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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE EXAMINE LE RAPPORT DE LA FINLANDE
26 février 2009
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Comité pour l'élimination
de la discrimination raciale
26 février 2009
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a examiné, hier après-midi et ce matin, le rapport périodique de la Finlande sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale.
Présentant des observations préliminaires à l'issue de ces deux séances de travail, le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Finlande, M. Anwar Kemal, a qualifié d'«une des expériences les plus satisfaisantes jamais vécues par le Comité» le dialogue avec la délégation finlandaise. Il a souligné que si le Gouvernement se concentre sur la jeunesse – c'est-à-dire sur la prochaine génération – cela constituera une base adéquate pour la promotion de la tolérance à venir. M. Kemal a par ailleurs dit que la Finlande semble déployer un véritable effort pour lutter contre la discrimination raciale à l'intérieur de ses frontières; mais les efforts ne suffisent pas toujours, c'est le succès qui compte, a-t-il souligné. Nombre de membres du Comité ont relevé au cours du débat l'accroissement des infractions racistes en Finlande, ainsi que les discriminations dont sont victimes les Roms, mais aussi les membres des minorités et les immigrants. Le Comité présentera en fin de session le vendredi 6 mars prochain, ses observations finales sur le rapport de la Finlande.
Présentant le rapport de son pays, M. Arto Kosonen, Directeur du Ministère des affaires étrangères de la Finlande, a indiqué que l'ensemble de la législation sur la non-discrimination est l'objet d'une mise au point et qu'une réunion des dispositions relatives à la non discrimination, la discrimination et l'égalité des sexes est envisagée. Il a d'autre part indiqué que le mandat du Médiateur des minorités a été élargi l'an dernier et inclut désormais la possibilité de mener des enquêtes indépendantes sur la discrimination ethnique. Depuis longtemps, la Finlande s'emploie à résoudre par voie législative la question des droits fonciers; l'objectif est de parvenir à une solution équilibrée qui respecte les obligations internationales du pays et garantisse que non seulement les Samis, mais également les autres populations locales, puissent influer sur les modalités d'usage de leurs zones d'habitat. Les conditions de logement des Roms restent un défi, a en outre reconnu M. Kosonen. Bien que des choses restent à faire en Finlande en termes d'élimination de toutes les formes de discrimination, d'une manière générale, la situation globale du pays s'est améliorée, a-t-il conclu.
La délégation finlandaise était également composée de représentants du Ministère de la justice, du Ministère de l'intérieur, du Ministère de l'éducation, du Ministère de l'environnement, du Ministère des affaires étrangères et du Ministère de l'emploi et de l'économie. Elle a fourni aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, entre autres, les activités du médiateur des minorités; la situation des minorités et des immigrants et le comportement de la population à leur égard; la ségrégation ethnique dans le logement; les poursuites engagées devant les tribunaux et les condamnations prononcées pour infractions racistes; la situation des Samis et la question de leurs droits fonciers; la situation des Roms. Elle a notamment fait valoir que le Parlement finlandais a adopté hier un amendement à la loi sur les étrangers en vertu duquel les personnes dotées d'un permis temporaire (permis B) ont désormais le droit de travailler.
En fin de séance, ce matin, le Comité s'est penché sur la question du suivi de ses observations finales en entendant un compte rendu sur la question présenté par l'un de ses membres, M. Nourredine Amir, concernant plus précisément le suivi de certains paragraphes des observations finales adoptées par le Comité en mars 2006 au sujet de la Bosnie-Herzégovine et de la République de Corée.
Sur recommandation de la Présidente du Comité, Mme Fatimata-Binta Victoire Dah, le Comité a décidé d'adresser un message de soutien et d'encouragement au Comité sur les droits des personnes handicapées qui tient, cette semaine à Genève, sa première session.
Le Comité entamera cet après-midi, à 15 heures, l'examen du rapport de la Croatie.
