunaux ou encore dans leurs démarches auprès de l'administration publique. Il est erroné de dire que des personnes sont éconduites ou ne reçoivent pas d'assistance de la part de fonctionnaires si elles n'utilisent pas l'anglais et encore plus d'imaginer une directive de l'État dans ce sens, a déclaré la délégation.

S'agissant des discriminations dont les Namibiennes sont victimes, notamment dans le cadre du droit et des mariages coutumiers, la délégation a informé le Comité qu'un premier projet de loi sur les successions a été achevé en mai dernier qui vise à établir un régime uniforme de succession et prévoit la distribution équitable des biens immeubles à son conjoint survivant et à ses enfants. En outre, une loi sur la reconnaissance des mariages coutumiers est à l'étude. La délégation a précisé que le Gouvernement s'emploie à assurer une certaine cohérence entre les régimes matrimoniaux et à procéder à l'enregistrement des mariages coutumiers afin d'assurer la protection des conjoints et des enfants.

En réponse à une question sur la forte proportion de personnes qui n'ont jamais été mariées, la délégation a expliqué que les mariages de droit coutumier sont largement pratiqués dans les zones rurales et que, pour l'instant, les mariages coutumiers ne sont pas enregistrés. Une procédure doit être mise au point pour enregistrer ces mariages en y mettant certaines conditions, notamment d'âge, afin qu'ils soient pleinement reconnus. De même, en cas de décès, il y a à présent une reconnaissance du droit à l'héritage des femmes et des enfants de ces unions, a réaffirmé la délégation qui a indiqué que la loi sera présentée sous peu au Parlement.

En ce qui concerne la compatibilité du mariage coutumier avec le Pacte et la Constitution, la délégation a rappelé que le droit coutumier est guidé par les principes directeurs contenus dans la Constitution, la Charte des droits et les droits consacrés par le Pacte. La délégation a donné l'exemple de la polygamie ou du mariage de fillettes qui, bien qu'acceptés par le droit coutumier, sont interdits par la loi.

De façon plus générale en ce qui concerne l'égalité entre hommes et femmes, la délégation a indiqué que la Namibie a mis en place une politique nationale de promotion des femmes en 1997 afin de s'attaquer aux inégalités entre les sexes dans le pays et en particulier dans les domaines de la pauvreté des femmes et du développement rural, de l'éducation et la formation, de la santé génésique, de la violence contre les femmes et les enfants, de l'émancipation économique et de la prise de décision. Des mécanismes de surveillance ont été mis en place et un plan d'action a été adopté pour accélérer la mise en œuvre de la politique nationale. Un exercice d'évaluation a mis en lumière certaines lacunes et le Ministère de la condition féminine s'est engagé dans un processus de revitalisation des structures des point focaux pour les questions sexospécifiques.

Beaucoup a été fait pour mettre en place des cadres de protection sociale et légale des femmes, a fait valoir la délégation, mais malgré les mécanismes et programmes mis en place, il reste de nombreux abus et le nombre de femmes dans des positions de décideurs reste très faible, de même que la participation des femmes en politique, avec 22% des sièges au Parlement occupés par des femmes. Toutefois, le Comité pour les femmes et la loi a permis l'adoption d'une loi sur l'égalité dans le mariage en 1996, d'une loi pour punir le viol en 2000 et d'une loi pour combattre la violence domestique en 2003, notamment.

Au nombre des aspects positifs, la délégation a également mis en avant la loi sur l'égalité entre époux qui a permis aux femmes de sortir de leur état de mineures et, notamment, d'ouvrir un compte en banque ou d'obtenir un prêt sans accord de leur mari.

En réponse à une question sur le droit des femmes d'être propriétaires, la délégation a indiqué que de nombreuses femmes ont pu accéder à la propriété, y compris à la propriété de la terre dans le cadre de la politique agraire du Gouvernement.

La délégation a par ailleurs indiqué que les grossesses chez les jeunes filles sont interdites mais que les jeunes filles ont la possibilité de poursuivre leurs études. La délégation a indiqué ne pas avoir connaissance de cas d'expulsion de jeunes filles de l'école pour cause de grossesse.

En ce qui concerne la discrimination dans le cadre du travail, la délégation a informé le Comité de la promulgation prochaine d'une nouvelle loi du travail qui interdit la discrimination à l'emploi et dispose qu'une personne ne doit pas être l'objet de discrimination dans le cadre de l'exercice de son emploi, directement ou indirectement, sur la base de son sexe.

