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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LA SOUS-COMMISSION DE LA PROMOTION ET DE LA PROTECTION DES DROITS DE L'HOMME EXAMINE LES QUESTIONS RELATIVES AU TERRORISME

14 août 2001



Sous-Commission de la promotion et
de la protection des droits de l'homme
53ème session
14 août 2001
Matin



Elle termine son débat sur la prévention de la discrimination
et est saisie du rapport du Groupe de travail
sur les sociétés transnationales


La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a entamé, ce matin, l'examen des questions diverses en se penchant plus particulièrement sur la question du terrorisme et les droits de l'homme et sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes.

La Sous-Commission a par ailleurs achevé son débat sur la prévention de la discrimination. Elle a également entendu, dans le cadre du débat sur les droits économiques, sociaux et culturels, M. El-Hadji Guissé, Président-Rapporteur du Groupe de travail de session sur les activités sociétés transnationales. M. Guissé a notamment souligné que le Groupe de travail sollicite le renouvellement de son mandat pour une nouvelle période de trois ans.

Mme Kalliopi K.Koufa, Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme, a présenté son rapport sur la question et a notamment recommandé à la Sous-Commission de renouveler son mandat. Plusieurs experts ont commenté ce rapport.

Mme Halima Embarek Warzazi, Rapporteuse spéciale sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes, a présenté son rapport en attirant l'attention en particulier sur le problème des crimes d'honneur.

Les représentants de la Turquie et du Pakistan sont intervenus sur ces questions, ainsi que les représentants de trois organisations non gouvernementales : International Educational Development, European Union of Public Relations et Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples.

Achevant son débat sur la prévention de la discrimination, la Sous-Commission a entendu les représentants de la Roumanie et du Bélarus, ainsi que des organisations non gouvernementales suivantes : Amnesty International, Asian Women's Human Rights Council, Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants et Pax romana.


Les représentants de la Turquie, de Maurice et de la Hongrie ont exercé leur droit de réponse.

Cet après-midi, à partir de 15 heures et jusque dans la soirée, la Sous-Commission devrait conclure son débat général.



Fin du débat sur la prévention de la discrimination

MME MELINDA CHING (Amnesty International) a souligné que la torture et les mauvais traitements continuent d'être infligés dans plus de 150 pays à travers le monde en ce début de XXIe siècle. Elle a attiré l'attention sur Tsvetalin Perov, un jeune rom de 16 ans, qui aurait été battu jusqu'à perdre conscience par la police bulgare; Kajal Khidr, une femme enceinte du Kurdistan iraquien, accusée d'adultère, et qui s'est fait couper le nez par les proches de son mari; Frederick Mason, un homosexuel noir des États_Unis, qui aurait été violé par un policier. Tous ces exemples témoignent du fait que la torture procède souvent de la discrimination. Dans son récent rapport sur les «crimes de haine», Amnesty International attire l'attention sur la conspiration du silence qui entoure la torture et les mauvais traitements fondés sur l'orientation ou l'identité sexuelle. La torture à l'encontre des lesbiennes, des gays et des transsexuels est largement répandue à travers le monde sans que cela ne provoque la moindre réaction indignée.

MME IULIA-ANTOANELLA MOTOC, experte de la Sous-Commission, a souligné qu'à la demande des peuples autochtones, les travaux du groupe de travail sur les peuples autochtones doivent continuer. Elle a souhaité que de nouvelles compétences s'associent aux travaux du groupe. Elle s'est ensuite associée à l'émotion soulevée par l'annonce faite par Mme Daes qu'elle ne se représentait pas aux élections pour être membre de la Sous-Commission. Mme Motoc s'est toutefois félicitée qu'elle participera tout de même aux travaux en tant que spécialiste de la question.

