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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME ACHÈVE L'EXAMEN DU RAPPORT DE LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

12 Juillet 2001



Comité des droits de l'homme
72ème session
12 juillet 2001
Matin






Le Président salue les progrès remarquables accomplis en matière
de droits de l'homme mais émet des préoccupations sur la situation des Roms



Le Comité des droits de l'homme a achevé, ce matin, l'examen du rapport de la République tchèque. Il adoptera ultérieurement, lors de séances privées, ses observations finales sur ce rapport, qui seront rendues publiques à la fin de la présente session, le vendredi 27 juillet.

Présentant ses observations préliminaires, le Président du Comité, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, a rappelé que la République tchèque est une démocratie récente, et a estimé que les progrès qui ont été accomplis ces huit dernières années en matière de protection et de promotion des droits de l'homme sont remarquables. Le Président a toutefois rappelé la préoccupation exprimée par la plupart des membres du Comité au sujet des difficultés rencontrés, à divers niveaux, par la communauté rom. Il a notamment indiqué que les écoles spécialisées, dans lesquelles sont envoyés plus de 75% des enfants rom, leur offrent aucune perspective d'avenir en matière d'emploi, comme en témoigne d'ailleurs le taux de chômage de la communauté rom qui atteint plus de 90% alors que le taux national oscille entre 5 et 10%.

En début de séance, la délégation tchèque a fourni des renseignements complémentaires sur la situation dans le pays, notamment en ce qui concerne la liberté de religion; la liberté d'expression, en particulier dans la presse; la formation des fonctionnaires de justice et de l'administration pénitentiaire; les restrictions qui peuvent être apportées aux dispositions du Pacte lors de situations d'urgence; les droits des détenus, en particulier le problème de la durée de la détention provisoire.

Le Comité entamera demain matin l'examen du rapport de Monaco (CCPR/C/MCO/99/1). Il tient cet après_midi une séance privée consacrée à l'examen de communications qui lui sont soumises en vertu du Pacte.


Fin de l'examen du rapport de la République tchèque

En réponse aux questions des experts s'agissant de la liberté de religion, la délégation a indiqué que les prescriptions de la loi relative à l'inscription des communautés religieuses sur le registre du Ministère de l'éducation ont été amendées. Cette loi imposait qu'une communauté compte au moins 10 000 fidèles adultes domiciliés en République tchèque pour pouvoir être enregistrée, le nombre étant ramené à 500 pour les religions membres du Conseil oecuménique. Ce critère avait été retenu afin d'éviter l'enregistrement de certaines sectes considérées comme obscures ou dangereuses, mais il a également eu pour conséquence de défavoriser des religions mondialement reconnues, comme l'islam, le bouddhisme et l'hindouisme, qui sont faiblement représentées en République tchèque. Depuis l'amendement à la loi, le nombre de fidèles nécessaires pour l'enregistrement d'une religion a été réduit à 300. La délégation a précisé que le cas des sectes considérées comme obscures ou dangereuses, pouvant tendre vers l'extrémisme, est resté hypothétique, de telles sectes n'existant pas en République tchèque. Néanmoins, des mesures préventives ont été adoptées, et un rapport annuel est remis au gouvernement sur le sujet.

Un expert a estimé que la notion de «sectes obscures ou dangereuses» est floue et qu'elle doit être remplacée par une définition claire en éliminant ce critère subjectif et éventuellement discriminatoire.

Répondant à d'autres questions, la délégation a souligné que la liberté d'expression figure parmi les droits et libertés fondamentales qui n'ont été pleinement acquis qu'à la suite des changements démocratiques intervenus en 1989. En pratique, la liberté d'expression et le principe d'indépendance des médias sont strictement respectés. Ceux-ci sont libres de critiquer les représentants des pouvoirs publics sans faire l'objet de censure. Par ailleurs, la télévision dite «publique» n'est pas directement régie par l'État. La fonction de directeur d'une télévision est d'ailleurs incompatible avec toute fonction publique ou politique.

Certains experts ayant souhaité obtenir un complément d'information sur la participation de la société civile à l'élaboration du présent rapport, la délégation a expliqué que les organisations non gouvernementales ont joué un rôle actif et pas uniquement consultatif. Le rapport a été rédigé en collaboration étroite et directe avec des membres de la société civile, dont de nombreuses organisations non gouvernementales, qui ont émis diverses suggestions très concrètes. La délégation a précisé que les informations contenues dans le rapport ainsi que les observations finales du Comité seront largement diffusées par le biais d'internet.

Interrogée sur les programmes de formation des membres du corps judiciaire à l'application des droits consacrés dans le Pacte, la délégation a précisé que ces programmes sont sous la responsabilité et le contrôle du Ministère de la justice. Les enseignants sont des juges de la Cour suprême, des professeurs à la faculté de droit et des avocats. Une partie du programme de formation consiste en une reconstitution d'un procès ayant un rapport direct avec les droits contenus dans les différents instruments internationaux ratifiés par la République tchèque, dont le Pacte relatif aux droits civils et politiques.

En ce qui concerne la formation dispensée au personnel de l'administration pénitentiaire au sujet du Pacte, la délégation a indiqué que depuis le milieu des années 90, des cours spéciaux en matière de droits de l'homme ont été mis en place. Une unité au sein du Ministère de l'intérieur, en charge notamment de rédiger des manuels détaillant le contenu des différents instruments internationaux ratifiés par la République tchèque, a également été créée. Cette unité est également chargée d'assurer le suivi des observations finales adoptées par le Comité, a déclaré la délégation.

