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COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME : LA HAUT-COMMISSAIRE SUGGÈRE L'ENVOI IMMÉDIAT D'UNE MISSION DANS LES TERRITOIRES OCCUPÉS
02 avril 2002
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Commission des droits de l'homme
58ème session
2 avril 2002
Après-midi
La Commission des droits de l'homme a entendu cet après-midi, dans le cadre de son débat sur la question de la violation des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, y compris la Palestine, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, qui a informé la Commission de la situation actuelle des droits de l'homme dans les territoires occupés, notamment des événements survenus ces derniers jours. Mme Mary Robinson a suggéré à la Commission d'envoyer immédiatement une mission de visite dans la région, qui rendrait compte à la Commission dans les plus brefs délais des faits qu'elle aura constatés et ferait des recommandations.
Mme Robinson a en outre estimé que le moment est venu de mettre en oeuvre la proposition qu'elle avait déjà émise en 2000 visant à ce que soit explorée la faisabilité de la mise en place d'une présence de surveillance internationale. Dans ce contexte, Mme Robinson soutient l'appel lancé par la présidence espagnole de l'Union européenne devant le Conseil de sécurité en faveur d'un mécanisme de contrôle d'une tierce partie dans les territoires palestiniens occupés et en faveur de la présence d'observateurs internationaux. «Je vous invite à faire en sorte que la conscience intervienne dans cette situation qui se déroule devant nos yeux», a déclaré la Haut-Commissaire.
Les représentants de la Palestine, d'Israël, de la Syrie, de la Malaisie, de l'Algérie, du Pakistan, de Cuba et de l'Iraq sont intervenus au sujet du rapport de la Haut-Commissaire, notamment pour appuyer la tenue d'une séance de la Commission qui serait consacrée à la un débat sur la situation dans les territoires occupés. La délégation des États-Unis a demandé que soit pris en considération le droit d'Israël à l'autodéfense. Les délégations espagnole, canadienne et australienne ont pris la parole pour souhaiter que le bureau examine l'opportunité de cette proposition. La Commission devrait prendre demain une décision à ce sujet. Israël, la Syrie et la Palestine ont exercé leur droit de réponse.
Plusieurs organisations non gouvernementales, intervenant dans le cadre du débat sur la violation des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés, ont dénoncé le recours à une force disproportionnée de la part des forces armées israéliennes, notamment contre les enfants qui ont payé un lourd tribu ces derniers mois. Elles se sont élevées également contre les restrictions imposées aux soins médicaux en faveur des Palestiniens, la destruction d'infrastructures et de maisons. D'une façon plus générale, elles ont dénoncé la politique d'expropriation et de colonisation menée par Israël, qui s'accompagne de la détérioration constante des conditions de vie du peuple palestinien. Elles ont relevé que l'intifada doit être considérée comme l'expression légitime des aspirations du peuple palestinien pour la création d'un État indépendant. D'autres organisations ont souligné qu'Israël était victime d'attentats terroristes sur son sol et ont estimé que le pays était en état de légitime défense. Certaines ont estimé que la Commission accordait une importance démesurée à cette question.
Les organisations non gouvernementales suivantes ont pris la parole : Association américaine de juristes, Union des avocats arabes, Mouvement international de la réconciliation, Congrès juif mondial, American Jewish Committee, Défence des enfants - international, Nord-Sud XXI, Fédération des associations pour la défense et la promotion des droits de l'homme, Congrès du monde islamique, Centre palestinien pour les droits de l'homme, Fédération internationale des ligues de droits de l'homme, Commission internationale de juristes, Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples, Fédération mondiale de la jeunesse démocratique, Alliance internationale d'aide à l'enfance, Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale, Commission des églises pour les affaires internationales du conseil œcuménique des églises, Coalition internationale habitat, Médecins du monde - international.