M. AKIRA MAEDA (Asian Women's Human Rights Council) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur la situation des Coréens qui résident au Japon et qui se voient refuser le droit de porter leur costume traditionnel. Les élèves coréennes portant leur costume traditionnel ont systématiquement été la cible d'actions discriminatoires - y compris de violences. Alors que s'accentue, dans la péninsule coréenne, en Chine et dans d'autres pays d'Asie, la protestation contre la déformation des faits historiques à laquelle se livrent les manuels scolaires japonais, les actions violentes et les insultes à l'encontre des étudiantes coréennes portant le chima-chogori n'ont cessé d'augmenter sans que le Gouvernement japonais ne prenne la moindre mesure pour freiner cette tendance. Tout cela prouve que le Gouvernement japonais refuse de regarder l'histoire et la réalité en face et de reconnaître sa responsabilité pour ses erreurs passées et présentes, ce qui ne saurait être toléré.


M. GHULAM MUHAMMAD SAFI (Fédération internationale islamique d'organisations d'étudiants) a attiré l'attention sur le sort des Dalits, qui réclament qu'il soit mis fin à la discrimination et aux souffrances dont ils sont victimes depuis des décennies. Il a estimé que leur situation s'apparente à celle de ceux qui résistent à une puissance occupante dans un territoire occupé ou disputé tel que le Cachemire ou la Palestine. L'histoire passée et récente illustre combien les peuples et les territoires, lorsqu'ils ont été séparés ou disloqués par la force finissent toujours par se réunir, comme l'atteste l'exemple désormais classique de l'Allemagne. La haine attisée par l'Inde entre les communautés majoritaires et minoritaires au Jammu-et-Cachemire - notamment par le biais de la migration planifiée des Pandits cachemiriens et par le biais des meurtres d'Hindous et de Sikhs refusant de migrer et préférant rester avec leurs voisins musulmans - est un sujet de grave préoccupation. Le Groupe de travail sur les minorités devrait se pencher sur le rapport de Human Rights Watch intitulé «L'armée secrète indienne», qui lève le voile sur les mystères entourant les enlèvements et les meurtres perpétrés par des hommes armés non identifiés.

M. CHRISTOPHER NORWOOD (Pax Romana) a rappelé que la Déclaration sur les droits des personnes appartenant à des minorités reconnaît le droit de ces personnes à participer effectivement aux décisions prises aux niveaux national et régional concernant la minorité à laquelle elles appartiennent. Il a ensuite souligné qu'alors que 11% seulement des votants en Floride lors des dernières élections présidentielles aux États-Unis étaient des Afro-Américains, ils représentaient 54% des 180 000 bulletins qui ont été rejetés dans cet État. L'administration Bush a prouvé qu'elle n'était pas sensible aux questions intéressant les Noirs en Amérique ou à l'étranger, comme en témoigne la position adoptée par les représentants des États-Unis dans le cadre des travaux préparatoires à la Conférence mondiale contre le racisme. Le représentant de Pax Romana a par ailleurs attiré l'attention sur la discrimination fondée sur l'emploi et l'ascendance dont sont victimes les Dalits en Inde et a fait observer que la discrimination dans l'administration de la justice est également répandue dans d'autres régions d'Asie et ailleurs. Le représentant a par ailleurs soulevé le problème des enfants autochtones non-ressortissants en Thaïlande qui, bien qu'ayant accès à l'éducation de base jusqu'à l'âge de 12 ans, n'obtiennent aucun certificat à la fin de leurs études, ce qui nuit à leurs chances de trouver ensuite un emploi.

M. ASBJØRN EIDE, expert de la Sous-Commission, s'est associé au représentant de Pax Romana, estimant qu'il serait intéressant qu'un document de travail soit élaboré par la Sous-Commission sur la question des droits des Noirs aux États-Unis.

M. IOAN MAXIM (Roumanie) a demandé à la Sous-Commission qu'elle examine une loi hongroise relative aux Hongrois vivant dans les pays voisins de la Hongrie. Cette loi accorde aux «Hongrois citoyens des pays voisins de la Hongrie», à l'exclusion de l'Autriche, certains droits et une assistance particulière de la part de la Hongrie, sur le territoire de la Hongrie mais également sur le territoire du pays dont ils sont citoyens. Pour être éligibles, les personnes concernées doivent obtenir un certificat attestant de leur nationalité hongroise, certificat délivré par le Gouvernement hongrois sur recommandation des organisations minoritaires hongroises. Le Gouvernement de la Roumanie estime que cette loi a un caractère discriminatoire vis-à-vis des citoyens des pays voisins de la Hongrie et note son application extraterritoriale. L'assistance que propose la Hongrie semble discriminatoire également vis-à-vis des nationaux des pays voisins citoyens de la Hongrie. Le représentant estime que l'avis de la Sous-Commission sur la question est souhaitable et a espéré qu'elle aurait un effet sur la politique du Gouvernement hongrois.


