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Communiqués de presse Commission des droits de l'homme

COMMISSION DES DROITS DE L'HOMME: DECLARATIONS DE MINISTRES DU PORTUGAL, DE POLOGNE, D'ALLEMAGNE ET DU MAROC

20 Mars 2002



Commission des droits de l'homme
58ème session
20 mars 2002
Après-midi



La Commission entend le Ministre des affaires étrangères
du gouvernement transitoire du Timor oriental
et poursuit l'examen du rapport de la Haut-Commissaire



La Commission des droits de l'homme a entendu, cet après-midi, les Ministres des affaires étrangères du Portugal, de la Pologne et de l'Allemagne, ainsi que le Ministre des droits de l'homme du Maroc et le Ministre des affaires étrangères du deuxième Gouvernement transitoire du Timor oriental. Elle a par ailleurs poursuivi l'examen du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme en entendant les déclarations d'une douzaine de pays et organisations non gouvernementales.
Relevant que depuis les attaques du 11 septembre la communauté internationale est confrontée au vieux dilemme de l'équilibre entre liberté et sécurité, le Ministre allemand des affaires étrangères, M. Joschka Fischer, a déploré que l'an dernier, soit apparue une nouvelle tendance dangereuse consistant à légitimer des violations des droits de l'homme sous prétexte de lutte contre le terrorisme. Ce serait un recul fatal si les terroristes nous amenaient à remettre en cause nos propres valeurs, a souligné M. Fischer. M. Jaime Gama, Ministre des affaires étrangères du Portugal et Président en exercice de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a souligné que la lutte contre le terrorisme est une priorité pour l'OSCE et figure au premier rang des priorités de la présidence portugaise de cette Organisation. Prévenir et combattre le terrorisme exige d'améliorer nos façons de procéder tout en gardant à l'esprit l'impératif de strict respect des droits de l'homme, a-t-il insisté. Le Ministre des affaires étrangères de la Pologne, M. W»odzimierz Cimoszewicz, a pour sa part souligné qu'il ne saurait être question, du fait de la haute priorité accordée à la lutte contre le terrorisme, de rétrograder les problèmes de protection et de promotion des droits de l'homme à un rang subalterne parmi les préoccupations de la communauté internationale.
M. José Ramos-Horta, Ministre des affaires étrangères et de la coopération du deuxième Gouvernement transitoire du Timor oriental, a mis l'accent sur la nécessité de consolider, désormais, ce qui a été fait dans son pays ces deux dernières années. Rappelant que pour cela, il est essentiel que le Timor oriental reçoive une aide financière, il s'est dit inquiet des informations indiquant que l'Union européenne a réduit de plus de moitié son précédent engagement en matière de soutien financier au pays, ce qui ne pourra qu'affecter sérieusement les efforts qui y sont déployés en faveur de l'éradication de la pauvreté et du développement.
Le Ministre marocain des droits de l'homme, M. Mohamed Auajjar, a relevé que, par mégarde ou simplement par méconnaissance, les événements du 11 septembre - malheureux et condamnables en eux-mêmes – ont été à l'origine de l'amalgame qui est désormais rapidement fait entre islam et terrorisme. Nous estimons que la lutte contre le terrorisme ne peut servir de prétexte aux violations des droits humains, a-t-il insisté. Le Ministre marocain a par ailleurs affirmé que «l'affaire du Sahara marocain» est aujourd'hui devant un tournant qu'il faut espérer décisif pour le règlement définitif, juste et durable d'un différend qui bloque le développement régional harmonieux des pays maghrébins.
Au titre de l'examen du rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, les représentants des pays suivants ont pris la parole: Égypte (au nom de la Ligue des États arabes), Indonésie; Venezuela, Inde, Algérie, Koweït, États-Unis. Le représentant des États-Unis a notamment affirmé que l'application directe du droit humanitaire est de la responsabilité première des États.
Les organisations non gouvernementales suivantes sont également intervenues: Amnesty International, Human Rights Watch, Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, International Institute for Non-Aligned Studies, Fédération internationale des ligues des droits de l'homme.
Les représentants d'Israël, de la Chine, de l'Égypte et de l'Allemagne, ainsi que le représentant de la Palestine ont exercé leur droit de réponse.
La Commission entame dans la soirée l'examen du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes.

