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Communiqués de presse Organes conventionnels

OUTRE LA PAUVRETE AU NICARAGUA, LES LACUNES DES MECANISMES D'APPLICATION DES INSTRUMENTS DE PROMOTION DE LA FEMME EXPLIQUENT LA LENTEUR DES PROGRES VERS L'EGALITE ENTRE LES SEXES

17 Juillet 2001



Comité pour l’élimination de
la discrimination à l’égard des femmes
25ème session
17 juillet 2001
525ème séance – matin





"Ce n'est pas dans le manque d'instruments juridiques ou sociaux qu'on trouve les limitations à l'avancement de la condition de la femme nicaraguayenne, mais dans l’absence de mécanismes d'application des instruments existants". C'est en ces termes que la Directrice exécutive de l'Institut nicaraguayen de la femme (INIM), Mme Amalia Frech de Aleman, a présenté, ce matin, aux 23 experts du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes les mesures prises par le Nicaragua pour appliquer la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes au cours de la période allant de 1991 à 1998 ainsi que les difficultés auxquelles se heurte le Gouvernement pour faire avancer la condition de la femme.

Le Nicaragua, a expliqué la Directrice exécutive, dispose d'un cadre normatif général de protection des droits de l'homme, et en particulier de la femme, et il existe entre le Gouvernement, la société civile et des institutions chargées de la politique en faveur des femmes un consensus sur la nécessité de faire progresser la condition de la femme. La Constitution, qui garantit l'égalité entre les sexes, et la loi d'amparo (de protection) sont les principaux instruments juridiques de protection des droits de l'homme. Le Gouvernement, a-t-elle expliqué, s'emploie à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes dans tous les axes de sa politique, que ce soit la politique sociale qui a pour objectif de développer en priorité l'éducation et la santé; la politique nationale de population; la politique de participation citoyenne ou la politique d'éducation sexuelle visant à promouvoir des comportements sexuels responsables. Grâce à l'action conjuguée de la Commission parlementaire de l'enfance, de la femme et de la famille et de l'Institut nicaraguayen des femmes, de nombreux progrès ont été enregistrés en matière d'avancement des femmes dans les domaines politique, civil, social et économique, en particulier dans les domaines de la scolarisation, de l'accès à la santé et de la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Les femmes ont, par ailleurs, réussi à se faire un espace dans la vie publique et politique. Elles ont réussi à transcender les différences politiques et à obtenir un programme pour la promotion de leurs droits. Les femmes occupent notamment 31% des sièges des conseils municipaux.

Au-delà de la situation économique caractérisée par une large pauvreté, les limitations à l'avancement de la condition de la femme nicaraguayenne se trouvent donc dans les mécanismes d'application des instruments juridiques et sociaux existants, a expliqué la Directrice exécutive. En particulier, ce sont la limitation de l'accès des femmes à la justice et la méconnaissance des lois par les femmes qui entravent le processus d'égalité entre les femmes et les hommes. En effet, indépendamment des actions menées pour faire améliorer la condition des femmes, la situation économique nicaraguayenne n'a pas été favorable au développement social, a fait observer la Directrice exécutive. Le Nicaragua est un des deux pays les plus pauvres de l'Amérique latine. En 1998, 48% de la population vivait dans la pauvreté et 17,3% de la population connaissait la misère. En outre, la prévalence de pratiques coutumières et de stéréotypes au Nicaragua font que le pouvoir est exercé par l'homme et que les femmes se retrouvent dans une situation désavantagée qui contribue à maintenir la ségrégation fondée sur le sexe. De plus, comme l'a fait remarquer Mme de Aleman, l'incidence des politiques d'ajustement structurel, les conséquences de l'ouragan Mitch et les cyclones n'ont fait qu'aggraver la situation de pauvreté de la population.

A l’issue de cette intervention, les experts se sont demandés si l’INIM pense avoir suffisamment de pouvoir pour exercer une influence réelle sur les différents départements du Gouvernement. Quelle est la nature de ses relations avec l’Eglise, ont-ils demandé avant de s’enquérir aussi de son budget et des résultats concrets des programmes mis en place. En matière juridique, ils ont voulu savoir pourquoi la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard n’a pas été intégrée dans la législation nationale au même titre que la Convention sur les droits de l’enfant, afin de rendre ses dispositions contraignantes. Est-ce que le Gouvernement, ont souhaité savoir les experts, dispose d’une analyse de toutes les lois discriminatoires et a établi un calendrier d’amendements de ces lois. Quel est le délai fixé pour la ratification du Protocole facultatif de la Convention, ont-ils encore demandé. En matière sociale, les experts ont voulu connaître la raison de l’écart entre les données encourageantes en matière d’éducation des femmes et les faibles performances en ce qui concerne leur santé. Des questions ont également été posées sur la lutte contre la pauvreté, l’écart salarial et la prostitution.

