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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

LA COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME ENTEND QUATRE PERSONNALITÉS DE RANG MINISTÉRIEL ET LE HAUT COMMISSAIRE DES NATIONS UNIES POUR LES RÉFUGIÉS

24 Mars 1999


HR/CN/99/5
24 mars 1999 (Matin)



Le Rapporteur spécial sur l'utilisation des mercenaires présente son rapport
dans le cadre de l'examen de la question du droit à l'autodétermination


La Commission des droits de l'homme a entendu, ce matin, les déclarations des ministres des droits de l'homme du Gabon et de l'Irlande, ainsi que de la Sous-Secrétaire d'État aux affaires étrangères du Mexique et du Vice-Président du Conseil d'État de Cuba.

La Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, MmeSadako Ogata, est également intervenue. Elle a souligné en particulier que l'afflux de réfugiés, se traduit généralement par des violations des droits de l'homme. Les deux phénomènes sont liés, d'où l'importance pour le Haut Commissariat aux droits de l'homme et le Haut Commissariat pour les réfugiés de conjuguer leurs efforts.

M.Pierre-Claver Zeng-Ebome, Ministre pour les droits de l'homme du Gabon, a notamment indiqué que son pays avait signé une convention avec le Haut Commissariat aux droits de l'homme portant, en particulier, sur l'harmonisation du droit interne et la formation des fonctionnaires.

Mme Liz O'Donnell, Ministre pour les droits de l'homme de l'Irlande, a déclaré que les questions de droits de l'homme sont essentielles pour la stabilité politique de l'Irlande du Nord et pour consolider une paix si longtemps attendue. Elle a souligné la nécessité d'une enquête indépendante sur le meurtre de Rosemary Nelson.

La Sous-Secrétaire d'État aux affaires étrangères du Mexique, MmeCarmen Moreno del Cueto, a déclaré que, son Gouvernement continue de rechercher au Chiapas, une paix digne et durable par le dialogue et la négociation avec l'EZLN, tout en prenant de mesures pour renforcer l'état de droit et en s'attaquer aux causes structurelles du conflit.

M.Carlos Lage Dávila, Vice-Président du Conseil d'État de Cuba, a déclaré que le blocus et la guerre économique contre son pays constituent un véritable génocide. Il a dénoncé la décision de l'OTAN de procéder à des frappes contre la Serbie.

Dans le cadre du débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, le Rapporteur spécial sur l'utilisation des mercenaires a présenté son rapport. M.Enrique Bernales Ballesteros a rappelé que le recours à des mercenaires n'est pas acceptable, même lorsqu'il prétend restaurer un gouvernement constitutionnel. Les représentants des pays suivants ont pris la parole dans la cadre de ce débat : Fédération de Russie, Chine, Cuba, Tunisie et Indonésie.

Les représentants des pays suivants ont pris la parole au sujet de l'organisation des travaux de la Commission : Allemagne, Argentine, Norvège, Chili, Canada, Afrique du Sud, Lettonie, Royaume-Uni, États-Unis.

Cet après-midi, à 15 heures, le Groupe de travail de session chargé d'examiner les préparatifs à la Conférence mondiale contre le racisme commencera ses travaux. La Commission reprendra ses travaux en séance plénière demain matin, à 10 heures, pour poursuivre son débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Déclaration dans le cadre du débat général

MME CARMEN MORENO, Sous-Secrétaire aux relations extérieures du Mexique, a indiqué que son pays, comme d'autres pays d'Amérique latine, est confronté aux défis de la mondialisation et s'efforce de réaliser son droit au développement, de renforcer sa démocratie et de consolider les droits de l'homme. Le Mexique, qui a fait la preuve de son engagement permanent pour la défense et le respect des droits de l'homme, a traduit dans son cadre juridique interne les conventions internationales relatives aux droits de l'homme. À cet égard, Mme Moreno a cité de nouvelles lois adoptées au cours de l'année dernière qui illustrent le travail accompli en matière de modernisation et d'actualisation de l'appareil juridique national en matière de défense et de respect des droits de l'homme. Récemment, un programme national de promotion et de renforcement des droits de l'homme a été mis en place avec pour principal objectif le renforcement d'une culture de respect des droits de l'homme et une collaboration plus étroite entr
e le secteur public et la société civile dans ce domaine. MmeMoreno a aussi insisté sur l'importance qu'attache le Mexique aux droits économiques, sociaux et culturels.

