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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITE POUR L’ELIMINATION DE LA DISCRIMINATION A L’EGARD DES FEMMES ACHEVE L’EXAMEN DE LA SITUATION DE LA FEMME EN ESTONIE

29 Janvier 2002




Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
29 janvier 2002
548ème séance – après-midi



La délégation de l’Estonie assure les experts du CEDAW
de l’évolution des mentalités en faveur de valeurs démocratiques modernes



L’intégration de la problématique homme/femme dans la politique du Gouvernement estonien est un processus permanent et continu tout comme l’est le mouvement de réforme du système judiciaire, a expliqué cet après-midi la Sous-Secrétaire adjointe pour les affaires juridiques et consulaires de l’Estonie. Celle-ci répondait aux questions posées le 23 janvier 2002* par les experts du CEDAW qui achevait ainsi l’examen du rapport initial et des deuxième et troisième rapports de l’Estonie. Les experts s’étaient inquiétés du fait que l’Etat partie avait accumulé dix ans de retard dans la présentation des rapports. Ils s’étaient également interrogés sur l’écart entre les mécanismes institutionnels et juridiques mis en place et le faible degré de sensibilisation des acteurs de la société estonienne.

La délégation de l’Estonie, a expliqué que depuis 1991, date à laquelle le pays a retrouvé son indépendance, des transformations juridiques profondes se sont produites compte tenu du fait que la majorité des lois datant de l’époque soviétique devaient être modifiées pour les mettre en conformité avec les principes d’une économie de marché. La traduction de la Convention sur toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a été achevée en 1995. L’Estonie envisage avec prudence la ratification du Protocole facultatif.

La représentante de l’Estonie a expliqué que son pays avait accordé une attention particulière à la formation aux sexospécificités des juges et des procureurs. Dans les facultés de droit, l’éducation aux droits de la femme fait partie des programmes d’enseignement. Des programmes de formation sont mis en place pour accroître la prise de conscience des journalistes aux questions de parité et aux stéréotypes dans les médias.

Les attitudes ont changé pour ce qui est de la sous-représentation des femmes sur le marché du travail et dans la vie politique, a expliqué la représentante. Selon une enquête, deux tiers des femmes et des hommes ont pris conscience de discrimination dans l’emploi contre 10% des personnes interrogées en 1993. La société estonienne s’adapte petit à petit aux valeurs des sociétés démocratiques modernes. Auparavant, un tiers de la population était prêt à voter pour une femme alors que ce taux est de deux tiers aujourd’hui.

La prochaine réunion du Comité aura lieu vendredi 1er février. Le Comité adoptera son rapport final et achèvera les travaux de cette 26ème session.


EXAMEN DU RAPPORT INITIAL ET DES DEUXIÈME ET TROISIÈME RAPPORTS DE L’ESTONIE

Réponses de l’Etat partie


Mme MARINA KALJURAND, Sous-Secrétaire adjointe pour les affaires juridiques et consulaires de l’Estonie, a expliqué que les retards pris dans la présentation des rapports de son pays tiennent au fait que l’Estonie, qui a été coupée de la communauté internationale pendant des décennies, manquait d’expérience en matière d’élaboration de tels documents. Depuis 1991, l’Estonie a accédé à près de 30 conventions internationales. Au même moment, le pays connaissait des transformations juridiques profondes compte tenu du fait que la majorité des lois datant de l’époque soviétique devaient être modifiées pour les harmoniser avec les principes d’une économie de marché. La traduction de la Convention sur toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a été achevée en 1995 et celle des autres conventions en 2001.

La représentante de l’Etat partie a indiqué par ailleurs que son pays envisageait avec prudence la ratification du Protocole facultatif à la Convention qui permet à des individus ou groupes d’individus de saisir le Comité pour des cas de discriminations basés sur le sexe une fois que tous les recours nationaux ont été épuisés. Il est également trop tôt pour envisager la ratification des amendements à l’article 20 de la Convention relatif aux réunions du Comité. Il n’existe pas de définition de «la discrimination envers les femmes» dans les lois estoniennes mais la Constitution et la législation contiennent des dispositions en cas de «discrimination fondée sur le sexe». Les instruments juridiques internationaux, y compris les traités, prévalent dans le système juridique national. La Convention et la définition de «discrimination envers les femmes» sont donc directement applicables.

