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Communiqués de presse Organe subsidiaire de la Commission des droits de l’homme

LES EXPERTS EXAMINENT LE RÉGIME APPLICABLE AUX RÉSERVES AUX INSTRUMENTS INTERNATIONAUX RELATIFS AUX DROITS DE L'HOMME

05 août 2003



Sous-Commission de la promotion
et de la protection des droits de l'homme
55ème session
5 août 2003
Après-midi




La Sous-Commission entend les interventions
de dix organisations non gouvernementales concernant
diverses «questions spécifiques ayant trait aux droits de l'homme»




La Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a examiné cet après-midi la question des réserves aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, suite à la présentation d'un document de travail sur la question par Mme Françoise Jane Hampson. Dans le cadre du débat général consacré aux questions spécifiques ayant trait aux droits de l'homme, notamment la promotion de la femme, les formes contemporaines d'esclavage et les «nouvelles priorités», la Sous-Commission a notamment entendu dix organisations non gouvernementales, un représentant du Haut Commissariat pour les réfugiés et les représentants de quatre États.
Mme Hampson a appelé l'attention sur les restrictions qui s'appliquent à la formulation de réserves par les États. Elle a rappelé qu'aux termes de la Convention de Vienne, les réserves ne sauraient être contraires aux objectifs et à l'objet du traité en question. Dans ce contexte, elle a appelé l'attention sur la compétence des mécanismes des droits de l'homme créés en vertu des traités pour inviter les États à retirer leurs réserves ou à en limiter le champ d'application. Elle a en outre examiné la compétence des parties contractantes à formuler des objections aux réserves inacceptables. Les experts qui sont intervenus suite à cette présentation ont appelé l'attention sur la nécessité de reconnaître à la fois l'universalité des droits de l'homme et les particularités religieuses, culturelles ou politiques des États.
Les experts suivants se sont exprimés au cours des débats : M. El-Hadji Guissé, M. Emmanuel Decaux, M. Miguel Alfonso Martínez, Mme Kalliopi Koufa, M. Paulo Sérgio Pihneiro, M. Asbjørn Eide, Mme Antoanella-Iulia Motoc, M. Soli Jehangir Sorabjee et M. Yozo Yokota.
Les principales puissances militaires du monde ont décidé que lorsque leurs intérêts sont en jeu, ni la Charte des Nations Unies ni aucun autre traité ou norme de droit international ne peut entraver l'action qu'elles entendent mener, s'est inquiétée une organisation non gouvernementale. Au vu des mesures prises par les États depuis les événements du 11 septembre 2001, nombre d'organisations non gouvernementales ont regretté qu'aucun mécanisme de surveillance de la conformité des législations antiterroristes avec les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, le droit international et le droit humanitaire n'ait été prévu. Plusieurs d'entre elles ont estimé que la compétence de juger les terroristes devrait être confiée aux Nations Unies, notamment par le biais de la Cour pénale internationale. En outre, la Sous-Commission devrait affirmer le droit des peuples à la paix, le principe du non-recours à la force, le droit inaliénable des peuples à l'autodétermination et le devoir de respect des normes humanitaires et des droits de l'homme en période de conflit ou d'occupation.
D'autres organisations non gouvernementales ont appelé l'attention sur la prolifération des armes à feu utilisées pour commettre des violations des droits de l'homme et ont appelé les gouvernements à mieux contrôler les transferts d'armes légères ainsi que leur circulation à l’intérieur des pays. À cet égard, Amnesty International s'est dit favorable à l'élaboration d'un traité sur le commerce des armes légères qui tiendrait dûment compte du droit international, notamment des droits de l'homme et du droit humanitaire.
Un représentant du Haut Commissariat pour les réfugiés a également pris par parole, ainsi que les représentants des organisations non gouvernementales suivantes : World Forum on the Future of Sport Shooting Activities; Human Rights Watch; Commission internationale de juristes; Union mondiale pour le judaïsme libéral ; Mouvement indien «Tupaj Amaru»; Voluntary Action Network India; Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples; Mouvement international de la Jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies; Amnesty International; et International Human Rights Association of American Minorities.
Les délégations des pays suivants sont également intervenues : République populaire démocratique de Corée, Sri Lanka, Inde et Bahreïn.
La Chine a exercé son droit de réponse s'agissant d'interventions faites au cours de l'examen du point relatif aux «questions spécifiques se rapportant aux droits de l'homme».
La Sous-Commission entamera demain, à 10 heures, le débat général sur l'administration de la justice, l'état de droit et la démocratie.