Les 23 experts du Comité sont : Mmes Charlotte Abaka (Ghana), Ayse Feride Acar (Turquie), Sjamsiah Achmad (Indonésie), Emna Aouij (Tunisie), Ivanka Corti (Italie), Feng Cui (Chine), Naela Gabr (Egypte), Françoise Gaspard (France), Maria Yolanda Ferrer Gomez (Cuba), Aida Gonzalez Martinez (Mexique), Savitri Goonesekere (Sri Lanka), Rosalyn Hazelle (Saint-Kitts-et-Nevis), Fatima Kwaku (Nigéria), Rosario Manalo (Philippines), Asha Rose Metengeti-Migiro (Tanzanie), Mavivi Myakayaka-Manzini (Afrique du Sud), Frances Livingstone Raday (Israël), Zelmira Ragazzoli (Argentine), Hanna Beate Schöpp-Schilling (Allemagne), Heisoo Chin (République de Corée), Maria Regina Tavares da Silva (Portugal), Chikako Taya (Japon) et M. Göran Melander (Suède).

Le Comité poursuivra l'examen des quatrième et cinquième rapports périodiques du Nicaragua, cet après-midi à partir de 15 heures.

EXAMEN DES RAPPORTS PRESENTES PAR LES ETATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 18 DE LA CONVENTION SUR L’ELIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION A L’EGARD DES FEMMES

Présentation et examen des quatrième et cinquième rapports périodiques du Nicaragua (CEDAW/C/NIC/4 et 5)

Ces quatrième et cinquième rapports périodiques, couvrant respectivement les périodes allant de 1991 à 1994 et de 1995 à 1998, décrivent les mesures prises dans les domaines constitutionnel, législatif et administratif pour améliorer la situation des femmes au Nicaragua, en application de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination ratifiée par le Nicaragua le 27 octobre 1981.

Les auteurs reconnaissent que si la législation nationale a permis de faire progresser la condition des femmes nicaraguayennes, certaines dispositions légales restent discriminatoires à leur égard. L'Institut nicaraguayen de la femme (INIM), en tant qu'organisme gouvernemental, régissant toutes leurs activités, favorise la jouissance par les femmes de tous les droits établis par la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes qui est considérée comme la « magna carta » des droits de la femme. Créé en 1993, l'INIM est une instance de coordination des divers organes gouvernementaux et non gouvernementaux, destinée à favoriser l'élaboration de propositions de politiques et d'actions visant à promouvoir l'intégration effective des femmes dans tous les secteurs de la vie sociale, économique et politique du pays. La Commission parlementaire de l'enfance, de la femme et de la famille, créée en 1991, est à l'origine de nombreux progrès réalisés en droit positif, en particulier dans le domaine de la protection de la femme, de l'enfant et de la famille.

La Constitution du Nicaragua garantit l'égalité juridique entre hommes et femmes et tend à éliminer la discrimination à l'égard des femmes. Les normes culturelles qui asservissent et marginalisent les femmes restent profondément enracinées dans la société nicaraguayenne. Le Parlement, les organes policiers, administratifs et judiciaires chargés de l'application des lois sont toujours influencés par les conceptions discriminatoires à l'égard des femmes, qui sont le reflet des valeurs culturelles de la société dans son ensemble. L'influence de la religion est grande. A ce jour, 80% de la population est de confession catholique, 15% de la population de confession protestante et l'église morave est concentrée sur la côte atlantique. L'église propage des messages qui renforcent des comportements et des valeurs qui asservissent la femme et la discrimination dont elle est victime. Au sein de la cellule familiale, la femme a un rôle différent de celui de l'homme. Une division marquée entre les sexes attribue à la femme toutes les activités domestiques et l'éducation des enfants. Le reste des activités dépend des caractéristiques de production des cellules familiales, et en particulier des moyens de production dont dispose l'homme, qu'il soit époux, père ou frère.

