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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS EXAMINE LE RAPPORT PÉRIODIQUE DU MAROC

11 Mai 2006

11 mai 2006

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné, hier après-midi et aujourd'hui, le troisième rapport périodique présenté par le Maroc sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Comité adoptera des observations finales sur le rapport du Maroc qui seront rendues publique à la fin de la session, le 19 mai prochain.

Présentant le rapport de son pays, M. Mohamed Bouzoubaa, Ministre de la justice et chef de la délégation, a notamment déclaré que la défense des droits de l'homme est de la responsabilité de toutes les couches de la société, aussi bien des autorités publiques que des forces qui travaillent dans la société à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels ainsi que civils et politiques. Plusieurs chantiers de modernisation ont été ouverts au Maroc: électrification, adduction d'eau potable, scolarisation. Par ailleurs, les initiatives se poursuivent pour le renforcement des droits de l'homme, des droits civils et politiques et aussi des droits économiques, sociaux et culturels. Le Ministre a présenté les cinq actions nationales engagées pour la construction d'un Maroc moderne sur des bases démocratiques: un effort spécial sera consacré aux infrastructures de base; une initiative de développement humain favorisera le rapprochement social; une Instance de compensation et d'équité a été instituée, dont la mission est de conclure les enquêtes sur des disparitions forcées et dédommager les familles des victimes; un chantier a été lancé pour l'harmonisation de la loi nationale avec les textes internationaux relatifs notamment aux femmes et aux enfants. Le Ministre a également évoqué plusieurs nouveaux textes adoptés par le Maroc: code de la famille, code du travail, loi instaurant la couverture médicale obligatoire, code des libertés générales (droit d'association, liberté syndicale, liberté de la presse).

La délégation du Maroc était également composée de M. Mohammed Loulichki, Représentant permanent auprès de l'Office des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants des Ministères de la justice, de la famille et de la solidarité, de l'intérieur, de l'agriculture, du développement rural et des pêches maritimes, de la santé, de l'éducation nationale, des finances et de l'emploi. La délégation a répondu aux questions qui lui étaient adressées par les membres du Comité s'agissant en particulier de la défense de la culture et de la langue amazigh, du droit à la santé, de la défense des droits syndicaux, de l'extension des services éducatifs, de la lutte contre la discrimination envers les femmes et du traitement réservé aux migrants en transit sur le sol marocain.


Le Comité reprendra ses travaux demain vendredi 12 mai à 10 heures, en abordant des questions de fond concernant la mise en œuvre du Pacte des droits économiques, sociaux et culturels, en particulier l'examen d'un projet d'observation générale sur le paragraphe du Pacte consacré à la non-discrimination.



Présentation du rapport du Maroc

Présentant le rapport de son pays, M. MOHAMED BOUZOUBAA, Ministre de la justice du Maroc, a déclaré que l'élection récente du Maroc au nouveau Conseil des droits de l'homme représentait certainement une reconnaissance des efforts que le Maroc a accomplis pour l'instauration chez lui de l'État de droit. Conformément aux dispositions du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, le projet social et politique présidé par le Roi est appliqué avec, en son cœur, l'idée que le bien du peuple marocain doit prévaloir. Le Maroc tient à faire prévaloir, dans la résolution des différends, les principes du dialogue social, du rapprochement des différentes couches de la population et du renforcement et de la coopération internationale. La défense des droits de l'homme est de la responsabilité de toutes les couches de la société, a dit le Ministre, aussi bien des autorités publiques que des forces qui travaillent dans la société à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels ainsi que civils et politiques.

Le Maroc compte trente millions d'habitants, avec une forte proportion de jeunes. Le budget de fonctionnement de l'État, relativement limité, est notamment consacré aux subventions, aux subsides et à l'achat de carburants. Plusieurs chantiers de modernisation ont néanmoins été ouverts au Maroc: électrification des villages avec un taux de couverture de 85% en 2005, et 100% prévus à fin 2007; adduction d'eau potable - 70% de la population est couverte à l'heure actuelle; scolarisation, dont le taux actuel s'établit à 91%. Le chômage, à 9%, est à son plus bas niveau depuis trente-cinq ans. Quant à la croissance, elle devrait atteindre 9% en 2006.

Le Ministre marocain de la justice a ajouté que les initiatives se poursuivent dans le cadre du Grand Maghreb pour le renforcement des droits de l'homme, des droits civils et politiques et aussi des droits économiques, sociaux et culturels. Il a présenté les cinq actions nationales engagées pour la construction d'un Maroc moderne sur des bases démocratiques; de nombreux partenaires ont été consultés pour la réalisation de ces projets, fortement orientés sur les communautés et les quartiers les plus défavorisés. Toutes ces initiatives s'inscrivent dans le cadre de la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement. C'est ainsi que, pendant la période 2006-2010, un effort spécial sera consacré aux infrastructures de base (eau, électricité) et à la formation afin d'abolir la marginalité et la pauvreté; une initiative de développement humain favorisera le rapprochement social, qui devra être au cœur de toute initiative en faveur des droits civils et humains; une instance de compensation et d'équité a été instituée, dont la mission est de conclure les enquêtes sur des disparitions forcées et dédommager les familles des victimes, et d'empêcher la répétition de ces disparitions; un chantier a été lancé pour l'harmonisation de la loi nationale avec les textes internationaux relatifs notamment aux femmes et aux enfants: l'accent portera sur le renforcement de l'application des droits de l'homme. À cet égard, un rapport sur la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement permettra de développer des indicateurs permettant de contrôler le suivi et de corriger les efforts du Maroc.