Déclarations de hauts dignitaires
M. JOSÉ RAMOS-HORTA, Ministre des affaires étrangères et de la coopération du deuxième gouvernement de transition du Timor oriental, a tenu à remercier la Commission, la communauté internationale, en particulier le Portugal, ainsi que les organisations non-gouvernementales pour le soutien qu'ils ont apporté à l'accession à l'autodétermination du Timor oriental. Le ministre a d'autre part esquissé un bilan des deux ans d'administration du territoire par l'Administration transitoire des Nations Unies au Timor oriental (ATNUTO): la sécurité et la confiance du peuple ont été restaurées, les activités des bandes armées neutralisées, les relations avec l'Indonésie stabilisées. Cette stabilité se reflète dans les progrès spectaculaires réalisés dans la reconstruction matérielle du pays, mais aussi dans une réduction de la criminalité, exception faite des violences domestiques, contre lesquelles une campagne d'éducation a été lancée.
M. Ramos-Horta a également souligné les efforts accomplis en matière de démocratisation de la vie publique: une Assemblée constituante prépare la rédaction d'une nouvelle charte fondamentale qui garantira le respect des libertés civiques fondamentales. Le ministre timorais a relevé à cet égard l'état d'esprit très positif qui règne dans la population, qui a véritablement soif de justice et de respect des droits de l'homme. L'intention du gouvernement est donc d'œuvrer dans cette voie, et de nombreuses initiatives ont été prises ou sont en voie d'être mises en œuvre.
Le Gouvernement timorais se félicite ainsi d'entamer une collaboration avec le Haut-Commissaire au sujet de la mise en œuvre des traités relatifs aux droits de l'homme, sujet complexe, comme le sera d'ailleurs le processus de réconciliation nationale et de prévention de la violence au Timor. Deux commissions judiciaires spécialisées sont actuellement à l'œuvre dans ces domaines, qui ont déjà procédé à plusieurs inculpations dans des cas de crime contre l'humanité. M. Ramos-Horta a toutefois fait remarquer que ces mesures sont toujours à la merci d'un manque de moyens financiers, et que, si elles doivent perdurer, elles doivent être consolidées. Rappelant que pour cela, il est essentiel que le Timor oriental reçoive une aide financière, il s'est dit inquiet des informations indiquant que l'Union européenne a réduit de plus de moitié son précédent engagement en matière de soutien financier au pays, ce qui ne pourra qu'affecter sérieusement les efforts qui y sont déployés en faveur de l'éradication de la pauvreté et du développement. Le ministre a donc exhorté les pays du Nord à respecter leurs engagements de porter à 0.7% de leur PIB le niveau de leur assistance aux pays du Sud. Cette aide est la seule façon d'éviter que ne se creuse davantage le fossé qui sépare les deux hémisphères.
M. JAIME GAMA, Président au bureau de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, Ministre d'état et Ministre des affaires étrangères du Portugal, a souligné que la lutte pour la sécurité et contre le terrorisme était une priorité pour l'OSCE. Il a ajouté que prévenir et combattre le terrorisme demande le respect strict des droits de l'homme. M. Gama a déclaré que les priorités de l'OSCE se présentent en deux volets, à savoir l'aspect opérationnel et l'aspect thématique. En ce qui concerne l'aspect opérationnel, il a souligné l'importance d'un dialogue et d'une coopération plus étroits avec les organisations non gouvernementales. Il a également mentionné la priorité accordée par la présidence de l'OSCE de faire le lien entre la dimension humaine et la réalité politique, entre la dimension humaine et la dimension économique et environnementale.
M. Gama a souligné que l'OSCE s'est penchée sur le problème de la violence contre les femmes, le problème des réformes du système pénitentiaire, le problème des relations entre les minorités ethniques et le groupe ethnique majoritaire, le problème du système judiciaire et des droits de l'homme et le problème de la peine de mort. À cet égard, M. Gama a déclaré que les États membres de l'OSCE considèrent que la peine de mort n'a pas sa place aujourd'hui: la vie est inaliénable et la justice doit défendre la vie humaine. M. Gama a souligné l'importance du travail de l'OSCE dans les régions de l'Europe du sud-est, dans l'ancienne République yougoslave de Macédoine (l'adoption de la loi sur l'amnistie du 7.3.2002 a été un pas fondamental pour renforcer la confiance du pays), dans l'ancienne République de Yougoslavie, au Kosovo, en Bosnie-Herzégovine, en Tchétchénie (où le retour du groupe d'assistance de l'OSCE a donné à l'organisation un nouvel élan dans ses activités actuelles), au sud du Caucase (où il reste beaucoup à faire dans le domaine des droits de l'homme), en Asie centrale (où l'appel aux gouvernements pour qu'ils ajustent leurs législations nationales aux normes internationales afin qu'ils respectent les droits de l'homme est toujours aussi pressant).
M. Gama a réitéré que le concept de la démocratie durable n'est pas encore compris par un nombre important de pays. Le représentant a souligné que le respect des droits de l'homme est fondamental. Le respect des droits de l'homme et la mise en place de la démocratie sont les seuls moyens de vivre libres et en sécurité.