Examen de la question des réserves aux instruments relatifs aux droits de l'homme
Présentant ses travaux sur la question des réserves aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, s'est tout d'abord excusée du retard dans la publication de son document de travail (E/CN.4/Sub.2/2002/34) qui n'est, pour le moment, disponible qu'en anglais. Elle a rappelé que le régime applicable aux réserves est défini par l'article 19 de la Convention de Vienne qui précise que les réserves doivent être compatibles avec les objectifs et l'objet du traité. Elle a indiqué que les articles 20 à 22 de la même convention traitent de la réaction des autres parties contractantes face aux réserves. Elle a fait valoir que le silence d'un État partie ne vaut pas acceptation et qu'une réserve incompatible ne devient pas effective en l'absence d'objection expresse par un État. Mme Hampson a ensuite fait part de la pratique en matière de réserves aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme qui est différente de ce qui se fait dans d'autres domaines. Ainsi, a-t-elle observé, les réserves aux instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme ne font pas toujours référence à une disposition spécifique. Il arrive aussi que ces réserves aient pour objectif d'interpréter certaines dispositions à la lueur d'une certaine doctrine religieuse ou d'un certain régime politique. Mme Hampson a précisé que 490 objections à des réserves aux six principaux instruments relatifs aux droits de l'homme ont été formulées et que 99 % d'entre elles font référence à l'incompatibilité des réserves avec les objectifs et l'objet du traité. Remarquant que cette pratique d'objection aux réserves était relativement récente, tout au plus une dizaine d'années, Mme Hampson s'est interrogée sur la validité des réserves émises avant cette date et qui n'ont donné lieu à aucune objection.
Mme Hampson a ensuite envisagé la réaction des mécanismes des droits de l'homme aux réserves et a estimé que ceux-ci devraient avoir la compétence de se prononcer sur la validité des réserves. Afin de déterminer les modalités selon lesquelles ces mécanismes peuvent réagir, Mme Hampson a indiqué qu'il fallait tenir compte du contexte et du contenu du traité en question. Par exemple, le fait qu'une violation des droits de l'homme risque de compromettre la sécurité internationale fait partie du contexte dans lequel doit être examinée la réserve dont il est question. Dans ce cas, le mécanisme des droits de l'homme qui réagit à la réserve représente les intérêts de tous les membres de la communauté internationale, a-t-elle expliqué. S'agissant des réserves générales à un traité, Mme Hamspon a formulé des critiques à l'égard des réserves qui tendent à réinterpréter les obligations à la lueur d'une certaine doctrine religieuse ou politique.
Évoquant ensuite la réaction d'un mécanisme des droits de l'homme face à une réserve incompatible avec les objectifs et l'objet d'un traité, Mme Hampson a expliqué que cet organe peut examiner la réserve en vue d'obtenir son retrait ou de limiter son application afin de la rendre compatible. Prenant l'exemple d'une réserve générale au droit à l'éducation qui demanderait qu'il soit conforme à la loi islamique, Mme Hampson a fait valoir qu'il serait possible d'insister sur des écoles non mixtes, à condition que les écoles de filles aient accès aux mêmes programmes et aux mêmes ressources que les écoles de garçons. En dernier lieu, elle a recommandé que le texte de son rapport soit distribué aux mécanismes créés en vertu des traités et à la Commission du droit international.
M. EL HADJI GUISSÉ, expert de la Sous-Commission, a déclaré qu'il est d'accord avec Mme Hampson pour dire qu'il faut partir de la Convention de Vienne pour procéder à l'analyse des questions relatives aux réserves aux traités. Il a toutefois rappelé que la réserve a été mise à disposition des États pour leur permettre de pouvoir dire, eu égard à leur réalité interne, à leur loi nationale et à leurs convictions religieuses, qu'ils souhaitent émettre des réserves. M. Guissé a rappelé que dans certains pays, la religion est la base, la finalité de toute la vie sociale. Aussi, s'est-il dit d'avis que les réserves fondées sur les convictions religieuses doivent être autorisées «pour permettre à de tels États de participer à partir du droit élaboré». Chaque pays a ses spécificités, ses particularités, sa situation économique et politique et dire qu'il n'y a pas possibilité d'émettre des réserves reviendrait à écarter des pays entiers de la communauté du droit international. À partir du moment où elles ne touchent pas le noyau central des conventions, les réserves devraient être acceptées, a insisté M. Guissé.