Enfin, le Ministre a annoncé la création de trois agences de développement économique et social, dont l'objectif est de créer et de mettre en œuvre des projets de développement dans trois régions défavorisées du sud du pays. Le Ministre a également évoqué plusieurs nouveaux textes adoptés par le Maroc: code de la famille, code du travail, loi instaurant la couverture médicale obligatoire, code des libertés générales (droit d'association, liberté syndicale, liberté de la presse).

Le troisième rapport périodique du Maroc (E/1994/104/Add.29) présente les mesures prises par l'État qui «témoignent de la volonté royale d'ancrer la démocratie dans les faits et les mœurs», et d'instaurer l'État de droit, en particulier: la création du médiateur marocain «Diwan Al Madhalim» et la création de l'Instance «équité et réconciliation», pour clore définitivement le dossier des violations des droits de l'homme perpétrées dans le passé. L'Instance aura la charge de procéder à la réhabilitation des victimes et à leur réintégration sociale, tout en poursuivant les investigations en vue d'élucider les cas de disparitions forcées et involontaires. L'harmonisation de la législation interne avec les dispositions des instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ratifiés par le Maroc permet une meilleure effectivité et consécration des droits reconnus par les instruments internationaux ratifiés par le Maroc. Par ailleurs, le Code de la famille a été adopté à l'unanimité en 2004 par la Chambre des représentants. Cette réforme permet aux femmes de recouvrer leurs droits et de lever l'injustice et l'iniquité qui pesaient sur elles, de garantir le respect des droits de la femme et de l'enfant pour la stabilité de la cellule familiale. La coresponsabilité des époux dans la gestion du foyer y est consacrée. Le nouveau Code de la famille introduit de nouvelles mœurs sociales influant sur le quotidien de la population.

Le Gouvernement œuvre également pour mettre au point un système lui permettant d'identifier les groupes de population les plus nécessiteux pour les faire bénéficier des services sociaux gratuits offerts par l'État, notamment dans les domaines de la santé, du logement, de l'alimentation et de l'assistance sociale. Depuis le milieu des années 1990, des efforts ont été consentis pour traduire cette politique sociale en un programme de priorités sociales. Une attention particulière est accordée aux régions rurales pour permettre aux populations défavorisées d'accéder plus largement aux services sociaux de base, à savoir les dispensaires, les programmes d'alphabétisation ainsi que l'emploi.

En matière de respect des droits du travail, le rapport précise aussi que le Maroc a adhéré à différentes conventions de l'OIT, parmi lesquelles la Convention (n° 81) sur l'inspection du travail, les Conventions (n° 29 et 105) relatives à l'abolition du travail forcé et la Convention (n° 138) sur l'âge minimum d'admission à l'emploi.


Examen du rapport du Maroc

Statut du Pacte

Un expert ayant demandé si les réformes qui ont été lancées au Maroc sont fondées sur les dispositions du Pacte, la délégation a expliqué que les dispositions du Pacte ne sont pas intégrées telles quelles dans les textes marocains, a dit un membre de la délégation, mais la Constitution stipule que les textes internationaux priment sur la loi nationale, qui doit être harmonisée dans ce sens. À la question de savoir si les citoyens peuvent se prévaloir des dispositions du Pacte devant les tribunaux marocains, la délégation a précisé que les Conventions internationales ont priorité dans le droit marocain. Une jurisprudence existe déjà à cet égard, la Cour suprême ayant par exemple statué dans ce sens en matière droit commercial ou de droit à l'éducation: une élève qui s'estimait lésée dans une affaire d'inscription universitaire a pu ainsi faire valoir ses droits en invoquant le principe de l'égalité.


Système judiciaire

Un expert a observé qu'il semble que le pouvoir judiciaire, dont l'indépendance est pourtant déterminante pour l'exercice des droits économiques, sociaux et culturels, est soumis au Maroc à certaines pressions. Des sources font en outre état de cas de corruption de magistrats. Quelles poursuites ont-elles été engagées à cet égard ? Le Comité a déjà posé des questions relativement à la prise en compte par les tribunaux de cas d'interdiction de mariages mixtes entre musulmans et non-musulmans ou de problèmes de transmission de nationalité, a ajouté l'expert; le Maroc envisage-t-il de prendre des mesures - administratives, judiciaires, législatives - pour donner effet aux dispositions du Pacte dans ce domaine?

Le chef de la délégation a répondu qu'une volonté se manifeste clairement de combattre la corruption dans le système juridique marocain. Un Conseil national de la magistrature a été créé qui regroupe notamment des juges élus, chargés de superviser le fonctionnement complet du système judiciaire. En cas de violation du droit de la presse, en cas de diffamation par exemple, la justice rend son verdict en toute conscience et indépendance, a assuré le chef de la délégation. Par ailleurs, et pour promouvoir l'intégrité du corps judiciaire, le Conseil national de la magistrature n'a pas hésité à mettre à pied des juges ayant failli à leurs obligations; certains juges convaincus de corruption passive ont été condamnés à des peines de prison. En outre, depuis 2005, les conditions de nomination des juges ont été revues dans le sens d'une plus grande rigueur. Les traitements ont été revus à la hausse, pour prévenir les tentations. En ce qui concerne l'application des dispositions du Pacte, le Maroc s'est lancé dans un grand chantier d'application des droits économiques, sociaux et culturels et civils et politiques, a dit le chef de la délégation.