M. WºODZIMIERZ CIMOSZEWICZ, Ministre des affaires étrangères de la Pologne, a affirmé que les actes terroristes tels que ceux perpétrés le 11 septembre dernier ne peuvent être porteurs de messages de justice ou de monde meilleur. La dimension génocidaire des actes de terreur et la violation des droits de l'homme fondamentaux à laquelle ils sont associés appellent la mise en place d'une étroite coopération au sein de la communauté internationale pour les combattre. En engageant une action concertée contre la menace terroriste, il convient de garder à l'esprit la nécessité de faire preuve d'une solide détermination pour combattre les individus et les organisations qui s'engagent dans des activités terroristes; d'appréhender avec la plus grande attention l'ensemble du phénomène et les situations considérées comme étant à l'origine d'attitudes extrêmes (à savoir notamment la pauvreté, l'inégalité, l'injustice, le sentiment de marginalisation et le désespoir); et de veiller à ce qu'aucune violation ou restriction injustifiée des droits de l'homme ne soit acceptée dans le cadre de la lutte contre le terrorisme.
Il ne saurait être question, du fait de la haute priorité accordée à la lutte contre le terrorisme, de rétrograder les problèmes de protection et de promotion des droits de l'homme à un rang subalterne parmi les préoccupations de la communauté internationale, a souligné M. Cimoszewicz. Il a rappelé que l'expérience de ces derniers mois met en lumière combien l'ordre politique, social et économique, tant au niveau national qu'au niveau international, influe sur la situation en matière des droits et libertés individuels. Dans ce contexte, l'expérience de la Pologne l'oblige à mettre l'accent sur la relation qui existe entre les droits de l'homme et la démocratie. Si nous voulons réduire le fossé qui sépare le Nord du Sud, il convient de résoudre le problème du développement économique, ce qui peut être fait grâce à la bonne gouvernance, lorsque la démocratie et le marché avancent main dans la main, a déclaré le ministre polonais. Il a invité la communauté internationale à accorder toute l'attention voulue aux droits de l'enfant, aux droits des femmes et à la relation existant entre religion et droits de l'homme. Ni la religion ni la manifestation de sentiments religieux ne doivent servir d'instruments servant à violer ou restreindre les droits de l'homme, a souligné le ministre. Afin d'éradiquer une fois pour toutes l'esclavage, il faut se concentrer sur la mise en œuvre des dispositions pertinentes du Programme d'action de la Conférence mondiale contre le racisme, a-t-il ajouté.
S'agissant du Moyen-Orient, le Ministre des affaires étrangères de la Pologne a souligné qu'il n'existe pas de solution militaire à la crise actuelle. La paix ne peut être réalisée que par le biais de négociations qui porteront sur la sécurité et sur les aspects politiques et économiques en tant qu'éléments indissociables et interdépendants d'un seul et même processus. La Pologne se réjouit de l'adoption de la résolution 1397 du Conseil de sécurité qui reflète l'engagement de la communauté internationale à cet égard. Parmi les nombreux autres sujets auxquels la Pologne attache une importance particulière, figure les droits de l'homme dans le contexte du VIH/sida, les droits des personnes handicapées, ainsi que les questions relatives aux organes de traité et au renforcement de l'efficacité des mécanismes et instruments à disposition de la Commission.
M. JOSCHKA FISCHER, Ministre des affaires étrangères de l'Allemagne, a rappelé que le 11 septembre et ses conséquences ont réorienté la politique mondiale, ce qui n'est pas sans conséquence pour la politique suivie dans le domaine des droits de l'homme. Chaque gouvernement doit considérer la protection de la sécurité de ses citoyens comme l'un de ses principaux devoirs et nous sommes tous appelés à combattre les terroristes qui, avec la plus grande détermination et avec la plus ferme vigueur, placent leurs objectifs au-dessus de la vie de gens innocents, a déclaré M. Fischer. Pour autant, l'action et la répression à elles seules ne constituent pas une réponse satisfaisante à la menace du terrorisme moderne, a-t-il souligné. Le terrorisme moderne ne pourra être vaincu que grâce à une politique de prévention. Cela implique de promouvoir de nouvelles stratégies contre la faim, la pauvreté et le manque d'opportunités et de promouvoir une gestion socialement juste de la mondialisation économique. Depuis les attaques du 11 septembre, nous sommes confrontés au vieux dilemme de l'équilibre entre liberté et sécurité, a relevé le Ministre allemand. En principe, il ne peut y avoir qu'une seule réponse convaincante en la matière: la liberté et la sécurité doivent être assurées simultanément.