M. EMMANUEL DECAUX, expert de la Sous-Commission, a jugé important le travail de Mme Hampson sur la question des réserves aux traités internationaux relatifs aux droits de l'homme. Notre vocation est de rendre cohérent le système international de droits de l'homme, a-t-il souligné. Il a estimé que l'approche de la Sous-Commission en la matière se doit d'insister sur le fait que les droits de l'homme ne sont pas un objet comme les autres, notamment parce qu'ils n'obéissent pas au régime de réciprocité qui est à la base du système des réserves. L'approche de la Sous-Commission doit en outre tenir compte de l'idée de continuité, la Commission du droit international ne voyant peut-être pas, en ce qui la concerne, la continuité qui existe précisément entre tous ces traités et la manière dont ils s'articulent. M. Decaux a par ailleurs rappelé que la Conférence de Vienne de 1993 a bien arbitré entre universalisme et particularisme et insisté sur la nécessité, pour les États, de lever et de retirer les réserves qu'ils maintiennent à l'égard des traités de droits de l'homme. Jugeant particulièrement important le dialogue entre la Sous-Commission et la Commission du droit international sur ces questions, M. Decaux a affirmé que, tout en cherchant à éviter les double emplois et sans vouloir empiéter sur le terrain des autres, la Sous-Commission se doit de faire entendre sa différence.
M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, a appuyé les propos de M. Decaux selon lequel il importe d'obtenir l'engagement le plus large possible en faveur des droits de l'homme. Il s'est par contre inquiété des propos tenus par Mme Hampson sur les réserves incompatibles aux traités. À cet égard, il a récusé toute tentative de reconnaître certains traités comme plus importants que d'autres et s'est dit d'avis que les instruments relatifs aux droits de l'homme ne sauraient constituer une catégorie supérieure de traités. Il a insisté sur le fait que toutes les conventions internationales doivent avoir la même valeur et qu'une obligation est une obligation. Il a ensuite posé la question de savoir qui avait compétence pour connaître de la compatibilité d'une réserve avec les dispositions d'un traité. Il a rappelé que les réserves formulées par un État étaient distribuées aux autres parties contractantes, ce qui signifierait que les États ont cette compétence. Il s'est opposé à l'idée avancée par Mme Hampson selon laquelle les mécanismes créés en vertu des traités sont compétents pour connaître de la validité des réserves, car seuls les États ont compétence à cet égard, en qualité de parties contractantes. Il a regretté la tendance «post-moderniste» à rogner la compétence des États, qu'il a jugée comme émanant d'un groupe d'États toujours prêts à rogner la souveraineté des États pour la confier à des organes d'experts.
M. KALLIOPI KOUFA, experte de la Sous-Commission, a brièvement réagi au rapport de Mme Hampson sur les réserves aux traités en indiquant que certains des commentaires qu'elle comptait y apporter ont déjà été faits par MM. Decaux et Alfonso Martínez.
M. PAULO SÉRGIO PINHEIRO, expert de la Sous-Commission, a relevé que, dans le contexte de la discussion sur les réserves aux traités, on semble entrer une nouvelle fois dans un débat entre Nord et Sud, alors que lorsque l'on parle du système des Nations Unies, on ne saurait prétendre qu'il est associé au Nord. M. Pinheiro a rappelé que le comité de rédaction de la Déclaration de Vienne n'était pas présidé par le Nord, pas plus que le Nord ne présidait le comité de rédaction du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. On ne saurait donc ici opposer Nord et Sud, a-t-il insisté.
M. ABSJØRN EIDE, expert de la Sous-Commission, a rappelé que les droits de l'homme sont universels mais que les particularités des divers pays doivent être prises en compte, ce qui doit permettre de juger de la compatibilité de certaines réserves. Il a réfuté les propos de M. Alfonso Martínez selon lesquels il n'y aurait pas de hiérarchie dans les traités et a déclaré que les instruments relatifs aux droits de l'homme étaient de nature différente. Il a estimé que si l'on reconnaît l'universalité des droits de l'homme, il faut déclarer incompatible les réserves contraires à l'objet et aux objectifs du traité. Il a salué les propositions de Mme Hampson concernant la compétence des mécanismes des droits de l'homme pour discuter avec les États en vue de les inviter à retirer leurs réserves ou d'en limiter le champ d'application.