Parmi les progrès réalisés par les femmes au Nicaragua, sont relevés: l'élaboration par consensus entre le gouvernement et la société civile d'un plan national de la femme, qui servira d'axe pour traiter les questions d'éducation, du travail et de la violence à l'égard des femmes; l'élaboration d'un programme d'étude incorporant la problématique hommes-femmes dans la formation d'enseignants de l'éducation nationale; l'intégration de la dimension hommes-femmes dans la planification du plan national de développement; l'émergence d'un mouvement féministe et l'apparition d'autres services pour les femmes à l'échelon national; et, pour limitée qu'elle soit encore, la place qu'ont acquise les femmes à des postes de responsabilité dans les différents ministères ou organes de l'Etat, les partis politiques, les administrations locales, les entreprises, et les syndicats.

En dépit des progrès dont bénéficient les femmes sur le plan juridique, indique le rapport, le Code civil, le Code du travail et le Code pénal présentent encore des lacunes dues aux conceptions traditionnelles qui font obstacle à une égalité pleine et entière de la femme devant la loi. De graves carences et inégalités sont constatées en ce qui concerne l'accès des femmes à la justice. La violence domestique, l'absence de code de la famille, la méconnaissance des lois par les femmes, l'irresponsabilité paternelle comptent parmi les obstacles à la pleine réalisation de la Convention au Nicaragua. Pour favoriser le progrès de la femme et de l'enfant, le Nicaragua a mis en place diverses politiques sectorielles au nombre desquelles on compte la politique nationale de la population qui tend à promouvoir le renforcement de la famille et de l'égalité entre les sexes, la politique sociale, la politique d'égalité d'accès à la propriété terrienne pour les hommes et les femmes (INRA), le programme national d'appui à la microentreprise (PAMIC), la lutte contre la violence.

En matière de lutte contre la violence, l'INIM a créé des commissariats à la femme chargés de répondre aux démarches de toutes les femmes qui ont aujourd'hui le courage de dénoncer les situations de violence. Ils se sont transformés en véritables lieux d'opinions et de dénonciation de la violence au sein de la famille et de la violence sexuelle.

Dans le domaine de l'éducation, l'accent est porté sur les quatre premières années de scolarité. La campagne d'alphabétisation de 1980 a réussi à faire tomber l'analphabétisme, qui touchait 50,3% de la population depuis les années 50, à 12,9%. Toutefois, en 1985, le taux était remonté à 24,8%. En 1993, l'analphabétisme a connu également une progression, atteignant 29,3%. Le Ministère de l'éducation a axé la formation d'instituteurs sur l'alphabétisation et l'éducation des adultes, ce qui a permis de ramener l'analphabétisme à 22,7% en 1995. L'analphabétisme était moins élevé chez les femmes (25,3%) que chez les hommes (26,7%). Le taux brut de scolarité pour 1998 était de 68%, avec un taux net de scolarité primaire de 12,3% chez les filles.

Parmi les limitations auxquelles se heurtent les femmes dans l’exercice de leurs droits, les auteurs des rapports périodiques relèvent: le fait que la plupart des lois ne tiennent pas compte des droits des femmes; l'accès limité à l'enseignement technique et à l'éducation scolaire et non scolaire; le faible pourcentage de femmes à des postes de direction et de décision; la faible participation de fonctionnaires sensibilisés à la problématique hommes-femmes à la prise de décisions dans tous les secteurs et à tous les niveaux; le manque de protection et de justice des lois envers la plupart des femmes; la faible rémunération du travail et des emplois offerts aux femmes; le taux élevé des femmes frappés par le chômage; l'existence de lois inopportunes et discriminatoires, génératrices de violence; la conviction générale que les rôles attribués aux hommes et aux femmes par la société sont naturels; la méconnaissance des engagements pris par le Gouvernement du Nicaragua envers les femmes et l'insuffisance de sensibilisation à ces engagements de la part des fonctionnaires; la puissance des mécanismes de reproduction du modèle socioculturel dans la famille, l'éducation et les médias et l' intervention encore naissante et très inégale de la société civile dans les affaires publiques et la gestion de l'Etat.

Mme AMALIA FRECH DE ALEMAN, Directrice exécutive de l'Institut nicaraguayen de la femme (INIM), a passé en revue les efforts accomplis par son Gouvernement pour mettre en application la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes au cours de la période 1991 à 1998 ainsi que les difficultés auxquelles se heurte le Gouvernement pour faire avancer la condition de la femme. Elle a indiqué que les pratiques coutumières et les stéréotypes au Nicaragua font que le pouvoir est exercé par l'homme et que les femmes se retrouvent dans une situation désavantagée. La situation économique n'a pas été favorable au développement social. Le Nicaragua est un des deux pays les plus pauvres de l'Amérique latine. En 1993, un peu plus de la moitié de la population vivait en-dessous du seuil de pauvreté. En 1998, 48% de la population vivait dans la pauvreté et 17,3% de la population connaissait la misère. Les conséquences de l'ouragan Mitch et des cyclones n'ont fait qu'aggraver la situation de pauvreté de la population. L'atténuation de la pauvreté est donc l'objectif principal du Gouvernement à l'horizon 2005. La réduction de l'analphabétisme et l'élimination des cas de malnutrition des enfants, garçons et filles de moins de cinq ans, et l'amélioration de l'accès aux services publics sont les principaux objectifs d’ici à 2015.