M. SERGEI ANOSHKO (Bélarus) a rappelé que son pays est partie à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Le Bélarus est un État multinational dans lequel cohabitent plus de 140 nationalités différentes. La législation du Bélarus interdit la création de partis politiques incitant à la haine raciale. Il existe à travers le pays plus de 80 groupements sociaux de diverses communautés nationales. Le Bélarus, qui a beaucoup souffert du racisme durant la seconde Guerre mondiale, suit avec une vive préoccupation les activités des groupes néonazis en Europe occidentale et en Amérique. Le Bélarus est conscient qu'il lui reste beaucoup à faire pour assurer l'égalité entre les diverses minorités que compte le pays.


Droit de réponse

Le représentant de la Turquie, a noté que Mme Hampson a affirmé que toutes les victimes de torture en Turquie sont d'origine kurde, une affirmation incorrecte selon le représentant turc. La structure ethnique de la Turquie est beaucoup plus complexe que ce que laisse entendre Mme Hampson: le pays compte une quarantaine d'origines ethniques dans le pays et tous ces citoyens sont titulaires des même droits que tout autre citoyen turc. Le représentant a affirmé que son gouvernement déploie des efforts importants en matière de droits de l'homme.

Le représentant de Maurice, en réponse à la déclaration faite vendredi dernier par Libération, a rappelé que l'archipel Chagos a été illégalement retiré à Maurice au moment de l'accession de ce pays à l'indépendance. Depuis lors, Maurice n'a cessé de réclamer la restitution de Chagos. Cet archipel, qui comprend notamment Diego Garcia, fait partie intégrante du territoire de Maurice.

Le représentant de la Hongrie, répondant au représentant de la Roumanie, a souligné que la loi hongroise dont il a fait état constitue une mesure de discrimination positive et un appui aux minorités. Il a ajouté que ses dispositions ne dérogent à aucune loi européenne en vigueur. Il s'agit de protéger l'identité des minorités hongroises et non pas d'intervenir sur le territoire national des pays voisins. Le représentant de la Hongrie s'est déclaré certain du bien fondé d'une telle démarche, qui contribue à préserver la richesse multiculturelle des pays voisins de la Hongrie.


Présentation du rapport du Groupe de travail de session sur les activités des sociétés transnationales

M. EL-HADJI GUISSÉ, Président-Rapporteur du Groupe de travail sur les activités des sociétés transnationales, a présenté le rapport du Groupe de travail (E/CN.4/Sub.2/2001/9, à paraître) en indiquant qu'il a tenu deux séances de travail dans le cadre de sa troisième session qui s'est tenu durant la présente session de la Sous-Commission. Il s'est notamment penché sur un document de travail portant sur les conséquences des activités des sociétés transnationales ainsi que sur des normes et directives sur les activités de ces sociétés, présentées par M. David Weissbrodt. Le Groupe de travail a également examiné un document de travail de M. Asbjørn Eide sur les méthodes de mise en œuvre des normes envisagées et la responsabilité des pays d'origine des sociétés transnationales. Les directives proposées ont fait l'objet d'un débat approfondi, a indiqué M. Guissé, et toutes les parties intéressées ont été priées d'apporter leurs commentaires à ce sujet. Chacun s'est accordé à reconnaître que de telles directives devraient être contraignantes. Il a également été souligné que ces directives ne sauraient se situer en deçà des normes déjà existantes.


Le Groupe de travail sollicite que le mandat qui lui a été confié soit prolongé de trois années, a souligné M. Guissé. Ce fut probablement la plus importante session du Groupe de travail depuis sa création, a estimé le Président-Rapporteur.