Un projet de loi sur l’égalité entre les sexes interdit la discrimination fondée sur le sexe et ce texte, une fois adopté et promulgué, obligera les autorités locales, les institutions scolaires et de recherche ainsi que les employeurs à respecter ces principes dans les domaines économique, social, culturel et dans d’autres sphères de la vie publique. Ce projet de loi est donc aussi complet que la Convention et couvre le secteur tant public que privé. Ce projet de loi a été approuvé par le Gouvernement et a été soumis à la Commission constitutionnelle du Parlement en 2001. Une Commission d’experts a par ailleurs été créée au sein du Ministère de la culture pour déterminer si une oeuvre artistique comporte des éléments pornographiques, cruels ou de nature à faire l’apologie de la violence. La publicité présentant la femme comme un objet sexuel a par ailleurs fait l’objet d’un large débat public. L’évaluation du niveau d’intégration des sexospécificités dans les projets de loi est menée par le Bureau pour l’égalité des sexes.

La Sous-Secrétaire adjointe a indiqué que le nouveau Code pénal, qui a été approuvé par le Parlement en 2001, comprend une définition du viol. Les relations sexuelles avec des personnes de moins de 14 ans sont un crime en vertu de l’article 145 du Code pénal. S’agissant des préoccupations exprimées par les experts sur le faible niveau de participation et de formation aux sexospécificités des juristes, elle a expliqué que l’éducation aux droits de l’homme et aux droits de la femme font partie des programmes d’enseignement. Une nouvelle loi sur la famille, qui est en cours d’élaboration, repose sur les principes de la Convention. Le Gouvernement prévoit son adoption en 2002. Convenant du taux élevé de divorces, la représentante a précisé qu’en 2000, 5 485 mariages et 4 230 divorces avaient été enregistrés. Elle a dit ne pas disposer d’information sur les causes de divorce. Selon la législation sur la famille, les biens acquis lors du mariage appartiennent aux deux époux.

Jusqu’à présent, la Cour suprême et les tribunaux n’ont pas fait de référence à la Convention. Au même moment, la notion de conformité de la loi avec le principe de l’égalité de traitement a été invoquée par la Cour. Celle-ci a appliqué les principes des autres conventions des Nations Unies et nous assumons donc que les principes de la Convention seront appliqués dans des cas pertinents. Nous avons accordé une attention particulière à la formation des juges et des procureurs. Il s’agit d’un processus permanent et continu tout comme l’est le processus de réforme du système judiciaire de l’Estonie. Le Chancelier juridique, qui est un représentant officiel indépendant, s’assure qu’il y a correspondance entre les lois et la Constitution. De nombreuses lois sont actuellement amendées de telle manière que l’interdiction de la discrimination fondée sur le sexe est encore plus forte. Il faut s’attendre à ce que le nombre de plaintes pour ce genre de discrimination augmente. Il existe un Bureau pour l’égalité des sexes mis en place en 1996. La responsabilité de veiller à l’égalité entre les sexes revient au Ministère des affaires sociales. Les mécanismes nationaux sont en cours de développement. Une Commission pour l’égalité entre les sexes, qui veillera à l’application des dispositions de la loi sur l’égalité, et un Comité pour l’égalité des sexes, qui jouera un rôle conseil auprès du Ministère des affaires sociales, seront bientôt mis en place.

