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LE COMITÉ POUR L'ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE ADOPTE SES OBSERVATIONS FINALES SUR LA RÉPUBLIQUE TCHÈQUE
18 août 2003
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Comité pour l’élimination
de la discrimination raciale
63ème session
18 août 2003
Matin
Il examine le rapport de la Norvège
Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a adopté ce matin ses observations finales sur le rapport de la République tchèque. Il a en outre achevé l'examen du seizième rapport périodique de la Norvège, entamé vendredi 15 août, et au sujet duquel il adoptera des observations finales dans le courant de cette semaine, la dernière de la présente session du Comité.
Dans ses observations finales sur la République tchèque, le Comité se félicite notamment des mesures nombreuses et concrètes, ainsi que des programmes et stratégies adoptés afin d'améliorer la situation des Roms et autres groupes marginalisés, notamment les réfugiés. Tout en notant les efforts visant à élaborer une législation anti-discrimination complète, il est préoccupé par les difficultés rencontrées et exhorte la République tchèque à incorporer dans sa nouvelle législation la définition de la discrimination raciale telle qu'elle figure dans la Convention. Le Comité est également préoccupé par la poursuite d'actes de violence raciste, de l'incitation à la haine raciale, de la persistance de l'intolérance et d'une discrimination de fait, en particulier à l'égard de la minorité rom. Il recommande que le Gouvernement poursuive et intensifie ses efforts en vue d'une meilleure application de sa législation afin de mettre fin aux pratiques discriminatoires de la part de la police à l'encontre des Roms ainsi que pour réduire la pauvreté et le chômage des Roms.
Présentant le rapport de la Norvège, M. Petter Wille, Directeur général adjoint au Ministère des affaires étrangères, a évoqué l'adoption en 2002 d'un plan national d'action pour combattre le racisme et la discrimination qui s'applique aux populations autochtones, aux minorités nationales et aux personnes d'origine immigrée. Les mesures contenues dans le plan visent essentiellement la vie professionnelle, les services publics, l'éducation et les écoles, le système judiciaire, l'Internet, les communautés locales et la protection juridique contre la discrimination ethnique et le harcèlement racial. Il a également fait état de la préparation d'une loi qui devrait être proposée l'année prochaine et viserait à interdire la discrimination ethnique dans tous les domaines de la société à l'exception des relations personnelles et de la vie familiale. Cette loi a pour objectif principal d'offrir une protection complète et efficace aux individus contre un traitement injuste fondé sur l'appartenance ethnique ainsi que de prévenir la discrimination mais aussi d'améliorer la situation des minorités ethniques en assurant l'égalité de traitement et l'égalité des chances. Ce dispositif est complété par une révision de la loi sur le logement afin d'y inclure des dispositions contre la discrimination ainsi que par un amendement visant à renforcer la protection contre la discrimination sur le lieu de travail.
La délégation norvégienne était également composée de représentants du Ministère des affaires étrangères ainsi que du Ministère de l'administration locale et du développement régional.
Le rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Norvège, M. Mario Jorge Yutzis, s'est félicité de la qualité du rapport ainsi que du dialogue réel et très fructueux entre la délégation et les membres du Comité. Tout cela montre la détermination de la Norvège de poursuivre le dialogue avec le Comité mais aussi la vivacité du débat qui existe au sein de la société norvégienne et qui est un élément déterminant de tout progrès dans l'application de la Convention, a estimé M. Yutzis. Il a toutefois estimé que certains problèmes demeurent, en particulier en ce qui concerne les Samis, dont il a relevé qu'ils continuent d'être victimes de discrimination. Il s'est particulièrement interrogé sur la nouvelle législation relative à la région du Finnmark et dans quelle mesure celle-ci est compatible avec l'autodétermination des Samis.
Au cours de la discussion, les experts du Comité ont salué à l'échange de vues très riche avec la délégation norvégienne, qui a apporté des réponses très précises à toutes leurs questions. Celles-ci ont tourné autour de thèmes tels que le statut de la Convention dans le droit norvégien, les problèmes de chômage des immigrés, la discrimination, la situation des Roms et des Samis, les cours de religion, le partage de la charge de la preuve en matière de discrimination dans les affaires civiles, l'interdiction des activités racistes organisées plutôt que des organisations racistes ou encore la lutte contre le racisme sur Internet.
