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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LE RAPPORT DE LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

17 Juillet 2007

Comité des droits de l'homme

17 juillet 2007



Le Comité des droits de l'homme a examiné, hier après-midi et ce matin, le deuxième rapport périodique présenté par la République tchèque sur la mise en œuvre par ce pays des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Le Président du Comité, M. Rafael Rivas Posada, concluant le dialogue avec la délégation, a fait des observations préliminaires dans lesquelles il a notamment relevé que l'une des préoccupations principales des membres du Comité a trait à la manière dont le pays appréhende la portée des constatations adoptées par le Comité suite à l'examen de plaintes contre l'État. Plusieurs autres questions ont retenu l'attention du Comité, au regard de la persistance d'un certain nombre de faits, a poursuivi le Président, citant en particulier les discriminations dont est victime la minorité rom. L'adoption de mesures législatives n'est pas toujours suffisante, a-t-il souligné, invitant la République tchèque à prendre des mesures concrètes pour appliquer les principes des droits de l'homme et sanctionner leur non-application.

Le Comité adoptera ses observations finales sur la République tchèque dans le cadre d'une séance privée, avant de les rendre publiques à la fin de la présente session, vendredi 27 juillet prochain.

Présentant le rapport de la République tchèque, le Commissaire gouvernemental auprès de la Cour européenne des droits de l'homme au Ministère de la justice, M. Vit A. Schorm, a indiqué que la modification de la Constitution en 2002 avait établi la primauté des traités internationaux sur le droit interne. Si la protection des individus est assurée de manière efficace dans le pays, la République tchèque n'en est pas moins consciente que, du fait d'un contexte historique et social complexe, certains groupes ou minorités sont exposés à un risque comparativement accru de discrimination et sont, de ce fait, susceptibles de jouir d'une protection moins importante de leurs droits, a reconnu M. Schorm. Il a par ailleurs souligné que l'immigration étrangère constitue un défi important pour un pays qui, traditionnellement, était jusqu'ici une terre d'émigration. La République tchèque est consciente que des crimes à motifs raciaux ou ethniques sont perpétrés sur son territoire et s'efforce de lutter contre ce phénomène; une campagne contre le racisme a ainsi été lancée en 2006, qui a permis de faire légèrement baisser les chiffres liés à ce type de délits.

La délégation tchèque était également composée de représentants du Ministère de l'intérieur, du travail et des affaires sociales, de la culture, de l'éducation et des sports, et des affaires étrangères. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, entre autres, la manière dont la République tchèque considère les constatations adoptées par le Comité sur les plaintes; la question des spoliations de biens et propriétés sous le régime communiste; des cas de stérilisation forcée; la réforme du système judiciaire; les questions relatives aux violences sexuelles contre les enfants, à la violence domestique et à la traite de personnes; l'utilisation de lits-cages et de lits-filets dans les institutions sanitaires; l'adoption de mesures de lutte contre le terrorisme; les conditions carcérales; la loi sur les étrangers; la lutte contre les discriminations; et la situation des Roms.


À sa prochaine séance publique, le jeudi 19 juillet à 10 heures, le Comité doit poursuivre l'examen du projet d'observation générale révisée portant sur l'article 14 du Pacte.


Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, M. VIT A. SCHORM, Commissaire gouvernemental auprès de la Cour européenne des droits de l'homme au Ministère de la justice de la République tchèque, a informé le Comité que la modification de la Constitution tchèque, en 2002, avait établi la primauté des traités internationaux sur le droit interne et renforcé l'accent mis par son pays sur ses engagements internationaux. Un Commissaire des droits de l'homme a été nommé qui joue un rôle déterminant en matière de coordination de l'action en faveur des droits de l'homme et d'évaluation de la situation et des normes de protection dans ce domaine, a-t-il ajouté. Ce Commissaire rédige un rapport annuel et est habilité à émettre des recommandations. Depuis 2001, a poursuivi M. Schorm, un ombudsman est également actif, qui reçoit des plaintes relatives à d'éventuels dysfonctionnements imputables aux autorités, au droit ou à la gouvernance nationale. L'ombudsman reçoit annuellement quelque 6000 plaintes et son travail est considéré comme tout à fait positif, tant par le public que par les instances administratives, a fait valoir M. Schorm.

Si la protection des individus est assurée de manière efficace dans le pays, la République tchèque n'en est pas moins consciente que, du fait d'un contexte historique et social complexe, certains groupes ou minorités sont exposés à un risque comparativement accru de discrimination et sont, de ce fait, susceptibles de jouir d'une protection moins importante de leurs droits, a reconnu M. Schorm.