Demain matin, à partir de 10 heures, la Commission devrait entendre les ministres des affaires étrangères du Danemark et du Nigéria; le Ministre chargé des femmes et du développement humain du Pérou; le Sous-Secrétaire d'État aux droits de l'homme du Mexique; le Directeur exécutif de l'ONUSIDA; ainsi que le Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
Fin du débat sur les violations des droits de l'homme dans les territoires arabes occupés
M. JAIRO SÁNCHEZ (Association américaine de juristes) a condamné les actions militaires israéliennes contre la population civile dans les territoires palestiniens occupés et a prôné le retour au dialogue et à la négociation. Il a déclaré que ces actions violentes de la part d'Israël ne cesseront pas tant que les États-Unis soutiendront Israël. Il a déclaré que le peuple palestinien avait le droit de se battre pour son autodétermination et que l'intifada est l'expression de la lutte pour la liberté nationale et est légitimée par le droit international. Il a demandé qu'Israël retire ses forces armées des territoires occupés. Il a demandé le droit au retour des réfugiés palestiniens sur leurs terres. Il a déclaré que son association exige le respect des droits de l'homme et a exhorté les Nations Unies à participer activement à un processus de paix dans la région. Il a déclaré que, soucieuse de l'instauration de la paix dans la région, son organisation condamne aussi les visées belliqueuses des États-Unis à l'égard de l'Iraq.
M. FAROUK ABU EISSA (Union des avocats arabes) a souligné l'inquiétude de son organisation devant les exactions de l'armée israélienne à Ramallah, notamment le bombardement de populations civiles et les exécutions extrajudiciaires. Certains, a déploré le délégué, ont tenté de dresser un parallèle entre ces agissements et ce qui a été décrit comme la «violence palestinienne» : c'est oublier que le droit à la résistance du peuple palestinien est reconnu par une déclaration spécifique de l'Assemblée générale des Nations Unies. Le représentant a approuvé les résolutions visant à rendre aux Palestiniens leurs droits. Entre-temps, il convient d'assurer aux populations civiles leur sécurité. D'autre part, l'Union s'oppose d'ores et déjà à toute intervention militaire contre l'Iraq.
M. JONATHAN SISSON (Mouvement international de la réconciliation) a dénoncé la politique de démolition de logements et d'expulsions de populations menée par le Gouvernement israélien à l'encontre de la communauté palestinienne, en violation flagrante de la quatrième Convention de Genève. La Commission devrait donc condamner la démolition de logements dans le camp de réfugiés de Rafah et les expulsions dans la partie sud d'Hébron, en tant que violation des articles de la quatrième Convention de Genève.
M. MASSIMO PIERI (Congrès juif mondial) a regretté qu'aucune condamnation des actions terroristes répétées visant la population civile d'Israël n'a été formulée. Il a affirmé que les actions d'Israël après le conflit de 1967 résultent de la légitime défense. Le représentant a rappelé que selon l'application de la résolution 1397 du Conseil de sécurité, seules les deux parties peuvent arriver à un accord. Il a estimé que la Commission doit jouer son rôle dans la paix au Proche-Orient et a exprimé son intérêt pour le projet «Diversité et paix». Le représentant a lancé un appel à la Commission pour qu'elle maintienne une position impartiale en tant que conciliatrice au Proche-Orient. Il a estimé que le rôle de la Commission est d'être un agent de la paix et de la justice en s'appuyant sur les principes de la Déclaration universelle des droits de l'homme et des Pactes relatifs aux droits de l'homme.
M. ANDREW SRULEVITCH (American Jewish Committee) a affirmé son engagement en faveur du dialogue entre les cultures juive et musulmane. Il s'est toutefois inquiété de l'utilisation de la Commission comme prétexte à des attaques contre Israël. Il a estimé que l'acharnement contre Israël est une manœuvre partiale, qui a pour effet d'occulter d'autres situations d'occupation dans le monde, dont aucune ne fait pourtant l'objet d'un point spécial de l'ordre du jour de la Commission. Il a rappelé qu'en dix-huit mois, le conflit au Proche-Orient a coûté mille cinq cents vies palestiniennes et israéliennes. Or pendant le même temps, 2,3 millions d'Africains sont morts du sida. La Commission doit donc revoir ses priorités et se consacrer aux problèmes selon leur importance relative.