Au Chiapas, le Gouvernement mexicain continue de rechercher une paix digne et durable à travers le dialogue et la négociation avec le EZLN, en renforçant l'état de droit et en s'attaquant aux causes structurelles du conflit, a indiqué Mme Moreno. Pour preuve de la bonne volonté du Gouvernement, elle a cité le bon déroulement, dimanche dernier, de la consultation organisée par l'EZLN et a détaillé les actions entreprises par le Gouvernement dans les domaines de la santé, de l'éducation et de la réforme agraire.

Mme Moreno a ensuite évoqué les problèmes liés au phénomène migratoire et déclaré que sa délégation présenterait un projet de résolution sur la problématique des droits de l'homme des travailleurs migrants. Elle a également annoncé que le Rapporteur spécial sur les éxécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, avait répondu favorablement à l'invitation que lui avait adressé le Mexique de se rendre au Mexique.

M. PIERRE-CLAVER ZENG-EBOME, (Ministre des droits de l'homme et des relations avec les institutions constitutionnelles du Gabon, a estimé que les droits de l'homme existent dans toutes les civilisations, sans exclusive, et qu'ils sont la base de l'humanité. «Au Gabon, nous ne croyons à la réalisation totale de l'être humain que dans la liberté», a-t-il déclaré. Cette liberté ne peut s'apprécier sans le respect de l'autre et la prise de conscience par chaque citoyen de ses responsabilités. Cependant, a ajouté le Ministre, «la certitude d'avoir découvert la seule vérité qui vaille, celle qui protège les intérêts du petit nombre, nous rappelle chaque jour que nos instincts sont fragiles et dangereux». Sous des formes qui ne sont pas très éloignées les unes des autres, le Nord et le Sud ont États-Unis et ont encore des instincts de barbarie.

Le Gabon s'est engagé sur la voie de la modernité, une modernité qui tient compte de son identité. Pour préserver la paix civile, le passage par le parti unique a sans doute été nécessaire dans la marche du pays vers cette modernité. En 1990, ce parti unique a lui-même aidé à l'avènement du pluralisme politique. Un cadre institutionnel a été mis en place avec la création de nouvelles institutions et une Commission nationale des droits de l'homme vient d'être créée. En vue d'aider au renforcement et à la consolidation du processus de démocratisation et de construction d'un État de droit, le gouvernement gabonais vient de signer une Convention avec le Haut commissaire aux droits de l'homme. L'exécution de cette Convention portera sur l'harmonisation du droit interne avec les normes internationales et sur une meilleure prise en compte des textes législatifs et réglementaires au niveau des instances judiciaires et administratives, qui permettra la formation de plusieurs fonctionnaires gabonais.

M. Zeng-Ebome a fait valoir que le ministère dont il a la charge, à savoir le Ministère des droits de l'homme, a été mis en place le 25 janvier dernier. Il a estimé que c'est au pouvoir politique qu'incombent le devoir et l'obligation de garantir la jouissance effective des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Sans attendre, il conviendrait de travailler résolument à rendre accessible au plus grand nombre le droit à l'éducation, le droit à la santé, le droit au travail, le droit à la sécurité sociale et surtout le droit au développement. Car seul le rééquilibrage économique entre le Nord et le Sud, notamment par l'effacement de la dette qui étrangle les États de tiers monde, et principalement ceux de l'Afrique, permettrait l'émergence de citoyens libres et responsables, prêts à oeuvrer pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales. Un acte de solidarité de la part des pays nantis devient une exigence à la fois morale et économique, a-t-il conclu.