Pour 1995, le revenu par habitant ne dépassait pas 500 dollars par an. Le taux de chômage frappait 41,6% de la population en 1996. Dans ce contexte, a expliqué la Directrice exécutive, le Gouvernement se heurte à la résistance au changement qui rend difficile la réalisation de l'objectif d'égalité entre les hommes et les femmes. Cependant, a-t-elle affirmé, le Nicaragua dispose d'un cadre normatif général de protection des droits de l'homme, et en particulier de la femme, et d'un consensus sur la nécessité de faire avancer la condition de la femme entre le Gouvernement, la société civile et des institutions chargées de la politique en faveur des femmes.

La Constitution politique qui garantit l'égalité entre les sexes et la loi d'amparo (de protection) sont les principaux instruments juridiques de protection des droits de l'homme. Mme de Aleman a particulièrement salué le rôle que jouent les ONG dans la protection des droits de la femme, en particulier la Commission permanente des droits de l'homme du Nicaragua et l'Institut nicaraguayen des droits de l'homme, dont le directeur exécutif est une femme.

Sur le plan législatif, de nombreux progrès ont été enregistrés en matière d'avancement des femmes dans les domaines politique, civil, social et économique. Toutefois, on a rencontré des difficultés pour ce qui est de l'application de ces lois. Les entraves à la pleine égalité des femmes sont la limitation de l'accès des femmes à la justice et la méconnaissance des lois par les femmes. Le Gouvernement est en train d'examiner les lois, à la lumière des projets de code pénal, de procédure pénale, de la famille et de la loi sur l'égalité des chances, afin d’en éliminer les dispositions discriminatoires à l'égard des femmes. La Commission parlementaire de l'enfance, de la femme et de la famille cherche à établir un cadre juridique global permettant de garantir l'équité et la parité entre les sexes. L'INIM, créé en 1991, est une instance gouvernementale chargée de faciliter l'élaboration de politiques publiques en faveur des femmes ainsi qu'une stratégie en vue d'assurer l'égalité des chances des femmes et des hommes par le biais de mesures d'atténuation de la pauvreté féminine. Le Ministère de la famille est chargé de faire avancer le droit de la famille et des enfants. Les réductions budgétaires résultant des mesures économiques prises au niveau national ont entravé l'action de ces instances chargées de la promotion des femmes.


Entre autres mesures visant à promouvoir la parité, la Directrice exécutive a mentionné la politique sociale qui a pour objectif de développer en priorité l'éducation et la santé; la politique nationale de population; la politique de participation citoyenne destinée à promouvoir le plein exercice de la citoyenneté dans tous les domaines de la vie d'une société; et la politique d'éducation sexuelle en pour encourager des comportements sexuels responsables.

L'INIM, a-t-elle expliqué, a initié l'élaboration de la politique d'égalité des chances qui sera lancée en 2002. Pour illustrer le processus de démocratisation du pays, Mme de Aleman a indiqué qu'en juin 1999, le Procureur et le Procureur adjoint chargés de la défense des droits de l'homme ont été nommés ainsi qu'un procureur chargé de la défense des droits des enfants, des adolescents et des femmes. Pour ce qui est de l'éducation, la Directrice exécutive a indiqué que l'indice de scolarisation est plus élevé chez les femmes, plus de 50% d’entre elles ont accès aux quatre premiers niveaux de l'éducation. L'accent mis sur l'augmentation de l'accès au système scolaire, en particulier aux niveaux préscolaire et primaire surtout dans les zones rurales, et sur les femmes dans l'application des programmes nationaux a permis d'enregistrer des progrès en ce qui concerne l'accès à l'éducation. Le taux de scolarisation au niveau préscolaire a augmenté de 11,2% de 1990 à 1998. L'évolution des effectifs dans l'enseignement primaire a connu une augmentation progressive. Le taux de scolarisation, de 50,7% dans les zones urbaines, est meilleur que dans les zones rurales. Dans les zones urbaines, 57,7% des écoliers de l'enseignement primaire sont des filles contre 42,3% dans les zones rurales. Le taux de scolarisation dans l'enseignement primaire était de 75% en 1999. Dans l'enseignement secondaire, le taux de scolarisation a augmenté pour atteindre 32,6%. Le taux d'analphabétisme enregistré en 1998 est de 20,9%, soit 11,5% dans les zones urbaines et 33,1% dans les zones rurales. Pour relever le taux d'alphabétisation, le Gouvernement a élaboré de nouveaux supports pédagogiques et axé la formation des enseignements sur l'alphabétisation. Le Plan national d'éducation 2001-2015 cherche à garantir la gouvernance, la permanence et la légitimité de la politique éducative pour les 15 prochaines années.