MME ANTOANELLA-IULIA MOTOC, experte de la Sous-Commission, a souligné que le droit international était toujours en cours d'élaboration, même si la base restait les traités entre les États. Elle a toutefois appelé l'attention sur un deuxième niveau du droit international qui se développe dans le cadre des organisations internationales et sur un troisième niveau qui se fait jour dans le cadre des négociations commerciales. Revenant sur la Convention de Vienne sur le droit des traités, elle a rappelé les normes relatives au jus cogens, contre lesquelles les pays du Sud ont lutté, et a précisé que les instruments relatifs aux droits de l'homme ont un statut spécial. Elle s'est félicitée que Mme Hampson ait mis en lumière l'évolution de l'attitude des États face au droit international, notamment en ce qui concerne les objections aux réserves. Elle a estimé que les mécanismes des droits de l'homme se devaient d'avoir une action normative et d'imposer «une éthique de la convention».
M. SOLI JEHANGIR SORABJEE, expert de la Sous-Commission, a affirmé que, si certaines réserves sont permises, d'autres ne le sont pas. Reste à savoir ce qui fait qu'une réserve n'est pas compatible avec un traité et qui décide de la compatibilité ou de l'incompatibilité d'une réserve, a souligné M. Sorabjee. Il a souhaité savoir s'il existe des observations générales du Comité des droits de l'homme concernant ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas en matière de réserves.
Reprenant la parole, M. MIGUEL ALFONSO MARTÍNEZ, expert de la Sous-Commission, a précisé qu'en dehors des normes du jus cogens, qui se trouvent effectivement au sommet de la hiérarchie du droit international, il ne considérait pas qu'il y avait de hiérarchie entre les traités. Il a reconnu que la Convention de Vienne sur le droit des traités accordait un statut différent pour les instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme. Toutefois, il a fait savoir que l'universalité des droits de l'homme veut qu'ils s'appliquent autant au Nord qu'au Sud.
M. YOZO YOKOTA, expert de la Sous-Commission, a déclaré que la Sous-Commission se doit d'adopter, en ce qui concerne la question des réserves, une position qui soit suffisamment convaincante pour l'expert en droit international, faute de quoi elle perdra toute crédibilité dans ce domaine. Il a estimé que l'on a tendance à oublier l'impératif d'universalité lorsque l'on aborde la question des réserves dans le contexte des traités relatifs aux droits de l'homme.
MME FRANÇOISE JANE HAMPSON, experte de la Sous-Commission, s'est accordée avec M. Alfonso Martínez pour reconnaître qu'il n'y avait qu'une seule référence dans la Convention de Vienne sur le droit des traités à une quelconque hiérarchisation des traités. Elle a rappelé qu'un État peut choisir en toute souveraineté de ratifier un traité, de ne pas le faire, ou de le faire en émettant des réserves. Toutefois, a-t-elle précisé, un État n'a pas la possibilité de ratifier un traité en émettant des réserves contraires à son objet et à ses objectifs. Elle a estimé que dans ces conditions, les mécanismes créés en vertu des traités, en tant qu'organes dotés de pouvoirs juridiques, sont habilités à déterminer leur compétence et, par conséquent, sont compétents pour se prononcer sur la validité des réserves. Elle a également reconnu que les États parties avaient également la compétence d'émettre des objections à des réserves qu'elles jugent contraires à l'objet et aux objectifs du traité. Elle a cité l'affaire Rawle Kennedy contre Trinité-et-Tobago dans laquelle le Comité des droits de l'homme s'est prononcé sur l'incompatibilité d'une réserve et a poursuivi son examen sans donner effet à la réserve incompatible.
Répondant à M. Guissé, Mme Hampson a précisé qu'elle n'exprimait dans son document de travail aucune objection aux réserves émises pour des raisons religieuses. Elle a repris l'exemple d'une réserve au droit à l'éducation en vue de le rendre compatible avec la loi islamique et a expliqué qu'une telle réserve est acceptable à condition d'être précise et de ne pas demander que l'ensemble du traité soit réinterprété à la lumière du droit interne.

Autres déclarations au titre des «questions spécifiques se rapportant aux droits de l'homme»
M. DON KATES (World Forum on the Future of Sport Shooting Activities), a souligné que l'utilisation d'armes à feu pour commettre des génocides à l'incitation de gouvernements armés est rarement le fait de civils, sauf s'ils ont été armés à dessein par des gouvernements qui récupèrent les armes par la suite. Il a observé que les génocides ont diminué vers la fin du XXe siècle, car l'histoire a prouvé que les génocides étaient trop coûteux, surtout si le groupe attaqué est armé. Il a mis en garde contre les risques qui peuvent apparaître lorsqu'on désarme les populations civiles dans un contexte de gouvernement faible. Il a estimé que les armes à feu étaient le seul moyen de défense des faibles. Il s'est opposé aux déclarations qui recommandent le désarmement des populations civiles, car c'est le seul moyen qu'elles ont de se défendre.