Présentation de rapports sur des questions diverses : terrorisme, pratiques traditionnelles affectant la santé, esclavage, promotion de la démocratie

MME KALLIOPI KOUFA, Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme, a présenté son rapport E/CN.4/Sub.2/2001/31 sur le terrorisme et les droits de l'homme (à paraître en français). Elle a indiqué que l'une des difficultés principales de son travail aura été de trouver des informations fiables et d'établir les liens juridiques appropriés entre terrorisme et droits de l'homme. Une partie du rapport traite de l'évolution de la situation internationale depuis la publication du dernier rapport sur la question. Le rapport se penche par ailleurs sur la question d'une définition du terrorisme, soulignant toutes les difficultés qu'une telle définition comporte. Un certain consensus a été établi pour définir des comportements terroristes mais rien de satisfaisant n'a pu voir le jour concernant ce qui pouvait justifier ce type de comportements.

La frontière qui sépare criminalité et terrorisme est encore très floue. La question de la entre terrorisme d'État et terrorisme individuel a également fait l'objet de débat. D'importants désaccords subsistent dans la communauté internationale sur la question, notamment sur ce que peut être le terrorisme d'État. L'étude de la question du lien entre le terrorisme et les luttes de libération a été reportée à plus tard. Le chapitre trois étudie les moyens du terrorisme, notamment l'utilisation d'armes de destruction massive mais aussi des nouvelles technologies. L'experte a souligné que, sur cette question, le catastrophisme n'était pas de mise. Elle a ajouté qu'aucune escalade répressive ne saurait être justifiée par les craintes que suscite l'utilisation de tels moyens. Le rapport sur le terrorisme étudie également les droits des victimes, la question de l'impunité et tous les aspects juridiques de la question.

Parmi ses recommandations, la Rapporteuse spéciale suggère qu'en raison de la complexité de son mandat, la Sous-Commission lui permette de rédiger un second rapport sur la question.

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, Rapporteuse spéciale sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes, a indiqué que, depuis 1996, 44 pays ont fourni des informations extrêmement utiles sur la question et que les pays qui brillent par leur absence, en dépit de nombreuses pratiques nocives à l'encontre des femmes et des fillettes, se situent en Asie. L'Afrique, pour sa part, s'est engagée fermement dans la lutte contre ces pratiques, a souligné Mme Warzazi. Les campagnes de sensibilisation et d'information menées notamment par les membres influents de la société et les ONG des pays concernés ont contribué à un changement, certes lent, mais sûr des mentalités, a ajouté la Rapporteuse spéciale.

Mme Warzazi a indiqué avoir appris du journal Chark El Aoussatt du 31 mai 2001 qu'en avril dernier, un certain nombre de femmes ont été exécutées à Bagdad sans autre forme de procès sous prétexte qu'il fallait «soigner la société des germes de la prostitution». Le même journal annonce aussi qu'il y a eu en Iran, en l'espace de neuf mois, une quarantaine de femmes assassinées par étranglement dans différentes villes, y compris Téhéran, ce qui a provoqué la panique et la réprobation de l'opinion publique. Il semble que ces crimes soient le fait de forces conservatrices du pays qui se sont assignées comme tâche de nettoyer la société de la prostitution et des maux sociaux, a précisé Mme Warzazi.


La Rapporteuse spéciale a par ailleurs relevé qu'un article paru dans le Herald Tribune du mois d'août évalue à plusieurs centaines le nombre des crimes d'honneur perpétrés en Turquie. Les autorités turques prennent les mesures qui s'imposent lorsqu'elles sont saisies des cas mais le phénomène semble prendre de l'ampleur, a déclaré Mme Warzazi. Aussi, la Rapporteuse spéciale a-t-elle formulé l'espoir que le Parlement turc prendra en considération ce grave problème lorsqu'il adoptera les importants amendements à apporter au Code civil du pays. Cet article du Herald Tribune signale par ailleurs que des crimes d'honneur ont été relevés dans des pays comme le Brésil, l'Italie, l'Ouganda et le Royaume-Uni, a ajouté Mme Warzazi. Pour ce qui est du grave problème que pose la dot en Inde et dans les pays voisins dont les sociétés partagent les mêmes traditions, il y a lieu de relever que, dès 1961, les autorités indiennes ont pris des mesures contre cette pratique, mais elle existe toujours et suscite de graves violences à l'égard de la jeune mariée de la part de la famille de son époux. Selon certaines informations, a poursuivi Mme Warzazi, 13 000 jeunes épouses sont tuées en raison de la dot, mais les associations féminines estiment que ces chiffres sont bien en deçà de la réalité car la peur du scandale réduit le nombre de plaintes déposées à l'encontre des responsables.