L'Institut national de technologie a été créé pour encourager la formation professionnelle, en particulier des femmes. Les effectifs féminins des universités se sont accrus de 55,2% entre 1991 et 1998 et dans les dernières années, on a constaté une augmentation de l'effectif féminin dans les cours qui traditionnellement étaient réservés aux hommes. L'université essaie de transmettre des valeurs soucieuses d'égalité entre les sexes.

En matière de santé, la mortalité maternelle continue de représenter un problème de santé publique compte tenu de sa prévalence qui était de 98 décès pour 100 000 naissances enregistrées en 1993 et de 106 décès pour 100 000 naissances enregistrées en 1998. On relève 78,6% de ces décès qui ont eu pour cause directe des problèmes obstétriques. Les prévalences des cancers de l'utérus et du sein sont également importantes. Pour améliorer la situation, le Gouvernement a lancé une réorganisation des services de santé pour assurer une meilleure couverture des soins, a encouragé la planification familiale et a accordé une attention particulière aux équipements et matériels de soins de santé. La mortalité infantile était de 58,2 pour 1000 en 1990 et de 20 pour 1000 sur la période 1993-1998. Ce sont notamment les progrès en matière du contrôle des maladies évitables qui ont permis de réduire le taux de mortalité infantile. Le Ministère de la santé mène une politique spécifique de santé pour la femme et les enfants mettant l'accent sur l'accès aux services de santé primaires. Il se focalise sur l'abaissement des taux de mortalité infantile et maternelle. Le taux de fécondité des femmes est passé de 4,5 à 3,9 enfants par femme grâce à l'alphabétisation de la population, de la croissance urbaine et de l'augmentation de l'utilisation des méthodes contraceptives. Le Nicaragua a, par ailleurs, développé des programmes pour compenser les effets des politiques d'ajustement structurel.

Dans le domaine du travail et de l'emploi, le Code du travail interdit toutes discriminations fondées sur le sexe en matière d'occupation et de salaire, et prévoit des mesures pour protéger la femme enceinte et ayant des enfants en bas âge. Les femmes représentent 46% de la population active. Les femmes travailleuses sont situées en majorité dans les zones urbaines. Dans le contexte de la mondialisation, la flexibilité du marché du travail et la responsabilité des femmes envers l'éducation des enfants et de la famille fait que la participation des femmes est de plus en plus difficile. Aux postes de direction, les hommes sont favorisés et les disparités de salaires entre hommes et femmes sont importantes et augmentent selon le niveau de hiérarchie. L'apport des femmes au développement a été limité aux zones rurales, à la famille et l'emploi des femmes est restreint aux travaux mal rémunérés, voire de survie. Depuis 1990, L'Institut nicaraguayen des femmes et l'Institut de la réforme agraire ont oeuvré pour faciliter l'accès des femmes à la propriété foncière. A ce jour, 32% de la population des zones rurales sont propriétaires de la terre qu'ils exploitent, dont 16,3% sont des femmes. En 1997, l'adoption de la loi sur l'établissement de la propriété a permis que les noms de l'époux et de la femme mariée soient inscrits sur les titres de propriété foncière. Une Commission interinstitutionnelle a été créée en 1997 pour coordonner l'action des différents organes gouvernementaux en faveur des femmes. Le Groupe pour la parité entre les sexes a élaboré un plan pour favoriser l'accès des femmes rurales au crédit. Les femmes ont un accès limité au crédit dans les zones rurales.
Seuls 13% des bénéficiaires de crédits sont des femmes. Pour ce qui est du crédit urbain, les banques favorisent les femmes et ainsi 56% des bénéficiaires sont des femmes. Le projet “Femmes et crédit” initié par l'INIM a permis la création de 12 banques communales de développement dans 14 des 17 départements du pays.

