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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EST INFORMÉ DES TRAVAUX DU COMITÉ CONTRE LE TERRORISME DU CONSEIL DE SÉCURITÉ

27 Mars 2003



Comité des droits de l'homme
77ème session
27 mars 2003
Après-midi





Le Comité des droits de l'homme a entendu, cet après-midi, un exposé sur les activités du Comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité des Nations Unies (CCT), présenté par M. Curtis Ward, Conseiller pour l'assistance technique et la liaison avec les organisations internationales et régionales du Comité contre le terrorisme.
M. Ward a rappelé que le CCT a été chargé de surveiller le respect par les États de leurs obligations en vertu de la résolution 1373 et d'examiner leurs rapports sur les mesures prises en vertu de la résolution. Bien qu'il n'appartienne pas au CCT de surveiller les droits de l'homme, il est très conscient des questions qui peuvent se poser à cet égard. C'est pourquoi il encourage le Haut Commissariat et les autres organes des Nations Unies chargés des questions relatives aux droits de l'homme à faire entendre leurs préoccupations en la matière.
Au cours de la discussion entre les membres du Comité et M. Ward, de nombreuses préoccupations ont été soulevées en particulier concernant l'absence d'une définition universellement acceptée de la notion de terrorisme. Plusieurs membres du Comité ont exprimé leurs craintes que la lutte contre le terrorisme serve de prétexte à des violations des droits et des libertés fondamentaux.
M. Ward a encouragé le Comité ainsi que les autres organes internationaux chargés des droits de l'homme à examiner les rapports soumis par les États en vertu de la résolution 1373 et à exprimer leurs inquiétudes lorsque les dispositions juridiques de lutte contre le terrorisme leur paraissent contraires aux instruments internationaux de protection des droits de l'homme. Il s'est prononcé pour une coopération accrue entre le CCT et les organes chargés des droits de l'homme.
À sa prochaine séance publique, le mardi 1er avril à 10 heures, le Comité poursuivra l'examen de son projet de Commentaire général sur l'article 2 du Pacte, relatif à la non-discrimination.

Exposé du Conseiller du Comité contre le terrorisme
M. CURTIS WARD, Conseiller pour l'assistance technique et la liaison avec les organisations internationales et régionales du Comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité des Nations Unies, a indiqué que l'idée de cette réunion d'information vient de la présentation faite par le Haut Commissaire aux droits de l'homme, M. Sérgio Vieira de Mello, devant le Comité contre le terrorisme (CCT).
Rappelant que le Comité contre le terrorisme a été établi en vertu de la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité, qui stipule un certain nombre d'actions devant être prises par les États pour combattre le terrorisme international, M. Curtis a souligné que les membres du Conseil de sécurité étaient conscients lors de l'adoption de cette résolution de ses implications possibles sur les droits de l'homme. C'est pourquoi la résolution stipule que la nécessité de combattre le terrorisme doit se faire en conformité avec la Charte des Nations Unies. Cette assomption a été renforcée par la Déclaration ministérielle annexée à la résolution 1456 (2003) du 20 janvier 2003 et qui exhorte explicitement les États à assurer que les mesures prises pour combattre le terrorisme sont conformes à leurs obligations en vertu du droit international et, en particulier, en matière de droits de l'homme, du droit des réfugiés et du droit humanitaire.
En ce qui concerne le rôle du CCT, M. Curtis a précisé que celui-ci a été chargé de surveiller le respect par les États de leurs obligations en vertu de la résolution 1373 et d'examiner leurs rapports sur les mesures législatives et exécutives dont ils disposent ou qu'ils ont mis en place afin de mettre en œuvre la résolution. Bien qu'il n'appartienne pas au CCT de surveiller les droits de l'homme, il est très conscient des questions qui peuvent se poser à cet égard. C'est pourquoi, il encourage le Haut Commissariat et les autres organes des Nations Unies chargés des questions relatives aux droits de l'homme à faire entendre leurs préoccupations en la matière. C'est également dans cette optique et parce qu'il n'est pas dans son mandat de surveiller directement la conformité des mesures adoptées contre le terrorisme avec les normes internationales en matière de droits de l'homme, que le CCT a pratiqué dès le début un maximum de transparence, en particulier en publiant les rapports qui lui sont soumis afin que d'autres organes puissent les étudier. Ces rapports fournissent des informations détaillées sur les mesures législatives et administratives adoptées ou prévues par les États en vue d'appliquer la résolution 1373, et toues ces informations sont à la disposition des organes des droits de l'homme. En outre, M. Ward a souligné que les représentants de la communauté des droits de l'homme se sont adressés à plusieurs reprises au CCT. Le CCT a bénéficié des informations apportées en particulier par Mme Mary Robinson, ancienne Haut Commissaire aux droits de l'homme en février 2002, et M. Sérgio Vieira de Mello, actuel Haut Commissaire le 21 octobre 2002. Il a ajouté que les experts du CCT sont à présent plus conscients des implications potentielles des législations nationales sur les droits de l'homme.
M. Ward a en outre souligné la complexité de l'appareil législatif nécessaire pour combattre le terrorisme. À cet égard, il a estimé que si les pays dans lesquels la primauté du droit est acquise ont les moyens d'équilibrer les contraintes liées à la protection des droits fondamentaux et les contraintes sécuritaires, il n'en va pas toujours de même dans les pays qui ont une tradition politique qui s'ancre moins dans la primauté du droit. Soulignant l'interdépendance entre primauté du droit, lutte contre le terrorisme et droits de l'homme, il a toutefois noté que les pays qui ont les systèmes juridiques les moins développés sont aussi ceux qui sollicitent le plus l'assistance d'experts extérieurs. M. Ward a indiqué que le CCT s'emploie à faciliter une telle assistance et qu'il a invité le Haut Commissariat aux droits de l'homme à participer à son programme d'assistance.