Dans son rapport sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes (E/CN.4/Sub.2/2001/27), la Rapporteuse spéciale souligne que, comme l'année passée, elle a souhaité accorder une attention prioritaire à la question des crimes d'honneur qui nécessite, de la part de la communauté internationale, une action urgente, concertée et respectueuse de la culture des régions et des pays les plus touchés. Contrairement à la tendance qui se dégageait du précédent rapport, les réponses fournies à la Rapporteuse spéciale par les gouvernements ne se réfèrent pas exclusivement, cette année, à la pratiques des mutilations génitales féminines. Toutefois, il apparaît de plus en plus évident que des pays où cette pratique n'était pas a priori un problème sérieux se voient contraints d'adopter une législation et des mesures préventives pour lutter contre les mutilations génitales féminines. Pour faire suite aux informations fournies par l'Allemagne et par la France l'année dernière, la Suède et la Nouvelle-Zélande ont cette année fait part des mesures qui ont été prises dans leur pays pour lutter contre ces pratiques.

Dans son rapport, la Rapporteuse spéciale affirme demeurer particulièrement choquée par les informations qui sont relayées par les médias au sujet des crimes d'honneur. De plus, alors que les mutilations génitales féminines deviennent une pratique contre laquelle la conscience collective, en particulier au sein des populations concernées, s'éveille, d'autres pratiques tout aussi néfastes et répandues persistent et changent même quelquefois de forme pour devenir plus insidieuses, telles que les mariages précoces, les mariages forcés, les maternités précoces, la préférence accordée aux garçons, la dot, la violence dans la famille, y compris l'inceste.

La Rapporteuse spéciale rappelle que dans son précédent rapport, elle expliquait que le crime d'honneur est une ancienne pratique utilisée dans certains pays du Moyen-Orient et au Pakistan, qui s'est étendue, dans le passé, aux pays du bassin méditerranéen, notamment dans les zones reculées de la Grèce et de l'Italie, principalement dans le but de contrôler les naissances. La Rapporteuse spéciale avait alors également tenu à mettre l'accent sur le fait que le crime d'honneur viole les préceptes de l'islam. Il est indéniable que l'évolution des mentalités est un facteur de succès primordial dans la lutte contre ces traditions ancrées depuis de longs siècles et perpétuées par des sociétés traditionnelles qu'on ne saurait en aucun cas condamner fût-ce au nom des droits de l'homme, souligne le rapport de cette année. Vouloir imposer des changements en portant délibérément atteinte à ce que ces sociétés considèrent comme étant le plus sacré, en utilisant le dénigrement, les propagandes mensongères ou les stéréotypes à caractère discriminatoire va à l'encontre d'une lutte efficace contre les pratiques pernicieuses. Il est ainsi regrettable que lors de la 55ème session de l'Assemblée générale, les coauteurs de la résolution 55/66 sur les mesures à prendre en vue d'éliminer les crimes d'honneur commis contre les femmes n'aient pas agi avec la prudence qu'il se doit pour assurer un débat serein et l'adoption par consensus d'un projet qui se voulait louable mais qui a malheureusement pris un très mauvais départ avec la projection, au siège des Nations Unies, d'un film intitulé «Crime d'honneur» réalisé par une non-musulmane et qui imputait le crime d'honneur à des pratiques islamiques, manipulant et déformant à cet effet des versets du Coran.