Un autre expert ayant demandé combien de femmes avaient été nommées dans l'appareil judiciaire, le Ministre a fait valoir qu'au Maroc les emplois sont ouverts sans discrimination aux femmes. On compte par exemple six cents femmes employées au Ministère de la justice; le Ministère de la santé est composé à 52% de femmes; elles sont également de mieux en mieux représentées dans le monde des affaires et jouent un rôle de plus en plus important dans la famille. Elles peuvent par ailleurs bénéficier de tous les droits fonciers. En cas de divorce, une femme sans emploi peut se voir attribuer une part de la fortune du mari. Dans les faits, des tribunaux indépendants et des juges formés à ces tâches doivent rendre des décisions dans des délais imposés (trois mois pour l'attribution des pensions, six mois pour les divorces).

La présidente du Comité s'étant étonnée de ce que le Ministère des droits de l'homme ait été rattaché au Ministère de la justice, le chef de la délégation a expliqué qu'il s'était agi d'une mesure de rationalisation, prise dans le cadre du rattachement de toutes les questions relatives aux droits de l'homme au Ministère de la justice.


Droit à l'autodétermination

Des experts ont demandé des données chiffrées actualisées sur la situation de la discrimination au Sahara occidental, la délégation. Un expert a rappelé que le Pacte posait que tous les peuples ont droit à l'autodétermination et ont le droit de poursuivre leurs droits économiques, sociaux et culturels. Cette disposition existe-t-elle dans la Constitution marocaine et, le cas échéant, sous quelle formulation, a voulu savoir l'expert.

Le chef de la délégation a expliqué que les problèmes en jeu étaient de nature économique et sociale, plutôt que politique. Les Sahraouis de cette région sont tous représentés aux conseils municipaux et peuvent s'associer librement. Le Gouvernement s'efforce de prendre en compte leurs aspirations économiques, compte tenu du fait que le Sahara occidental est la province la plus récemment intégrée au territoire national. Le chef de délégation a estimé que le plein exercice des droits au Sahara peut être constaté sur place. L'insatisfaction de certains ne saurait justifier la politisation de cette question, a aussi dit le chef de la délégation. Un autre membre de la délégation a précisé que le Maroc ayant été «saucissonné» par la colonisation, le souci de l'État marocain est, depuis l'indépendance en 1956, d'unifier le territoire. Un conflit artificiel a été déclenché au Sahara occidental; les propositions de règlement de ce conflit avancées par la partie adverse ont été jugées inapplicables par l'Organisation des Nations Unies elles-mêmes. Le roi s'est dit prêt, au nom du Maroc, à accepter le principe d'une solution basée sur l'autonomie pour la région, autonomie négociée entre le Maroc, les autres parties et les populations concernées, lesquelles doivent pouvoir exprimer librement leurs souhaits.


Lutte contre la discrimination

Un expert ayant demandé s'il existait, outre des directives, des lois imposant l'accès des handicapés aux bâtiments publics, par exemple. Le chef de la délégation a fait état de l'existence au Maroc d'un véritable problème lié aux accidents de la circulation, responsables d'un grand nombre de handicaps. La loi dispose que sept pour-cent des emplois publics doivent être réservés aux personnes handicapées. De nombreuses organisations non gouvernementales contribuent à la prise en charge des personnes handicapées et la solidarité familiale est un important soulagement pour les autorités, a dit le Ministre. Un membre de la délégation a par ailleurs fait savoir que la discrimination à l'encontre des handicapés est criminalisée par le droit marocain. Trois lois protègent les droits des handicapés et des aveugles sur le marché du travail et dans la fonction publique. Un projet de loi vise à fixer un taux d'emploi des handicapés dans le secteur public. Une étude nationale menée en 2004 a permis de calculer que le nombre des handicapés au Maroc s'élève à 5,12% de la population, soit 1,5 million de personnes. Plus de six cent organisations indépendantes offrent de leur côté une prise en charge médico-sociale. Les enfants handicapés issus de familles pauvres bénéficient de mesures financières de l'État.

Des experts ont demandé si les tribunaux pénaux avaient déjà été saisis de cas de discrimination de femmes ou de Sahraouis et, si oui, dans quelle mesure les sanctions prévues ont été appliquées par les tribunaux. Vers quelles autorités peut-on se tourner pour se plaindre de discrimination? Les personnes à faible revenu - et notamment les femmes amazigh - ont-elles accès à ces instances ?

En ce qui concerne l'accès de femmes amazigh aux services de base, un autre membre de la délégation a précisé que l'origine ethnique n'était pas une condition d'accès au services publics. En matière de participation politique de la femme, il existe une volonté politique au Maroc pour généraliser la présence des femmes dans les instances publiques: des quotas ont été fixés, il s'agit d'une mesure temporaire. Il appartient aussi aux partis politiques d'assurer la représentativité des femmes. Les femmes sont aussi bien représentées dans l'appareil d'État.

Un membre du Comité a relevé que la discrimination à l'encontre des femmes restait inquiétante, en matière de succession, de divorce, d'accès à la propriété foncière ou à l'éducation par exemple. La délégation peut-elle indiquer les mesures concrètes prises par le Maroc pour remédier à ces problèmes, a-t-il demandé. Un autre expert a noté que le rapport indiquait que la polygamie restait autorisée, bien qu'avec des restrictions. Comment dans ces conditions garantir l'égalité entre hommes et femmes, a-t-il demandé. La persistance de cette pratique milite contre le principe d'égalité inscrit dans la Constitution marocaine, a observé une experte du Comité. Quel est l'état de la jurisprudence en ce domaine ? Une experte a demandé si la privatisation des services publics avait eu des conséquences en termes d'accès par les personnes défavorisées, et par les femmes amazigh en particulier, certaines d'entre elles devant obtenir un consentement de leur mari. Les textes ne précisent nulle part le principe de l'interdiction de la discrimination fondée sur le sexe, a-t-elle déploré. Qu'en pense la délégation, et quelles mesures pourraient être prises pour sensibiliser la société marocaine sur le chemin à parcourir ?