En réponse aux questions du Comité sur des allégations de disparitions massives, en particulier dans le Nord du pays, et d'exécutions extrajudiciaires, la délégation a indiqué que la police n'a reçu aucun rapport officiel sur de tels incidents et qu'il n'a par conséquent pas été mené d'enquêtes, de même que la police namibienne n'a pas connaissance de plaintes pour des cas de torture ou d'exécutions extrajudiciaires. Elle a précisé que la plupart des cas de disparitions ou d'exécutions extrajudiciaires dans lesquels les tribunaux ont agi, les coupables ont été retrouvés et punis. D'autres affaires de ce type se sont déroulées sur le territoire angolais pendant la guerre entre le MPLA et l'UNITA alors que les frontières entre les deux pays n'étaient pas sûres.

À cet égard, la délégation a indiqué que la situation s'est nettement améliorée entre les deux pays et que des efforts sont faits pour développer les échanges et les contacts entre les Gouvernements, les partis et les parlementaires des deux pays. La question des disparitions et des exécutions extrajudiciaires a été réglée depuis un certain temps déjà et des réparations ont même été accordées à certaines victimes.

S'agissant de la détention avant jugement qui peut parfois aller jusqu'à un an, la délégation a précisé que c'est là une exception et non la règle et que toute personne accusée peut faire une demande de liberté sous caution. S'agissant du procès pour trahison qui s'est déroulé dans la région de Caprivi, la délégation a donné un certain nombre de détails expliquant les retards intervenus dans la procédure, notamment du fait d'une controverse au sujet de l'aide juridictionnelle qui a considérablement retardé le procès. La délégation a estimé que les retards dans la comparution des accusés sont dus à des délais de procédures et ne sauraient être imputables au Gouvernement. La Namibie est connue pour sa stricte adhésion au droit à un procès équitable tel que garanti par la Constitution, a affirmé la délégation.

En ce qui concerne la règle constitutionnelle qui veut que toute personne arrêtée comparaisse devant un juge dans les 48 heures, la délégation a assuré que les problèmes à cet égard ont été réglés à la suite de réunions entre le Ministère de la justice, le Ministère de l'intérieur, la police namibienne et le Bureau du Procureur général afin de s'assurer que cette règle ne serait plus bafouée. En outre, le nombre de magistrats a été doublé pour assurer une présence dans tout le pays et permettre de respecter la règle des 48 heures.

En réponse à une question sur l'intention de la Namibie de créer un organe indépendant chargé d'inspecter les centres de détention et d'enquêter sur les faits faisant l'objet de plaintes, la délégation a indiqué que la Namibie considère que les magistrats, en tant que membres du pouvoir judiciaire indépendant, sont les mieux placés pour assumer cette tâche.

En ce qui concerne les réfugiés, la délégation a annoncé que la Namibie dispose à présent d'une loi sur les réfugiés qui est entrée en vigueur en septembre 2000 et facilite l'obtention du statut de réfugié. En réponse à une question sur l'origine des demandeurs d'asile, la délégation a indiqué qu'ils proviennent essentiellement d'Angola, de République démocratique du Congo et de Zambie. Un projet existe conjointement avec le Gouvernement d'Angola et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés pour rapatrier, sur une base volontaire, les réfugiés angolais. Pour sa part, le Conseil des recours examine les plaintes des réfugiés qui estiment que leurs droits sont violés ou qui contestent une décision d'expulsion, a indiqué la délégation.

S'agissant du droit à un procès équitable, la délégation a fait valoir que les poursuites sont du ressort du Procureur général qui est totalement indépendant dans la loi comme dans la pratique. En outre, en vertu de la Constitution, nul ne peut être soumis à une arrestation ou une détention arbitraire et nul ne peut être gardé en détention au-delà de 48 heures sans être déféré devant un juge. Toute personne arrêtée peut également demander sa libération sous caution. Les accusés ont accès à toutes les informations relatives à l'accusation afin de pouvoir préparer leur défense. Le droit à un avocat de son choix est un droit constitutionnel et, dans le cas où la personne n'a pas les moyens d'engager un avocat, une aide juridictionnelle peut lui être accordée. Nul ne peut en outre être obligé à témoigner contre lui-même ou son conjoint, y compris dans le cadre d'un mariage coutumier, et les aveux ne sont recevables que si leur caractère volontaire ne fait aucun doute. La délégation a reconnu que les retards dans les procédures demeurent un problème, notamment du fait du manque de ressources.

La délégation a indiqué que le Président de la République procède à la nomination des juges sur recommandation de la Commission des services judiciaires. Cette Commission peut en outre initier des enquêtes en cas de mauvaise conduite des magistrats, qui peuvent le cas échéant conduire à des révocations, bien qu'un tel cas ne se soit encore jamais présenté.

En réponse à plusieurs questions sur l'aide juridictionnelle, la délégation a indiqué qu'elle est assurée à tous les citoyens n'ayant pas les moyens de payer un avocat. Dans le cas des accusés de Caprivi, ceux-ci n'ont d'abord pas voulu de cette aide car ils ne se reconnaissaient pas comme Namibiens. Tous les Namibiens y ont droit sous condition de ressource, a affirmé la délégation.

