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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHÈVE SON DIALOGUE AVEC LA DÉLÉGATION DU YÉMEN

18 Juillet 2002



Comité des droits de l’homme
75ème session
18 juillet 2002
Matin


Le Président du Comité se félicite des efforts des autorités yéménites
pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte dans le pays



Le Comité des droits de l'homme a conclu, aujourd'hui, l'examen du troisième rapport périodique du Yémen. Le Président du Comité, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati a félicité la République du Yémen d'avoir présenté son rapport sans retard. Il a noté avec satisfaction les efforts engagés par les autorités yéménites pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte dans le pays.
Des observations finales sur le rapport de la République du Yémen seront adoptées en séance privée et rendues publiques à la fin de la session, le vendredi 26 juillet 2002.
En début de séance, des experts ont posé une série de questions complémentaires, notamment sur la peine de mort et le statut de la femme yéménite. Un expert a notamment souhaité obtenir des informations supplémentaires sur la place de la charia dans le cadre des obligations prévues par le Pacte.
Au cours de la discussion, la délégation du Yémen a rappelé que tout changement dans une société en transition ne peut se faire sans heurts et requiert du temps. Le Yémen s'est néanmoins engagé dans la voie de la sauvegarde et du respect des droits de l'homme. La délégation a par ailleurs répondu aux questions des experts, notamment sur la peine de mort, indiquant que 177 exécutions avaient eu lieu en 2000-2001. Le grand nombre d'exécutions s'explique par le retard administratif qui a été enregistré dans l'étude des dossiers.
Le Comité se réunira cet après-midi, à 15 heures, afin d'examiner le rapport initial de la République de Moldova (CCPR/C/MDA/2000/1).