Malheureusement, l'an dernier, est apparue une nouvelle tendance dangereuse consistant à légitimer des violations des droits de l'homme sous prétexte de lutte contre le terrorisme, a poursuivi le ministre allemand. Il a déclaré que la communauté des nations et tous les pays civilisés doivent s'opposer à cette tendance avec la plus ferme détermination. Chaque société doit s'assurer que les normes internationalement acceptées en matière de protection des droits de l'homme restent à la base de l'approche retenue pour traiter les questions relatives aux individus qui ont des opinions différentes, aux opposants politiques, aux minorités religieuses et ethniques, aux prisonniers de guerre et aux personnes soupçonnées d'être impliquées dans des actes terroristes. Ce serait un recul fatal si les terroristes nous amenaient à remettre en cause nos propres valeurs, a souligné M. Fischer.
En dépit de la libération de prisonniers politiques et la disponibilité accrue du pays de coopérer avec les mécanismes internationaux de droits de l'homme, l'Allemagne reste critique à l'égard de la situation des droits de l'homme en Chine, a affirmé M. Fischer. Il a indiqué que son gouvernement demande une fois de plus à la Chine de mettre un terme aux persécutions dont sont victimes des membres d'églises chrétiennes et d'autres communautés religieuses; de cesser la répression à l'encontre des minorités ethniques; de garantir aux Tibétains et aux Ouigours des droits d'autonomie substantiels; de mettre un terme à la persécution à l'encontre des adeptes du Falun Gong; de déclarer un moratoire sur l'application de la peine de mort en vue de son abolition totale; et de ratifier rapidement le Pacte international relatif aux droits civils et politiques tout en mettant en œuvre pleinement le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
La situation en Tchétchénie est également une source de grave préoccupation constante pour l'Allemagne, a indiqué M. Fischer. Certes, la Russie a non seulement le droit mais aussi le devoir de se défendre contre le terrorisme, néanmoins, nous considérons l'utilisation de la force militaire contre la population civile comme étant inacceptable et incompatible avec les normes européennes et internationales. Tout récemment, des rapports dignes de foi font état de violations graves et systématiques des droits de l'homme à l'encontre de la population civile, accrues des deux côtés. Il faut que la Russie et la Tchétchénie discutent et mettent enfin un terme à l'utilisation massive de la violence et aux combats et s'efforcent d'avancer énergiquement sur la voie d'une solution politique. La situation en Tchétchénie doit rester à l'ordre du jour de la Commission jusqu'à ce qu'il y ait une amélioration concrète. S'agissant de la situation au Moyen-Orient, M. Fischer a notamment indiqué que l'approbation de l'initiative saoudienne présentée lors du Sommet de la Ligue arabe à Beyrouth constituerait un signal positif. Pour l'Allemagne, a également déclaré le Ministre allemand, tout dialogue interculturel honnête doit traiter de la question de la compatibilité des lois de la charia avec les droits des femmes et avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. En ce qui concerne les droits économiques, sociaux et culturels, l'Allemagne parrainera une fois de plus cette année la résolution sur le droit à un logement convenable.
M. MOHAMED AUAJJAR, Ministre des droits de l'homme du Royaume du Maroc, a indiqué qu'à l'heure où il s'adresse à la Commission, son pays est au rendez-vous de réformes fondamentales qui engageront son avenir immédiat. Ces réformes concernent l'élargissement intégral des espaces de liberté; la rationnalisation de l'intervention des différents acteurs politiques dans la vie publique nationale; et la participation du citoyen marocain dans le choix de ses représentants Le Ministre marocain a notamment indiqué qu'une session parlementaire extraordinaire a été ouverte dans son pays sur un ordre du jour ambitieux incluant l'étude d'un nouveau code électoral qui introduit toutes les garanties nécessaires de liberté et de transparence pour les élections législatives (prévues pour la fin septembre de cette année). Les dossiers douloureux du passé sont aujourd'hui pris en charge par une commission indépendante qui a déjà entamé les indemnisations nécessaires aux victimes du passé, a par ailleurs indiqué M. Auajjar. Il a précisé que la volonté de son pays est d'arriver à la réhabilitation politique, sociale et psychologique totale de toutes les victimes de ce passé.
Les terribles incidents du 11 septembre, qui ont visé les États-Unis, interpellent notre conscience alerte d'hommes libres, a poursuivi le ministre. Ces événements ont produit des revers qui ont marqué et marqueront pour longtemps encore les relations entre États. Et par mégarde, ou simplement par méconnaissance, ces événements malheureux et condamnables en eux-mêmes ont été à l'origine de l'amalgame qui est désormais rapidement et légèrement fait entre islam et terrorisme, ainsi qu'entre la lutte contre le terrorisme et les violations constatées des droits de l'homme. Nous estimons que la lutte contre le terrorisme ne peut servir de prétexte aux violations des droits humains, a insisté M. Auajjar. La communauté internationale doit s'efforcer d'assurer le respect des droits fondamentaux des Palestiniens qui sont quotidiennement violés par les forces d'occupation israéliennes, a-t-il par ailleurs affirmé.