M. HANAN ELMASU (Défence des enfants - international) a souligné que l'occupation israélienne est un système qui prive intentionnellement les enfants palestiniens de leurs droits. Depuis septembre 2000, plus de 230 enfants ont été tués et 7 000 blessés, sans parler des centaines qui ont été arrêtés et des dizaines de milliers qui ont été traumatisés par les attaques militaires incessantes contre leurs foyers et leurs communautés. Il est impossible de prétendre que les enfants ne sont pas pris pour cible alors que l'armée israélienne attaque sans cesse les zones civiles et que les enfants représentent 53% de la population. En outre, les responsables israéliens reconnaissent eux-mêmes que des enfants âgés d'à peine 13 ans ont été détenus. La Commission devrait donc, notamment, réaffirmer l'illégalité de l'occupation israélienne et demander une libération immédiate des enfants palestiniens prisonniers politiques.
MME MANUELA CLAVIJO (Nord-Sud XXI, au nom également de l'Union interafricaine des droits de l'homme) a souligné qu'Israël nie aux Palestiniens ses droits à l'indépendance nationale. Elle a estimé que les actes perpétrés par l'armée israélienne sont considérés par le droit international comme des crimes de guerre. Elle a déclaré qu'Israël a signé la Convention de 1949 et ne respecte pas ses engagements. Elle a déclaré que l'intifada représente la résistance légitime des Palestiniens contre l'occupation de ses territoires. Elle a souligné que les opérations kamikaze, armes des faibles, sont des cris de désespoir. La représentante a instamment demandé à la communauté internationale l'arrêt immédiat de la violence israélienne dans les territoires palestiniens occupés, l'établissement d'un État palestinien, la reconnaissance par Israël du droit au retour des Palestiniens, l'arrêt immédiat de la construction de colonies de peuplement, le démantèlement des colonies construites depuis 1967 dans les territoires occupés, la condamnation du gouvernement d'Ariel Sharon pour ses crimes contre l'humanité, la mise en place d'une commission d'enquête sur les pratiques de l'armée israélienne, l'application des conventions de Genève ainsi que des résolutions des Nations Unies'
M. MIGUEL ANGEL SANCHEZ (Fédération des associations pour la défense et la promotion des droits de l'homme) a déclaré qu'Israël maintient depuis 17 mois la même politique, augmentant progressivement la répression exercée à l'encontre du peuple palestinien. Pour parvenir à instaurer une paix globale et durable au Proche-Orient, il faut que les Nations Unies mettent en marche les mécanismes propres à garantir l'application des résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale sur la Palestine, en particulier les résolutions 242 et 338 du Conseil de sécurité. Il faut que l'application des résolutions s'accompagne de la fin de l'occupation militaire israélienne en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, et sur la bande de Gaza, ainsi que d'une solution juste à la question des réfugiés palestiniens, conformément à la résolution 194 de l'Assemblée générale. La fin de l'occupation militaire doit impliquer la reconnaissance des droits légitimes et inaliénables du peuple palestinien avec la création de l'État indépendant de Palestine.
M. M. AHMAD (Congrès du monde islamique) a dénoncé la politique de déshumanisation et de privation de leurs droits qu'Israël a menée contre les Palestiniens depuis 1967. Outre les séquelles - psychologiques et économiques - de cette politique, il faut déplorer la mort de nombreux Palestiniens. Des mesures urgentes doivent être prises contre la politique ethnocentrique du gouvernement Sharon, qui vise le déplacement des populations palestiniennes pour faire place à une future immigration. Toutes les exactions constatées s'expliquent par cet objectif, notamment les humiliations publiques infligées aux Palestiniens, et surtout les mesures de colonisation. Après avoir rappelé que l'intifada est une révolte civile, et non pas une forme de terrorisme, le délégué en a appelé à la communauté internationale pour qu'elle fasse pression sur Israël pour que prévale le droit en Palestine.
M. JABR WISHAH (Centre palestinien pour les droits de l'homme) a tenu à avertir la Commission du danger qu'il y a à assurer l'impunité à Israël pour ses actes de guerre contre les Palestiniens. Les violations des droits de l'homme et l'occupation des territoires par Israël constituent une forme de terrorisme d'État. Il a déclaré que les Palestiniens ont le droit de résister à cette occupation pour défendre leur droit à l'autodétermination. Les violations commises par Israël prennent comme cible la population civile (attaques de mosquées, punitions collectives, démolitions de maisons, détentions arbitraires, tortures, attaques contre des équipes médicales) à l'aide d'armes lourdes. Le représentant a affirmé qu'il s'agit là de crimes de guerre. Le résultat est un niveau croissant de pauvreté, de chômage, de manque d'hygiène, l'impossibilité d'accéder aux centres médicaux, même pour les femmes enceintes. Le représentant a tenu à rappeler à la communauté internationale le traité d'Oslo qui soulignait qu'une paix ne peut être obtenue sans le respect des droits de l'homme.