Diverses mesures ont été mises en place par la République tchèque pour renforcer la protection des femmes et des enfants, a poursuivi M. Schorm, citant notamment des initiatives visant à protéger les enfants contre les abus sexuels ou encore l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi en matière de protection contre la violence domestique. Il a également fait mention de la stratégie nationale de lutte contre le trafic d'êtres humains, qui prévoit une assistance accrue aux victimes ainsi que le renforcement des lois permettant de poursuivre les auteurs de ce type de crimes.

S'agissant des questions relatives aux minorités, la République tchèque a ratifié la Charte européenne pour les langues régionales ou minoritaires, entrée en vigueur dans le pays cette année. Ainsi, le slovaque, le polonais, l'allemand et le romani sont-ils considérés comme des langues minoritaires. En outre, afin de renforcer la cohésion nationale, une campagne a été menée pour encourager les membres des minorités à intégrer la police tchèque.

L'immigration étrangère constitue un défi important pour la République tchèque qui, traditionnellement, était jusqu'ici une terre d'émigration, a par ailleurs indiqué M. Schorm. Depuis 2004, a-t-il précisé, la Coordination pour l'intégration des étrangers relève du Ministère du travail et non plus du Ministère de la sécurité nationale. Pour faire face aux récentes vagues d'immigration, des mesures globales ont été envisagées qui combinent campagne de sensibilisation et adaptation du cadre légal.

S'agissant de la privation de liberté, M. Schorm a fait état d'une baisse du nombre de personnes en détention préventive et de prisonniers condamnés. La République tchèque a par ailleurs supprimé l'usage des lits-cages dans les institutions de santé et ne maintient qu'en dernier recours l'utilisation de moyens de contrainte, a-t-il ajouté.

La République tchèque, a poursuivi M. Schorm, est consciente que des crimes à motifs raciaux ou ethniques sont perpétrés sur son territoire et s'efforce de lutter contre ce phénomène; une campagne contre le racisme a ainsi été lancée en 2006. En conséquence, les chiffres liés à ce type de délits ont légèrement baissé, s'établissant, en 2006, à 248 crimes à connotation raciste. M. Schorm a souligné l'importance accordée à la formation et à la sensibilisation des policiers et membres des forces de l'ordre aux principes des droits de l'homme.

M. Schorm a indiqué qu'à l'avenir, seront considérés de nouveaux amendements susceptibles d'être apportés à la Constitution afin d'améliorer encore la compatibilité du droit interne avec les obligations internationales de la République tchèque.

Le deuxième rapport périodique de la République tchèque (CCPR/C/CZE/2), relève que durant la période d'examen (1er janvier 2000 au 31 décembre 2004), la Cour européenne des droits de l'homme a rendu plusieurs jugements dans lesquels la République tchèque a fait l'objet de critiques en relation avec des affaires ayant trait au droit à une procédure régulière, et notamment le droit à une procédure judiciaire, aux droits et obligations civils ou à la justification de la durée des procès pénaux dans des délais raisonnables. La République tchèque a adopté en 2003 la Stratégie nationale pour la lutte contre la traite des êtres humains en vue de l'exploitation sexuelle, fait par ailleurs valoir le rapport.

S'agissant du comportement de la police à l'égard des minorités, le rapport indique que le Ministère de l'intérieur et la police appliquent depuis 2003 la Stratégie nationale pour le travail de la police avec les minorités nationales et ethniques, qui doit permettre de développer la confiance entre police et minorités et de combattre les stéréotypes raciaux et ethniques, la xénophobie et l'intolérance au sein de la police. En 2001, la République tchèque a adopté la loi sur les droits des membres des minorités nationales, qui réglemente largement les droits des membres des minorités nationales en République tchèque et met l'accent sur le droit à l'éducation dans la langue de la minorité, le droit d'être entendu devant les autorités publiques, notamment les tribunaux, dans la langue des minorités nationales, et le droit au développement de la culture des minorités. La loi sur les droits des membres des minorités nationales a introduit la définition des expressions «minorité nationale» et «membre d'une minorité nationale». Ces deux définitions se fondent sur le principe selon lequel ce qui constitue l'élément décisif permettant de définir un groupe de personnes en tant que minorité nationale et une personne en tant que membre de cette minorité est leur volonté d'être considérés comme une minorité nationale ou un membre de cette dernière. Leur volonté peut se manifester d'une manière tout à fait informelle, mais elle doit être définie et sans ambiguïté. Le membre d'une minorité nationale ne peut être qu'un citoyen tchèque inscrit comme appartenant à la minorité nationale.