MME LIZ O'DONNELL, Ministre pour les droits de l'homme de l'Irlande, a fait observer qu'au cours de la décennie écoulée, le monde a connu, d'un côté, les horreurs du conflit ethnique en ex-Yougoslavie et au Rwanda et a assisté, de l'autre, à l'épanouissement de la démocratie en Afrique et en Amérique latine. Des lueurs d'espoir sont apparues au Nigéria et au Timor oriental. Les questions de droits de l'homme sont tout aussi vitales pour la stabilité politique de l'Irlande du Nord et essentielles si l'on veut conforter une paix si longtemps attendue. À cet égard, elle a rappelé que ce que l'on a appelé les «troubles» dans cette région a commencé avec l'émergence d'un mouvement de droits civils né il y a trente ans en raison de la négligence et des violations dont ont fait l'objet les droits civils et politiques d'une grande partie de la population d'Irlande du Nord. Les manquements des autorités de Belfast de l'époque pour répondre de manière adéquate aux aspirations en matière de droits civils a été pro
fondément déstabilisateur et la violence paramilitaire qui s'en est suivie a infligé de graves souffrances tout en violant massivement les droits de l'homme, ce qui allait à l'encontre de l'objectif recherché. La défaite du terrorisme est devenue l'objectif essentiel, reléguant au second plan les droits civils. L'Accord signé à Belfast il y a un armes nucléaires engage le pouvoir souverain en Irlande du Nord à exercer son autorité avec une impartialité rigoureuse au nom de toute la population. Mme O'Donnell a salué l'établissement de nouvelles commissions des droits de l'homme, tant au Nord qu'au Sud, l'adoption d'une nouvelle Charte des droits en Irlande du Nord et la mise sur pied d'une Commission sur l'égalité en Irlande du Nord.

C'est en gardant à l'esprit cette expérience, qui permet de comprendre que les bonnes pratiques en matière de droits de l'homme ne vont pas d'elles-mêmes, que la délégation irlandaise s'associera à la déclaration de l'Union européenne au titre du point de l'ordre du jour relatif aux violations des droits de l'homme dans tous les pays. Un dialogue et une coopération honnêtes entre les diverses composantes de la famille des nations est nécessaire au sein de la Commission si l'on veut progresser vers la réalisation de l'objectif déclaré du respect universel des droits de l'homme pour tous. S'il n'existe aucune région du monde qui soit totalement exempte de violations des droits de l'homme, il existe néanmoins une échelle dans ces violations. «Aucun d'entre nous n'est innocent», a déclaré Mme O'Donnell. Cette attitude devrait être le point de départ permettant à la Conférence mondiale contre le racisme d'être couronnée de succès. Cette Conférence devra être orienté vers l'action pour lutter contre les for
mes contemporaines de racisme et non pas un forum pour revenir sur le passé. Elle devra traiter de questions telles que la mondialisation, les migrations et l'utilisation croissante de l'Internet.

Mme O'Donnell a par ailleurs indiqué que le Rapporteur spécial sur l'indépendance des juges et des avocats, M. Param Cumaraswamy a, dans le rapport qu'il présente cette année à la Commission, attiré l'attention sur l'intimidation et le harcèlement dont sont victimes les avocats de la défense en Irlande du Nord. Le récent meurtre, la semaine dernière, de Rosemary Nelson, témoigne de la pertinence du mandat de ce Rapporteur spécial. Le Gouvernement irlandais estime qu'il est absolument essentiel que l'enquête annoncée par le Gouvernement britannique concernant le cas de Rosemary Nelson soit totalement indépendante. Mme O'Donnell a par ailleurs indiqué avoir pris connaissance du rapport du British Irish Rights Watch qui contient des preuves et des allégations concernant l'implication des forces de sécurité dans le meurtre de Patrick Finucane, il y a dix ans. Le Gouvernement irlandais entend exhorter les autorités pertinentes à répondre aux appels pour une enquête indépendante soit menée au sujet du meurtre
de M. Finucane.

M. CARLOS LAGE DÁVILA, Vice-président du Conseil d'État de Cuba, a déclaré que les règles de fonctionnement de la Commission, et en particulier le temps de parole, peuvent uniquement convenir à une grande puissance qui ne souhaite pas que la vérité soit exprimée. Il a indiqué que le texte complet de son discours serait distribué.

M. Lage Dávila a déclaré que l'on ne peut agresser un pays pendant 40ans puis le condamner lorsqu'il se défend. Il n'est pas possible d'accepter que les États-Unis se désignent eux-mêmes comme juge suprême dans le domaine des droits de l'homme alors que de nombreuses violations de ces droits fondamentaux se produisent dans ce pays notamment le maintien de la peine de mort. Le blocus et la guerre économique constituent un véritable génocide, a déclaré M.Lage-Davida.