Présentation du rapport
M. ARTO KOSONEN, Directeur du Ministère des affaires étrangères de la Finlande, a rappelé que le rapport couvre la période allant de 2003 à 2007. L'ensemble de la législation sur la non-discrimination est l'objet d'une mise au point qui vise à l'asseoir sur le système finlandais des droits fondamentaux et le principe de l'égalité des recours et sanctions pour tous motifs de discrimination, a-t-il déclaré. Une commission, établie par le Ministère de la justice en janvier 2007, est en train d'examiner la nécessité de revoir les dispositions relatives à la non-discrimination et l'égalité des sexes prévues dans la législation. Dans le cadre de cette réforme, les tâches et les pouvoirs de l'actuel médiateur pour la non-discrimination seront ajustées selon que de besoin. La commission susmentionnée a présenté son rapport intérimaire en février 2008, a indiqué M. Kosonen, ajoutant que les directives proposées par cette commission avaient en général reçu un écho favorable auprès des autorités, des organisations non gouvernementales et autres parties prenantes.
M. Kosonen a indiqué que la loi sur les langues, entièrement remaniée et applicable aux langues nationales du pays – finnois et suédois – est entrée en vigueur au début de 2004. Aux termes de la nouvelle loi, toute administration publique veillera, dans ses activités, de sa propre initiative, au respect des droits linguistiques des particuliers, sans que ces derniers soient tenus de les invoquer. Conformément à cette loi, un rapport gouvernemental concernant l'application de la loi ainsi que la situation générale du point de vue des droits linguistiques est présenté au Parlement périodiquement. Le premier rapport a été présenté en 2006 et le deuxième doit l'être ce printemps, a précisé M. Kosonen. La loi d'ensemble antérieure sur les droits linguistiques des Samis a été remplacée par une nouvelle loi sur la langue samie, entrée elle aussi en vigueur en 2004, qui insiste sur l'obligation des administrations publiques de veiller, de leur propre initiative, à la garantie des droits linguistiques. Cette dernière loi couvre les trois langues samies parlées en Finlande, à savoir le sami inari, le sami skolt et le sami septentrional, a indiqué M. Kosonen. Conformément à cette loi, le rapport sur l'application de la loi a été soumis au Parlement sami en 2007, a-t-il précisé. Selon ce rapport, aucun changement réel ne semble être intervenu s'agissant du nombre de personnes parlant le sami ou des services fournis dans les municipalités samies du territoire sami. De l'avis du Gouvernement, toutefois, il semble que les autorités aient pris, ces dernières années, une meilleure connaissance de la loi sur la langue sami et de ses dispositions.
M. Kosonen a par ailleurs indiqué que la législation sur l'enseignement de la langue maternelle pour les immigrants, les élèves de langue rom et les élèves de langue samie en dehors du territoire sami a été amendée en 2007, portant notamment de 2 à 2,5 le nombre de cours hebdomadaires financés par l'État. Le soutien à l'enseignement de la langue maternelle dans les écoles pour enfants immigrants est nécessaire afin de que les compétences linguistiques de ces enfants soient préservées et que soit instauré un bilinguisme fonctionnel, a souligné M. Kosonen.
Le chef de la délégation finlandaise a également fait part du Programme de sécurité interne adopté par la Finlande en mai 2008 et qui vise à améliorer la sécurité des immigrants et des minorités ethniques tout en réduisant la violence et en luttant contre le crime organisé, la cybercriminalité et les risques liés à Internet. L'objectif déclaré de ce programme est de faire de la Finlande le pays le plus sûr d'Europe d'ici 2015, a ajouté M. Kosonen. Parmi les mesures associées à ce Programme figurent celles qui visent à assurer que la législation et le système judiciaire traitent efficacement les crimes racistes et les messages racistes diffusés sur Internet, en recourant à la loi pénale, a-t-il insisté.
M. Kosonen a d'autre part indiqué que le mandat du Médiateur des minorités a été élargi l'an dernier et inclut désormais la possibilité pour cette institution de mener des enquêtes indépendantes sur la discrimination ethnique et d'agir en tant qu'organe national de surveillance du trafic de personnes. En outre, le Ministère de l'intérieur a mis au point en septembre 2008 un projet visant l'application du plan pour un système national de surveillance du racisme et de la discrimination raciale.