Le Ministre marocain a par ailleurs affirmé que «l'affaire du Sahara marocain» est aujourd'hui à un tournant qu'il faut espérer décisif pour le règlement définitif, juste et durable d'un différend qui bloque le développement régional harmonieux des pays maghrébins. Cette blessure n'est autre que le sort inhumain, dégradant et humiliant qui est réservé aux 1 362 détenus marocains en territoire algérien, a précisé le ministre. Il a exhorté la Commission à agir pour que la légalité internationale soit respectée et rétablie en ce qui concerne la libération totale, immédiate et sans condition des détenus marocains. Il a également évoqué les conditions désastreuses dans lesquelles vivent les populations sahraouies marocaines détenues contre leur gré dans les camps dits de réfugiés à Tindouf.
MME NAÉLA GABR (Égypte) au nom des pays membres de la Ligue arabe, a réaffirmé la volonté de ces pays de faire appliquer les principes des droits de l'homme, y compris dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il ne faut pas que, sous couvert de lutte contre le terrorisme, les crimes contre les minorités soient perpétrés en fonction de leur origine, et que le combat pour la libération nationale, notamment celui des Palestiniens, soit abusivement assimilé au terrorisme.
La représentante a précisé que les pays arabes ont adopté une position claire en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme et que des mesures ont été prises dans le cadre de la Ligue arabe. Dans ce domaine, l'accent doit être mis sur la coopération internationale et la recherche des causes profondes du problème, plutôt que sur le recours à la force militaire contre les États, qui doit être résolument exclu. La lutte contre le terrorisme doit être envisagée dans le strict respect du principe de non-discrimination; la Ligue arabe est consternée par les manifestations d'anti-islamisme dont sont victimes les communautés musulmanes, en particulier le peuple palestinien, illégalement privé de ses droits fondamentaux et de son territoire.
M. NUGROHO WISNUMURTI (Indonésie) a souligné que son pays a toujours condamné tous les actes de terrorisme et a exprimé son souci que le monde interprète ces actes comme un conflit entre l'islam et les autres religions. Il a exprimé sa préoccupation face à l'intolérance religieuse croissante, particulièrement l'islamophobie ainsi que face aux mesures anti-terroristes prises par certains pays suite aux événements du 11 septembre 2001. Le représentant a estimé que ces mesures sont en contradiction avec les principes de base des droits de l'homme et qu'ils risquent de provoquer une résurgence de sentiments racistes. Il a réitéré que le terrorisme est une menace directe pour les efforts des États pour faire respecter la dignité humaine. Le terrorisme est un problème global qui exige des réponses globales; le seul moyen de le combattre est de s'en prendre aux racines. Il a déclaré que la coopération internationale devrait inclure l'échange des informations, la formation de personnel dans le domaine du crime international et la mise en place d'instruments juridiques.
Le représentant de l'Indonésie a déclaré que des efforts nationaux sont aussi indispensables pour obtenir un résultat dans la lutte contre le terrorisme. Il a indiqué qu'en septembre 2001 son gouvernement a signé la convention internationale pour la suppression du financement du terrorisme et qu'il s'est rallié aux résolutions 1333 et 1373 du conseil de sécurité des Nations Unies concernant le combat contre le terrorisme international. Le représentant a souligné le fait que la lutte contre le terrorisme dans son pays est confrontée au même dilemme que connaissent d'autres pays, à savoir de trouver la bonne mesure entre le respect des libertés démocratiques, la sécurité nationale et la protection des droits de l'homme. Il a déclaré qu'il était confiant que le terrorisme et l'insécurité pourront être combattus grâce aux efforts multilatéraux, régionaux et coopératifs, tout en assurant la participation de la société civile.
M. VÍCTOR RODRÍGUEZ CEDEÑO (Venezuela) a indiqué que son pays partageait pleinement les conclusions du rapport du Haut-Commissaire, notamment en ce qui concerne la nécessité d'adopter une vision globale commune, fondée sur le respect des droits de l'homme, dans la lutte contre le terrorisme. M. Rodríguez Cedeño a souligné que l'Amérique du Sud a subi certaines expériences douloureuses qui lui permet de porter un certain regard sur ces questions: il ne fait aucun doute que lutter contre la violence terroriste est une nécessité au regard d'abord du maintien de la sécurité des personnes, mais il est également certain que cette lutte doit s'accompagner d'une dimension pour ainsi dire structurelle, qui devrait permettre d'en isoler les causes pour éviter sa propagation.