M. ANTOINE MADELIN (Fédération internationale des ligues de droits de l'homme) a fait part de sa vive préoccupation face aux destructions massives de logements auxquelles se livre Israël et a souligné qu'à ce jour, les militaires israéliens ont démoli au moins 520 maisons palestiniennes dans la bande de Gaza et 116 en Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est. Depuis le 28 septembre 2000, on estime à 802 le nombre de Palestiniens qui auraient été tués, a poursuivi le représentant. Il a également dénoncé l'utilisation, contre des civils désarmés et en l'absence de toute manifestation ou confrontation, d'armes lourdes censées être utilisées dans des situations de combat. Environ 3000 Palestiniens des territoires palestiniens occupés sont actuellement détenus dans des prisons en Israël et leur transfert dans des lieux de détention hors des territoires palestiniens occupés constitue une grave infraction à la quatrième Convention de Genève. La Commission devrait condamner les attaques perpétrées par les militaires israéliens contre les organisations médicales et humanitaires et réaffirmer l'illégalité de l'occupation des territoires palestiniens. La Commission devrait également mettre en place un mécanisme permanent, transparent et indépendant pour la surveillance des droits de l'homme et de la situation humanitaire dans les territoires palestiniens occupés. La Commission devrait demander la convocation d'une réunion spéciale de l'Assemblée générale, en application de la résolution 377, afin d'examiner les mesures visant à restaurer la paix dans la région.
M. IAN SEIDERMAN (Commission internationale de juristes) a estimé que les attaques contre les civils israéliens sont des crimes de guerre. Israël a donc le droit de protéger ses citoyens, dans le respect toutefois du droit de la guerre et des droits de l'homme. Les déclarations extrêmes de M. Sharon ont abouti à un lourd bilan en vies innocentes. Ces crimes de guerre sont des violations flagrantes de nombreux traités internationaux auxquels Israël est partie. Le délégué a notamment dénoncé les attaques contre le personnel médical, violation flagrante de la quatrième Convention de Genève. Il en a appelé au déploiement d'une force internationale d'interposition pour faire respecter les droits de l'homme dans les territoires occupés.
M. JEAN-PIERRE LAGNAUX (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a déclaré que l'implantation de nouvelles colonies de peuplement juives a pour conséquence d'isoler les villages palestiniens les uns des autres. Ces implantations reposent sur l'expropriation des paysans palestiniens. Il a estimé qu'il s'agissait d'un «hold-up» programmé méthodiquement. Il a déclaré que pour faire triompher le droit et les droits de l'homme il faut dire la vérité. Le représentant a demandé à la Commission d'adopter une résolution exigeant de tous les États d'interdire le recrutement par Israël de leurs ressortissants pour peupler les colonies afin de tarir le flux de colons, de reconnaître un État palestinien de plein droit s'étendant sur tous les territoires occupés, y compris Jerusalem-Est, d'exiger des États-Unis de cesser toute aide militaire et assistance financière à Israël, de financer un programme de reconstruction de l'État palestinien.
M. JAVIER LABRADA ROSABAL (Fédération mondiale de la jeunesse démocratique) a dénoncé comme de l'hypocrisie le fait qu'au moment où est menée, à grand renfort de propagande, une guerre contre le terrorisme, rien ou presque n'est fait contre le Gouvernement israélien qui, sous le regard impassible du monde, recourt au terrorisme d'État contre un peuple qui lutte pour son droit légitime à un État libre et indépendant. Ce sont les aides économiques et militaires reçues du Gouvernement des États-Unis qui permettent aujourd'hui le génocide du peuple palestinien, a affirmé le représentant. Il a vivement condamné «le génocide perpétré par le Gouvernement israélien contre le peuple palestinien» ainsi que la «politique d'apartheid» contre les Arabes qui vivent en Israël. Il a demandé le retrait immédiat de l'armée palestinienne des territoires occupés et l'application du droit au retour de tous les réfugiés. Il a également demandé que cessent les assassinats sélectifs de dirigeants palestiniens et que soit reconnu le juste droit du peuple palestinien à un État indépendant avec Jérusalem-Est comme capitale. Il a aussi lancé un appel en faveur de la libération des prisonniers palestiniens détenus dans les prisons d'Israël et de l'envoi de forces de protection internationales afin de protéger les Palestiniens des agressions de l'armée israélienne.