Débat sur le terrorisme et les droits de l'homme

MME KAREN PARKER (International Educational Development) a dénoncé le terrorisme d'État pratiqué par la Chine à l'égard des adeptes du Falun Gong. Il a réaffirmé qu'à sa connaissance, la pratique du Falun Gong n'avait pas les conséquences néfastes que voulait bien lui attribuer le Gouvernement chinois. Les seules souffrances résultant de la pratique du Falun Gong sont celles causées par la répression des autorités chinoises, a souligné le représentant. 50 000 pratiquants du Falun Gong seraient ainsi détenus dans les prisons, les camps de travail ou les hôpitaux mentaux chinois. Le représentant a ensuite abordé la question du terrorisme en zone de guerre en soulignant que les attaques dites terroristes servaient de prétexte au terrorisme d'État comme au Jammu-et-Cachemire occupé par l'Inde, au Sri Lanka avec la question tamoule, en Turquie avec la question kurde et en Indonésie aux Moluques. Le représentant a demandé à la Sous-Commission d'étudier de près les mesures «anti-terroristes» adoptées par certains États et l'établissement par les États de listes de prétendus terroristes.

MME LUDOVICAVERZEGNASSI (European Union of Public Relations) a attiré l'attention de la Sous-Commission sur les manifestations contemporaines du terrorisme et ceux qui en sont responsables. Pour cela, elle a cité quelques extraits du rapport annuel du Département d'État des États-Unis pour l'an 2000 dans lesquels il est dit que le gouvernement du Pakistan a accru son soutien aux taliban et aux groupes militants actifs dans le Cachemire indien, tels que le Harkat ul Mujahideen, dont certains sont engagés dans le terrorisme. Cela fait plus d'une décennie que l'Inde est frappée par le terrorisme émanant de groupes appuyés par le Pakistan, a souligné la représentante. Le Népal, pour sa part, devient particulièrement victime de détournements d'avions imputables à des pirates de l'air qui demandent notamment la libération d'un terroriste.

MME VERENA GRAF (Ligue Internationale pour la libération et le droit des peuples) a dénoncé le terrorisme comme étant contraire aux droits de l'homme et que rien ne saurait justifier de telles méthodes. Elle a regretté que le rapport de Mme Koufa n'ait pas établi une définition plus claire du terrorisme, tout en soulignant la difficulté d'une telle définition, du fait, en particulier, que le terrorisme international se situe par définition, hors du droit international. La représentante a demandé qu'une liste d'États soutenant des mouvements terroristes soit établie afin que ces États soient clairement identifiés. Elle a également demandé que les États comme la Turquie ou le Sri Lanka, qui mènent des politiques de répressions féroces, soient dénoncés comme États terroristes du fait qu'ils terrorisent des populations civiles.

M. HÜSREV ÜNLER (Turquie) a rappelé à la Sous-Commission que la Turquie a souffert d'actes terroristes pendant de nombreuses années et que par conséquent la lutte contre le terrorisme est une de ses priorités. Il a souligné que le terrorisme met en danger les droits de l'homme. La société démocratique fondée sur le libre exercice des droits et libertés fondamentales est menacée par des organisations terroristes qui ont recours au trafic d'armes et de stupéfiants pour financer leurs activités. Le représentant de la Turquie a encouragé Mme Koufa à poursuivre son rapport en y ajoutant une partie sur le terrorisme étatique et en soulignant mieux la responsabilité de certains États qui financent des activités terroristes, ce qui est inacceptable. Il a également appelé au renforcement de la coopération internationale pour lutter contre le terrorisme.

M. EL-HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a félicité Mme Koufa pour son rapport sur le terrorisme et les droits de l'homme, qui tient compte de toutes les observations qui lui ont été adressées l'an dernier par la Sous-Commission. La difficulté, dans le cadre de ce rapport, réside dans la définition de l'acte de terrorisme, a souligné M. Guissé. Or, pour procéder à une telle définition, il est important de tenir compte du contexte dans lequel s'inscrit cet acte car certains actes sont considérés comme des actes de libération nationale alors que dans un autre contexte, ces mêmes actes seront qualifiés de violation du droit international. Un mouvement de libération trouvera normaux des actes qui seront considérés par d'autres comme du terrorisme, a insisté M. Guissé. Il a estimé que le rapport de Mme Koufa ne tient pas suffisamment compte de cette question du contexte de l'acte et a encouragé Mme Koufa à se pencher davantage sur les normes objectives afin de donner un contenu plus appréciable et respectable à la définition du terrorisme qu'elle avancera probablement à un stade ultérieur. M. Guissé a reconnu ne pas savoir où l'on va avec cette étude mais a encouragé la Sous-Commission à poursuivre cet exercice intellectuel.