Examen du rapport du Yémen
En début de séance, des experts ont posé une série de questions complémentaires, notamment sur la peine de mort et le statut de la femme yéménite. Un expert a notamment souhaité obtenir des informations supplémentaires sur la place de la charia dans le cadre des obligations prévues par le Pacte. L'expert a également fait référence à des cas de déportation massive et a souhaité savoir ce que le gouvernement envisage de faire à ce sujet.
Répondant aux questions posées hier après-midi et ce matin par les membres du Comité, la délégation yéménite a rappelé que tout changement dans une société en transition ne peut se faire sans heurts et requiert du temps. Le Yémen s'est néanmoins engagé dans la voie de la sauvegarde et du respect des droits de l'homme.
En ce qui concerne le statut du Pacte dans la législation nationale, la délégation a précisé que la Constitution stipule l'obligation de l'État de respecter la Charte des Nations Unies ainsi que les règles du droit international. Lorsque le Yémen ratifie un instrument international, il devient partie intégrante de son système juridique. Ainsi le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels fait partie intégrante de la législation nationale du pays. Les tribunaux sont tenus de se référer à ces textes.
Répondant aux questions des membres du Comité au sujet du statut de la femme au sein du mariage, la délégation a indiqué que le Pacte ne prévoit pas de renoncer au principe de la polygamie. Elle a ajouté que, si dans les textes, la femme ne peut sortir de son foyer qu'avec l'autorisation de son mari, dans les faits elle est libre de ses déplacements. Le droit du mari de répudier son épouse sans en référer à la justice et l'obligation de l'épouse de saisir la justice si elle souhaite divorcer sont basés sur la charia islamique.
En réponse à des questions sur la commission nationale des droits de l'homme (le Comité suprême des droits de l'homme), la délégation a indiqué qu'il s'agit d'une autorité administrative et non judiciaire. Elle est uniquement saisie des plaintes et des communications relatives aux droits de l'homme et participe à la préparation des rapports présentés devant les instances internationales des droits de l'homme. Elle œuvre à la promotion des droits de l'homme grâce à des activités de formation et d'information dans le domaine des droits de l'homme.
La délégation a également indiqué que l'article 5 de la Constitution yéménite prévoit la saisie du Parquet dans les cas d'infractions aux droits de l'homme. Le comité suprême des droits de l'homme reçoit les plaintes avant de les renvoyer vers les autorités compétentes en la matière. Ce Comité assure également le suivi des plaintes. Cette année, environ 300 plaintes ont été reçues dont 90% ont été traitées et suivies et ont abouti à des règlements. En cas de disfonctionnement de la justice, le Ministre de la justice est tenu pour responsable.
En réponse aux questions posées hier à ce sujet par des membres du Comité, la délégation a assuré que l'état d'urgence de 1994 n'avait pas entraîné de violations des droits de l'homme et avait même eu un effet positif dans la mesure où il avait permis de limiter les effets néfastes de la guerre de sécession. Il n'y a pas eu de décret d'application précisant les droits qui devaient être limités dans le cadre de l'état d'urgence.
La délégation a indiqué que 177 exécutions avaient eu lieu en 2000-2001. Ce grand nombre d'exécutions s'explique par l'important retard administratif enregistré dans l'étude des dossiers. Un mineur de moins de 18 ans ne peut être exécuté, a par ailleurs assuré la délégation, qui a ajouté qu'en cas de doute sur l'âge de la personne, la condamnation à mort ne peut pas être prononcée.
La délégation a précisé que le faible nombre de femmes représentées au Parlement est le résultat de leur faible score lors du vote et non du nombre de candidats de sexe féminin, qui était important lors des élections. En ce qui concerne les postes administratifs qui sont soumis à nomination, un grand nombre de femmes sont nommées à des postes à responsabilité.
S'agissant des mesures qui sont prises pour faire face à la violence domestique, la délégation a rappelé que la violence à l'égard des femmes n'est pas très connue et rarement dénoncée par les victimes. Aucune statistique n'est donc disponible en la matière.
La délégation a indiqué que le seul cas de torture enregistré dans le pays est le cas d'un condamné à mort qui a été torturé par des agents de police et de sécurité du gouvernorat de Mahwit. Les trois agents ont été reconnus coupables et condamnés à des peines de 10 ans d'emprisonnement pour l'un et de 5 ans pour les deux autres.
En réponse aux questions des experts concernant les dispositions relatives à la déportation, la délégation a indiqué que les personnes en situation irrégulière au Yémen doivent quitter le territoire. Il a ajouté que les expulsions sont exécutées dans le respect de la dignité humaine.
Pour ce qui est de la question de la nationalité, la délégation a précisé que l'époux étranger d'une femme yéménite ne peut obtenir la nationalité yéménite. En revanche, les enfants de mère yéménite et de père apatride ou étranger reçoivent la nationalité yéménite.
En ce qui concerne la détention des femmes, la délégation a reconnu le maintien de certaines femmes en détention après la fin de la peine prononcée. Cela se produit lorsque la famille de la détenue refuse de l'accueillir. Dans ces cas, les autorités préfèrent garder les femmes dans les centres et tente de les aider à se réinsérer dans la société.
La délégation a reconnu l'existence d'actes de «vengeance extrajudiciaire» dans le pays, et a assuré que la législation permet de poursuivre les responsables de crimes de vengeance. Les tribunaux sont saisis de ce type de dossiers et tentent dans la plupart des cas d'éviter les vendettas et de discuter avec les familles pour régler le problème à l'amiable. Les autorités organisent par ailleurs des séminaires pour sensibiliser la population et limiter cette pratique.