S'agissant de la prévalence de la violence à l'encontre des femmes est importante. À un moment donné, 29% des femmes ont été victimes de violences et sévices et59% de ces femmes ont mentionné la présence de leurs enfants au moment des sévices. La prévalence de ces violences est plus importante dans le milieu urbain. Pour répondre à cette situation, le Gouvernement a créé, grâce aux efforts conjoints de l'INIM, de la police nationale et des organisations de femmes, 16 commissariats de la femme et l'enfants chargés de répondre aux démarches de toutes les femmes qui ont le courage de dénoncer les situations de violence. Ils sont de véritables lieux de dénonciation de la violence au sein de la famille et des violences sexuelles. Des campagnes de sensibilisation sur l'importance de la question ont été menées. Un an de débat à l'Assemblée nationale a permis l'adoption d'une loi sur la pénalisation des sévices et violences domestiques. Une Commission de lutte contre la violence à l'égard des femmes, des enfants et adolescents a été établie en 1998 Un Plan national de prévention de la violence domestique et sexuelle qui met l'accent sur la prévention a été mis en place. Il prévoit 21 projets sectoriels dans les domaines de la détection, de la prévention, de la sanction et du développement institutionnel. L'INIM a, par ailleurs, pris des mesures visant à modifier les comportements et stéréotypes. Elle a mené des campagnes d'information. La formation a joué un rôle important dans la promotion des femmes nicaraguayennes. Une grande part des ressources de l'INIM a été allouée à des programmes de formation de femmes chefs de file et des femmes dirigeantes au sein des partis politiques. Ont ainsi été formés des adolescents des deux sexes pour diffuser une meilleure connaissances des principes de la Convention. En coopération avec l'Allemagne, des programmes de formation de la police ont été menés. L'élaboration d'un module de formation intitulé "Violence fondée sur le sexe et sécurité urbaine" a été un progrès important. L'article 40 de la Constitution politique interdit la traite des personnes sous toutes ses formes et ce délit est pénalisé.

Pour ce qui est de la participation des femmes dans la hiérarchie politique, la participation des femmes est relativement importante. En 1995, trois des quatre pouvoirs de l'Etat étaient dirigés par des femmes, la Vice-Présidence, l'Assemblée nationale et le Conseil électoral suprême. La Coalition nationale des femmes a préparé un "Agenda minimal" pour encourager la promotion des femmes dans le processus électoral. L'avancée la plus importante est le fait que les femmes ont désormais la possibilité de participer aux débats et aux négociations. L'Association des maires et des Maires adjoints a organisé, avec l'aide de l'INIM, des ateliers pour faciliter l'action en faveur des femmes. Au Ministère des affaires étrangères, 39% des fonctionnaires expatriés sont des femmes. On compte en outre quatre femmes ambassadeurs. Un saut qualitatif a été fait en ce qui concerne la participation des femmes à la vie publique et politique. Deux femmes se sont présentées aux élections présidentielles de 1990. En 1995, l'Assemblée nationale a élu sa première Vice-Présidente. Les femmes représentaient 51% des votants aux élections de 1996. En 1990, 10 des 93 députés étaient des femmes et actuellement, 11% des sièges sont occupés par des femmes. Six femmes occupent les postes de ministres au sein du Gouvernement. Leur représentation progresse également dans la police, les tribunaux et les collectivités locales.

Les problèmes économiques continuent de faire obstacle à la réalisation de l'égalité entre les sexes. La situation discriminatoire et de pauvreté des femmes limite l'avancement de leur condition. Ce n'est pas dans le cadre juridique qu'on trouve les limitations à l'avancement de la condition de la femme nicaraguayenne, mais dans les mécanismes d'application. Indépendamment des efforts menés, la prévalence de stéréotypes contribue à maintenir la ségrégation pour raison de sexe. Toutefois, l'espace que les femmes se sont fait dans la vie publique et politique est une avancée significative. Elles ont réussi à transcender les différences politiques et à obtenir un programme pour la promotion de leurs droits. Des progrès ont été réalisés dans les domaines de la scolarisation, de l'accès à la santé, de la lutte contre la violence à l'égard des femmes. Les défis qui persistent sont importants mais des progrès ont été réalisés en termes d'instruments juridiques et sociaux. Un effort significatif doit être accompli en ce qui concerne les mécanismes d'application de ces instruments.

Questions des experts

Entamant la première série de questions, Mme ZELMINA RAGAZZOLI a souhaité connaître les perspectives en matière de renforcement de la représentation des femmes nicaraguayennes dans le cadre du processus électoral. Est-ce qu’un système de quotas est envisagé? a-t-elle demandé avant d’aborder la question des statistiques et de s’interroger sur l’établissement de statistiques ventilées par sexe?