Le Vice-président du Conseil d'État de Cuba a protesté contre d'éventuelles frappes de l'OTAN sur la Serbie, pays qui a lutté héroïquement contre les nazis pendant la deuxième guerre mondiale.

Déclaration de la Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés

MME SADAKO OGATA, Haut Commissaire des Nations Unies aux réfugiés, déclare que s'occuper des réfugiés ou des personnes déplacées est une expérience qui nous ramène à la triste réalité. Le Haut Commissariat a assisté à une recrudescence des violations des droits de l'homme alors que la communauté internationale peut s'enorgueillir de posséder un arsenal juridique étendu dans le domaine de la défense des droits de l'homme. Il arrive que le HCR se sente impuissant devant l'étendue des violations des droits de l'homme lors de conflits armés et surtout de conflit internes qui provoquent des déplacements massifs de civils. Les femmes, les enfants et les vieillards souffrent particulièrement de ces situations. Ainsi, dans la province yougoslave du Kosovo, Mme Ogata avait demandé en 1998 à M. Milosevic de ne plus utiliser la violence contre les civils. Suite aux pourparlers avec le représentant des États-Unis, M. Holbrooke, la violence avait diminué. Malheureusement, les violences contre les civils ont repris de
ux mois plus tard, en particulier au village de Racak, avec le massacre de 45 civils et des exécutions sommaires. Mme Ogata a lancé un nouvel appel au Président Milosevic tout en reconnaissant que les Serbes du Kosovo sont les cibles de la violence de l'Armée de libération du Kosovo. Depuis les Accords de Rambouillet, plus de 80 000 personnes ont dû quitter leurs foyers et 260000personnes sont déplacées à l'intérieur de la province du Kosovo. La Mission de vérification de l'OSCE au Kosovo a quitté la province il y a quelques jours, et le HCR a dû rappeler son personnel la nuit dernière.

Le Sierra Leone, où les rebelles combattent un gouvernement élu démocratiquement, est aussi un exemple tragique. Les rebelles s'attaquent délibérément aux femmes et aux enfants. Des vilonces contre les jeunes détenus ont également été signalées. Le Haut Commissariat exprime également sa préoccupation croissante au sujet de l'Indonésie. Des populations ont été brutalisées et des villages pillés. Cette semaine, des combats ont États-Unis lieu sur l'île de Bornéo où il existe une grave menace de déplacements massifs et de violences contre les minorités.

Des violations des droits des femmes et des jeunes femmes dans les camps de réfugiés en Afrique sub-saharienne font l'objet d'un programme spécial a indiqué Mme Ogata. Elle a aussi attiré l'attention sur la situation des femmes en Afghanistan, ou les Taliban leur refusent leurs droits les plus élémentaires.

Mme Ogata a souligné que ces nombreuses situations de violations des droits de l'homme sont étroitement liées à l'afflux de réfugiés. C'est pourquoi les efforts du Haut Commissariat aux droits de l'homme et du HCR sont étroitement liés et se renforcent mutuellement. Les droits figurant dans les accords internationaux, et plus particulièrement dans le Pacte relatif aux droits sociaux, économiques et culturels ne doivent pas être considérés comme utopiques.
Les principes prioritaires pour le HCR sont la protection physique des réfugiés, leur droit à un logement convenable, le maintien de la cellule familiale, la protection des enfants qui sont des cibles particulièrement exposées aux agressions. Il est également essentiel que le personnel humanitaire puisse toujours avoir accès aux personnes déplacées, a conclu MmeOgata.