Concernant le traitement des prisonniers, la délégation a précisé que la Constitution et le Code pénal prévoient la protection de la personne humaine lors de la garde à vue. Toute personne soupçonnée d'avoir commis un délit et placée en garde à vue doit être présentée à un magistrat au plus tard dans les 24 heures qui suivent son arrestation. Le magistrat ou le ministère public doit informer cette personne des raisons de son arrestation, l'interroger et lui donner la possibilité de faire des déclarations pour sa défense. Le magistrat doit émettre immédiatement un ordre circonstancié de mise en garde à vue ou de libération. En aucun cas le ministère public ne peut placer une personne en garde à vue pour une période de plus de sept jours, à mois qu'un autre ordre judiciaire à cet effet n'ait été délivré. La loi interdit également de placer le prévenu en détention provisoire tant qu'il n'a pas été interrogé et que plusieurs conditions, telles que l'existence de preuves suffisantes, n'ont pas été réunies. Les prévenus doivent être détenus dans un autre lieu que les condamnés. Ils doivent être présumés innocents et il est interdit de leur faire subir de mauvais traitements physiques ou psychologiques pour obtenir des aveux ou à toute autre fin.
La délégation a indiqué que des efforts considérables ont été entrepris pour améliorer la situation dans les prisons. Des enquêtes sont menées au sein même des centres de détention pour identifier les problèmes principaux que rencontrent les prisonniers. Les prisonniers ont le droit d'avoir une vie décente et les autorités tentent dans la limite de leurs moyens d'améliorer leurs conditions de vie. En cas de décès en cours de détention et s'il existe des doutes quant aux circonstances du décès, une autopsie est pratiquée et une enquête est menée.
La délégation a précisé que les magistrats sont indépendants. La loi sur le pouvoir judiciaire stipule que les juges administrent la justice en toute indépendance et ne sont soumis à aucune autre autorité que celle de la loi. Aucun organe ne peut intervenir de quelque façon que ce soir dans une action en justice ou dans un procès. Les procès doivent être publics sauf si le tribunal prononce le huis clos pour préserver la morale ou l'ordre public.
Répondant aux questions des experts concernant la liberté de religion, la délégation a précisé que la liberté reconnue à l'individu de pratiquer sa religion ou sa croyance est consacrée dans une disposition de la Constitution yéménite qui est tirée de la charia islamique et repose sur le principe du respect des croyances d'autrui et de sa liberté de choix
La délégation a souligné qu'il n'existait pas de limite, de droit ou de fait, aux libertés d'opinion et d'expression. Les restrictions auxquelles est assujettie la presse sont davantage des limitations que des interdictions. N'est interdit que ce qui est incompatible avec le Coran et la charia.
En ce qui concerne les procédures d'obtention de licences de publication, la délégation a indiqué que toute personne qui désire publier un journal ou un écrit périodique présente au Ministère de l'information une demande écrite qui doit contenir un certain nombre de renseignements tels que les quatre composantes du nom de l'auteur de la demande d'autorisation, son nom de famille et son adresse, les quatre composantes du nom du directeur de la publication, des codirecteurs et des éditeurs et le nom de l'établissement où l'impression est effectuée si l'intéressé ne possède pas ses propres installations.
La délégation a précisé que quiconque choisit le métier de journaliste doit avoir la nationalité yéménite, avoir 21 ans révolus, avoir la capacité légale, ne pas avoir été condamné pour manquement à l'honneur ou abus de confiance (sauf s'il a été réhabilité conformément à la loi), posséder des diplômes universitaires ou avoir une expérience du journalisme de trois ans au moins et exercer effectivement et de manière continue le métier de journaliste.
Concernant les droits de l'enfant, la délégation a indiqué que le droit à l'éducation est un droit garanti par la Constitution. Tous les enfants ont le droit d'avoir accès aux services éducatifs, sanitaires, récréatifs et autres fournis par l'État. Les orphelins qui sont indigents, handicapés ou sans famille ont droit à une protection, une éducation et une formation, que l'État garantit par la création d'institutions où ils peuvent être recueillis. L'État a également créé des centres de protection sociale chargés du redressement et de la rééducation des jeunes délinquants ou des délinquants potentiels et accorde les ressources et les crédits nécessaires à la gestion et à l'exploitation de ces centres.
Répondant à des questions sur les mesures prises pour éliminer le travail des enfants, la délégation a précisé que le Yémen a passé un accord avec le Programme mondial de lutte contre le travail des enfants. Un département spécial a été créé au sein du gouvernement afin de lutter contre le travail des enfants. Un projet de création de six centres d'accueil des enfants sur l'ensemble du territoire a été élaboré en 2000. Deux centres vont être parachevés dans le courant de l'année.
Les membres du Comité ont posé une nouvelle série de questions sur les points soulevés par la délégation yéménite. Ils ont en particulier souhaité obtenir des informations complémentaires sur le droit de la presse. Un expert a également souhaité obtenir des informations supplémentaires sur le statut du Pacte dans l'ordre juridique yéménite. Il a demandé quelle décision prenaient les tribunaux lorsqu'une partie à un procès demande l'application du Pacte et l'autre partie l'application de la législation nationale.
La délégation a assuré à cet égard qu'en cas d'incompatibilité, les instruments internationaux prévalent sur la loi nationale. La délégation a néanmoins précisé qu'il n'y a pas d'incompatibilité du Pacte avec le Coran et la charia, qui sont les sources du droit yéménites.
Répondant à une question sur la peine de mort, la délégation a indiqué que cette peine était parfois commuée en peine de prison. Sur 344 condamnés à la peine capitale, moins de 20 seront exécutés. Les autres pourront voir leur peine commuée à l'emprisonnement à perpétuité. La délégation a précisé que, dans le cas d'un meurtrie, la famille de la victime peut demander que la peine de mort soit appliquée.

Observations de conclusion du Président
Le Président du Comité, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, a félicité la République du Yémen d'avoir présenté son rapport sans retard. Il a noté avec satisfaction les efforts engagés par les autorités yéménites pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte dans le pays. Il a tenu à souligner à nouveau que les questions des membres du Comité visent essentiellement à clarifier certains points afin d'améliorer la situation des droits de l'homme dans le pays.



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