Avec les différentes parties prenantes du marché du travail et les organisations représentant les minorités, le Gouvernement a entrepris de lancer plusieurs programmes dont l'objectif est d'améliorer les comportements des employeurs et des communautés de travailleurs à l'égard des minorités, a poursuivi M. Kosonen. Le Ministère de l'intérieur a joué un rôle central dans le lancement d'un projet intitulé «zone exempte de discrimination» par lequel les lieux de travail peuvent se déclarer sur Internet «zone exempte de discrimination», a-t-il précisé.
Les immigrants doivent se voir accorder les mêmes services sanitaires et sociaux que le reste de la population, a poursuivi M. Kosonen; mais des services complémentaires spéciaux peuvent s'avérer nécessaires à leur intention. Les besoins spéciaux des immigrants en matière de santé ont été retenus dans le récent plan d'action national visant à réduire les inégalités en matière de santé, a indiqué M. Kosonen.
La ségrégation résidentielle en Finlande résulte de différents processus dynamiques de migration interurbaine, a poursuivi M. Kosonen. La migration institutionnellement générée, c'est-à-dire les cadres et manifestations migratoires résultant de différentes politiques et procédures en matière de logement et d'immigration, constitue l'un des facteurs essentiels du développement de la ségrégation ethnique, a-t-il expliqué. Les choix et préférences, en matière de logement, des immigrants somaliens et russes (les deux plus importants groupes d'immigrants) ont amené ces personnes à se rendre dans la capitale et dans sa région, a-t-il ajouté. En outre, a-t-il poursuivi, l'importance des communautés ethniques et des réseaux est reconnue, tout comme le fait que certains groupes accordent de l'importance au maintien de contacts sociaux étroits avec leur propre communauté.
Depuis longtemps, la Finlande s'emploie à résoudre par voie législative la question des droits fonciers, a poursuivi M. Kosonen. L'objectif est de parvenir à une solution équilibrée qui respecte les obligations internationales du pays et garantisse que non seulement les Samis, mais également les autres populations locales, puissent influer sur les modalités d'usage de leurs zones d'habitat. Néanmoins, la question s'est avérée complexe et difficile, a indiqué M. Kosonen. Il a précisé que l'intention de son Gouvernement est de rédiger un projet de loi sur la question qui soit basé sur un point de vue commun quant au modèle acceptable pour toutes les parties prenantes.
Les conditions de logement des Roms restent un défi, a poursuivi M. Kosonen. Il a notamment souligné que la préparation du premier programme de politique gouvernementale en faveur des Roms a débuté au sein d'un groupe de travail intersectoriel dont la moitié des membres représentent la population rom. La première phase de ce programme doit être achevée d'ici le mois de juin prochain, a-t-il précisé. Les objectifs principaux de ce programme ont trait au renforcement de l'égalité des Roms et à leur participation, a-t-il ajouté.
Bien que des choses restent à faire en Finlande en termes d'élimination de toutes les formes de discrimination, d'une manière générale, la situation globale du pays s'est améliorée, a conclu M. Kosonen.
Le rapport périodique de la Finlande (CERD/C/FIN/19 - dix-septième, dix-huitième et dix-neuvième rapports périodiques, soumis en un seul document) souligne que, sur l'ensemble des résidents permanents, 97,7% (5 155 216 personnes) étaient des ressortissants finlandais et 2,3% (121 739 personnes) d'autres nationalités. En 2006, le nombre de citoyens étrangers s'est accru de quelque 6,5%. Russes, Estoniens, Suédois et Somalis constituaient les principaux groupes d'étrangers résidant en Finlande. Le finnois et le suédois sont les langues nationales, poursuit le rapport. La Finlande compte environ 10 000 Roms. La plupart résident dans les grandes villes du sud. Quelque 3 000 Roms finlandais vivent en Suède. Quelque 1500 Juifs vivent en Finlande, dont la plupart dans les environs d'Helsinki. Des congrégations juives se trouvent à Helsinki et Turku. Les Tatars représentent une communauté islamique d'origine turque. Leurs ancêtres ont émigré en Finlande entre 1870 et 1925. Environ 800 vivent dans le pays, essentiellement dans la circonscription de la capitale. À la population russophone traditionnelle qui vit en Finlande depuis le tournant du XXe siècle (environ 5000 personnes), s'est ajouté, durant la dernière décennie, un grand nombre de nouveaux immigrants. Ainsi, les russophones constituent le principal groupe linguistique dans le pays, après ceux des personnes parlant le finnois et le suédois.