Présentation du rapport sur l'utilisation des mercenaires

Présentant son rapport, M.ENRIQUE BERNALES BALLESTEROS, Rapporteur spécial sur la question de l'utilisation de mercenaires, a souligné que l'on aurait pu penser que lorsque les conflits armés ont pris fin et que des accords de paix ont été signés, l'intervention de mercenaires cesserait dans les pays affectés. Or, il n'en est rien : les mercenaires continuent de s'immiscer dans les conflits qui se déroulent dans divers pays africains. Cette immixtion se fait par le biais d'entreprises qui offrent, à l'échelle internationale, des services de sécurité et d'assistance militaire et dont l'objectif est de gagner de l'argent en faisant de la guerre un commerce lucratif. En Angola, l'UNITA ne tient pas compte des accords de paix et se réarme avec le concours de mercenaires. Des mercenaires sont également présents au Congo, en République démocratique du Congo, en Sierra Leone et dans d'autres pays africains.

Au Sierra Leone, les affaires publiques ont été confiées à une entreprise privée de sécurité militaire nommée Executive Outcomes. Le Président destitué en mai 1997, lié au Front Révolutionnaire Uni, a fait appel à une autre entreprise de sécurité militaire, la Sandline International. Fin 1998, les forces du Front sont entrées dans Freetown où elles ont commis des crimes odieux contre la population. D'après les données disponibles, ce sont les mercenaires d'une entreprise créée par l'ex-Colonel israélien Yair Klein apparemment financé à partir du Libéria voisin qui ont apporté leur soutien militaire aux rebelles, a déclaré M.Ballesteros. Il a souligné qu'aujourd'hui la situation au Sierra Leone est un désastre humanitaire et que la présence de mercenaires au sein de toutes les forces qui s'affrontent militairement ne fait que prolonger le conflit.

Le Rapporteur spécial a affirmé que le recours à des mercenaires n'est pas acceptable, même lorsqu'il prétend viser la restauration d'un gouvernement constitutionnel destitué par un fait de guerre. M.Ballesteros a attiré l'attention sur la position de l'Afrique du Sud qui, en 1998, a adopté une loi réglementant l'assistance militaire à l'étranger et la compétence des entreprises privées en la matière. Il a également souligné que, lors de la visite qu'il a effectuée au Royaume-Uni le mois dernier, il a pu observer l'importance que le Gouvernement du Royaume-Uni accorde à cette question et à sa résolution globale dans le strict respect du droit à l'autodétermination et des droits de l'homme.

Dans son rapport (E.CN.4/1999/11), M.Ballesteros fait part de communications qu'il a reçues de divers gouvernements. La République fédérale de Yougoslavie fait état de «données officielles sur la participation active de mercenaires étrangers aux actes de terrorisme perpétrés par la soi-disant Armée de libération du Kosovo» ainsi que de «preuves de l'aide et du soutien que la République d'Albanie a prêtés aux terroristes de la soi-disant Armée de libération». La République de Macédoine «a aussi servi aux mercenaires à s'infiltrer sur le territoire yougoslave». L'Azerbaïdjan a pour sa part présenté une liste de personnes qui avaient combattu dans les rangs arméniens dans le conflit armé dirigé contre son pays, indique par ailleurs le rapport. Maurice a répondu à la demande de renseignement du Rapporteur spécial en précisant qu'il n'y a pas la moindre preuve de l'existence d'activités mercenaires à Maurice. Cuba affirme que deux citoyens guatémaltèques ont tenté d'introduire dans le pays le matériel nécess
aire pour fabriquer des engins explosifs, à la solde d'un ressortissant salvadorien. Le Gouvernement cubain, insiste par ailleurs sur l'explosion qui s'était produite à l'entrée de l'hôtel «Cohiba» et affirme que ces opérations ont un rapport avec les «organisations extrémistes qui ont leur siège à Miami». Il demande instamment au Rapporteur spécial d'user de ses bons offices pour demander aux États-Unis de «prendre des mesures énergiques et décisives pour mettre fin à ces faits répréhensibles». Cuba invite le Rapporteur spécial à se rendre dans le pays.

Dans ses conclusions, le rapport souligne que les mercenaires ont été particulièrement actifs en Sierra Leone. La Convention internationale contre le recrutement, l'utilisation, le financement et l'instruction de mercenaires, adoptée en 1989, n'est toujours pas entrée en vigueur puisque seize pays seulement l'ont ratifiée ou y ont adhéré, rappelle le rapport. Le Rapporteur spécial estime qu'il conviendrait que la Commission et d'autres organes de l'ONU examinent la possibilité d'organiser une conférence internationale d'experts chargés d'étudier la question de l'utilisation de mercenaires et de prendre position à son sujet, en examinant en particulier le risque que les entreprises qui fournissent des services d'aide et de conseil en matière militaire (dont le rapport fournit une liste non exhaustive dans son paragraphe 73) se substituent à l'ONU pour les opérations de consolidation et de maintien de la paix, le risque que la passation de contrats avec ces entreprises conduise à légitimer le recours à des m
ercenaires et tout spécialement l'élaboration d'un système de protection internationale des droits de l'homme et des règles du droit humanitaire.