Intervenant aussi, Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ s’est attardée sur la question de la pauvreté pour demander des compléments d’informations sur les projets exécutés par le Gouvernement pour réaliser les objectifs de réduction de la pauvreté et s’inquiéter de la manière dont on assure la participation des femmes dans ce processus. Que fait-on pour réduire l’écart salarial et pour protéger davantage les femmes? Le Comité peut-il avoir les taux de participation des femmes dans le secteur informel et dans le travail à temps partiel? Comment assure-t-on la protection des femmes dans les usines d’assemblage en ce qui concerne la protection de leurs droits? a encore demandé l’experte avant de s’interroger sur les mouvements migratoires des adolescentes et des jeunes femmes célibataires. Enfin, elle a cherché à recevoir des informations supplémentaires sur les femmes des communautés autochtones. Le Gouvernement a-t-il des programmes spécifiques pour améliorer leur situation économique ou dans leur propre communauté? En matière de lutte contre les stéréotypes, a ajouté l’experte, comment le Gouvernement envisage-t-il l’avenir et quel est le rôle joué par les médias?

Mme ROSARIO MANALO s’est, pour sa part, attardée sur les questions de l’éducation pour demander des statistiques sur l’inscription des filles aux filières non traditionnelles? Elle a aussi souhaité des informations sur les cours informels et par correspondance avant d’aborder la question de la santé. Elle s’est interrogée sur l’existence d’un programme sur la santé mentale pour aider les femmes à se remettre des traumatismes de la guerre et d’un programme particulier en faveur des femmes atteintes de la tuberculose et de la malaria. Je ne vois aucune description du rôle des ONG, a poursuivi l’experte en s’inquiétant de leur place au sein de l’INIM. Venant à la question de la violence contre les femmes, elle a demandé s’il existe une disposition juridique relative au viol et s’est interrogée sur la manière dont le Code pénal traite de la prostitution.

A son tour, Mme AIDA GONZALEZ MARTINEZ s’est demandée ce qu’il adviendrait de l’INIM et de ses programmes lorsque la coopération internationale aura cessé.

Elle a aussi demandé des informations sur les résultats des initiatives mises en place. Qu’en est-il des ressources consacrées aux programmes coordonnés par l’INIM ou le Ministère de la santé ou encore la police nationale et autres organes judiciaires? a-t-elle encore dit en ajoutant que cette information permettra de juger de l’engagement politique et institutionnel du Gouvernement. Elle a conclu sur la nécessité de lutter contre les stéréotypes avant de céder la parole à Mme HEISOO SHIN qui a posé des questions sur le dispositif national pour savoir si l’INIM pense avoir suffisamment de pouvoir pour exercer une influence réelle sur les différents ministères. Mme Shin s’est aussi interrogée sur les relations entre l’INIM et les responsables de l’Eglise.

Répondant à cette première série de questions, la Directrice exécutive de l’INIM a indiqué que son pays a organisé des réunions et des cours de sensibilisation pour expliquer le Protocole facultatif se rapportant à la Convention. Avant la ratification, le pays avait décidé de faire connaître à chacun la teneur de ce Protocole. L’INIM, en coordination avec d’autres institutions, a organisé des colloques et actuellement, le Protocole est à l’étude au Ministère des affaires étrangères.

Reprenant la série de questions, Mme SAVITRI GOONESEKERE s’est dite surprise de l’écart qui existe entre les données liées à l’éducation et celles liées à la santé. Lorsque les femmes ont un taux élevé de participation dans l’éducation, cela a un impact sur la santé. Or, cela ne semble pas être le cas au Nicaragua. Pourquoi? a demandé l’experte. Le Bureau du Procureur de la République est-il déjà opérationnel, a-t-elle poursuivi en s’attardant sur les programmes de formation aux droits de l’homme. Comment ces programmes fonctionnent-ils et où sont-ils mis en place? s’est encore interrogée l’experte.

A son tour, Mme IVANKA CORTI s’est inquiétée de l’écart dénoncé par Mme Goonesekere pour s’interroger sur son origine. Vient-elle de la relation entre l’Eglise et l’Etat? D’où vient le machisme et pourquoi survit-il malgré la présence massive des femmes dans l’éducation et les efforts visant à faire connaître le droit international?