Les membres du Comité suivants ont participé au débat: M. Mohamed Aly Thiam, M. Nourredine Amir, M. Luis Valencia Rodríguez, M. Morten Kjaerum, M. Marc Bossuyt, M. Raghavan Vasudevan Pillai, M. Mahmoud Aboul-Nasr, M. Jose Lindgren Alves, M. Chengyuan Tang, M. Linos-Alexandre Sicilianos, M. Régis de Gouttes, M. Patrick Thornberry, M. Alexei Avtonomov, M. Kurt Herndl et Mme Patricia January Bardill.
En fin de réunion, le Comité a par ailleurs adopté le texte d'une lettre adressée au Représentant permanent d'Israël par laquelle il lui fait part de la décision adoptée par le Comité, au titre de sa procédure d'urgence, sur la nouvelle loi israélienne relative au regroupement familial (voir notre compte rendu HR/CERD/03/42). Dans cette lettre, le Comité rejette par ailleurs fermement toute allégation selon laquelle, en prenant cette décision, il n'aurait pas agi en toute indépendance et impartialité conformément à son mandat.
Le Comité a en outre discuté des dates et lieux de ses prochaines sessions et de l'opportunité de tenir une de ses sessions à New York. En ce qui concerne la prochaine session, il a été confirmé qu'elle aurait lieu à Genève du 23 février au 12 mars 2003.
Le Comité reprendra ses travaux cet après-midi, à partir de 15 heures, pour entamer l'examen du rapport de Saint-Vincent-et-les-Grenadines (CERD/C/378/Add.1). Il entamera également l'adoption de ses observations finales sur la République de Corée.
Présentation du rapport de la Norvège
M. PETTER WILLE, Directeur général adjoint au Ministère norvégien des affaires étrangères, a réaffirmé l'engagement de la Norvège en faveur de la coopération avec les organes de traités des Nations Unies et considéré que l'examen des rapports périodiques constitue la pierre angulaire de la surveillance du respect des obligations des États dans le domaine des droits de l'homme. Au nombre des efforts déployés depuis la soumission du dernier rapport par la Norvège, M. Wille a notamment évoqué l'adoption en 2002 d'un plan national d'action pour combattre le racisme et la discrimination qui s'applique aux populations autochtones, aux minorités nationales et aux personnes d'origine immigrée. Les mesures contenues dans le plan visent essentiellement la vie professionnelle, les services publics, l'éducation et les écoles, le système judiciaire, la documentation et la surveillance, l'Internet, les communautés locales et la protection juridique contre la discrimination ethnique et le harcèlement racial.
En 2001, un comité spécial a examiné la situation juridique de la dissémination d'idées racistes, des organisations et manifestations racistes et, bien que n'ayant pas recommandé l'interdiction des organisations racistes, il a néanmoins recommandé d'amender le Code pénal afin de rendre illégal l'usage de symboles racistes, a fait valoir M. Wille. Il a ajouté que ce comité spécial a conclu que les dispositions existantes offraient une protection suffisante contre les manifestations racistes.
Le chef de la délégation norvégienne a par ailleurs indiqué qu'une commission a été constituée afin d'examiner comment la protection juridique contre la discrimination pouvait être renforcée. Elle a fait des propositions en vue d'une nouvelle loi qui interdirait la discrimination ethnique dans tous les domaines de la société à l'exception des relations personnelles et de la vie familiale. Cette loi a pour objectif principal d'offrir une protection complète et efficace aux individus contre un traitement injuste fondé sur l'appartenance ethnique ainsi que de prévenir la discrimination, mais aussi d'améliorer la situation des minorités ethniques en assurant l'égalité de traitement et l'égalité des chances. À cet égard, il a été considéré que les actions positives en faveur de certains groupes ethniques ne doivent pas être considérés comme une discrimination et la Commission a proposé que la loi offre une protection tant contre la discrimination directe que la discrimination indirecte.
La Commission a par ailleurs réexaminé la question de l'interdiction des organisations racistes et a recommandé que, pour une meilleure efficacité, l'interdiction frappe plutôt les activités racistes que les organisations en tant que telles, et a proposé l'introduction de sanctions civiles et pénales pour l'incitation ou la participation à des activités racistes organisées ou à d'autres actes de discrimination collectifs. Il a été considéré qu'une telle disposition serait conforme aux obligations de la Convention internationale pour l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale. La Commission a par ailleurs proposé des amendements à la loi pénale et examiné comment les dispositions de la Convention pouvaient être intégrées dans le droit interne, a indiqué M. Wille, précisant que la nouvelle loi devrait être soumise en 2004.