MME HALIMA EMBAREK WARZAZI, experte de la Sous-Commission, a rappelé que lorsque la Sous-Commission a chargé Mme Koufa du rapport sur le terrorisme, elle n'y était pas favorable. Depuis, à la lecture du rapport, elle a changé d'avis. Mme Warzazi a rappelé qu'une des difficultés principales du rapport était la définition même du terrorisme. Elle a apporté son soutien à la distinction entre terrorisme d'État et terrorisme individuel. Elle a en outre appuyé les efforts de la Rapporteuse spéciale pour établir une différence entre conflit armé et terrorisme et s'est félicitée que le rapport condamne les actes illégaux dont sont victimes les populations civiles dans le cadre d'une stratégie de contre-terrorisme. Il est très difficile de définir ce qui est terroriste et ce qui est de l'ordre de la résistance, comme en Palestine où certaines actions ne doivent pas être assimilées à des actes terroristes car elles trouvent leurs raisons dans la lutte contre une présence étrangère qui est, elle, la véritable responsable de ces actes.

M. RAJENDA KALIDAS WIMALA GOONESEKERE, expert de la Sous-Commission, a relevé que le rapport de Mme Koufa sur le terrorisme et les droits de l'homme contient des chapitres importants présentant une analyse conceptuelle des conséquences du terrorisme. Comme le reconnaît la Rapporteuse spéciale dans son rapport, il est difficile de parvenir à une définition du terrorisme, a souligné M. Goonesekere. L'expert a dit attendre avec intérêt un rapport supplémentaire qui vienne compléter le travail important réalisé jusqu'à présent par Mme Koufa.

M. EIDE a salué la structure du rapport sur le terrorisme et ses conclusions finales. Il a souligné que certains groupes qui luttent pour leur droit à l'autodétermination le font parfois avec des actes de terreur injustifiables perpétrés en dehors des zones du conflit armé. Il a cité l'exemple du conflit armé au Sri Lanka. Pour M. Eide, il faut différencier les actes de terreur et les actes terroristes en ce sens que tous les coupables d'actes de terreur ne sont pas forcément des terroristes. Il a souligné l'importance de l'étude de la portée des terrorismes de type «sous-étatique». Il a encouragé Mme Koufa dans la poursuite de son travail.

M. ALONSO GÓMEZ-ROBLEDO VERDUZCO, expert de la Sous-Commission, a relevé qu'il n'est pas certain que la pratique des États en matière d'extradition des personnes accusées de terrorisme soit tout à fait uniforme à travers le monde. La réaction à la lutte contre le terrorisme doit revêtir un caractère avant tout préventif, a souligné M. Gómez-Robledo Verduzco. Il a dit partager l'avis de Mme Koufa selon lequel il vaut mieux pour l'heure s'abstenir d'adopter une définition stricte du terrorisme, ce qui ne doit pas empêcher de réfléchir aux éléments constitutifs d'une bonne définition du terrorisme que l'on s'efforcerait d'élaborer dans l'avenir. L'expert a demandé à Mme Koufa si elle estime que le mécanisme d'extradition devrait être amélioré au niveau international et si elle pense que le principe de juridiction universelle mérite d'être renforcé.

MME LEÏLA ZERROUGUI, experte de la Sous-Commission, a encouragé la Rapporteuse spéciale à poursuivre son travail. Elle s'est déclarée particulièrement intéressée par l'extradition et le vide juridique qui existe sur la question, soulignant que ce vide juridique peut mener à l'impunité. L'experte s'est interrogée sur ce qui pourrait être fait pour que les activités des terroristes soient soumises au droit international et que les auteurs d'actes terroristes ne puissent pas échapper à la justice.