L’intégration des principes d’égalité entre les sexes dans les politiques économiques et dans le budget national est un défi qui suppose que l’on dispose des données nécessaires, que l’on développe de nouvelles méthodes de travail et que l’on fournisse une formation. L’Estonie bénéficie de l’expérience d’autres pays, notamment dans le cadre du programme de coopération entre les pays du Nord et les pays baltes. L’intégration des sexospécificités dans les politiques financières est un des grands axes de coopération. Nous avons lancé le processus de développement de méthodes de travail, d’outils et d’indicateurs pour l’intégration des sexospécificités. L’égalité entre les sexes a été incluse dans les Plans d’action nationaux successifs depuis 1999. Le Plan d’action pour 2002 insiste sur les principes suivants: à valeur égale, égalité de rémunérations; conciliation de la vie de famille et de la vie professionnelle; soutien aux femmes chefs d’entreprise; diffusion de l’information pertinente.

Les attitudes ont changé pour ce qui est de la sous-représentation des femmes sur le marché du travail. Selon une enquête, deux tiers des femmes et des hommes ont pris conscience de la discrimination dans l’emploi contre 10% des personnes interrogées en 1993. En juin-juillet 2001, nous avons mené le premier sondage sur la violence à l’égard des femmes et nous élaborons actuellement un plan d’action stratégique. Il s’agit d’une des priorités du Ministère des affaires sociales pour le Plan d’action de 2002. La représentante a indiqué que la société estonienne s’adapte petit à petit aux valeurs des sociétés démocratiques modernes. La majorité de la société estonienne hésite quant à la nécessité de disposer d’un système de quotas, au risque de miner le pouvoir patriarcal. Le projet de loi sur l’égalité contient un article qui prévoit l’adoption de mesures temporaires spéciales pour accélérer l’égalité de facto entre l’homme et la femme. La représentante a souligné l’importance du rôle de l’éducation pour lutter contre les stéréotypes. Toutefois, il n’existe pas de chaire pour les questions féminines à l’Université. Les attitudes au sujet de la participation des femmes à la vie politique ont changé au cours des dernières années. Auparavant, un tiers de la population était prêt à voter pour une femme alors que les deux tiers le sont aujourd’hui.

La traite des êtres humains n’a pas été clairement criminalisée jusqu’en 2001. Le nouveau Code pénal fait des privations de liberté, de l’esclavage et du kidnapping un crime. La majorité des prostituées refusent de témoigner de peur d’être expulsées vers leur pays d’origine. C’est la raison pour laquelle seul un faible nombre de procédures criminelles ont été lancées. Un des problèmes principaux est la vulnérabilité des victimes elles-mêmes. Les services de police et les services sociaux n’ont pas été encore en mesure de mettre en oeuvre des actions concertées.

Dans le cadre de la lutte contre la traite des femmes, des pays baltes nordiques devraient réunir des représentants sur les problèmes de parité et des fonctionnaires des ministères de la justice et de l'intérieur. Les pays de la région de la mer Baltique considèrent que la protection des témoins joue un rôle important dans la prévention des crimes organisés. Concernant la participation des femmes à la vie politique locale, il est difficile de faire un pronostic sur le nombre de femmes dans le prochain parlement, mais les progrès dans la société et au sein de différents partis incitent à l'optimisme. La participation des organisations de femmes à l'élaboration de la législation est menée de façon informelle, ces organisations ont par exemple largement contribué au processus ayant abouti à la ratification de la Charte sociale européenne révisée.

En 2000, la loi sur la nationalité a été amendée et des dispositions spéciales ont été introduites concernant l'acquisition de la citoyenneté estonienne par les personnes handicapées. Tous les étrangers qui résident légalement en Estonie peuvent demander un permis de résidence et de travail. L'article 27 de la Constitution prévoit la protection de la famille par l'Etat, cet article a été interprété de façon large par la Cour suprême. L'Estonie a suivi une politique d'intégration avec pour résultat une société multiculturelle.

Les journalistes suivent un cours spécial qui leur permet de mieux comprendre les problèmes de parité et d’être plus conscients des stéréotypes dans les médias. Le contenu des livres scolaires est analysé dans une perspective sexospécifique. Les femmes avec des enfants en bas âge ont droit à une formation en vue de leur retour sur le marché du travail. Des mesures ont été prises pour attirer plus d'hommes dans les domaines de la médecine et de l'éducation traditionnellement réservés aux femmes.