Débat sur le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes

M.SERGUEI TCHOUMAREV (Fédération de Russie) a souligné la nécessité de redéfinir les principes du droit à l'autodétermination afin qu'il ne puisse pas être interprété comme un moyen d'ébranler la stabilité des États et de menacer leur intégrité territoriale en encourageant des tendances séparatistes. Pour M.Tchoumarev, la solution se trouve dans le respect et la concertation. À cet égard, un État fédératif, comme la Fédération de Russie, crée les conditions du respect des droits de tous les peuples et de toutes les nationalités, sans compromettre l'unité nationale, en leur garantissant le droit à une autonomie nationale et culturelle.

M.Tchoumarev a indiqué que le règlement du conflit au Moyen Orient exigeait une attention soutenue de la communauté internationale. En tant que parrain du processus de paix, la Fédération de Russie souhaite que les pourparlers de paix se poursuivent, notamment sur le problème des implantations israéliennes dans les territoires occupés et sur le statut final de ces territoires, y compris Jérusalem. M.Tchoumarev a également mis l'accent sur la situation humanitaire dont il a estimé qu'elle est aussi importante que le problème du statut de la Palestine auquel elle est étroitement liée, notamment à cause du problème des réfugiés.

M.WANG MIN (Chine) a rappelé que le respect du droit à l'autodétermination s'oppose à toute ingérence compromettant la souveraineté nationale, l'indépendance et l'intégrité territoriale ou empêchant les peuples de tous les pays de choisir leurs systèmes politiques et sociaux, leurs modèles économiques et leur voie vers le développement. Aucun système ne doit imposer sa propre idéologie ou son système social sur d'autres. La Chine est opposée aux pressions des grands sur les petits et à toute ingérence d'un pays dans les affaires intérieures d'autres pays par le biais de pressions politiques ou de sanctions économiques. Le droit à l'autodétermination ne doit pas être interprété comme autorisant ou encourageant des actions visant à dissoudre ou violer l'intégrité territoriale et l'unité politique d'États indépendants et souverains. Les Nations Unies et ses organes pertinents doivent s'opposer avec fermeté à toute activité séparatiste et de démembrement d'États souverains, a-t-il indiqué.

Par ailleurs, M.Wang a rappelé qu'une paix durable et de la stabilité au Moyen Orient dépendant du rétablissement des droits des Palestiniens, y compris leur droit à l'autodétermination. À cet égard, il a estimé qu'Israël et les pays arabes devaient trouver, pour la négociation, une solution juste et durable sur la base des résolutions pertinentes des Nations Unies, des accords déjà conclus et du principe de la «terre contre la paix».

MME MERCEDES DE ARMAS GARCIA (Cuba) a déclaré que la défense du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est toujours d'actualité malgré la disparition du système colonialiste. En effet, de nouvelles menaces découlant d'une politique de domination visent les pays en développement par le biais du principe de «droit d'ingérence humanitaire». On voudrait que ces pays se soumettent à des modèles étrangers que l'on présente comme universels. La communauté internationale doit rejeter les tentatives d'altération du principe d'autodétermination. Ce principe essentiel est directement lié aux principes de souveraineté et d'indépendance nationale.

Les activités mercenaires n'ont pas cessé. Elles ont même augmenté et pris de nouvelles formes plus dangereuses qui menacent le respect des droits de l'homme et le plein exercice du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.
Cuba soutient le travail d'investigation du Rapporteur spécial sur les mercenaires. Il a attiré l'attention sur le problème particulier posé par ces activités illégales lorsqu'elles sont effectuées par des individus agissant contre leur propre pays, au service d'une puissance étrangère. Cuba soutient la proposition de M.Ballesteros de réfléchir à une nouvelle définition du terme de mercenaire et de poser comme circonstance aggravante le fait pour un pays de saper l'autorité intérieure d'un autre État en louant les services de nationaux de cet État.