Le chef de la délégation a rappelé que c'est l'Islam qui a le premier renforcé le statut des femmes au sein de la nation. Le Maroc entend donc protéger les femmes, qu'elles vivent à la ville ou la campagne. Le Code de la famille réorganise et régit par exemple le droit du divorce, qui peut désormais être demandé par les femmes: le juge engage une procédure de conciliation avant de prononcer, en cas d'échec, le divorce. De même, la femme peut se déterminer librement sur son mariage. Au sein de la famille, les deux parents disposent des mêmes prérogatives en matière d'éducation des enfants, entre autres. Le résultat de l'introduction du Code de la famille est une augmentation des mariages et une diminution des divorces.

Quant à la polygamie, qui concerne 0,7% des mariages au Maroc, il s'agit d'une pratique autorisée par l'Islam pour des raisons initialement sociales et économiques. Les conditions actuelles rendent quasiment impossible de pourvoir aux besoins de plusieurs femmes. Le Code de la famille énonce les conditions de la polygamie, notamment l'obtention de l'accord de la première femme ou l'existence de raisons pertinentes, comme la stérilité. Un autre expert ayant fait remarquer que la Tunisie, autre pays arabe et musulman, a su trouver dans la charia des éléments permettant d'interdire la polygamie, la délégation a répondu qu'il n'existe véritablement aucune discrimination entre hommes et femmes. Le nouveau Code de la famille, très proche du Code tunisien, rend de fait très difficile le recours à la polygamie. Il ne fait que confirmer une situation qui avait d'ailleurs déjà changé au Maroc. Par ailleurs, la femme peut invoquer les mêmes motifs de divorce que l'homme.

Un autre membre de la délégation a dit que le Maroc était confronté à des difficultés dans l'application du Code de la famille, à mettre au compte des habitudes et de la difficulté de changer les mentalités. Il a par ailleurs indiqué que le roi a annoncé son intention de réviser le droit sur la citoyenneté, de manière à permettre à toutes femmes marocaines d'octroyer sa nationalité à ses enfants. D'autre part, la loi ne pose aucune entrave au mariage des femmes marocaines avec des ressortissants étrangers. En matière de protection des droits des femmes, le Maroc collabore avec les organisations non gouvernementales et les syndicats. Un Comité ministériel supervise les stratégies locales et nationales visant à l'ancrage dans les mœurs de la notion de parité entre les sexes. Un autre plan d'action vise à améliorer l'image de la femme dans les médias et la publicité. Enfin, une législation nationale vise à interdire tout harcèlement sexuel et la violence domestique; une ligne téléphonique (en arabe, en amazighi et dans plusieurs dialectes) d'assistance aux femmes victimes de violence les informe de leurs droits. Le Maroc est le seul pays arabe à disposer de telles mesures en faveur des femmes, a-t-il été précisé. La délégation a aussi expliqué que le Maroc avait pris des mesures en faveur des mères célibataires, qui est un phénomène dont l'apparition est assez récente dans le pays.


Langue et culture amazigh

Un expert a demandé si l'enseignement, qui se donne en arabe, ne discriminait pas la culture amazigh. Un autre expert a souligné que le rapport montre que 25% de la population du Maroc est arabe; une majorité de la population étant amazigh. Dans ces conditions on s'explique mal certaines mesures comme l'interdiction de donner un prénom amazigh à ses enfants, qui sont clairement discriminatoires vis-à-vis des dispositions du Pacte. La langue amazigh est-elle enseignée dans les écoles primaires et secondaires, a demandé une experte. L'objectif affiché des autorités est en effet de favoriser tous les aspects identitaires du royaume, a-t-elle rappelé. Un autre expert a demandé s'il était possible d'étudier la langue et la civilisation amazigh au niveau universitaire. D'après certaines sources, une partie de la population amazigh ne jouit pas de ses droits culturels, en particulier au plan de l'utilisation de la langue amazigh, qui ne serait pas reconnue comme langue officielle (par opposition à «langue nationale»). Un expert a demandé des renseignements sur l'Institut royal pour la culture amazigh (IRCAM).

Le chef de la délégation a répondu à cet égard qu'il n'y avait pas de discrimination à l'encontre des Amazigh, qui sont des Marocains comme les autres, disposant des mêmes droits. Le roi, descendant du Prophète, symbole de l'unité du Maroc et garant unanimement reconnu de sa souveraineté, est lui-même marié à une femme amazigh. L'idée d'une communauté autochtone n'existe pas au Maroc, ni dans la loi, ni dans l'administration. L'Institut amazigh a été créé pour favoriser l'intégration de la culture amazigh dans la société marocaine, afin que soit instaurée une véritable harmonie à cet égard. Quant aux prénoms amazigh, il avait été institué un règlement interdisant les prénoms qui pouvaient porter préjudice aux enfants (prénoms ridicules, etc.). Il est maintenant question d'abroger ce règlement, dans l'optique de la défense des droits de l'homme, a indiqué le chef de la délégation.