Le nombre de femmes propriétaires de petites entreprises a augmenté. Les femmes occupent essentiellement le secteur des services et des ventes. Il est trop tôt pour émettre des conclusions sur les tendances des stéréotypes dans l'emploi. Le Plan d'action pour l'emploi 2002 attache une attention particulière à la nécessité de concilier la vie de famille et le travail. Le groupe d'âge 50-54 ans est cependant particulièrement vulnérable sur le marché du travail, avec un nombre de chômeurs qui a doublé entre 1998 et 2000. Le nouveau régime des pensions date de 2001 et est marqué par plus d'égalité entre hommes et femmes, le précédent étant très favorable aux femmes.

L'avortement en Estonie, au taux particulièrement élevé, ne peut pas être considéré comme un moyen contraceptif. Il est inférieur de moitié par rapport à celui qui prévalait, il y a dix ans. Beaucoup doit encore être fait, notamment en informant les femmes sur les moyens contraceptifs. Les contraceptifs sont accessibles pour tous à des prix abordables. Il y a eu très peu de cas d'avortements illégaux. Les avortements légaux sont effectués sur la base de prescriptions médicales et de la volonté exprimée par les intéressées. Le taux de suicide est relativement haut. Des études ont mis en évidence certains facteurs comme les problèmes d’emploi et la consommation d'alcool. La tuberculose et le VIH/sida restent préoccupants. Le traitement est gratuit, même pour les personnes qui ne sont pas assurées. En 1998-1999, il y avait 4,8 hommes consommateurs d'héroïne pour une femme. Le nombre de jeunes femmes toxicomanes augmente. L'usage de drogue et le virus VIH/sida sont étroitement liés.

Les époux sont tenus de subvenir aux besoins du conjoint qui a besoin d'assistance et qui ne peut pas travailler, ou pendant la grossesse et la croissance de l'enfant jusqu'à ce qu'il atteigne trois ans. La loi sur la famille permet le mariage de personnes âgées de plus de 18 ans. Les mariages de personnes âgées de 15 à 18 ans sont très exceptionnels et nécessitent le consentement des parents. Ces cas se présentent surtout lorsqu'une fille est enceinte.

Répondant à une nouvelle question de l’experte du Sri Lanka, la représentante de l'Estonie a précisé que l'âge minimum au moment du mariage, fixé après la loi estonienne, est de 18 ans mais qu’il existe des cas d'exception, pour une femme âgée d'au moins 15 ans qui est enceinte, ceci étant justifié par la volonté d'éviter l'augmentation du nombre d'enfants qui naissent en dehors des liens du mariage. Il faut le consentement des parents ou tuteurs et le mariage n'est d'ailleurs pas toujours autorisé.

La Présidente du Comité, Mme CHARLOTTE ABAKA, experte du Ghana, a exprimé l'espoir du Comité que le Gouvernement estonien ratifiera le Protocole additionnel à la Convention. Dans le domaine de la violence et la santé, elle a conseillé au Gouvernement estonien d'appliquer les recommandations fédérales élaborées par le Comité, notamment les recommandations 19 et 24. Les femmes ne portent pas plainte, a fait remarquer la Présidente, car elles ne savent pas que leurs droits ont été bafoués. Il serait bien que des représentantes du Comité soient invitées lors de la Conférence de femmes qui devrait avoir lieu l'an prochain en Estonie. Concernant le mariage à 15 ans, autorisé de façon exceptionnelle, la Présidente du Comité a fait observer que ceux qui le veulent tireront toujours partie de cette possibilité. Les enfants nés hors du mariage devraient avoir les mêmes droits que ceux nés dans le mariage, rendant ainsi inutile une telle disposition.





* Voir notre communiqué de presse FEM/1177



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