M.KAMEL MORJANE (Tunisie) a attiré l'attention de la Commission sur la situation explosive qui existe dans les territoires arabes occupés par Israël en Palestine, en Syrie et au Liban. Il a déploré que les autorités israéliennes intensifient leurs actes violents dans ces régions. Il a dénoncé les pratiques israéliennes visant à judaïser Jérusalem en modifiant la composition démographique de la ville. Le représentant tunisien a souligné que les violations flagrantes des accords de paix de la part d'Israël menacent le processus de paix. Il a rappelé que l'Assemblée générale a reconnu que l'attitude israélienne constitue une menace à la paix et à la sécurité internationale. Il s'est réjoui de la position adoptée par l'Union européenne de ne pas reconnaître Jérusalem comme étant la capitale d'Israël. Chacun espérait que la Conférence de Madrid de 1991 aboutirait à une paix juste et globale. Malheureusement, le fait que les autorités israéliennes continuent de faire fi des résolutions internationales a men
é la région dans une nouvelle situation de tensions. La Tunisie exprime sa profonde préoccupation face à cette situation.

MME LUCIE RUSTAM (Indonésie) a exprimé sa préoccupation face à la maigreur des progrès enregistrés au fil des ans dans le domaine des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, y compris la Palestine. Elle a rappelé que les Palestiniens jouissent actuellement d'une autonomie totale ou partielle sur 27% de la Cisjordanie. Mais qu'Israël conserve le contrôle en matière de sécurité sur l'ensemble de ces territoires, à l'exception de 3% du total. En vertu des Accords d'Oslo et d'Hébron, Israël était censé procéder à trois retraits supplémentaires de Cisjordanie avant le milieu de l'année 1998 avant de parvenir à un accord final d'ici mai 1999. Malheureusement, le calendrier initial est désespérément en retard et la confiance entre les deux parties a virtuellement disparu. Le processus de paix ne saurait enregistrer le moindre progrès sans que les deux parties acceptent les initiatives de WyeRiver concernant une seconde phase du retrait israélien de Cisjordanie ainsi que la reprise des discussion
s sur l'étape finale. Se déclarant particulièrement préoccupée par la reprise de la violence et les dangers potentiels d'une escalade si un accord n'est pas obtenu rapidement, la représentante indonésienne a jugé important que la Commission envoie un message clair au Gouvernement d'Israël lui demandant d'agir immédiatement pour mettre un terme aux violations des droits de l'homme dans les territoires occupés. La cause profonde de ces violations réside dans le non-respect, par le Gouvernement israélien, du droit des Palestiniens à l'autodétermination.

Débat sur l'organisation des travaux

M. WILHEM HOYNK (Allemagne), s'exprimant au nom de l'Union européenne, a estimé qu'il fallait améliorer le mécanisme afin de permettre à toutes les délégations de participer aux discussions et à la prise de décisions. Mais le rôle crucial des mécanismes de défense des droits de l'homme rend urgent le démarrage de ce processus, a-t-il ajouté. À cet égard, il a estimé que l'idée de ne pas procéder à des discussions de fond n'est pas acceptable et que la création d'un groupe de travail n'était pas pratique. L'Union européenne ne souhaite pas une solution rapide, mais l'amorce d'un processus pragmatique dans le cadre duquel toutes les délégations puissent participer de façon équitable. En ce qui concerne l'obligation de consensus, M. Hoynk a jugé qu'elle n'était pas réaliste et imposerait un droit de veto de facto. Il faudrait dans le cadre de consultations informelles, trouver des solutions qui puissent être adoptées par consensus. Il a souligné enfin la nécessité d'établir la confiance entre toutes les d
élégations.

M. MANUEL BENITEZ (Argentine) a salué la transparence qui a marqué les consultations du Bureau. L'interdépendance entre les différents mécanismes de la Commission ne doit pas cacher le fait qu'il existe des degrés divers d'urgence entre les différents problèmes abordés par la Commission. Il serait utile de créer un mécanisme intersession, sous la forme d'un groupe de travail ouvert, afin de traiter des questions qui n'ont pas été suffisamment définies ou approfondies, a t-il estimé.