Discussion
En réponse aux questions et aux inquiétudes exprimées par des membres du Comité, M. Ward a précisé que le CCT est l'«alter ego» du Conseil de sécurité, qui est un organe politique au sein du système des Nations Unies, c'est-à-dire que sa composition est la même que celle du Conseil de sécurité.
M. Ward a ensuite rappelé qu'il n'y a pas de définition universelle du terrorisme car les tentatives d'y parvenir ont échoué. Le CCT n'a pas l'intention de parvenir à une définition du terrorisme. En revanche, il y a des actes de terrorisme qui font l'objet d'une acceptation générale et c'est sur ces «actes» que les États sont appelés à légiférer. En l'absence de notion de «crime de terrorisme», le CCT a demandé aux États qu'ils définissent les actes qui peuvent être qualifiés d'actes de terrorisme et c'est sur cette base que ceux-ci peuvent faire l'objet de sanctions. Si, dans le cadre de son mandat, le CCT ne peut surveiller que l'application de la résolution 1373 alinéa par alinéa, rien n'empêche les autres organes des Nations Unies d'utiliser les rapports et les informations qu'ils contiennent pour vérifier la conformité des législations adoptées avec les instruments pertinents, en particulier les instruments relatifs aux droits de l'homme. M. Ward a rappelé à cet égard qu'un grand nombre d'États n'ont pas adopté de législations spécifiques en matière de lutte contre le terrorisme.
M. Ward, soulignant que le CCT est un organe politique et qu'il fonctionne sur la base du consensus, a indiqué que celui-ci a fonctionné dès le départ dans la plus grande transparence. La première étape du travail du CCT a été de s'assurer qu'un processus était initié dans les pays afin d'adopter une législation spécifique, en particulier concernant la répression du financement des activités terroristes et du soutien direct ou indirect à ces activité ainsi que le renforcement de la coopération internationale contre le terrorisme. L'étape actuelle se concentre sur l'application pratique de ces lois ainsi que sur le respect des précautions qui ont pu être introduites en particulier pour protéger les droits de l'homme.
En réponse à une question sur les critères permettant au CCT d'évaluer la conformité des législations antiterroristes avec les droits de l'homme, M. Ward a indiqué que cela ne fait pas partie du mandat du CCT. Les préoccupations par rapport aux droits de l'homme ont été très clairement exprimées par les Ministres dans leur déclaration du 20 janvier mais, pour l'instant, elles ne relèvent pas du mandat du CCT. M. Ward a estimé que le Conseil pourrait être disposé à entendre les préoccupations qui pourraient exister en la matière.
Évoquant les programmes de formation qui ont été mis en œuvre, M. Ward a espéré que le renforcement de la capacité des États permettra d'assurer que la lutte contre le terrorisme ne se fait pas au détriment de l'état de droit. À cet égard, il s'est prononcé pour une mise à disposition plus vaste des programmes de formation existants et, de façon générale, pour un meilleur partage de l'information. Il a en outre rappelé que le CCT peut orienter les États qui le demandent vers les organisations compétentes afin de recevoir l'assistance nécessaire à la rédaction de leurs législations. Il a invité le Haut Commissariat à se joindre à ce programme d'assistance.