Par ailleurs, M. Wille a indiqué que le Gouvernement a entamé une révision de la loi sur le logement afin d'y inclure des dispositions contre la discrimination. Il a en outre adopté un plan d'action afin d'accroître la participation dans la société des enfants et des jeunes issus de l'immigration qui vise notamment à améliorer leurs connaissances linguistiques, à améliorer le travail de prévention de la criminalité ainsi qu'à améliorer la santé et la prévention des mutilations génitales féminines. Un rapport de la Direction de l'immigration sur le racisme et la discrimination a également été présenté qui fait état des expériences subjectives du racisme et de la discrimination et se concentre en particulier sur la discrimination dans les écoles primaires, sur le lieu de travail, dans les communautés locales et les médias. Il conclut que la discrimination est perçue comme un problème dans toutes les enceintes considérées et propose diverses mesures de prévention. Le Gouvernement travaille pour sa part à un rapport sur les défis de la société multiculturelle qui sera présenté au Parlement en 2004 et qui se concentre sur la façon de préserver un sentiment de communauté et de participation alors que la population devient de plus en plus hétérogène.
M. Wille a en outre fait état de l'amendement proposé afin de renforcer la protection contre la discrimination sur le lieu de travail ainsi que du nouveau système d'intégration des nouveaux immigrés qui oblige les nouveaux immigrés à participer activement à un programme devant leur donner les qualifications nécessaires pour vivre et travailler en Norvège avant de pouvoir prétendre recevoir des prestations sociales. Ce programme a pour but de leur donner une connaissance de base de la langue norvégienne et de la société et de les préparer à travailler ou étudier en Norvège. Il est assorti d'une allocation généralement supérieure aux prestations sociales ordinaires et d'une allocation au logement.
Le seizième rapport périodique de la Norvège (CERD/C/430/Add.2) indique notamment que les Samis sont le peuple autochtone de la Norvège. Les Juifs, les Kvens (minorité d'origine ethnique finnoise), les Roms /Tsiganes, les Romani/Gens du voyage et les Skogfinns (personnes de souche finnoise habitant au sud du pays) sont reconnus comme des minorités nationales. On estime qu'il y a en Norvège entre 50 000 et 100 000 personnes de souche sami et environ 25 000 personnes en Norvège comprendraient le sami. Le dialogue avec les organisations des minorités est un élément important du processus d'élaboration des politiques. Dans son rapport au Storting, le Gouvernement condamne fermement les abus commis contre les Romani/Gens du voyage. Il regrette en outre la politique de norvégisation à laquelle toutes les minorités nationales ont été soumises et présente des excuses au nom de l'État pour la manière dont les minorités ont été traitées. Le rapport rappelle par ailleurs que le Centre de lutte contre la discrimination ethnique est un organisme public indépendant qui fournit une assistance juridique à des particuliers victimes de discrimination fondée sur la religion ou la croyance, la race, la couleur de la peau ou l'origine nationale ou ethnique.
Le rapport détaille en outre un certain nombre de rapports, études et plans d'action relatifs respectivement à la politique gouvernementale à l'égard des minorités nationales, aux principes généraux de la politique norvégienne à l'égard du peuple sami, à la politique à l'égard des demandeurs d'asile et des réfugiés, au plan d'action pour combattre le racisme et la discrimination. Un chapitre est par ailleurs consacré à la discrimination raciale, à la violence à caractère raciste et aux attitudes racistes et discriminatoires. À cet égard, il fait valoir qu'une tendance positive peut être constatée depuis 20 à 30 ans en ce qui concerne les attitudes de la population majoritaire envers la minorité sami. Des attitudes négatives à l'égard des Samis subsistent cependant, reconnaît le rapport, qui indique que, dans certaines communautés locales, des cas de discrimination se sont produits contre les Samis. Le rapport fournit également des renseignements sur les mesures visant notamment à favoriser la compréhension multiculturelle dans les principaux secteurs des services, sur la loi sur la sécurité, sur l'évaluation des mesures officielles appliquées aux Roms, sur l'enregistrement des minorités nationales, sur les mesures concernant les jeunes d'origine immigrée ou les groupes autochtones et minoritaires, sur la diffusion d'idées racistes et les organisations racistes, sur la promotion de l'égalité de traitement devant les organes administrant la justice, sur les procédures d'instruction concernant les infractions pénales à caractère racial ainsi que sur le projet de nouvelle loi de la nationalité. Il présente en outre une évaluation de la matière d'enseignement «Connaissance de la religion chrétienne et éducation religieuse et morale» ainsi que diverses données et actions relatives à la discrimination dans le monde du travail ou sur le marché du logement, aux services de santé et au plan d'action contre l'excision, à l'éducation et à la culture.