MME RAHEEK RINAWI (Human Rights Watch) a souligné que la prolifération incontrôlée et l'utilisation abusive répandue des armes légères représente une crise humanitaire et une crise des droits de l'homme au niveau mondial. Elle a dit attendre de l'étude que mène la Rapporteuse spéciale Barbara Frey sur cette question qu'elle s'étende à la question de l'impact de ces petites armes dans les situations de conflit armé. La représentante a en outre souligné que les gouvernements sont responsables de contrôler les transferts internationaux d'armes afin d'empêcher qu'elles ne tombent entre de mauvaises mains. Les gouvernements se doivent également de faire preuve de responsabilité face à la question de la circulation de ces armes dans leur pays. Même dans les pays réputés en paix, l'utilisation abusive des petites armes est responsable de nombreuses violations des droits de l'homme, a insisté la représentante. Il arrive même parfois que les responsables de ces violations soient des agents de l'État qui contreviennent aux normes internationales, a-t-elle ajouté.
MME HASSIBA HADJ SAHRAOUI (Commission internationale de juristes) a dénoncé la présence de plus de 600 prisonniers à Guatanamo Bay, qui ont été privés du droit à un avocat et de tout statut juridique. Tout en reconnaissant la compétence des États à prendre les mesures nécessaires pour lutter contre le terrorisme, la représentante a fait valoir que cette lutte doit s'inscrire dans le cadre juridique des droits de l'homme. Il importe que les États veillent à ce que les mesures qu'ils prennent dans ce cadre sont conformes aux engagements qu'ils ont souscrits au plan international. Elle a ensuite appelé l'attention sur les divers instruments régionaux de lutte contre le terrorisme qui portent atteinte aux droits de l'homme et a regretté que la contribution des mécanismes des droits de l'homme dans la surveillance des mesures antiterroristes soit limitée par leur mandat. Elle a regretté aussi que la surveillance exercée par le Comité des droits de l'homme se fasse a posteriori et se limite à une vingtaine de pays par an, au maximum. La représentante a appelé l'attention sur la résolution de l'Assemblée générale qui recommande au Haut Commissariat aux droits de l'homme d'assister les États à vérifier la conformité de leur législation antiterroriste avec les droits de l'homme et a déploré que cette même résolution ne prévoie pas de mécanisme de surveillance à proprement parler.
M. DAVID LITTMAN ((Union mondiale pour le judaïsme libéral) s'est demandé si l'autorité spirituelle sunnite d'Al-Azhar, en Égypte, ne pourrait pas être persuadée de publier une fatwa abrogeant trois fatwas précédentes, datant de 1949, 1951 et 1981 qui, sans apporter une caution religieuse aux mutilations génitales féminines, ont laissé aux parents des fillettes l'entière responsabilité dans ce domaine. M. Littman a par ailleurs relevé que la Rapporteuse spéciale sur les pratiques traditionnelles affectant la santé des femmes et des fillettes, Mme Halima Embarek Warzazi, affirme dans son rapport que l'Égypte, le Soudan et le Yémen ont, dans le monde arabe, une exclusivité pour ce qui est de ce type de mutilations. S'agissant d'autre part de la question des formes contemporaines d'esclavage, M. Littman a rappelé que l'esclavage reste un sujet tabou au Nord-Soudan, ceux que le Gouvernement qualifie de «personnes enlevées» étant bel et bien des esclaves, comme l'on affirmé des participants dinka lors d'une récente conférence anti-esclavage tenue à Mabil, au Sud-Soudan, en juin dernier. Il convient donc désormais d'intégrer des mesures d'éradication de l'esclavage dans les accords de paix à venir entre le Gouvernement du Soudan et le SPLM et de mettre sur pied une commission indépendante chargée de surveiller la mise en œuvre de ces mesures. S'agissant enfin de la question du terrorisme, M. Littman a demandé à la Sous-Commission d'adopter une résolution condamnant sans équivoque cette grande infamie qu'est le terrorisme.