En ce qui concerne la torture, la délégation a rappelé que la Namibie est signataire de la Convention internationale contre la torture et que la Constitution du pays stipule que nul ne sera soumis à la torture. Elle a donné l'exemple d'une affaire qui a fait jurisprudence et dans laquelle le tribunal a estimé que tous les châtiments corporels étaient interdits. En cas d'allégations vérifiées de torture, les victimes ont droit à une indemnisation, a assuré la délégation.

Interrogée sur des incidents ayant conduits à des menaces ou à l'emprisonnement de journalistes, la délégation a fait valoir que l'incitation à la violence est cause d'énormes problèmes en Afrique comme l'ont montré les événements au Rwanda qui ont conduit au génocide. Dans ce contexte, il importe d'être très prudents vis-à-vis de telles incitations. La délégation a fait valoir par ailleurs que de nombreux journaux privés et indépendants existent en Namibie.

La délégation a par ailleurs déclaré ne pas avoir d'information sur des plaintes pour violation de la liberté d'expression au motif que le portefeuille de Ministre de l'information a été détenu à un certain moment par le Président. Elle a précisé à ce sujet que les portefeuilles ministériels sont attribués à des individus et qu'en l'occurrence, le Président s'est trouvé, à titre individuel, en charge du portefeuille de l'information et que cela ne signifiait nullement que l'information se trouvait rattachée à la Présidence.
À une question concernant la loi sur les publications de 1974, qui dispose qu'on s'efforcera de défendre une «vision chrétienne de la vie», la délégation a répondu que celle-ci a été déclarée inconstitutionnelle depuis que la Namibie est un État laïc et qu'il n'existe pas de Comité chargé d'exercer une censure.

S'agissant des mesures prises pour prévenir la maltraitance des enfants, la délégation a cité deux lois visant à réduire la violence contre les femmes et les enfants : la loi contre le viol de 2000 et la loi sur la violence domestique de 2003. En outre, une loi sur le statut de l'enfant est en cours d'élaboration qui vise principalement à supprimer les discriminations entre enfants nés dans le cadre d'un mariage et enfants nés hors mariage ou dans le cadre de mariages non enregistrés. En ce qui concerne le travail des enfants, le phénomène est mal connu mais des inspecteurs parcourent le pays pour évaluer la situation, a indiqué la délégation.

La délégation a indiqué que l'application du droit coutumier a fait l'objet d'une évaluation et qu'un effort de sensibilisation et d'information a été fait pour éliminer les pratiques traditionnelles néfastes.

Au sujet du VIH/sida, la délégation a expliqué comment le Gouvernement namibien réagit à ce problème en rappelant que la Namibie est une jeune démocratie qui a hérité d'une grande inégalité des richesses et des chances et dans laquelle de fortes inégalités structurelles restent à surmonter. Elle a insisté sur la nécessité de l'aide extérieure pour faire face à ces difficultés. Elle a assuré que la lutte contre le VIH/sida est une priorité du Gouvernement namibien qui agit en matière de prévention et de traitement. Le Président lui-même a été particulièrement actif dans cette lutte, notamment pour ce qui est de sensibiliser la population. En réponse à une question sur la coopération avec l'Organisation mondiale de la santé, la délégation a indiqué que des programmes communs existent notamment pour obtenir des antirétroviraux.

Interrogée sur la situation des minorités ethniques, linguistiques ou religieuses, la délégation a fait valoir que la société namibienne est parfaitement laïque et que personne n'a jamais vu ses droits bafoués en raison de sa religion ou de sa non religion. En outre, en ce qui concerne les personnes parlant l'afrikaans, la délégation a précisé qu'elles ne sauraient être considérées comme une minorité linguistique et qu'en tout état de cause le soi-disant «peuple afrikaans» ne jouit pas de moins de droits que n'import qui d'autre en Namibie pour ce qui est de l'usage de sa langue ou de la promotion de sa culture. De même, rien n'indique que les Himbas soient victimes de discrimination ou voient leurs droits moins protégés en raison de leur appartenance ethnique. En revanche, beaucoup a été fait en faveur des San, qui ont été très défavorisés avant l'indépendance.

En réponse à une question sur la nécessité de parler l'anglais, la langue officielle, pour accéder à la fonction publique, la délégation a précisé qu'il n'est pas obligatoire pour toute personne souhaitant entrer dans la fonction publique de parler l'anglais couramment, mais autant que l'exige la fonction assumée. En outre, si l'anglais est la première langue enseignée dans les écoles, les autres langues sont enseignées comme deuxièmes langues au niveau du primaire et du secondaire.