Le représentant vénézuélien a souligné la nécessité de veiller à la protection particulière des personnes déplacées et des demandeurs d'asile, qui ne doivent pas subir les contrecoups des politiques antiterroristes. Pour sa part, le Venezuela appuie activement les normes internationales s'agissant des réfugiés et des personnes déplacées et respecte ces normes. Le représentant a par ailleurs souligné que l'entrée en fonction de la Cour pénale internationale, garante du respect des droits de l'homme, sera une étape importante pour la communauté internationale dans les efforts qu'elle mène pour protéger les droits de l'homme.
MME SAVITRI KUNADI (Inde) a déclaré que le monde avait changé après les événements du 11 septembre 2001. Elle a déclaré que la lutte contre le terrorisme pose des défis aux sociétés. Elle a déclaré que cet événement avait montré qu'aucune société, si puissante soit-elle, n'était à l'abri de la violence. Elle a évoqué l'attaque contre le parlement indien le 13 décembre 2001, soulignant que ce sont les systèmes qui font la promotion de la démocratie et qui respectent les droits de l'homme qui sont les plus vulnérables face aux attaques terroristes. La représentante a déclaré que ces actes de terrorisme sont une violation des droits de l'homme et portent atteinte aux normes universelles des droits de l'homme. Elle a demandé que les gouvernements qui estiment que le terrorisme n'est qu'un crime et non une violation des droits de l'homme reviennent sur leur position suite au choc du 11 septembre 2001. La représentante a déclaré qu'une convention relative au terrorisme international serait un élément essentiel pour une action efficace contre le terrorisme. Elle a exprimé l'espoir que la conclusion d'une telle convention sera possible dans un avenir proche. Elle a souligné que la résolution 1373 du Conseil de sécurité des Nations Unies était un important outil pour combattre le terrorisme. La représentante a rappelé que le Comité de lutte contre le terrorisme était en train d'évaluer les rapports nationaux, et elle a déclaré que ce sont les gouvernements nationaux qui doivent mesurer les objectifs de réalisation des droits de l'individu et la sécurité de l'État.
La représentante de l'Inde a déclaré, concernant le problème des réfugiés, que, bien qu'un État doive reconnaître le droit d'asile d'un individu, il doit également s'assurer que le demandeur d'asile ne soit pas engagé dans des activités terroristes. Elle a finalement instamment demandé à la Commission de reconnaître la lacune actuelle qui veut que les abus perpétrés par des terroristes ne soient pas considérés comme des violations des droits de l'homme.
M. MOHAMED-SALAH DEMBRI (Algérie) a fait part des observations de son gouvernement sur le rapport de la Haut-Commissaire (CN4/2002/18). L'Algérie considère que si la lutte contre le terrorisme est un devoir pour les États, elle ne doit pas servir de prétexte à des jugements de valeur sur les différentes cultures. En outre, la lutte pour l'autodétermination et pour le droit à la légitime défense contre une occupation étrangère ou coloniale ne saurait aucunement être assimilée au terrorisme. La communauté internationale doit apporter les solutions appropriées pour que des peuples ou des communautés ne se considèrent pas victimes d'injustices graves. À cet égard, la situation en Palestine exige la création immédiate de l'État palestinien.
L'Algérie a exprimé le 11 septembre même sa solidarité avec le peuple américain face à l'agression terroriste. Aussi, pense-t-elle que la convocation d'une conférence internationale sous l'égide des Nations Unies est aujourd'hui un impératif. L'Algérie, qui a mené seule durant cette décennie la lutte contre le terrorisme, a appelé la tenue de cette conférence depuis des années. L'Algérie est vivement préoccupée par les campagnes visant les communautés arabes installées en occident et qui ont fait l'objet de mesures vexatoires, humiliantes et dégradantes. Elle condamne l'assimilation faite par certains milieux selon laquelle la religion musulmane serait une religion de violence.
M. ABDULLAH AL-ASKAR (Koweït) a déclaré que son pays appuie les conclusions du rapport de la Haut-Commissaire. Le Koweït attire aussi l'attention sur le fait que beaucoup de pays n'ont pas respecté les résolutions adoptées par la Commission et ont refusé de coopérer avec d'autres mécanismes de droits de l'homme internationaux. Cette tendance est une source de préoccupation et un réel obstacle pour la promotion et la protection de droits de l'homme et la Commission devrait rapidement se saisir de ce problème.
M. KEVIN E. MOLEY (États-Unis) a salué les efforts déployés par la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson, pour veiller à ce que les droits de l'homme soient intégrés dans toutes les activités des Nations Unies. Il a également réitéré l'engagement du Président Bush en faveur de la cause des droits de l'homme.