Examen du rapport de la Norvège
M. Mario Jorge YUTZIS, Rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de la Norvège, s'est félicité que le seizième rapport de la Norvège répond aux observations formulées par le Comité lors du dernier examen. Il a mis l'accent sur l'influence particulière qu'ont jusqu'à présent tant la Conférence de Durban que les attentats du 11 septembre 2001 sur la façon dont les États appliquent la Convention. À cet égard, il s'est félicité de ce que la Norvège se conforme aux recommandations de Durban sur la participation des organisations non gouvernementales, notamment à la rédaction des rapports. Il s'est en outre félicité des informations concernant la place de la Convention dans le droit interne. Mais il s'est interrogé sur la signification de la mention de la «nécessité d'étendre l'application de la Convention». En ce qui concerne l'information sur la loi sur l'immigration, il s'en est félicité mais a toutefois indiqué qu'il fallait en attendre les résultats concrets. À cet égard, M. Yutzis a demandé comment la Norvège pense rendre plus efficace le processus d'examen de recours en matière d'immigration.
En ce qui concerne l'absence de statistiques sur les Samis et autres minorités ethniques ou linguistiques, il a attiré l'attention de la Norvège sur les recommandations de la Déclaration de Durban sur la nécessité de statistiques ventilées sur les groupes ethniques afin de mettre en œuvre la Convention. Par ailleurs, en ce qui concerne le plan d'action pour combattre le racisme, il a relevé la contradiction entre l'affirmation de l'efficacité de ce plan et le fait qu'il n'a pas encore fait l'objet d'évaluation.
Au sujet des organisations racistes, M. Yutzis s'est interrogé sur la pertinence de l'affirmation selon laquelle le problème ne vient pas tant des groupes racistes que des formes plus subtiles de discrimination qui sont pratiquées quotidiennement. Il est également revenu sur certains exemples de crimes racistes qui ont été par ailleurs sévèrement punis, et s'est interrogé sur les mesures prises pour mettre réellement en œuvre l'article 4 de la Convention relatif à l'interdiction de la diffusion d'idées racistes mais aussi des organisations racistes.
En ce qui concerne les Samis, dont il a relevé que le rapport reconnaît que des attitudes négatives à leur égard subsistent, il a demandé notamment si la nouvelle législation envisagée permettrait aux Samis d'avoir le contrôle sur leurs terres dans le Finmark et dans quelle mesure les Samis sont consultés au sujet de projets industriels ou autres sur leur territoire. Il s'est particulièrement félicité de la création d'un Fonds pour le peuple sami dont les ressources sont administrées par le parlement sami.
Dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001, de nouvelles dispositions ont été adoptées notamment en ce qui concerne l'expulsion de personnes suspectées de participation à des activités terroristes, a fait remarquer M. Yutzis, qui a demandé quelles étaient les autorités compétentes pour exécuter ces expulsions et si les décisions sont prises sur la base de faits ou seulement de soupçons.
Sur la question de l'éducation et de la religion, M. Yutzis a indiqué qu'il n'est pas personnellement en faveur d'une église d'État et a posé des questions sur les cours obligatoires de religion. Il a souligné les progrès qui ont été réalisés afin d'élargir les cas de dispense mais il a souhaité davantage d'information sur la structure et les programmes de ces cours.
La délégation a indiqué, répondant aux nombreuses questions de membres du Comité sur le projet de loi sur la région du Finnmark, qu'il concerne le droit à la terre et à l'eau et que l'objectif est de fournir une protection efficace des ressources naturelles de base des Samis. Le projet de loi propose un dispositif administratif fondé sur le principe de l'égalité des droits de tous les habitants du comté, sans distinction ethnique, qui a pour but d'encourager la coopération entre tous les groupes ethniques du Finnmark où cohabitent des Samis et des Norvégiens. La délégation a précisé que ce projet s'inscrit dans le cadre général de l'obligation d'instaurer des conditions favorables pour la préservation et le développement du peuple sami en tant que peuple autochtone. Le projet de loi prévoit la création d'une entité légale séparée, la «Régie du Finnmark», qui sera à la fois le propriétaire et le gestionnaire de la terre au nom des habitants tant Samis que Norvégiens qui seront représentés à égalité à son Conseil d'administration. Cet organe ne sera pas sous la supervision de l'État et entretiendra la même relation avec l'État que n'importe quel propriétaire terrien privé. Ce projet, qui devra être présenté en avril prochain, est considéré par le Gouvernement comme pleinement compatible avec les dispositions du droit international.