Les Samis, au nombre d'environ 8000, sont des autochtones, poursuit le rapport. Un peu moins de la moitié vit dans le territoire sami, en Laponie septentrionale, et le reste dans d'autres parties du pays et à l'étranger. Dans le territoire sami, ils constituent une minorité représentant un tiers de la population totale. Conformément à l'article 3 de la loi sur le Parlement sami, un Sami s'entend d'une personne qui se considère comme telle (auto-identification) et remplit de surcroît les critères objectifs de la définition. La portée subjective de cette définition s'appuie sur la pratique suivie par la Cour administrative suprême en matière d'interprétation et modifier la loi à cet égard ne se justifie pas actuellement. Le Parlement sami estime que la définition devrait être examinée à l'échelle des pays nordiques aux fins d'une définition commune.
La Constitution finlandaise contient une disposition d'ordre général sur l'égalité et une interdiction de la discrimination, de large portée, dans tous les domaines de la vie. De plus, la loi sur la non-discrimination et des lois spéciales disposent largement en la matière, ainsi que la loi de 2004 sur la non-discrimination qui applique les Directives du Conseil européen relatives à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement et l'égalité de traitement en matière d'emploi et de travail. Le respect des dispositions de la loi est suivi par le médiateur des minorités et le tribunal national de lutte contre la discrimination, du point de vue de l'origine ethnique et par les autorités chargées de la sécurité et la santé au travail, du point de vue des relations professionnelles et prestations de services régies par le droit public. En outre, le Code pénal érige en infraction la participation aux activités d'une organisation criminelle et s'applique notamment quand un groupe de la criminalité organisée cherche à fomenter une agitation ethnique contre un groupe de population donné. De plus, une disposition du Code pénal prévoit une sanction plus sévère pour cause de motifs racistes. En 2005, 669 délits de caractère raciste ont été enregistrés dans les rapports de police et, en 2006, leur nombre est passé à 748, indique le rapport. Les condamnations pour agitation ethnique et autres délits qualifiables d'infractions racistes sont relativement peu nombreuses. De 2000 à 2005, six personnes ont été déclarées coupables d'agitation ethnique. Cinq d'entre elles ont été condamnées à une amende et, pour l'une, la condamnation a été annulée. Toutefois, les affaires d'agitation ethnique n'ont cessé d'augmenter. Les Roms, les personnes issues de l'immigration et les étrangers continuent de se heurter à une discrimination dans l'accès aux lieux de services, tels que restaurants et bars, reconnaît par ailleurs le rapport. En 2005–2006 (et trois mois en 2004), le Tribunal national de lutte contre la discrimination a examiné et jugé au total 100 réclamations au cours de 21 audiences. Les réclamations invoquaient une discrimination dans les actes de pouvoirs publics, services de protection sociale, services du logement, possibilités éducatives, services de restauration et autres. La plupart alléguaient une discrimination par les autorités. Dans deux cas, un règlement à l'amiable a été conclu; trois décisions ont fait l'objet d'un recours administratif et deux de ces recours ont été rejetés. La Cour administrative suprême instruit actuellement le seul recours admis. Le tribunal a prononcé six interdictions expresses.