La délégation a expliqué que le tissu social du Maroc est très varié, chacun des composants participant de la richesse du pays. L'Institut de la langue amazigh est financé directement par le roi. Cet institut a mis en place un plan global de promotion et d'intégration de la culture amazigh, avec cours de langues et de civilisation. Un autre objectif est de former des enseignants dans ces deux domaines, une méthode pédagogique a été mise au point pour ce faire. L'enseignement a démarré dans le primaire, il s'étendra progressivement aux autres niveaux, avec l'appui des manuels scolaires adéquats. S'il n'existe pas encore de faculté universitaire, ce n'est que faute d'étudiants.

L'Institut royal pour la culture amazigh est pleinement indépendant, a dit le chef de la délégation; sa mission est d'émettre des avis que le Gouvernement s'attache à suivre.


Institutions des droits de l'homme

Un expert a relevé la création de plusieurs instances de contrôle, notamment l'Instance «équité et réconciliation»: cette structure, dont des équivalents existent dans de nombreux autres pays, signifie-t-elle que le Maroc reconnaît qu'il y a eu dans le passé, des violations des droits de l'homme, et si oui à quelle période ? L'expert a aussi voulu savoir si la fin du mandat de cette instance marquerait l'entrée du Maroc dans une ère nouvelle à l'égard des droits de l'homme.

Le chef de la délégation a expliqué que le Conseil consultatif de droits de l'homme institué au Maroc sert de lien avec les organisations non gouvernementales et le gouvernement. Sa mission était à l'origine d'étudier les rapports produits par ces organisations sur des questions liées au respect des droits de l'homme et de préconiser des mesures d'action, notamment la création d'un système d'arbitrage à l'intention des victimes directes et indirectes des disparitions. Une Instance «équité et réconciliation» a été créée ultérieurement avec pour mandat de réaliser une étude sur tous les cas de disparitions non encore résolus. Au terme de son mandat, un rapport a été présenté au roi, qui s'est adressé personnellement aux victimes reconnaissantes. La page des disparitions est maintenant tournée, a dit le Ministre, qui a précisé que le Maroc continuerait d'appliquer les mesures préconisées dans le rapport.


Migrants

Quelle est la situation des migrants qui échouent dans leur tentative de rentrer en Europe ou qui sont refoulés au Maroc, et comment leurs droits sont-ils protégés, a voulu savoir des experts du Comité. Quant à la réadmission des migrants illégaux, fait-elle l'objet d'accords avec l'Union européenne, et notamment l'Espagne. Existe-t-il des camps de rétention à l'intention de ces personnes ?

Le chef de la délégation a expliqué que son pays était, en effet, un pays de transit pour les émigrants africains. Le traitement qui leur est réservé est humanitaire, ils bénéficient en effet de soins et de traitements, avant d'être le cas échéant renvoyés chez eux aux frais du Maroc. Ce dernier ne saurait assumer à lui seul la surveillance des frontières, c'est pourquoi une aide a été demandée à l'UE. Un autre membre la délégation a précisé que la portée de l'accord de réadmission signé avec l'Espagne ne concerne que les Marocains refoulés d'Espagne. Il a aussi indiqué que toutes les opérations de rapatriement avaient été faites en concertation avec les représentations diplomatiques des personnes concernées. Le Maroc a proposé à l'Europe la tenue d'une conférence portant sur la gestion des migrations par les pays concernée (pays d'origine, de transit et de destination.)

Traite des êtres humains

Des dizaines de milliers de petites filles de zones rurales seraient envoyées de force dans des familles urbaines, où elles servent de domestiques, s'est inquiété un expert de la délégation. Que peut dire le gouvernement sur cette question, a demandé l'expert. Un expert a demandé quel avait été le degré de participation de la société civile à l'élaboration du rapport, notamment des organisations non gouvernementales.

La délégation a fait savoir que la loi punissait les employeurs d'enfants de moins de quinze ans. Un projet de loi est à l'étude concernant les petites filles domestiques. Il prévoit des mesures contre les intermédiaires du trafic des enfants concernés et s'attache aussi à remédier aux causes de ces pratiques, par une action dans le domaine de l'éducation notamment. Un programme de sauvetage et de protection de ces fillettes a été lancé avec l'aide de l'UNICEF.

Le chef de la délégation a confirmé que la rédaction du rapport avait profité de la participation d'organisations non gouvernementales.


Code du travail

Une experte du Comité a demandé si le Maroc comptait ratifier la Convention de l'Organisation internationale du travail sur la protection de la maternité. Quant aux chiffres sur l'emploi, ils ne sont pas ventilés et ne permettent pas les comparaisons – chômage de femmes, dans les zones rurales, etc. Le droit de grève est limité par une prérogative royale, a fait observer une experte. Un autre expert a fait déploré que le dépôt de la demande de dossier d'ouverture d'un syndicat est souvent suivi de mesures dilatoires de la part des autorités publiques, ce qui constitue un obstacle de fait à la jouissance du droit à la liberté syndicale. Un autre expert a dit que le Maroc mérite des compliments pour l'introduction de son nouveau Code du travail, relevant les mesures très favorables prises en faveur de l'égalité de traitement envers les femmes qu'il contient. Par contre, a ajouté l'expert, il est regrettable que ce Code n'incrimine pas formellement le harcèlement sexuel.

Le Maroc n'a pas encore ratifié la Convention 87 de l'OIT, a confirmé la délégation, mais en a déjà intégré les principes essentiels dans le Code du travail. Certaines catégories de personnel, opposées à certaines dispositions de la Convention, empêchent encore la ratification de cette convention, a-t-il été aussi précisé. Elles sont en discussion avec les autorités, un accord pourrait intervenir qui permettrait de ratifier la Convention.