Examen du rapport

Renseignements complémentaires fournis par la délégation tchèque

La délégation tchèque a rappelé que, parmi les situations qui avaient fait l'objet de critiques du Comité, figuraient notamment des affaires de spoliations de biens et propriétés intervenues durant les années de régime communiste. Quoique certaines affaires compliquées soient encore en train d'être tranchées, a précisé la délégation, tout a été mis en place pour trouver un juste équilibre entre ceux qui se sont vu priver de leurs biens et ceux qui en jouissent depuis parfois plusieurs décennies. Les victimes de l'Holocauste, notamment, ont dans certains cas reçu des dédommagements conséquents, a indiqué la délégation. Aujourd'hui, a-t-elle ajouté, le grand public et le Gouvernement considèrent que le dossier est clos.

La délégation a par ailleurs fait savoir que la République tchèque ne faisait pas sienne l'opinion du Comité quant au caractère discriminatoire de l'application du principe de nationalité en ce qui concerne la restitution de la propriété, a-t-il dit. Tout en affirmant que les constatations des experts ne sont pas assimilables à des décisions juridictionnelles, la délégation a néanmoins assuré le Comité de l'importance accordée par la République tchèque à la poursuite d'un dialogue constructif avec cet organe.

Abordant le chapitre des mesures concrètes mises en œuvre par la République tchèque pour renforcer la protection des droits de l'homme, la délégation a mentionné la réforme du pouvoir judiciaire, qui vise à accélérer les procédures. Un budget considérable a été investi afin d'améliorer le fonctionnement de la justice, a souligné la délégation. L'utilisation des moyens informatiques a contribué à renforcer l'efficacité des tribunaux, a-t-elle ajouté. La durée des procédures est en baisse constante, comme en attestent les statistiques, a-t-elle fait valoir.

En ce qui concerne les questions relatives aux droits des femmes, la délégation a notamment répondu aux allégations concernant des cas de femmes soumises à une stérilisation forcée sans leur consentement. Elle a indiqué qu'une enquête à ce sujet avait été menée qui avait effectivement constaté des erreurs administratives et médicales dans une minorité de cas. Nous devons admettre qu'il y a eu des carences dans la procédure s'agissant du principe de consentement informé, a reconnu la délégation. Elle a toutefois souligné qu'en aucun cas ce problème ne découlait de motifs raciaux ou ethniques. De nouvelles directives ont été édictées pour appliquer de manière stricte l'obligation de consentement des patientes en cas de stérilisation; le Ministère de la santé est en train de préparer un projet de loi général sur les procédures de santé, a indiqué la délégation.

La délégation a par ailleurs fait état des mesures mises en place par la République tchèque pour lutter contre la violence domestique, la violence sexuelle à l'encontre des enfants et la traite des personnes. Une attention accrue à été consacrée à ces problèmes ces dernières années qui a conduit à une augmentation des arrestations en rapport avec ces crimes, a fait valoir la délégation. Au total, près de 800 cas d'abus sexuels contre des enfants ont été dénoncés en 2005, à la suite des campagnes de sensibilisation menées auprès de la population pour encourager la dénonciation de suspicion de telles violences. Dans ce domaine, la mobilisation des communautés défavorisées constitue toutefois encore un défi, a reconnu la délégation.

S'agissant de l'utilisation des lits-cages et lits-filets dans certaines institutions sanitaires, jugée inacceptable et inhumaine par plusieurs membres du Comité, la délégation a expliqué que les lits-cages ne sont plus utilisés depuis le 1er janvier 2007. Quant aux lits-filets, leur usage est de moins en moins fréquent; il est réservé à des situations exceptionnelles déterminées par la nécessité d'immobiliser certains patients. Les institutions psychiatriques respectent les recommandations et conditions d'utilisation de ces lits, a affirmé la délégation.

Répondant à des questions sur la lutte contre le terrorisme, la délégation a fait savoir que la loi tchèque ne propose pas de définition distincte du terrorisme et qu'aucune loi spécifique n'existe ni n'est prévue en la matière. La loi existante suffit à poursuivre l'ensemble des activités terroristes, a souligné la délégation. La délégation tchèque a par ailleurs vivement nié que quiconque agissant à titre officiel ait pu prendre part à des arrestations et au transport illégal de prisonniers accusés d'actes terroristes.

Le Code pénal sanctionne toute personne qui dans le cadre de l'exercice de ses pouvoirs soumet une autre personne à des souffrances physiques, psychologiques ou à la torture, a en outre rappelé la délégation.