M. AHMED MOTALA (Alliance internationale d'aide à l'enfance) a exprimé l'inquiétude de son organisation face à la violence au Proche-Orient, et en particulier à ses conséquences sur les enfants palestiniens. Leur droit à l'éducation est fortement compromis par la perturbation du fonctionnement des écoles. Le bouclage des territoires - assimilable à une punition collective - a des effets particulièrement néfastes à cet égard, les enseignants ne pouvant dans certains cas se rendre sur leur lieu de travail. L'absentéisme scolaire augmente fortement dans les conditions de violence qui prévalent, et menace en particulier la scolarisation des fillettes. L'organisation demande donc à la Commission qu'elle mandate le Rapporteur spécial sur l'éducation afin qu'il se rende sur place pour y évaluer l'impact de la violence et des bouclages sur le droit à l'éducation des enfants palestiniens.
M. ALFONS NOLL (Confédération internationale d'organismes catholiques d'action charitable et sociale) a joint sa voix à celle des autres orateurs dans la mesure où il trouve choquant que tant de victimes civiles souffrent. Il a réaffirmé le droit d'Israël à vivre dans la sécurité mais a souligné que cela n'est possible que dans le respect d'autrui et l'application du droit international. Le représentant a rappelé qu'il défend ceux qui se trouvent dans la région et ne peuvent faire entendre leur voix. Il a demandé à la Commission de prendre des mesures pour régler la situation, à savoir : envoyer des observateurs internationaux sur place, exiger un gel des colonies israéliennes de peuplement, arriver à un règlement juste sur le problème des réfugiés palestiniens et leur droit de revenir dans leur pays, exiger la participation de la communauté internationale dans le règlement du conflit car elle a joué un rôle dans la création de cette situation et doit donc assumer ses responsabilités.
M. ALEXANDROS KARIDES (Commission des églises pour les affaires internationales du conseil œcuménique des églises) a demandé à la Commission de prendre des mesures immédiates et concrètes en vue de mettre en place une présence internationale chargée d'assurer la pleine et entière protection des droits de l'homme du peuple palestinien. Il a également demandé à la Commission de prendre des mesures concrètes pour assurer qu'Israël respecte scrupuleusement ses obligations et responsabilités en tant que signataire de la quatrième Convention de Genève, afin de mettre un terme aux graves violations du droit international actuellement perpétrées dans les territoires palestiniens occupés – y compris à l'occupation militaire elle-même. Le représentant a également souhaité que la Commission réitère sa demande visant à ce qu'Israël facilite les visites des rapporteurs spéciaux dans les territoires occupés.
M. JOSEPH SCHECHLA (Coalition internationale habitat) a dénoncé l'étendue des destructions qui s'abattent sur la Palestine et l'ampleur des conséquences économiques de ces agissements, qui sont le résultat de la volonté affichée du Premier ministre israélien. Il a déploré que les Nations Unies n'aient rien entrepris pour arrêter le pillage et craint un processus de paix qui ignore les leçons de l'histoire. Le représentant a appelé, notamment, à l'arrêt des confiscations de terre par les colons, à l'adoption d'un code de la nationalité israélien qui ne soit pas discriminatoire à l'encontre des Arabes, à ce que le Gouvernement israélien réoriente ses efforts de planification et de développement en vue de faciliter le retour des réfugiés palestiniens et syriens.