Le droit de grève est formellement garanti par la Constitution, une nouvelle loi d'application viendra en préciser encore les modalités pratiques, a indiqué la délégation. Entre-temps, les consultations à ce sujet engagées entre employeurs, salariés et gouvernement n'ont pas abouti, les salariés n'étant pas satisfaits de certaines mesures prévues par cette loi. La délégation a admis certains problèmes dans la délivrance des autorisations syndicales et dit que le Gouvernement étudiait les mesures à prendre pour y remédier.

La délégation a précisé qu'au contraire le harcèlement sexuel était puni de deux ans prison et que toute personne convaincue de violence pouvait être condamnée aux termes de la loi. L'épouse violentée peut désormais recevoir des dommages pour les torts qu'elle a subis. Ces torts sont aussi un motif de divorce, de même que le viol conjugal. Des cellules spécialisées dans l'appui aux femmes victimes de violence sont intégrées aux tribunaux régionaux, a précisé la délégation.

Par ailleurs, le Gouvernement a conclu un accord avec l'OIT en matière de conclusion de conventions collectives. Le secteur du textile, qui fait l'objet de mesures de renforcement, compte 175 000 unitées qui bénéficieront de mesures d'alphabétisation. Le régime de retraites fait l'objet d'études qui ont mis au jour des problèmes financiers latents. Un programme de réforme financière est à l'étude. Deux Fonds de pensions couvrent les fonctionnaires, un troisième est dévolu au secteur privé.

Le Code du travail précise en outre que le salaire est déterminé entre les parties concernées ou par le biais de conventions collectives. La détermination du montant des salaires doit cependant aussi tenir compte des textes réglementaires existants ainsi que de l'évolution du coût de la vie. Les inspecteurs du travail marocains sont quant à eux protégés selon les dispositions des conventions 81 et 129 de l'OIT, ratifiées par le Maroc, a ajouté la délégation.

Répondant à une question précise d'un expert, un membre de la délégation a fait observer que les licenciements économiques devaient faire l'objet d'une demande spéciale; les employés concernés reçoivent une indemnité qui peut aller jusqu'à trente-six mois de salaire


Pauvreté

Répondant à un expert ayant observé que la pauvreté frappe surtout les zones rurales, la délégation a indiqué que le Gouvernement avait adopté une stratégie de désenclavement à l'intention de ces régions: un programme national vise à la création d'un réseau de routes rurales pour la couverture intégrale du territoire; l'électrification des campagnes avance à grands pas, elle sera probablement généralisée en 2007. Quant à la couverture sanitaire, elle a fortement progressé en milieu rural, que ce soit en termes de nombre de médecins ou d'institutions de soins. Il existe aussi un lien entre le développement de l'agriculture et le celui des infrastructures, a précisé un membre de la délégation, ce qui permet d'étendre les surfaces cultivables.

Droit au logement

Un expert a demandé une mise à jour des chiffres sur l'état et la situation du logement au Maroc, certaines sources faisant état de pénuries criantes dans ce domaine. Il a aussi relevé l'absence de statistique concernant les personnes sans abri. Le même expert a déploré que les programmes d'assainissement des bidonvilles ou de reconstruction après des catastrophes ne prennent pas en compte l'avis des populations concernées, ni ne prévoient toujours les dédommagements adéquats. Quelles mesures sont-elles prises pour couvrir les besoins en logement des catégories les moins favorisées, a demandé l'expert.

De manière générale, a dit la délégation, l'élimination des bidonvilles est une priorité pour l'État qui a pour ce faire entrepris, dès 2001, la construction de plus de 200 000 nouveaux logements sociaux. Actuellement, 270 000 familles vivent en bidonvilles. Un programme de réhabilitation des logements insalubres est en cours dans plus de 191 000 quartiers. L'État axe également son action sur l'amélioration des infrastructures publiques et des structures de santé.


Protection des enfants

Un expert a constaté que l'État partie a pris des mesures louables en matière de protection de la famille et des enfants en particulier. Mais un rapport d'une organisation non gouvernementale relève l'existence de près d'un demi-million de mendiants quasiment professionnels au Maroc, dont un grand nombre d'enfants: ceux-ci feront-ils l'objet de mesures de retour à l'école ? La délégation a remis en cause les méthodes de travail de l'étude citée, qui extrapolait sur la base d'un échantillon très limité. Certes la mendicité existe, mais pas dans les proportions indiquées. Les enfants de la rue – dont la définition est problématique – ont fait l'objet d'une étude du gouvernement qui donne le chiffre de 32 000. Le gouvernement a deux programmes de lutte contre la mendicité, l'un criminalisant l'exploitation de ces enfants, l'autre s'occupant, avec l'aide de l'UNICEF, de leur réinsertion; il est appliqué dans les grandes villes du royaume.

Répondant aux questions d'experts du Comité, la délégation a admis que le Maroc connaissait un déficit en matière d'enregistrement des enfants à la naissance. D'ici à 2008, cependant, ce problème devrait être réglé grâce notamment à une simplification des procédures.


Protection de la famille

Le rapport précise que les femmes éprouvent des difficultés à faire valoir leurs droits; mais quelles sont exactement les difficultés qui empêchent l'application effective du Code de la famille, ont demandé deux expertes, relevant que la participation des femmes à l'activité économique varie fortement entre la ville et la campagne. Une experte a demandé quels sont les services de garde offerts aux femmes afin qu'elles puissent plus facilement se consacrer à des activités professionnelles. Un expert a demandé à l'État partie s'il avait des données statistiques concernant l'exploitation des enfants et quelle protection était-elle prévue à leur intention. L'expert s'est aussi inquiété des conditions de vie dans les institutions d'accueil de ces enfants.