Répondant aux allégations faisant état de fautes commises par les forces de police, la délégation a rappelé que le Gouvernement s'est engagé à assurer une enquête indépendante pour tout crime commis par des agents de police. La réglementation relative aux cellules de garde à vue a été modifiée, tout comme les dispositions sur la détention provisoire, a souligné la délégation. Elle a en outre indiqué que les problèmes de surpeuplement carcéral étaient particulièrement aigus jusqu'à la fin des années 1990, mais que suite aux mesures qui ont été prises afin d'y remédier, le surpeuplement carcéral atteint aujourd'hui 1,37%.

S'agissant de la loi sur les étrangers et du régime de détention qui leur est applicable, la délégation a fait état de changements fondamentaux intervenus depuis janvier 2006. En effet, les établissements pour étrangers sont passés du contrôle policier au contrôle civil, sous la supervision de l'instance en charge des demandes d'asile.

S'agissant des mesures prises pour lutter contre la discrimination, la délégation a fait état d'un projet de loi qui doit être adopté en 2007 et qui prévoit, notamment, une aide juridique pour les victimes de discrimination.

En ce qui concerne la situation des Roms, la délégation a indiqué que la République tchèque s'efforçait de mieux cerner le phénomène de discrimination dont les Roms sont victimes. De nombreuses mesures sont mises en place pour éviter la ségrégation dans les domaines de l'emploi, de la santé, de l'éducation et du logement, a indiqué la délégation. Elle a insisté sur les ressources allouées à la création de logements sociaux destinés aux Roms, précisant qu'un guide méthodologique a été rédigé à l'intention des municipalités afin de les aider à mener une politique appropriée en matière de logement.

Commentaires des experts

Félicitant la République tchèque pour son rapport détaillé, les experts ont pris acte des informations apportées par la délégation sur sa manière d'aborder les opinions du Comité. Si les constatations du Comité ne sont certes pas formellement contraignantes, elles sont toutefois davantage que de simples recommandations, ont-ils souligné, invitant la République tchèque à les considérer au moins comme constituant un premier degré d'observation juridique.



Certains membres du Comité ont insisté sur les lacunes existantes en matière de suivi des recommandations du Comité en rapport avec la question des réparations dues aux personnes - notamment des victimes de l'Holocauste - ayant été spoliées de leurs biens. Ils ont noté que Gouvernement exprime sa volonté de régler les cas encore en suspens, mais aussi qu'il rencontre une la résistance de la part du Parlement.

Plusieurs experts ont en outre soulevé le problème de l'utilisation persistante des lits-filets. Ces méthodes sont injustifiables, a dénoncé un membre du Comité. La stérilisation forcée constitue, elle aussi, une pratique inacceptable, ont relevé certains membres du Comité, invitant la République tchèque à reconnaître le problème - qui a en particulier touché les femmes roms - et à mettre en place un mécanisme de réparations.

Les progrès sont faibles en matière de représentation politique des femmes, ont relevé certains membres du Comité, notant qu'avec 5,5% seulement de femmes à la Chambre des députés, la République tchèque se situait en dessous de la moyenne mondiale.

Les problèmes relevant de la violation des droits des enfants sont traités par diverses instances, ont relevé certains experts, suggérant que c'est peut-être cet éparpillement de l'action qui explique l'insuffisance des résultats dans ce domaine.

La République tchèque a été invitée à envisager l'élaboration d'un Plan d'action en matière de droits de l'homme et à mobiliser d'avantages de ressources pour favoriser l'application du Pacte et de ses protocoles facultatifs.


Observations préliminaires

Présentant des observations préliminaires sur la mise en œuvre du Pacte en République tchèque, le Président du Comité, M. RAFAEL RIVAS POSADA, a relevé que l'une des préoccupations principales des membres du Comité a trait à la manière dont le pays appréhende la portée des constatations adoptées par le Comité au titre du Protocole facultatif. Une fois que le Comité a constaté l'existence d'une violation du Pacte, a-t-il insisté, on entre dans le cadre du devoir de l'État partie de se conformer à ses engagements et obligations. Plusieurs autres questions ont retenu l'attention du Comité, au regard de la persistance d'un certain nombre de faits, a poursuivi le Président, citant en particulier les discriminations dont est victime la minorité rom. L'adoption de mesures législatives n'est pas toujours suffisante, a-t-il souligné, invitant la République tchèque à prendre des mesures concrètes pour appliquer les principes des droits de l'homme et sanctionner leur non-application. Il a finalement salué les efforts louables déployés par la délégation afin de fournir le plus d'informations possibles et d'apaiser les inquiétudes du Comité.
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