Les questions relatives à l'autodétermination et à la lutte contre l'occupation n'ont pas été soulevées devant le CCT, a indiqué M.Ward en réponse aux questions des membres du Comité, non plus que la distinction entre terrorisme individuel, terrorisme de groupe ou terrorisme d'État. M. Ward a rappelé que le Conseil de sécurité ne légifère pas nécessairement sur toutes les questions et qu'en outre, certaines questions peuvent gagner à rester en dehors du Conseil.
Sur les causes premières du terrorisme, M. Ward a indiqué que bien qu'il n'existe pas de consensus sur une cause unique, il est toutefois reconnu que la pauvreté et l'oppression constituent un terreau favorable au terrorisme. Toutefois, le Conseil économique et social est un forum plus adapté pour discuter de ces questions, a estimé M. Ward qui a en outre évoqué un certain nombre d'initiatives pour encourager, par exemple, le dialogue entre les civilisations.
Le Conseiller du Comité contre le terrorisme a souligné l'importance pour les organes des droits de l'homme de rester vigilants et de surveiller sans cesse la conformité des législations avec les principes fondamentaux.
Plusieurs experts ont souligné l'importance d'insister sur la nécessité de respecter les normes internationales relatives aux droits de l'homme et au droit humanitaire dans la lutte contre le terrorisme. À cet égard, les membres du Comité se sont félicités de la disponibilité des rapports des pays au Comité contre la torture sur l'internet (http://www.un.org/french/docs/sc/committees/1373/, cliquer Documentation), ce qui permet au Comité des droits de l'homme d'en prendre connaissance lorsqu'il examine la situation des droits de l'homme dans les mêmes pays.
S'agissant de la méthodologie du CCT, certains membres ont exprimé leur préoccupation que certaines questions posées par le CCT puissent conduire les pays à créer des lois spécifiques condamnant le terrorisme sans qu'il soit requis de définition claire de la notion de terrorisme. Ils ont également exprimé leur préoccupation face à la tendance à recourir au refoulement des demandeurs d'asile suspectés d'activités terroristes ou au rétablissement de la peine capitale pour des crimes qualifiés de «terroristes». D'autres membres ont mis l'accent sur la remise en cause de la liberté de réunion ou le transfert de nombreux pouvoirs discrétionnaires à l'exécutif, notamment, en ce qui concerne la détention. Certains ont en outre déploré le recul progressif qui s'est opéré dans le sens de politiques plus restrictives en matière d'immigration à la suite de l'adoption des mesures contre le terrorisme.
Plusieurs membres ont en outre souligné l'importance de s'attaquer aux causes et pas seulement aux symptômes du terrorisme. D'autre se sont interrogés sur les distinctions à faire sur terrorisme et résistance, ainsi que entre terrorisme individuel, terrorisme de groupe et terrorisme d'État.
Soulignant les nombreux problèmes pratiques aggravés par la difficulté pour de nombreuses personnes d'avoir recours à un tribunal, certains experts ont suggéré que le Comité des droits de l'homme dispose d'arrangements institutionnels avec le CCT pour échanger des informations sur les pays examinés et trouver des solutions aux conflits qui peuvent surgir entre les nécessités de lutter contre le terrorisme et de protéger les droits fondamentaux. À cet égard, il a été suggéré que des questions sur les droits de l'homme ainsi que sur la définition donnée par les pays du terme «terrorisme», soient introduites dans les questionnaires du CCT.



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