Un expert s'est interrogé sur la place du Pacte et de la Charte des libertés et des droits fondamentaux dans l'ordre constitutionnel tchèque. La délégation a expliqué que la Charte, qui reprend un grand nombre de dispositions contenues dans le Pacte, fait partie de l'ensemble des textes constitutionnels de la République tchèque. Le Pacte relatif aux droits civils et politiques, en tant qu'accord international liant la République tchèque, prévaut sur la Charte. Néanmoins, la Charte et le Pacte sont complémentaires et peuvent indépendamment être invoqués devant les tribunaux.

Plusieurs membres du Comité ont estimé que la place du Pacte relatif aux droits civils et politiques dans la hiérarchie normative tchèque n'était pas très claire. Par ailleurs, le Pacte et la Charte ne peuvent être complémentaires puisqu'ils ne sont pas au même niveau dans cette hiérarchie.

Certains experts ayant souhaité des informations supplémentaires sur les restrictions qui peuvent être apportées aux droits énoncés dans le Pacte lors de situations d'urgence (article 4 du Pacte), la délégation a indiqué que ces restrictions sont précisées dans la loi constitutionnelle sur la sécurité de la République tchèque. Cette loi permet d'apporter des restrictions à l'exercice de droits et libertés fondamentales en cas d'état d'urgence, d'état de danger public et en cas d'état de guerre. L'état d'urgence est proclamé pour une période de 30 jours en cas de catastrophe naturelle ou de sinistre écologique ou industriel. La décision de proclamer l'état d'urgence est prise par le gouvernement ou par le Premier ministre, qui doit avoir l'autorisation du gouvernement. Puis, le gouvernement doit aviser sans retard la Chambre des députés qui peut annuler cette proclamation. L'état de danger public survient lorsque la souveraineté, l'intégrité territoriale ou le statut démocratique de l'État sont menacés. La décision de proclamer l'état de danger public ou l'état de guerre est prise par la Chambre des députés et le Sénat à la majorité absolue.

Répondant à la question d'un expert au sujet du rôle joué par le Médiateur national dans les établissements pénitentiaires, la délégation a confirmé que ce dernier pouvait se rendre dans les prisons afin de prendre en considération la plainte d'un détenu.

Concernant les droits de la personne placée en détention provisoire, la délégation a indiqué que le juge doit informer sans retard un proche de l'intéressé et son supérieur hiérarchique du placement en détention provisoire. S'il s'agit d'une personne étrangère, le juge en informe également le consulat concerné. La personne détenue a le droit de consulter un avocat ainsi qu'un médecin.

De nombreux experts ont émis de vives préoccupations s'agissant de la durée de la détention provisoire, qui peut atteindre jusqu'à quatre ans dans certains cas. La délégation a reconnu que les conditions et la durée de la détention provisoire sont loin d'être satisfaisantes en République tchèque. À cet égard, la Cour constitutionnelle examine de nombreuses plaintes ayant trait à la détention provisoire, à son bien fondé ainsi qu'à sa prolongation.


S'agissant du droit de propriété, la délégation a précisé que les étrangers qui résident en République tchèque exercent leur droit de propriété au même titre que les citoyens tchèques. Toutefois, quelques rares exceptions demeurent concernant certains biens appartenant souverainement à l'État.

Un expert s'étant interrogé sur la définition de génocide adoptée par la République tchèque, la délégation a déclaré qu'un génocide n'était pas uniquement constitué de violences physiques mais pouvait également être caractérisé par l'imposition, à un groupe donné, de conditions de vie défavorables.


Observations préliminaires du Président du Comité concernant le rapport de la République tchèque

Présentant ses observations préliminaires, M. Prafullachandra Natwarlal Bhagwati, Président du Comité, s'est félicité du dialogue constructif et franc qui s'est établi entre la délégation tchèque et le Comité. La délégation n'a nullement tenté de masquer les failles qui existent en matière de droits de l'homme en République tchèque, ce qui a été bénéfique à l'échange avec le Comité. Il a rappelé que la République tchèque est une démocratie récente, les progrès qui ont été accomplis ces huit dernières années en matière de protection et de promotion des droits de l'homme sont remarquables. Ils prouvent l'aspiration du peuple tchèque à la démocratie et sa volonté de faire en sorte que le régime totalitaire qui a régné sur le pays durant plus de 40 ans ne soit plus qu'un lointain souvenir. Le Président a également accueilli avec satisfaction la création de l'institution du Médiateur national et du Comité national des droits de l'homme.

Le Président a toutefois noté que les membres du Comité ont encore quelques préoccupations, notamment s'agissant de la place du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans la hiérarchie normative tchèque. Le lien entre le Pacte et la Charte des libertés et droits fondamentaux n'a pas été clairement établi par la délégation. Par ailleurs, le Président a regretté la faible représentation des femmes au Parlement et au sein du gouvernement.

Le Président a rappelé la préoccupation émise par la plupart des membres du Comité au sujet des difficultés rencontrés, à divers niveaux, par la communauté rom. Il a notamment estimé que les écoles spécialisées dans lesquelles sont envoyés plus de 75 % des enfants rom ne peuvent pas être considérées comme des écoles primaires traditionnelles. En effet, les enfants ne parviennent pas à entrer dans les établissements d'enseignement secondaire et n'ont donc aucune perspective d'avenir en matière d'emploi. Le Président a apporté pour preuve le taux de chômage de la communauté rom qui atteint plus de 90 % alors que le taux national oscille entre 5 et 10%. Par ailleurs, des mesures doivent être prises pour agir contre l'impunité dont bénéficient les forces de police qui se sont rendues coupable de violences et de harcèlement à l'égard de membres de la communauté rom.




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