MME IULIA ANTOANELLA MOTOC, experte de la Sous-Commission, a relevé que l'étude de Mme Koufa sur le terrorisme et les droits de l'homme s'inscrit dans un cadre juridique très flou. Aussi, est-il nécessaire de dégager un cadre conceptuel avant d'en venir à l'ébauche d'une définition précise. Mme Motoc a rappelé qu'en 1993, le Conseil de sécurité avait déclaré que le terrorisme constitue une menace à la paix.

M. LOUIS JOINET, expert de la Sous-Commission, a félicité la Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme pour son travail. Il a souligné que la définition du terrorisme est mouvante et délicate. Par contre, une différence entre conflit armé et terrorisme doit être faite. Une question importante est celle de savoir comment définir un mouvement dit «terroriste» lorsqu'il atteint ses objectifs. Étudier la manière dont le terrorisme s'adapte à l'évolution de l'histoire est un bon indice de sa légitimité, a estimé l'expert. À cet égard, M. Joinet a pris l'exemple de l'ETA dont l'action pouvait être comprise et soutenue sous Franco mais qui ne saurait être acceptable aujourd'hui. La violence politique est justifiée lorsqu'il s'agit de lutter contre la tyrannie et de défendre les droits de l'homme mais elle ne doit jamais s'en prendre à des populations civiles. Cette simple frontière permet de déterminer si l'on est du bon côté du droit international, a estimé M. Joinet.

MME MUMTAZ BAOUCH (Pakistan) a souligné que son pays condamne le terrorisme sous toutes ses formes et qu'il a ratifié tous les instruments internationaux portant sur cette question, ce qui témoigne de son engagement en la matière. Le Pakistan est également victime du terrorisme souvent parrainé au-delà de ses frontières par certaines forces hostiles, a fait observer la représentante. Ce n'est pas la nature des victimes ou de l'acte qui doivent être considérés pour déterminer si un acte constitue ou non un acte de terrorisme, a-t-elle également estimé. Il est heureux que Mme Koufa, dans son étude, soit parvenue à privilégier une approche qui évite la controverse, a déclaré la représentante. Elle a par ailleurs relevé que certains États profitent de l'absence d'une définition du terrorisme pour commettre de graves violations des droits de l'homme dans des territoires disputés sous occupation ou sous contrôle étranger ou pour refuser à un peuple la jouissance du droit à l'autodétermination en présentant les mouvements de libération comme des activités terroristes. Aussi, est-il important de tenir compte du contexte et des circonstances qui poussent souvent des peuples à user de moyens non pacifiques pour restaurer leurs droits fondamentaux. Le terrorisme d'État est l'une des pires formes de terrorisme qui puisse être infligé à un peuple, a par ailleurs déclaré la représentante.

La représentante du Pakistan a toutefois relevé un risque de malentendu dans le rapport de Mme Koufa lorsque la Rapporteuse spéciale affirme que l'encouragement moral ou diplomatique du terrorisme par un État constitue une forme de terrorisme parrainé par l'État. La Rapporteuse spéciale devra s'efforcer de faire la distinction entre l'encouragement diplomatique et moral apporté par un État à un peuple occupé ou opprimé et le terrorisme parrainé par l'État.


M. SOLI JEHANGIR SORABJEE, expert de la Sous-Commission, a rappelé la phrase d'un juge de la Cour suprême des États-Unis qui disait que s'il ne sait pas définir ce qui est obscène, il sait le reconnaître lorsqu'il le voit. Pour M. Sorabjee, la même chose est valable pour le terrorisme. Concernant le terrorisme d'État, l'expert a souligné que seuls les États qui n'offrent aucun recours légal, ni de moyens de libre expression à leurs citoyens peuvent mériter ce qualificatif. Il s'est associé à M. Joinet dans la condamnation des exactions commises contre les populations civiles, ajoutant qu'il ne pouvait comprendre comment certains pouvaient se réjouir de telles exactions.



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