Examen du rapport
Observations et questions des membres du Comité
M. ANWAR KEMAL, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Finlande, a relevé que le pays est doté de toute une panoplie de mécanismes très complets qui permettent de faire face aux problèmes des inégalités ou de la discrimination. Nombre de sujets de préoccupations exprimées lors de l'examen du précédent rapport de la Finlande, en 2003, restent encore valables, notamment en ce qui concerne la question de la définition des Samis, a toutefois fait observer M. Kemal. Il a demandé à la délégation finlandaise de préciser quand la question de la définition des Samis serait abordée au niveau des pays nordiques, comme semblait le proposer la Finlande. En ce qui concerne la question des droits fonciers, M. Kemal a souhaité que la délégation explique au Comité quelles sont les dernières évolutions dans ce domaine.
En ce qui concerne le racisme, la discrimination et la xénophobie sur Internet, M. Kemal a rappelé les allégations qui avaient été portées concernant l'existence d'attitudes racistes et xénophobes parmi les jeunes. Le pays indique s'être intéressé à ce problème, notamment par la promotion d'actions en faveur au multiculturalisme, a relevé l'expert. En outre, a-t-il ajouté, une étude a laissé apparaître que l'attitude des autorités à l'égard des immigrants et des minorités s'était améliorée mais qu'il restait encore une marge d'amélioration. M. Kemal a relevé que selon les informations fournies par le rapport lui-même, les élèves d'origine étrangère font fréquemment l'objet d'intimidation dans les cours de récréation; il conviendrait donc que le Comité se penche sur ce problème.
M. Kemal a par ailleurs attiré l'attention sur les problèmes d'octroi de permis de résidence temporaire (permis B) qui se posent, en particulier, pour les ressortissants de l'Iraq, de l'Afghanistan et de la Somalie, lesquels ne bénéficient pas du regroupement familial, n'ont pas accès aux soins de santé au niveau municipal et n'ont pas non plus le droit de travailler.
Le rapporteur a dit craindre qu'en matière de traitement des demandes d'asile, la procédure accélérée existante n'aboutisse à l'expulsion immédiate du requérant d'asile. En effet, comme l'indique le rapport lui-même, les 774 demandes d'asile qui ont été traitées dans le cadre de cette procédure accélérée ont toutes été rejetées. Aussi, M. Kemal s'est-il enquis des raisons de ce taux de 100% de refus.
La Finlande compte environ 10 000 Roms, parmi lesquels le taux de chômage est d'environ 20%, a en outre souligné M. Kemal. Il ajouté que les femmes roms subissent une discrimination dans le recrutement, leur accoutrement vestimentaire servant souvent de prétexte. Un problème se pose également en matière d'accès des Roms aux lieux publics tels que les bars ou restaurants, a insisté l'expert.
En conclusion, il semble que la Finlande déploie un véritable effort pour lutter contre la discrimination raciale à l'intérieur de ses frontières; mais les efforts ne suffisent pas toujours à assurer le succès d'une entreprise et en la matière, c'est le succès qui compte, a-t-il souligné.
Un autre membre du Comité a souligné que la discrimination raciale est perceptible à toutes les instances de la vie finlandaise et les actes discriminatoires sont en augmentation, en particulier s'agissant des Roms, a souligné un expert, relevant que les Roms sont victimes de discrimination en matière d'emploi, de logement, d'éducation et d'accès aux services sociaux. On peut dire que les communautés musulmanes et somaliennes sont, elles, victimes de racisme, a ajouté cet expert. Or, on constate que souvent, les cas avérés qui sont portés devant les tribunaux ne sont pas sanctionnés, a-t-il souligné. Quelles mesures pourraient-elles être prises pour renverser cette situation, a demandé cet expert?
Le nombre d'infractions racistes s'est accru en Finlande, a lui aussi relevé un autre membre du Comité. Il a en outre relevé l'existence d'une discrimination à l'encontre des minorités et des immigrants de la part des patrons. Des discriminations subsistent également en matière d'accès aux lieux publics; les amendes – sans grands effets d'ailleurs – qui sont appliquées en la matière visent le personnel de garde (à l'entrée des établissements) et non les patrons d'établissements eux-mêmes.
Comment s'articulent les compétences de tous les organes qui traitent des questions de discrimination, a pour sa part demandé un expert? La législation pénale visant à lutter contre les actes de racisme semble assez complète, a ajouté cet expert; mais il apparaît que les infractions racistes sont assez peu poursuivies en justice, a-t-il relevé.