M. BJØRN SKOGMO (Norvège) a noté qu'il semble exister un accord au sein de la Commission en ce qui concerne la nécessité de procéder à un examen de ses mécanismes de cet organe afin d'en améliorer l'efficacité. A certaines délégations qui ont proposé la constitution d'un groupe de travail intersession pour traiter de cette question, il a répondu que les meilleures chances de parvenir à un résultat concret dans le cadre de l'examen des mécanismes de la Commission se présentent pendant la session de la Commission. Rappelant que la Commission avait, l'armes nucléaires dernier, demandé à son bureau de préparer des recommandations concrètes concernant le réexamen des mécanismes de la Commission, le représentant norvégien a encouragé la Présidente à poursuivre ses consultations sur le rapport du bureau et a préconisé le démarrage d'un processus de consultations, dès que possible, pour permettre aux délégations d'échanger leurs points de vue.

M. ALFREDO LABBE (Chili) s'est félicité des recommandations du Bureau sortant et a estimé qu'il était urgent de procéder à l'examen des mécanismes de la Commission. Les propositions du Bureau sortant sont complexes et devront être analysées et débattues, a-t-il déclaré. Certaines exigeront un processus long et peut-être la constitution d'un groupe de travail. Mais, a-t-il insisté, l'examen de ces question doit commencer ici et, à cet égard, le mécanisme de consultations officieuses, voire la création d'un «groupe d'amis du Président» chargé des questions de procédure, pourrait s'avérer utile.

MME MARIE GERVAIS-VIDRICAIRE (Canada) s'exprimant au nom de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande, a exprimé son soutien à la Norvège et a souhaité que la Commission parvienne à des résultats concrets en ce qui concerne le réexamen des mécanismes. Une fois le processus lancé, les questions plus difficiles pour être abordées. La création d'un groupe de travail peut être une possibilité mais pas une priorité, a déclaré le représentant.

M. S.G. NENE (Afrique du Sud) a déclaré que toute tentative de transférer vers un autre organe l'examen des mécanismes de la Commission, y compris en confiant cet examen à un groupe de travail, avant même que le sujet n'ait été débattu au sein de la Commission, l'empêcherait de débattre de la question de manière ouverte et transparente. Il dépend de la Commission de décider collectivement de la marche à suivre en la matière. L'Afrique du Sud estime qu'il serait précipité d'établir un mécanisme chargé d'examiner la question avant même qu'un débat ait États-Unis lieu à la Commission. Elle s'opposerait donc à une telle décision.

M. ROMANS BAUMANIS (Lettonie) s'exprimant au nom de plusieurs pays, a proposé que soit reconnue la nécessité de la réforme, que les discussions se déroulent dans un climat de confiance et sans parti-pris, que des efforts importants soient réalisés au cours de cette session. Il a suggéré que les propositions posant le moins de difficultés soient examinées en premier. Pour les autres propositions, M. Baumanis a proposé qu'elle fassent l'objet de consultations officieuses. Bien qu'un accord le plus large possible soit nécessaire sur ces propositions, M. Baumanis s'est dit préoccupé par la perte de crédibilité qu'entraînerait, pour la Commission, le renvoi de cette question à un groupe de travail.

MME AUDREY GLOVER (Royaume-Uni) a approuvé la déclaration de l'Union européenne. Elle se réjouit de participer à un dialogue constructif sur les travaux de la Commission. Cet examen ne doit toutefois pas entraver ou nuire aux discussions menées sur d'autres questions, a dit la représentante du Royaume-Uni.

MME NANCY RUBIN (États-Unis) a estimé que, si les membres de la Commission travaillent ensemble de façon ouverte et transparente, ils obtiendront des résultats. Il a été proposé de créer un groupe de travail intersessionnel mais cette solution semblerait indiquer que la Commission n'a pas confiance en ses capacités. Il serait ironique qu'en essayant de réduire le nombre des mécanismes de la Commission, nous aboutissions à la création d'un nouveau groupe de travail, a noté la représentante des États-Unis.

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