M. LAZARO PARY (Mouvement indien «Tupaj Amaru»)a retracé l'expérience particulière qu'ont les populations autochtones du terrorisme d'État, de l'occupation militaire et de diverses brimades sous couvert de protéger la sécurité. Condamnant vigoureusement le terrorisme, M. Pary a rappelé que chacun avait aussi le droit de s'élever contre la tyrannie. Le représentant a ensuite regretté que les États-Unis et le Royaume-Uni se soient lancés, sans l'aval des Nations Unies, dans une campagne simpliste contre le terrorisme dont le mot d'ordre était «avec ou contre nous». Il a dénoncé les intérêts géostratégiques qui animent les puissances occidentales et a demandé à ces dernières de procéder à un examen de conscience. En effet, au nom de quel principe une superpuissance peut-elle imposer un modèle unique de société qui conduit notamment au non-respect de l'environnement, a-t-il demandé. Il s'est indigné de la complicité de la communauté internationale et de son silence devant les violations des droits des Palestiniens. Il s'est déclaré choqué aussi que la lutte contre le terrorisme soit menée en marge de la Charte des Nations Unies et a estimé que la responsabilité de juger les terroristes devraient revenir aux Nations Unies, notamment à la Cour pénale internationale.
M. NARENDER KUMAR (Voluntary Action Network India) a souligné que, s'il est vrai que, depuis l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, la situation vis-à-vis du droit à la vie et à la sécurité des personnes a connu des hauts et des bas, jamais elle n'a subi une pression aussi grande que celle que lui inflige, depuis une décennie, le terrorisme, aux ramifications internationales. De nombreuses démocraties, puissantes et moins puissantes, anciennes et nouvelles, ont été victimes du terrorisme international et transfrontière. Toutefois, le cas du terrorisme au Jammu-et-Cachemire est quelque peu spécifique. En dépit du fait qu'elle s'est engagée dans la lutte contre un terrorisme appuyé par un soutien de l'étranger, l'Inde a été en mesure de maintenir des normes internationales de droits de l'homme raisonnables, grâce à un système judiciaire indépendant, à des mécanismes internes efficaces et à une solide société civile. Relevant qu'il n'existe toujours pas de définition universellement acceptée du terrorisme, le représentant a souligné que disposer d'une définition précise du terrorisme n'est pas aussi important que de comprendre ce phénomène. Le terrorisme ne saurait être justifié en invoquant le prétexte de l'autodétermination et de la lutte pour la libération. Comme l'a souligné lui-même le Sénateur Jesse Jackson, les combattants de la liberté ou les révolutionnaires ne font pas exploser des bus remplis de non-combattants. Le représentant a exhorté toutes les nations à s'abstenir d'apporter leur soutien aux actes terroristes, voire de les promouvoir. Il a également mis l'accent sur la nécessité de garder à l'esprit les obligations en matière de droits de l'homme dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Il convient à cet égard de respecter les principes de nécessité, de proportionnalité et de non-discrimination, a-t-il rappelé.
MME ELENA SANTIENMA (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples) a estimé que le 11 septembre 2001 marquait un tournant dans la politique des États pour lutter contre le terrorisme et a rappelé la création du Comité antiterroriste du Conseil de sécurité chargé de veiller à l'application des nouvelles mesures antiterroristes. Elle a appelé l'attention sur le fait que les nouvelles mesures antiterroristes sont souvent formulées dans un style ambigu, ce qui permet aux États de réinterpréter les textes pour servir les priorités politiques. Ainsi, ce qui pouvait être toléré par les pouvoir publics comme exercice de la liberté d'expression peut désormais être qualifié d'activité illégale ayant des connotations terroristes. La représentante s'est élevée contre cette nouvelle tendance à réduire l'espace de liberté.
M. JAN LONN (Mouvement international de la Jeunesse et des étudiants pour les Nations Unies) a rappelé que depuis plus d'un siècle, la communauté internationale n'a eu de cesse que de déployer des efforts, au niveau multilatéral, afin de mettre en place un système de droit international fondé sur le rejet du recours à la force et sur le respect de normes humanitaires en période de conflit. Les conventions de La Haye et de Genève ont constitué le point de départ de ces efforts. Puis, fondés sur la Charte des Nations Unies, des normes universellement acceptées de droits de l'homme ont été adoptées pour protéger les êtres humains partout dans le monde. C'est aujourd'hui l'ensemble de ce système de droit international qui est exposé au défi le plus important auquel il ait jamais été confronté depuis la création des Nations Unies. Les événements du 11 septembre 2001 ont servi de prétexte pour rejeter des normes qui étaient depuis longtemps acceptées et considérées comme étant des normes contraignantes de conduite internationale. Ce sont les droits de l'homme qui, à travers le monde, ont pâti de cette situation. Les principales puissances militaires du monde ont décidé que lorsque leurs intérêts sont en jeu, ni la Charte des Nations Unies ni aucun autre traité ou norme de droit international ne peut entraver l'action qu'elles entendent mener. Il s'agit là d'une évolution particulièrement grave qui requiert une réponse ferme des États membres, des organisations non gouvernementales, de l'opinion publique et de la communauté juridique internationale, experts et universitaires confondus. La Sous-Commission devrait donc se prononcer clairement en faveur du droit des peuples à la paix, du non-recours à la force, du droit inaliénable des peuples à l'autodétermination et du devoir de respect à l'égard des normes humanitaires et des droits de l'homme en période de guerre ou d'occupation.