La délégation a confirmé l'existence de carences en termes de respect des droits des femmes, qui s'expliquent en partie par les conditions économiques difficiles que connaît le pays. Quoi qu'il en soit, le Gouvernement, en collaboration avec les organisations non gouvernementales, applique une stratégie nationale destinée à revaloriser ces droits et assurer l'égalité pour tous et toutes.

Les enfants seront protégés par des textes inspirés des conventions internationales de protection de la jeunesse, a dit un membre de la délégation. La délégation a fait état de l'existence à cet égard de crèches et jardins d'enfants publics et privés.

Une experte ayant estimé qu'il convenait d'introduire une législation spécifique contre la violence domestique, la délégation a dit que cette forme de violence était dorénavant criminalisée par la loi. Une série de mesures de soutien à l'intention des femmes victimes a aussi été prise, avec notamment l'ouverture de centres d'écoute dans tout le royaume, où les femmes sont accueillies avec leurs enfants et conseillées. Les hôpitaux vont également ouvrir des unités d'accueil spéciales.


Droit à la santé

Répondant à des questions sur les mesures prises par le gouvernement du Maroc pour faire appliquer le droit à la santé, des membres de la délégation ont expliqué que les retraités bénéficient, comme les actifs, des prestations de l'assurance maladie. Quant aux services de santé génésiques, ils sont intégrés aux soins de santé primaires gratuits, dont les femmes en milieu rural sont de plus en plus largement bénéficiaires. La lutte contre le sida passe par un dépistage gratuit et anonyme; les soins sont aussi gratuits et les trithérapies sont disponibles dans les principaux hôpitaux du Maroc. L'avortement est autorisé pour raisons médicales, auquel cas la prise en charge est assurée par l'assurance maladie. La protection de la maternité est prévue par la loi et le congé de maternité est de quatorze semaines. Pendant la grossesse et dans les sept semaines qui suivent l'accouchement, la mère peut demander un congé supplémentaire pour s'occuper de son bébé.

Répondant à un expert qui s'inquiétait de la situation des personnes vivant dans des camps de réfugiés au sud du pays, la délégation a répondu que ces camps ne se trouvent pas sur le territoire marocain, mais à Tindouf. Prévoyant cependant le retour, à terme, de ces populations sur le territoire marocain, le Maroc a pris, depuis 1975 déjà, des mesures de mise à niveau des provinces du sud, avec notamment la construction d'infrastructures et de logements pour un montant total de 250 millions de dollars.

Un expert est revenu sur la question de la disparité des conditions d'accès à la santé entre les zones urbaines et rurales, la mortalité infantile et maternelle étant par exemple plus élevée dans les campagnes. Par ailleurs, le régime d'assurance médicale obligatoire ne couvre pas tout le monde, puisque 60% de la population doit assumer ses coûts de santé, a aussi dit l'expert, demandant quelles mesures étaient prises pour égaliser ces situations.

Eu égard à ses contraintes matérielles, le Maroc a obtenu en matière de santé des résultats appréciables. Il reste des disparités, a dit la délégation, qui font l'objet de mesures d'affectation de ressources financières pour le recrutement de médecins et pour le suivi rigoureux des indicateurs concernant l'évolution de la situation. Les décès maternels concernent les suites de l'accouchement. L'intérêt pour cette problématique date des années 1990, époque de l'adoption de la première stratégie nationale en la matière. Un état des lieux a été dressé afin de déterminer les causes des décès maternels. Les causes étant connues (problèmes de compétences et de qualité), des mesures ont été prises: agrandissement et humanisation des installations, formation du personnel, adaptation du matériel technique. Un autre axe est la communication et l'information des patientes quant à l'existence des services, afin qu'ils soient sollicités à temps. Des indicateurs indirects permettent de constater que le pays est sur la bonne voie, comme par exemple l'évolution du taux de césariennes, qui est passé de 1% en 1990 à 12%. Quant à l'assurance maladie, elle couvre 34% de la population marocaine. Un nouveau régime va s'adresser aux personnes économiquement faibles. Restera une petite catégorie d'indépendants qui devront bénéficier d'un régime qui est encore à l'étude.

Un membre de la délégation a observé que les médicaments génériques ont été adoptés par l'assistance maladie obligatoire. Par ailleurs, dans la négociation du traité de libre échange avec les États-Unis, la question des médicaments a été abordée sous l'angle du maintien de l'accès aux médicaments par toutes les couches de la population.

Harcèlement sexuel

Il s'agit d'une notion assez ouverte, a dit une experte, demandant si le Maroc disposait à cet égard d'une «stratégie» ou d'une «loi». En particulier, le harcèlement sexuel sur le lieu de travail fait-il l'objet de textes de loi, a aussi demandé l'experte.

À ces questions la délégation a répondu que le Code pénal criminalise (article 503) le harcèlement sexuel dans le contexte professionnel et le punit d'amende. Un article pénalise toute forme de harcèlement ou d'abus sexuel. Une femme mariée peut porter plainte pour violence domestique, a-t-il aussi été précisé.

En réponse à une question portant sur le traitement juridique des crimes dits d'honneur, la délégation a expliqué que le droit pénal marocain ne prévoyait pas de circonstances atténuantes pour ce type de délit.


Éducation

En matière d'éducation, il apparaît que la loi n'opère pas de discrimination entre étudiants nationaux et non nationaux, a relevé un autre expert, demandant s'ils pouvaient donc tous accéder à l'enseignement dans les mêmes conditions. Des cours de formation aux droits de l'homme sont-ils dispensés dans les écoles, et qu'en est-il de l'éducation religieuse, a-t-il aussi demandé.