MME GRACIELA ROBERT (Médecins du monde - international) a indiqué que suite à la violence de l'armée israélienne, des équipes de médecins ont dû être retirées des territoires occupés. La représentante a relaté une scène de violence contre des enfants palestiniens innocents allant à l'école, blessés ou tués par des chars israéliens. Elle a déclaré que le spectacle de ces enfants à la vie brisée est inacceptable pour son organisation. Elle a souligné que l'accès du personnel médical aux victimes est de plus en plus difficile, et qu'il est devenu lui-même une cible des actions violentes de l'armée israélienne. Elle a demandé à la Commission d'agir pour changer cette situation.
Déclaration de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés
MME MARY ROBINSON, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, a fait rapport à la Commission sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés en attirant l'attention sur la grave détérioration de la situation dans ces territoires depuis le week-end dernier. Mme Robinson a rappelé que dans le discours qu'elle avait prononcé devant la Commission il y a deux semaines, elle avait déploré que les efforts de la communauté internationale, notamment ceux de la Commission, n'aient malheureusement pas permis de mettre fin aux hostilités. Le 29 mars 2002, les forces de défense israéliennes ont occupé Ramallah; le 1er avril, elles ont pris le contrôle de Beit Jala, de Qalqilya et de Tulkarem. Aujourd'hui, 2 avril, elles ont envahi Bethléem. Les officiels israéliens ont affirmé que la réoccupation de villages de la Cisjordanie se poursuivra pendant une période prolongée. Le bureau du Haut-Commissariat dans les territoires occupés indique qu'il est extrêmement dangereux de se mouvoir dans toutes ces zones, a fait observer Mme Robinson avant de rappeler que ces derniers jours, on a assisté à une recrudescence terrifiante des pertes en vies humaines. La Haut-Commissaire a mis l'accent sur la nécessité de mettre fin à la spirale de la violence. Elle s'est notamment fait l'écho d'une information relayée le 31 mars par la BBC selon laquelle 700 Palestiniens auraient été arrêtés dans la région suite, notamment, à une fouille menée maison par maison par les forces militaires en plusieurs endroits de Ramallah/al-Bireh. Un certain nombre de militants pacifistes étrangers auraient été arrêtés et certains déportés.
Mme Robinson a fait observer que l'Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA) est confronté à d'extrêmes difficultés pour opérer dans les territoires palestiniens occupés et répondre à la crise actuelle dans la mesure où le personnel de l'UNRWA qui se trouve hors de Jérusalem-Est ne peut se rendre au siège de l'Office à Jérusalem puisqu'il ne dispose pas des autorisations requises, ce qui crée une importante pénurie de personnel. La situation humanitaire va s'exacerber si l'action militaire se poursuit pendant une période prolongée et les produits alimentaires se font rares. La Société palestinienne du Croissant-Rouge a indiqué le 1er avril que les forces de défense israéliennes avaient cessé toute liaison et toute coordination avec le CICR au cours des dernières 24 heures, de sorte que la Société palestinienne du Croissant-Rouge se trouvait dans l'incapacité de procéder à l'évacuation des blessés dans de nombreuses zones de conflit. Ce matin, neuf membres de la Société palestinienne du Croissant-Rouge, dont le Président de la Société, M. Younis Al Khatib, ont été arrêtés à Ramallah, a indiqué Mme Robinson. Selon l'Association de la presse étrangère, a poursuivi Mme Robinson, depuis le 30 mars, les forces de défense israéliennes ont empêché les journalistes d'entrer à Ramallah d'où qu'ils viennent, déclarant la totalité de la ville «zone militaire fermée».
La Haut-Commissaire aux droits de l'homme a estimé que le moment est venu de mettre en œuvre la proposition qu'elle avait faite (dans son rapport sur sa visite dans la région en 2000) visant à ce que soit explorée la faisabilité de la mise en place d'une présence de surveillance internationale. La présence d'observateurs internationaux sur le terrain pourrait permettre d'éviter les violations des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés et de promouvoir la sécurité humaine contre les attaques suicides et autres à l'encontre des civils israéliens. «Dans ce contexte, je soutiens l'appel lancé par la présidence espagnole de l'Union européenne devant le Conseil de sécurité en faveur d'un mécanisme de contrôle d'une tierce partie dans les territoires palestiniens occupés et en faveur de la présence d'observateurs».