MME MELINDA CHING (Amnesty International) a appelé l'attention sur l'utilisation des armes légères pour commettre des violations des droits de l'homme et a observé que les États n'agissaient pas suffisamment pour prévenir les transferts illicites de ces armes. Elle a indiqué que, depuis 1998, plus de trois millions de civils ont trouvé la mort en République démocratique du Congo dans des circonstances d'une extrême violence, mais que les gouvernements avaient continué à fournir des armes à ce pays. Ainsi, le Gouvernement a reçu des armes en provenance de Belgique, de Chine, de France, d'Allemagne, d'Israël, d'Espagne, du Royaume-Uni et des États-Unis. Elle a précisé qu'en novembre 2002, Amnesty International avait découvert la preuve de l'utilisation de matériel militaire étranger dans les combats violents autour de Kisangani. Elle a ajouté que les pilotes et les navires qui acheminaient des armes n'étaient pas interdits par le Gouvernement britannique notamment. Elle s'est inquiétée de l'accroissement des exportations d'armes vers de nombreux pays qui n'ont que peu de contrôle sur les armes. Dans ce contexte, elle a rappelé qu'Amnesty International avait appelé les membres du G-8 à appuyer l'élaboration d'un traité sur le commerce des armes, qui tienne compte des principes du droit international, y compris les droits de l'homme et le droit humanitaire.
M. ALTAF HUSSAIN QADRI (International Human Rights Association of American Minorities) a souligné que les femmes sont souvent la cible de violations des droits de l'homme, la situation étant à cet égard encore pire dans les cas de conflit armé ou d'occupation par une armée étrangère. L'absence de mécanisme de contrôle international et l'absence de médias internationaux dans les territoires occupés encourage l'impunité des agents des puissances occupantes, a-t-il par ailleurs fait observer. Il a affirmé que le débat international sur la définition du terrorisme a été bloqué par des pays comme l'Inde qui entendent tout regrouper pêle-mêle, y compris le droit légitime à l'autodéfense, sous la rubrique du terrorisme. Le représentant a par ailleurs mis l'accent sur la nécessité d'aborder les causes essentielles du terrorisme que sont l'occupation, la tyrannie et la défiance à l'égard du droit international - terreaux particulièrement fertiles pour le terrorisme.
M. CHRISTOPH BIERWIRTH (Haut Commissariat pour les réfugiés) a reconnu le rôle de la Sous-Commission pour renforcer et développer les normes relatives aux droits de l'homme qui s'appliquent aux demandeurs d'asile et aux réfugiés. Il s'est déclaré préoccupé par le contexte rendu plus difficile pour les réfugiés par l'adoption des législations antiterroristes par les États. Il a ensuite soulevé la question de la succession des États après la chute d'un régime, notamment en ce qui concerne les questions de nationalité et d'apatridie. Il a ensuite appelé l'attention sur les conditions favorables au retour des réfugiés et s'est notamment félicité des travaux de M. Paulo Sérgio Pinheiro sur la question de la restitution des biens des réfugiés et personnes déplacées. Il a ainsi insisté sur l'important rôle que la Sous-Commission peut jouer dans le renforcement du régime de protection des réfugiés.
M. KIM YONG HO (République populaire démocratique de Corée) a déclaré que l'esclavage sexuel et les pratiques analogues en période de conflit armé sont des crimes particulièrement odieux qui doivent être condamnés sans équivoque par la communauté internationale, les auteurs de ces actes devant être punis comme il se doit et les victimes devant être rétablies dans leur honneur. Il a affirmé que cette question n'a pas été réglée complètement en raison de l'impudence de certains qui continuent à nier leur responsabilité juridique en la matière tout en reconnaissant la réalité des crimes. Dans le cas des femmes de réconfort, plus de 200 000 Coréennes ont été kidnappées et réduites à l'esclavage, a-t-il rappelé. La justice internationale ne peut en aucun cas pardonner de tels crimes et une telle barbarie, a-t-il poursuivi. La première étape est donc de reconnaître la responsabilité juridique des auteurs de ces actes, a-t-il insisté.