La délégation a répondu que l'accès à l'enseignement est garanti à tous, les bourses étant accordées sans discrimination. Les cours de formation aux droits de l'homme sont dispensés non seulement dans les écoles primaires et secondaires, mais aussi dans les écoles de police, en particulier.

L'enseignement informel concerne des jeunes n'ayant jamais fréquenté l'école ou l'ayant quitté précocement, ce qui est une manière, selon un expert, de dire que certains enfants échappent à l'école obligatoire dès 6 ans.

La délégation a confirmé que certains enfants ne peuvent pas, pour des raisons économiques généralement, entrer à l'école obligatoire de six ans. Le programme d'enseignement informel concerne notamment une quinzaine de mille enfants bénéficiant de mesures de lutte contre le travail des mineures, après quoi ils peuvent réintégrer le circuit scolaire normal. Certains autres enfants marocains, autrefois détenus à Tindouf, ont aussi été réintégrés de la même manière.

Concernant l'analphabétisme, la délégation a dit qu'il s'agissait d'un phénomène réel, près d'un million d'enfants étant touchés. Le Gouvernement a adopté à leur intention des stratégies de rescolarisation ou de redirection vers l'enseignement professionnel. L'abandon scolaire fait l'objet de mesures importantes en collaboration avec la société civile, au niveau des seize districts. L'objectif est d'éliminer l'analphabétisme d'ici à 2015. D'une manière générale, il existe au Maroc 137 000 classes primaires, regroupant 86% des enfants dans les zones rurales (91% en ville); ces chiffres sont en augmentation de 12% ces dernières années. Un budget a été dégagé pour la mise à disposition de cantines scolaires, entre autres mesures.

Quelle est la langue d'enseignement dans le primaire et le secondaire ? a demandé un expert. Il semble que les matières scientifiques y sont enseignées en arabe, alors qu'au niveau universitaire elles le sont en français (ou en anglais). La langue d'enseignement des écoles est l'arabe, a précisé la délégation.

Un expert a fait état d'un rapport du PNUD indiquant que seuls 31% des enfants suivaient un enseignement secondaire (contre 91% dans le primaire). Un autre rapport fait état d'un total de 1,5 millions d'enfants âgés de 13 à 15 ans déscolarisés. L'accès aux études universitaires ne semble pas non plus généralisé, seuls 10% d'une classe d'âge étant inscrit.

Le taux d'abandon est assez élevé, en effet, a admis la délégation. Plusieurs programmes nationaux visent la sensibilisation des nomades et les habitants de régions reculées; des bourses d'études sont disponibles à leur intention. Le Gouvernement étudie également la possibilité de créer des écoles itinérantes.

Culture

Revenant sur la question de la culture amazigh, un expert a relevé l'affirmation de la délégation selon laquelle la culture amazigh est vivace au Maroc. Dans le même temps, le rapport indique l'existence d'un Institut royal chargé de promouvoir progressivement cette culture. Que faut-il conclure ? La culture amazigh est-elle valorisée en soi ? Les stations de radio et de télévision émettent-elles aussi en langue amazigh, a demandé un autre expert, souhaitant aussi avoir des précisions sur l'existence d'émetteurs en langues étrangères.

La délégation a précisé que les programmes en langue amazigh, comme par exemple le journal télévisé, font depuis longtemps partie du quotidien des Marocains. Le secteur des médias a été libéralisé récemment, a aussi déclaré la délégation, ce qui a permis une éclosion de chaînes multilingues, entre autres. D'un autre côté, les lois marocaines pour la protection du droit d'auteur couvrent également l'expression des traditions orales. De nombreux festivals culturels attestent de la vigueur la culture amazigh.

Un expert a demandé comment le Gouvernement marocain agissait pratiquement pour protéger les droits des minorités, qui sont couverts par l'article 1, al. 1 du Pacte. La Constitution marocaine reflète-t-elle cette obligation du respect de l'autonomie culturelle ? Plus précisément, qu'est-il fait pour protéger les droits de la communauté amazigh ?

La délégation a relevé que les Nations Unies, dans plusieurs résolutions, ont statué que l'autodétermination peut s'exprimer de plusieurs manières. La position du Maroc est que l'autonomie est, à cet égard, une modalité acceptable de l'expression du droit à l'autodétermination.

Le chef de la délégation du Maroc a par ailleurs déclaré sa très vive surprise de constater l'insistance avec laquelle les experts du Comité abordaient la question amazigh, laquelle n'est pas tout à l'ordre du jour des préoccupations des Marocains. Le Maroc, éternel carrefour culturel, ne stigmatise en aucune manière les communautés qui le composent. Au Maroc, chacun est libre de parler la langue qu'il souhaite. L'Institut a pour mission de fixer les règles de cette langue qui n'est encore qu'orale, afin justement qu'elle puisse être enseignée dans les écoles. Il n'y a donc absolument aucune discrimination à l'encontre de la communauté amazigh. Certaines organisations utilisent ce vecteur pour tenter de décrédibiliser le Maroc, a dit le Ministre de la Justice du Maroc.

Le chef de la délégation a enfin remercié le Comité pour son travail patient et attentif et l'a assuré que le Maroc, qui n'a jusqu'ici pas ménagé ses efforts de développement humain, est bien déterminé à continuer dans la voie d'une meilleure réalisation des droits économiques, sociaux et culturels de ses citoyens.

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