Mme Robinson s'est en outre demandée s'il ne serait pas approprié que la Commission envoie immédiatement une mission de visite dans la région, qui rendrait compte à la Commission dans les plus brefs délais des faits qu'elle aura constatés et de ses recommandations. Nul doute, a-t-elle ajouté, que la protection des droits de l'homme requiert au minimum une telle mesure». En conclusion , elle a déclaré : «Je vous le dis simplement mais de toutes mes forces : j'en appelle à votre conscience. Je vous invite à faire en sorte que la conscience intervienne dans cette situation qui se déroule devant nos yeux».
Déclarations concernant l'intervention de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme
M. NABIL RANLAWI (Palestine) a remercié la Haut-Commissaire pour l'honnêteté dont elle a fait preuve dans ses interventions sur la situation actuelle dans les territoires occupés. Il a réaffirmé les graves violations des droits de l'homme à l'encontre des Palestiniens. Il a proposé que demain, 3 avril 2002, se tienne une séance extraordinaire de la Commission des droits de l'homme consacrée à la situation actuelle des droits de l'homme qui se détériorent dans les territoires occupés palestiniens.
M. YAAKOV LEVY (Israël) a pris acte du rapport de la Haut-Commissaire. Il aurait cependant souhaité que la Haut-Commissaire prenne également des informations auprès des autorités israéliennes, notamment au sujet de l'utilisation d'une ambulance pour transporter un kamikaze. De la même façon, a-t-il poursuivi, Mme Robinson aurait sans doute dû entendre le témoignage des survivants des attentats de ce week-end, tous des civils, tués par des kamikazes; le témoignage également de toute une population menacée et prise en otage par des kamikazes qui sont, estime le délégué, le fruit d'une politique délibérée de l'Autorité palestinienne. L'intervention de la Haut-Commissaire aurait ainsi été plus équilibrée, a estimé le représentant israélien.
M. TOUFIK SALLOUM (Syrie) a soutenu sans réserves les déclarations de Mme Robinson. Il a considéré que M. Sharon ne dit pas la vérité et ne tient pas ses engagements. Il a déclaré qu'il faut faire face à la réalité, c'est à dire aux violations des droits de l'homme par Israël. Le représentant a souligné que le retrait est le mot clé d'une solution au problème israélo-palestinien. Il a mentionné que la déclaration de reconnaissance mutuelle a été signée il y dix ans. Or, depuis ce temps, Israël ne cesse d'occuper des territoires palestiniens et de maltraiter la population civile et les enfants.
M. MOHAD JOHAR AHMAD JAZRI (Malaisie, au nom de l'organisation des États islamiques) a déclaré qu'il soutient la proposition du représentant de la Palestine de tenir demain, 3 avril 2002, une séance extraordinaire sur la question des territoires palestiniens occupés.
M. MOHAMED-SALAH DEMBRI (Algérie) a déclaré que, pour la première fois en ce troisième millénaire, un peuple est en train de mourir en direct. La puissance occupante veut une guerre sans témoin et il y a là une insulte à la conscience universelle, a-t-il affirmé. L'Algérie est favorable à la tenue d'un débat spécial aux fins d'obtenir l'envoi d'observateurs internationaux ou d'une mission de visite pour mettre fin au carnage en cours. Aujourd'hui, c'est notre conscience collective qui est interpellée, a insisté M. Dembri. La Commission est souveraine pour examiner toute proposition concernant la tenue d'un débat spécial ou l'adoption d'une résolution spéciale.
M. MUNIR AKRAM (Pakistan) a estimé que le rapport de la Haut-Commissaire exige l'adoption de mesures concrètes et décisives qui devront être discutées en séance plénière. Le Pakistan appuie donc la proposition de tenir une réunion spéciale sur la question des territoires occupés.
M. KEVIN EDWARD MOLEY (États-Unis) regretté que le rapport de la Haut-Commissaire ne mentionne pas le droit d'Israël à l'autodéfense. Il a souligné que deux États vont devoir coexister dans une région, et il a rappelé qu'une résolution du Conseil de sécurité appelle à l'application des plans Tenet et Mitchell. Le représentant a souligné que la démagogie n'aidera pas à trouver une solution au problème.