M. Moley a relevé que le rapport de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, dont l'objet n'est pas de traiter des objectifs ou de l'idéologie d'Al Qaeda, prend note de la résolution 1373 du Conseil de sécurité qui constitue une affirmation fondamentale du droit à l'autodéfense. Le rapport de la Haut-Commissaire parle aussi de l'obligation des gouvernements d'assurer qu'en matière de lutte contre le terrorisme, les actions qu'ils prennent sont conformes aux obligations relatives aux droits de l'homme, a relevé le représentant des États-Unis. Il a affirmé à cet égard que l'élaboration et l'interprétation du droit humanitaire relève généralement de la responsabilité des États qui doivent aussi tenir compte des contributions du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Bien que la Commission ait, dans certaines de ses résolutions passées, fait référence au droit humanitaire, l'application directe de ce droit est de la responsabilité première des États, a réitéré le représentant des États-Unis. Il a indiqué ne pas être d'accord avec l'affirmation contenue dans le rapport de la Haut-Commissaire selon laquelle les résultats de Durban constituent un antidote au terrorisme; pour les États-Unis, ce sont des mesures de sécurité qui doivent avant tout être prises pour contrer les terroristes.
MME LOUBNA FREIH, Amnesty International et Human Rights Watch, a déclaré que, suite aux événements du 11 septembre, de nombreux États ont pris des mesures pour protéger les populations à l'intérieur de leurs pays. La représentante a déclaré que ces mesures violaient souvent les droits de l'homme. Elle s'est déclarée vivement préoccupée par certaines mesures prise par l'Inde, la Chine, l'Égypte, les États-Unis et la Grande Bretagne (cette liste n'étant pas exhaustive) sous prétexte de lutter contre le terrorisme. Dans ces États, les gardes à vue, les détentions au secret, les brutalités, les critères vagues et flous d'arrestation violent les normes des droits de l'homme. Les lois sur le terrorisme, la sécurité et la criminalité permettent des arrestations arbitraires et non fondées. Les garanties fondamentales pour le respect des droits de l'homme risquent de ne pas être respectées.
La représentante a cité le président de l'Égypte qui a déclaré que les événements du 11 septembre avaient créé une nouvelle notion de la démocratie qui s'écarte du concept que les États occidentaux défendaient avant ces événements, à savoir le respect des droits fondamentaux des droits de l'individu. La représentante a instamment demandé à la Commission de demander à tous les États d'assurer le respect des droits de l'homme en prenant des mesures contre le terrorisme et d'encourager les États à développer des mesures antiterroristes qui respectent les normes internationales des droits de l'homme.
MME H. SHARFELDDIN (Organisation internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale) a souligné que le rôle capital de l'Organisation des Nations Unies est menacé par les difficultés financières auxquelles elle doit faire face, à cause notamment du défaut de paiement de certains États. Son organisation préconise donc que le financement de l'ONU soit basé sur une contribution individuelle de chaque citoyen, proportionnelle à son revenu. Cette mesure permettrait d'impliquer chaque citoyen du monde de façon plus tangible dans les activités et le fonctionnement de l'Organisation.
MME REENA MARWAH (International Institute for Non Aligned Studies) a souligné que les événements de ces six derniers mois témoignent, si besoin était, de la nécessité de rester alerte face aux forces du fondamentalisme. Il est tragique qu'à un moment où l'enseignement devrait avoir pour objectif d'unifier la famille mondiale, des enfants se voient enseigner, aujourd'hui encore, la haine.
M. ANTOINE MADELIN (Fédération internationale des ligues des droits de l'homme) a fermement condamné le terrorisme, mais a dénoncé avec autant de vigueur les violations des droits de l'homme que l'on a pu constater dans certains pays occidentaux ou autres dans le cadre de la lutte antiterroriste. La FIDH appelle donc les États membres de la Commission à s'associer à l'appel lancé par 17 experts de la Commission, qui ont déploré les mesures liberticides qui ont pu être adoptées par ces États.

Droit de réponse.
Le représentant d'Israël a estimé que la distinction entre le terrorisme et le droit de résister revient à admettre le droit de tuer des innocents. Il a ajouté que rien ne peut justifier un tel acte. On ne saurait faire de distinction entre des terrorismes. Bien que les nombreux cessez-le-feu n'aient pas été respectés par les Palestiniens jusqu'à présent, il a espéré qu'un nouveau cessez-le feu entrera en vigueur cette semaine encore. Il a demandé à la Commission de condamner tous les actes de terrorisme, sans exception.
La représentante de la Chine a répondu à la déclaration du Ministre allemand des affaires étrangères en estimant que ses accusations étaient injustifiées. Elle a déclaré que les minorités nationales en Chine se développaient harmonieusement. Elle a souligné que la secte du Falun Gong avait provoqué la mort de nombreux innocents et que c'était pour cette raison que son pays avait interdit ce mouvement.