Renseignements complémentaires fournis par la délégation
Répondant aux questions des membres du Comité, la délégation finlandaise a notamment expliqué que le Médiateur des minorités relève à l'heure actuelle du Ministère de l'intérieur, mais ses bureaux se trouvent dans des bâtiments bien distincts afin de bien marquer l'indépendance entre cette institution et le Ministère. La loi sur le Médiateur des minorités stipule très clairement que cette institution est totalement indépendante, a-t-elle insisté. Elle a ajouté que le Médiateur est pleinement responsable du recrutement de son équipe et à toute compétence en la matière. Le Médiateur dépend donc du Ministère de l'intérieur mais ne lui est absolument pas subordonné, a insisté la délégation.
En ce qui concerne les comportements de la population finlandaise à l'égard des groupes ethniques, la délégation a rappelé que ces comportements sont surveillés depuis 1987. À l'époque, il y avait peu de d'immigrants dans le pays et la majorité des Finlandais estimaient que le pays pouvait accueillir davantage de réfugiés et d'étrangers. Puis cela a changé à partir de 1990 et les années suivantes alors que la Finlande connaissait une période de récession économique; les réactions devinrent alors plus négatives à l'égard des groupes susmentionnés. Aux environs de 2005-2006, c'est-à-dire après cette période de récession, les réactions ont recommencé à être plus positives et on peut dire que les attitudes sont donc de nouveau positives. Il y a bien sûr des exceptions, notamment en ce qui concerne l'attitude des jeunes de 16 ou 17 ans – lesquels ont d'ailleurs tendance à penser également que les hommes et les femmes ne sont pas égaux.
La délégation a indiqué qu'un nombre de plus en plus grand d'immigrants travaillent en Finlande. Le chômage des immigrants a baissé ces cinq dernières années pour se stabiliser à 10% - le taux national moyen de chômage se situant quant à lui à 6%. On considère que sur les 130 000 immigrants qui se trouvent dans le pays, quelque 105 000 travaillent, a précisé la délégation.
En ce qui concerne la ségrégation ethnique dans le logement, la délégation a assuré que depuis les années 1970, la politique du logement suivie en Finlande consiste à mélanger les populations, de manière, précisément, à mieux prévenir toute ségrégation. Nous assurons l'égalité de traitement entre les personnes et cela s'applique bien entendu aussi à la sélection des locataires de logements sociaux, a ajouté la délégation. Aussi, la ségrégation, si elle existe, reste-t-elle très réduite dans les grandes villes, a poursuivi la délégation. Il arrive souvent que des appartements à louer restent vides assez longtemps parce que les populations locales n'en veulent pas; aussi, y place-t-on de plus en plus fréquemment des immigrants, a en outre indiqué la délégation. Ainsi, la population immigrée dans certaines zones atteint-elle parfois 10% et même, pour certains immeubles, 20% - ce qui reste toutefois assez rare, a indiqué la délégation. D'une manière générale, les populations immigrées dépendent davantage que les autres du secteur public du logement.
Les Roms en Finlande ne sont pas nomades mais plutôt sédentaires comme le reste de la population, a par ailleurs souligné la délégation. À l'automne 2008, le Ministre de l'éducation a annoncé des subventions spéciales pour la période 2009-2010 afin que les conseils municipaux qui en feront la demande puissent contribuer à l'éducation des enfants roms.
En réponse aux préoccupations exprimées par certains experts quant au faible nombre de poursuites engagées devant les tribunaux finlandais pour infractions racistes, la délégation a tout d'abord souligné qu'entre 2003 et 2007, le nombre de plaintes pour crimes et délits racistes dans le pays a enregistré une hausse de 40%. Étant donné qu'il apparaissait que nombre de plaintes n'aboutissaient pas à une condamnation, une étude a été commandée, diligentée l'an dernier par l'académie de police. Il est apparu, d'un point de vue statistique, que 74% des plaintes déposées devant la police se soldaient par une enquête préliminaire fructueuse et que sur ce nombre (certains plaignants choisissant à ce stade de retirer leur plaintes) les deux tiers étaient renvoyées au procureur pour décision quant à la suite à donner – ce dernier décidant dans les deux tiers des cas de renvoyer l'affaire devant un tribunal. La délégation a ajouté que dans 80% des cas, les affaires portées à l'attention des tribunaux se soldaient par une condamnation.