M. SUGEESHWARA GUNARATNA (Sri Lanka) s'est déclaré particulièrement préoccupé par l'utilisation des armes légères et des armes de petit calibre pour commettre des violations des droits de l'homme. Il a reconnu qu'un certain degré de responsabilité des États peut être engagé quand ces violations sont commises par des agents de l'État ou dans le cas où il ne fait pas preuve de diligence face à des individus ou des groupes qui commettent des violations des droits de l'homme. Toutefois, en cas d'utilisation abusive de ces armes par des acteurs non étatiques, le représentant a estimé que le principe de la diligence due ne saurait s'appliquer, car la stabilité de l'État lui même peut se voir menacée. Il s'est déclaré d'avis que les transferts illicites d'armes légères vers des acteurs non étatiques étaient à l'origine de la plupart des graves violations des droits de l'homme et a considéré qu'il serait donc utile de rechercher des moyens d'engager la responsabilité de ces groupes au regard des droits de l'homme. Il convient aussi que les États s'appliquent, au plan national, à endiguer ce trafic illicite. Dans la mesure où les actions des forces étatiques sont réglementées par de nombreuses normes internationales, il a estimé qu'il était inutile de restreindre davantage la capacité des États à produire ou importer des armes légères.
M. PANKAJ SARAN (Inde) a déclaré qu'en tant que pays démocratique fondé sur l'état de droit, son pays ne peut que se réjouir que la Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme ait fait part de sa préoccupation s'agissant de la question de la compatibilité des mesures antiterroristes avec les normes internationales de droits de l'homme. Il s'est néanmoins dit déçu que la Rapporteuse spéciale n'ait pas traité suffisamment de la question qui était au cœur de son mandat, à savoir l'impact du terrorisme et non pas des mesures antiterroristes sur les droits de l'homme. Le terrorisme empiète en effet sur tous les droits de l'homme et viole le premier d'entre eux, le droit à la vie, a-t-il rappelé. En dépit du lourd tribut en vies humaines que continue de prélever le terrorisme transfrontière, l'Inde s'efforce d'assurer que les mesures antiterroristes sont conformes aux normes internationales de droits de l'homme. Cela fait désormais longtemps que l'on attend une étude complète de l'impact du terrorisme sur la jouissance des droits de l'homme, a insisté le représentant indien. Il a dénoncé les acteurs étatiques et non étatiques qui invoquent des principes tels que l'autodétermination et la lutte pour la liberté afin de créer la confusion. Ce sont ces mêmes États qui refusent à leur propre population des droits élémentaires tels que celui de bénéficier d'un gouvernement représentatif. Un autre argument fallacieux fréquemment propagé consiste à affirmer que le terrorisme ne peut être éliminé qu'en s'attaquant à ces causes profondes, a poursuivi le représentant indien. Il a souligné que les attaques terroristes contre des innocents ne sauraient être justifiées en aucune façon et a rappelé que l'Inde ne partage pas l'avis selon lequel seuls les États violent les droits de l'homme.
M. KHALID AL-KHALIFA (Bahreïn) a mis l'accent sur la nécessité d'assurer la pleine égalité entre les sexes et a rendu compte de la situation de la femme bahreïnite. Il a précisé que le rôle des femmes de Bahreïn avait encore été renforcé par la Charte nationale, qui a créé le Conseil supérieur de la femme. Ainsi, a-t-il poursuivi, des femmes sont élues à des fonctions représentatives et sont pleinement associées aux processus de développement. Il a ajouté que Bahreïn était partie à la Convention internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qui constitue une nouvelle pierre angulaire du système de protection des droits de la femme à Bahreïn. Malgré toutes ces mesures, le représentant a reconnu que des efforts restaient à faire pour assurer la pleine égalité entre les femmes et les hommes.

Exercice du droit de réponse
Le représentant de la Chine a répondu à certaines organisations non gouvernementales et à certains experts qui ont parlé du Falun Gong. Il a noté que l'on a pu entendre à maintes occasions des allégations fallacieuses, quoique désormais de moins en moins fréquentes, être proférées sur ce sujet à l'encontre du Gouvernement chinois. Falun Gong est une secte dont les principales victimes sont ceux qui pratiquent, en particulier des femmes. Le Gouvernement chinois s'efforce donc de protéger les pratiquants.



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