Le représentant de l'Égypte a fait observer au délégué d'Israël qu'il est certes nécessaire de respecter le droit à l'existence des Israéliens, mais qu'il oublie les attentats commis contre les civils palestiniens, qui ont eux aussi des droits. C'est l'occupation israélienne qui est l'origine de tous maux de la région, a ajouté le représentant égyptien, avec leur cortège de meurtres et de démolitions de maisons. Ces actes sont en tout état de cause incompatibles avec les droits de l'homme et avec une quelconque volonté de faire aboutir les négociations de paix.
En réponse au représentant israélien, le représentant de la Palestine s'est étonné quant à lui que les Israéliens se posent en victime, étant donné que c'est eux-mêmes qui, en 1967, ont décidé d'occuper les territoires, occupation qui est à l'origine de tous les problèmes aujourd'hui. Il a dénoncé l'usurpation de la terre, les meurtres, les destructions de maisons, d'écoles et d'hôpitaux, et a assuré que le peuple palestinien saura résister à l'occupation et faire valoir son bon droit.
Le représentant de l'Allemagne a répondu à la représentante de la Chine en déclarant que l'Allemagne fait beaucoup d'efforts pour faire respecter les droits de l'homme en Allemagne et dispose de beaucoup d'outils et d'organisations qui surveillent la situation dans ce domaine.
Le représentant d'Israël a répondu au représentant de la Palestine en attirant l'attention sur le nombre important d'Israéliens tués mais en soulignant également qu'Israël comprend la souffrance des Palestiniens. Il a déclaré qu'Israël a acquis ses territoires dans une action d'autodéfense en 1967. La Commission devait être un lieu où la paix devait être négociée et non la guerre.
Le représentant de la Chine a affirmé que, selon les propos du représentant de l'Allemagne, tout semble parfait en Allemagne. Or une telle affirmation ne saurait occulter des problèmes bien réels dans ce pays.
Le représentant de l'Égypte a rappelé que l'initiative de la paix en 1977 a démarré dans son pays et qu'il ne s'agissait alors nullement d'une initiative israélienne. L'Égypte ne cesse aujourd'hui encore de déployer des efforts pour contribuer à trouver une solution au conflit. Il est un fait que c'est en mettant fin à l'occupation des territoires palestiniens que la paix pourra être réalisée.
Le représentant de la Palestine a souligné que 1200 Palestiniens ont été tués alors que 200 ou 300 Israéliens étaient tués dans le même temps. Ces Palestiniens ont été tués dans une guerre totale menée contre eux, alors qu'ils ne disposent pas d'armes modernes, ni même d'armée. Ils défendent leur intégrité; les morts israéliens sont quant à eux les victimes indirectes de la politique israélienne elle-même. Israël peut cependant faire régner la paix. Il n'y a qu'une condition nécessaire et obligatoire : le retrait des territoires occupés en 1967, le démantèlement des colonies, et le retour des Palestiniens qui ont quitté la Palestine depuis 1948.




Rectificatif

Dans le communiqué de presse HR/CN/02/6 du 20 mars 2002, les deux droits de réponse du représentant de la Chine (pages 9 et 10) doivent se lire comme suit:
Un représentant de la Chine, exerçant son droit de réponse au discours du Ministre des affaires étrangères allemand, a déclaré que les minorités nationales en Chine bénéficiaient de l’égalité des droits civils, économiques et politiques; cet état de fait ne peut être changé par les calomnies d’un gouvernement étranger ou d’un individu. Le Falun Gong a provoqué la mort de beaucoup de victimes innocentes et le Gouvernement chinois a interdit cette secte afin de prévenir de nouveaux décès. Le représentant se félicite de l’attention que l’Allemagne porte aux droits de l’homme; l’Allemagne pourrait et devrait prendre des mesures en faveur des droits de l’homme, par exemple étudier comment lutter contre le néo-nazisme et la xénophobie sur son propre territoire afin d’éviter une tragique répétition d’événements. Il est difficile de faire face à ses propres problèmes et de les résoudre. C’est peut-être moins aisé que de montrer du doigt d’autres États.
Le représentant de la Chine, dans un deuxième droit de réponse, a souligné que bien qu’il se proclame indépendant, le système judiciaire allemand n’est pas parvenu à prévenir efficacement de graves violations des droits de l’homme, comme le néo-nazisme, la discrimination raciale, etc. Le délégué allemand a admis dans son rapport les lacunes de son pays dans le domaine des droits de l’homme, mais il serait plus courageux de les confesser de sa propre initiative.


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