La délégation a affirmé que tous sont égaux devant la loi et que le Gouvernement namibien n'entend pas adopter de mesures particulières pour protéger spécifiquement les homosexuels. Toute personne qui estime ses droits violés de fait de ce qu'elle est, de ce qu'elle pense, ou de ce qu'elle fait de son corps en privé a le droit, de par la loi, de former recours par des moyens judiciaires ou quasi judiciaires. En ce qui concerne l'homosexualité, la délégation a indiqué que si de tels comportements existent, ils choquent encore la vaste majorité des Namibiens qui professent la religion chrétienne, mais tant que ces pratiques restent privées, cela ne pose pas de problème.

S'agissant des mesures adoptées en faveur de la réconciliation nationale, la délégation a rappelé qu'avant l'indépendance, la population était divisée en fonction de caractéristiques ethniques. L'État namibien s'est efforcé de mener une politique systématique de réconciliation nationale et de construction d'un État unitaire depuis l'indépendance. Une loi interdisant la discrimination raciale ainsi que des mesures d'action positives ont été adoptées. À ce sujet, la délégation a cité l'exemple du secteur de la pêche qui est à présent entièrement détenu par des Namibiens et constitue un succès de la politique de discrimination positive.

En réponse à une question sur la Commission électorale, la délégation a indiqué qu'il s'agit d'un organe indépendant composé de quatre membres qui est chargé d'organiser et de contrôler de façon impartiale les élections dans le pays. Elle a ajouté que les élections qui se sont tenues jusqu'à présent n'ont fait l'objet d'aucun problème. S'agissant des organisations non gouvernementales, la délégation a souligné l'importance de leur rôle tout en rappelant les énormes difficultés auxquelles elles se heurtent notamment en terme de ressources. Elle assuré que les organisations non gouvernementales au sein de la société namibienne ont toute possibilité de suivre les plaintes et de se faire entendre.


Observations préliminaires

M. ABDELFATTAH AMOR, Président du Comité des droits de l'homme, a estimé que le rapport initial de la Namibie est très intéressant et met en relief les efforts de la Namibie pour se construire. Il se caractérise par son sérieux et sa franchise, s'est félicité M. Amor qui a estimé que la Namibie mérite le soutien et l'assistance de la communauté internationale en matière de renforcement des capacités de fait de sa volonté manifeste de changer et améliorer les choses et de sa bonne volonté. Il s'est en particulier félicité de l'abolition de la peine de mort ainsi que l'attitude d'ouverture des autorités namibiennes, en particulier en direction des organisations non gouvernementales.

Toutefois, M. Amor a déploré le côté factuel limité du rapport et le peu d'indications sur l'application des lois. En outre, M. Amor a exprimé sa préoccupation face au rapport entre le Pacte et la loi positive ainsi qu'entre le Pacte et le droit coutumier. À cet égard, il a estimé que beaucoup reste à faire pour développer le droit positif et que l'état de projet d'un certain nombre de lois ne permet pas de se faire une idée précise de l'application du Pacte, notamment en ce qui concerne la torture. S'agissant du droit coutumier, M. Amor a rappelé que très souvent bien des outrages sont commis à l'endroit des droits de l'homme au nom du droit coutumier. À partir du moment où un État souscrit à des obligations internationales, son droit, écrit ou non, doit être conforme à ces obligations. Or M. Amor a estimé qu'en ce qui concerne un certain nombre de questions, par exemple les mariages non enregistrés, qui ont des incidences sur la condition de la femme, les obligations ne sont pas respectées. En outre, le Président a réfuté les arguments opposés par l'État aux observations et demandes du Comité en ce qui concerne certaines communications. Il a rappelé qu'il appartient à l'État de mettre en place les mécanismes permettant de remédier aux problèmes constatés par le Comité. En outre, en ce qui concerne la violence domestique, M. Amor s'est interrogé sur le fait de savoir si la Namibie a fait suffisamment d'efforts pour assurer une meilleure protection des femmes et des enfants battus et surtout pour prévenir ce phénomène. De même en ce qui concerne la violence policière, il s'est interrogé sur les mécanismes et procédures existants afin de prévenir et remédier à cette violence.

M. UTONI NUJOMA, Chef de la délégation namibienne, a remercié le Comité pour le dialogue instructif et précieux qui s'est tenu et s'est déclaré convaincu que celui-ci permettra d'améliorer les prochains rapports qui seront présentés par son pays. Il a attiré l'attention sur le fait que la Namibie n'a pas caché ses difficultés et il a souhaité que le Comité pourra apporter une aide au renforcement des capacités dans le domaine des droits de l'homme dans son pays.

* *** *

VOIR CETTE PAGE EN :