M. ALFONSO MARTINEZ (Cuba) a rappelé que tout le problème dont il est ici question résulte de l'occupation militaire de territoires étrangers et que le fond du problème réside donc dans le droit du peuple palestinien à l'autodétermination. Il faut donc, par tous les moyens, prendre des mesures pratiques afin que cesse le bain de sang dans les territoires occupés. Il faut que la Commission montre au monde que nous ne sommes pas indifférents à la tragédie du peuple palestinien.
MME MARIE GERVAIS-VIDRICAIRE (Canada) a relevé que le débat sur la situation des droits de l'homme dans les territoires occupés a animé les débats de la Commission pendant près d'une journée et demie, et que le Conseil de sécurité s'est aussi saisi de la question. Il convient donc d'agir efficacement, et ne pas exacerber la polémique.
M. LIU XINSHENG (Chine) a déclaré qu'en ce qui concerne la situation au Proche-Orient, son pays appuie la proposition de la Malaisie de tenir demain une session spéciale.
M. OMER M. A. SIDDIG (Soudan) a remercié Mme Robinson pour le réalisme dont est empreint le rapport qu'elle vient de présenter. On ne saurait présenter rapport plus équilibré que celui-ci, a insisté le représentant soudanais. Il faut tenir dès demain une séance spéciale de la Commission afin de débattre des mesures qui pourraient être prises pour améliorer la situation du peuple palestinien, a-t-il estimé.
M. JOAQUIN PEREZ-VILLANUEVA Y TOVAR (Espagne, au nom de l'Union européenne) a remercié la Haut-Commissaire pour son rapport informatif. Il a estimé que la Commission doit résoudre ce genre de problèmes. Il a assuré que l'Union européenne donnera son avis à ce sujet au bureau pour que celui-ci puisse décider de la meilleure façon de gérer ce problème sur la dégradation de la situation dans les territoires occupés.
M. MOHAMED TAWFIK (Égypte, au nom du Groupe des États arabes) a félicité la Haut-Commissaire aux droits de l'homme pour l'exposé équilibré qu'elle a fait de la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés. Le représentant égyptien a apporté son soutien, au nom du Groupe arabe, à la proposition visant à ce que la Commission tienne une séance spéciale pour débattre des moyens qui permettraient d'améliorer la situation dans les territoires palestiniens occupés.
M. SAMIR AL-NIMA (Iraq) a salué le rapport présenté par la Haut-Commissaire, dont il appuie les propositions courageuses. Il a relevé que les deux oppositions au rapport émanaient des deux puissances qui perpétuent la situation inique dans les territoires occupés, Israël et les États-Unis. Le délégué iraquien appuie par ailleurs la tenue d'une session spéciale le 3 avril.
M. PETER HEYWARD (Australie) a déclaré que son pays ne pense pas qu'une discussion prolongée au sujet des territoires palestiniens occupés va faire avancer la cause de la paix. Il a estimé que d'autres points de l'ordre du jour doivent absolument avoir le temps d'être traités par la Commission.
Droit de réponse
Le représentant d'Israël, en réponse du représentant de Syrie, a rappelé qu'Israël était prêt, en 1995 et en juillet 2002, à entamer des négociations. Le président Arafat a préféré se lancer dans une stratégie de violence. Israël, a conclu le délégué, reste néanmoins toujours disposé à tenir des négociations.
Le représentant de la Syrie a déclaré que la déclaration du représentant d'Israël dans son droit de réponse n'est pas exacte. Il a souligné qu'une initiative a été présentée pour un retrait israélien aux lignes de juin 1967 en échange de la paix. Il a affirmé qu'Ariel Sharon n'a pas accepté le retrait en échange de la paix.
Le représentant de la Palestine a répondu à l'intervention faite cet après-midi par la délégation des États-Unis en regrettant que cette délégation n'ait pas exprimé sa reconnaissance à la Haut-Commissaire aux droits de l'homme. La raison invoquée par la délégation des États-Unis est que le rapport de Mme Robinson ne serait pas équilibré. Qu'est-ce qui explique un tel jugement : est-ce parce que Mme Robinson rend justice aux victimes? Est-ce parce que son rapport est étayé par des faits? Est-ce parce qu'il n'est pas conforme à la politique des États-Unis? La politique des États-Unis est-elle elle-même équilibré, a demandé le représentant palestinien?
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