Pour l'heure, la définition du terme de «Sami» se fonde sur la pratique de la Cour administrative suprême, a par ailleurs rappelé la délégation. Elle a fait part de l'intention des autorités de participer à des consultations au niveau nordique (Suède, Norvège, Finlande) afin de parvenir à dégager une définition commune de ce terme. La délégation a également rappelé le projet de convention samie envisagé au niveau des pays nordiques.
La délégation a en outre rappelé l'existence d'un Conseil consultatif sur les questions samies créé au niveau nordique en 1963, entre la Suède, la Norvège et la Finlande, et composé de représentants gouvernementaux et des communautés samies.
La question des droits fonciers des Samis s'est avérée complexe et difficile et il n'est pas aisé de dégager un consensus à ce sujet, a poursuivi la délégation. Actuellement, la question est débattue au niveau ministériel, a-t-elle ajouté.
En Finlande, la langue samie est une langue minoritaire et la loi sur la langue samie est en principe régionale, a indiqué la délégation; elle garantit aux Samis le droit d'utiliser leur langue devant les tribunaux et auprès de toute autre autorité.
En ce qui concerne les questions relatives aux immigrants, la délégation a notamment indiqué qu'hier, le Parlement finlandais a adopté un amendement à la loi sur les étrangers en vertu duquel les personnes dotées d'un permis temporaire (permis B) ont désormais le droit de travailler.
Interrogée sur l'éventuel recours à la pratique du testing afin d'évaluer l'accessibilité à tous des lieux publics en Finlande, la délégation a indiqué que deux études ont été menées en Finlande ces dernières années concernant l'accès aux restaurants et autres lieux publics. Les personnes qui ont procédé à ces tests étaient d'origine rom et les résultats se sont avérés décourageants car ces personnes, qui essayaient d'entrer dans ces lieux publics, se sont en fait vu refuser l'accès, a indiqué la délégation. Ces cas ont été soumis à la police et des poursuites ont été engagées, a-t-elle ajouté.
La délégation a indiqué que l'on compte environ 300 détenus étrangers dans les prisons finlandaises. On estime entre 170 et 180 personnes le nombre de Roms emprisonnés en Finlande, a ajouté la délégation.
Observations préliminaires
M. Kemal a remercié la délégation finlandaise pour sa coopération avec le Comité ainsi que pour les réponses qu'elle a apportées aux questions des experts et qui ont permis au Comité de mieux appréhender la situation dans le pays. C'est l'une des expériences les plus satisfaisantes jamais vécues par le Comité, s'est réjoui l'expert, faisant observer que la délégation a parfois même anticipé les questions. La délégation n'a pas hésité à reconnaître les problèmes auxquels le pays était confronté, a ajouté le rapporteur.
M. Kemal a souligné que si le Gouvernement se concentre sur la jeunesse – c'est-à-dire sur la prochaine génération – cela constituera une base adéquate pour la promotion de la tolérance à venir. M. Kemal a par ailleurs invité la Finlande à aider, en les accueillant dans le pays ne serait-ce que quelques-unes des personnes – véritables boat people - qui cherchent à quitter le Myanmar, ce qui s'inscrirait parfaitement dans la tradition d'accueil de la Finlande à l'égard des personnes qui souffrent.
Un autre membre du Comité a souhaité que la Finlande réagisse plus fermement face à la recrudescence des infractions racistes enregistrées dans le pays. Il s'est toutefois félicité que la Finlande ait conscience de ses obligations et ait déjà pris un certain nombre de mesures.
Plusieurs experts se sont réjouis de l'annonce faite par la délégation indiquant que le Parlement finlandais avait adopté hier un amendement à la loi sur les étrangers en vertu duquel les personnes dotées d'un permis temporaire ont désormais le droit de travailler.