S’attardant sur les amendements apportés à la Constitution, Mme CORTI a souhaité savoir depuis quand cette Constitution a reconnu le “droit à la vie”. Que signifie la notion de “droit au patrimoine” et pourquoi la Convention sur l’élimination de la discrimination n’a-t-elle pas été intégrée dans la législation nationale comme l’a été la Convention sur les droits de l’enfant? Venant à la question de la violence, elle a demandé pourquoi les efforts sont plus centrés sur les adolescents que sur les femmes? Qui finance le groupe chargé de la question et où s’inscrit-il dans la hiérarchie étatique? Quel est le budget de la Commission nationale sur la violence contre les femmes? a-t-elle encore demandé avant de poser une question sur la réforme du code de la famille. Sur l’avortement, Mme CORTI a demandé si la pénalisation de cette pratique a permis de l’éradiquer. Y-a-t-il des données sur les avortements clandestins? Quel est le contenu des programmes d’éducation sexuel? Que veut dire “assumer de façon responsable sa sexualité”? a insisté l’experte avant d’aborder la question de la participation politique des femmes au processus de prise de décisions. Pourquoi le pays enregistre-t-il un recul en la matière? s’est-elle interrogée.

Mme FRANÇOISE GASPARD est, elle, revenue sur la question de la disponibilité des statistiques. Il serait très utile, a-t-elle dit, que dans le prochain rapport des statistiques soient fournies. Sont-elles d’ailleurs systématiquement ventilées par sexe? s’est-elle interrogée. Venant elle aussi au Code de la famille en cours d’élaboration, elle a demandé dans quel délai ce nouvel instrument juridique sera examiné. A-t-il été élaboré en collaboration avec les ONG féminines, a-t-elle demandé. En matière de législation du travail, l’experte a voulu savoir si les mesures d’action positive envisagées concerneront aussi le secteur privé et, à ce propos, quelles mesures seront prises pour assurer l’application des mesures. Qu’en est-il de la situation des femmes dans les zones franches, a poursuivi l’experte avant de s’inquiéter du statut des femmes qui travaillent sans rémunération dans l’exploitation de leur conjoint. Enfin, quelles sont les règles qui définissent les pensions alimentaires dues aux femmes chefs de famille? a conclu l’experte en cédant ainsi la parole à Mme SJAMSIAH ACHMAD.

Mme ACHMAD s’est déclarée préoccupée par l’absence de loi sur l’éducation, instrument de choix pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Pour sa part, Mme ROSALYN HAZELLE a souhaité connaître la teneur des programmes mis en place pour aider les femmes chefs de famille, en matière de garderie, de crèche ou d’école? L’INIM travaille-t-il sur la question de la situation des femmes dans les zones franches, a aussi demandé l’experte avant de s’inquiéter de la manière dont sont pénalisés les actes de violence contre les femmes. Comment le plan mis au point récemment vient-il compléter les dispositions du Code pénal? Comment lutter contre la violence familiale lorsqu’elle n’est pas qualifiée de délit par le Code pénal? a encore demandé l’experte.

A son tour, Mme HANNA BEATE SCHOPP-SHILLING, a souhaité savoir si le Gouvernement dispose d’une analyse de toutes les lois discriminatoires et si un calendrier d’amendement de ces lois est prévu. Le Gouvernement compte-t-il présenter sa proposition de loi sur l’égalité des chances avant les élections et quelles sont les chances que cette proposition de loi soit soumise une nouvelle fois devant le Parlement? a encore demandé l’experte.

Mme LIVINGSTONE RADAY s’est, par ailleurs, inquiétée de la “coutume” qui veut que de très jeunes filles aient des relations sexuelles avec des hommes plus âgées. Des mesures sont-elles envisagées pour traiter de la question? Ces actes sont-ils considérés comme relevant d’un détournement de mineurs? Des poursuites ont-elles été engagées? Le programme d’éducation sexuelle décourage-t-il ce genre de pratiques? a demandé l’experte avant de s’attarder aussi sur la question de la santé. Des mesures spécifiques sont-elles prises pour améliorer les soins apportés à la jeune mère? Les femmes enceintes font-elles l’objet de dépistage du VIH/sida? Des données existent-elles en la matière et quelle est la politique de prévention en la matière? L’Eglise coopère-t-elle aux initiatives visant la distribution des préservatifs?

De manière générale, l’experte a souhaité savoir pourquoi la Cour suprême en est venue à la conclusion qu’il n’existe aucun aspect discriminatoire dans les lois nicaraguayennes?

Quels sont les chiffres dans la parité entre les sexes dans le corps professoral des universités du Nicaragua, a tenu à savoir M. GORAN MELANDER en demandant aussi si le Nicaragua compte souscrire à l’amendement apporté à l’article 20 du Protocole facultatif à la Convention.





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