Suivi des observations finales
Le Comité s'est penché sur la question du suivi de ses observations finales en entendant un compte rendu sur la question présenté par l'un de ses membres concernant plus précisément le suivi de certains paragraphes des observations finales adoptées par le Comité en mars 2006 au sujet de la Bosnie-Herzégovine et de la République de Corée.
M. NOURREDINE AMIR, rapporteur pour le suivi des observations finales sur la Bosnie-Herzégovine et la République de Corée, a rendu compte de la manière dont ces deux pays ont à ce stade réagi après que le Comité leur eut fait parvenir les paragraphes de ses observations finales sur lesquels il souhaitait que soient apportées des réponses de suivi.
M. Amir a notamment rappelé que le Comité avait demandé à la Bosnie-Herzégovine de modifier certaines parties de la Constitution et de la loi électorale du pays. Il a précisé que la Constitution stipulait en effet que les personnes appartenant à l'une des parties constituantes de la Bosnie-Herzégovine (c'est-à-dire les Bosniaques, les Croates et les Serbes) pouvaient être élus à la Chambre des représentants, entre autres, ce qui, de fait, empêchait tout membre de minorité ethnique n'appartenant pas à l'une des trois parties constituantes du pays d'y être élu. Le Comité pourrait donc, tout en se félicitant de l'information fournie par la Bosnie-Herzégovine quant aux changements que le pays a proposé d'apporter à la Constitution, se dire préoccupé que le pays ne soit pas encore parvenu à imposer ces changements. Il serait donc recommandé à la Bosnie-Herzégovine de procéder aux modifications requises afin d'assurer le respect du droit de tout citoyen, indépendamment de son appartenance ethnique, de voter et de se présenter aux élections. Le Comité pourrait en outre réitérer sa recommandation visant le règlement des revendications des employés qui ont été placés sur liste d'attente suite au conflit en raison de leur appartenance ethnique. Le Comité pourrait par ailleurs encourager la Bosnie-Herzégovine à redoubler d'efforts pour que la ségrégation dans les écoles publiques soit supprimée le plus rapidement possible, accélérant notamment à cette fin le processus de cursus unique pour tous les élèves.
Pour ce qui est de la République de Corée, M. Amir a relevé que le Gouvernement est en train de traduire en anglais la loi sur le traitement des étrangers dans le pays, mais que cette traduction n'était pas achevée. Le Gouvernement est en train de parachever un plan national d'action pour les étrangers qui devrait entrer en vigueur au deuxième semestre de cette année, a en outre relevé M. Amir. Dans le cadre de ce programme quinquennal, il semble que le Gouvernement de la République de Corée fasse de son mieux pour éviter la discrimination à l'encontre des travailleurs migrants et de leurs enfants, a-t-il déclaré. M. Amir a aussi relevé qu'il n'existe à l'heure actuelle aucune législation spécifique, en République de Corée, interdisant et réprimant les infractions pénales à motivation raciste, le pays faisant toutefois valoir que le droit pénal national punit les auteurs d'infractions pénales quelle que soit la race des victimes. M. Amir a proposé que le Comité demande au pays de fournir des informations précises sur le contenu du plan d'action national pour les étrangers. Le Comité pourrait en outre demander au pays de garantir que toutes les dispositions prévues dans ce plan couvrent tous les domaines de la vie, y compris, entre autres, l'emploi, la santé et l'éducation. Le Comité pourrait aussi rappeler que la Convention exige que toute diffusion d'idées fondées sur la supériorité raciale ainsi que l'incitation à la haine raciale soient considérées comme un délit punissable par la loi; par conséquent, des sanctions devraient être établies à cette fin.
M. PIERRE-RICHARD PROSPER, co-rapporteur, a pour sa part fait observer que les rapports disponibles indiquent que la situation en Bosnie-Herzégovine est de plus en plus délicate. Il serait donc peut-être judicieux de voir si le Comité ne pourrait pas prévoir un engagement plus marqué s'agissant de ce pays, a-t-il affirmé.
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