En réponse à d'autres questions sur le peuple sami, la délégation a précisé que les Samis n'ont pas souhaité faire partie de la liste des minorités nationales dans le cadre de la Convention européenne sur les minorités nationales car, en tant que peuple autochtone, ils bénéficient de droits plus importants en vertu d'autres conventions internationales auxquelles la Norvège est partie. S'agissant du nombre de Samis en Norvège, la délégation a indiqué qu'il n'y a pas de statistiques fiables dans la mesure où l'appartenance ethnique n'est pas recensée. De plus, le nombre dépend également de la définition utilisée ainsi que du fait que nombre de personnes concernées ne souhaitent pas être enregistrées comme appartenant à un groupe particulier. Les autorités entretiennent toutefois des consultations régulières avec les représentants de ces groupes et sont au fait de leurs demandes et de leurs besoins.
S'agissant de la langue sami et du fait qu'un nombre relativement peu élevé des personnes d'ascendance sami la parle, la délégation a expliqué que les Samis ont été victimes d'une longue et rigoureuse politique d'assimilation et de nombreuses violations des droits de l'homme qui les a notamment conduit à abandonner leur langue. Ces violations ont fait l'objet de regrets exprimés publiquement par le Roi de Norvège en 1997. La politique norvégienne sur les Samis en tant que peuple autochtone a radicalement changé au cours des dernières décennies et elle est à présent fondée sur le respect des droits de l'homme et de la diversité culturelle, a indiqué la délégation. Dans cette optique, des mesures ont été prises afin de protéger et de promouvoir la langue sami qui est composée de quatre dialectes principaux et qui a été reconnue de valeur égale à la langue norvégienne dans les six districts administratifs de langue sami. Au sujet des activités militaires qui ont lieu sur les zones de pâturage des rennes dans les comtés du Finnmark et de Troms, et les conflits qui en résultent, la délégation a indiqué que ces conflits ont fait l'objet de plusieurs procès mais aussi de négociations entre les autorités et les communautés concernées qui n'ont pas encore abouti. Toutefois, un dialogue permanent se poursuit et tient compte des droits des communautés. S'agissant des activités d'exploration pétrolière et gazière, la délégation a fait valoir que ces activités, comme tout autre projet, doivent être mises en œuvre de façon à respecter les droits et les régimes juridiques existants, y compris les droits des Samis. En outre, elle a informé le Comité qu'un débat public a lieu en Norvège sur la question de savoir si les Samis ont droit à une part des revenus du pétrole.
En ce qui concerne les organisations et activités racistes, la délégation a réitéré que les activités racistes sont rarement organisées et que, de ce fait, il ne serait pas très efficace d'interdire les organisations en tant que telles. C'est la raison pour laquelle on a préféré interdire les activités racistes organisées et introduire des sanctions civiles et pénales pour incitation ou participation à des activités racistes organisées et autres formes de discrimination collective. Ainsi, toutes les formes de discrimination collective et activités racistes seront interdites, que les auteurs appartiennent à une organisation formelle ou non. La délégation a par ailleurs précisé que la nouvelle législation contre la discrimination devrait être proposée au cours du premier semestre 2004.
Aux questions relatives à l'immigration, aux demandeurs d'asile et aux réfugiés, la délégation a d'abord expliqué les attributions du Conseil d'appel de l'immigration indiquant qu'il s'agit d'un organe indépendant et quasi-judiciaire qui traite des appels concernant les décisions de la Direction de l'immigration. Ces appels portent sur l'asile, la réunification familiale, les différents permis de séjour, les permis de travail, les permis d'installation, les refus d'entrée sur le territoire, les expulsions et les visas. Une quinzaine d'organisations non gouvernementales participent au Conseil qui compte un peu plus de 170 employés. Détaillant les différents modes d'intervention du Conseil, la délégation a précisé qu'une étude indépendante n'a trouvé aucun motif de critique de la façon dont les décisions sont prises. Les décisions sur des cas individuels ne peuvent être revues par le Gouvernement ou l'administration mais peut faire l'objet d'un appel devant les tribunaux ordinaires. En ce qui concerne les demandeurs d'asile déboutés mais ne pouvant être renvoyés chez eux, la délégation a précisé qu'ils peuvent bénéficier des services de santé et que les enfants ont le droit de suivre une scolarité primaire et secondaire. Dans certains cas, des permis de travail temporaires peuvent être accordés.
Pour ce qui est du climat général à l'égard des immigrés, la délégation a indiqué que le nombre de demandeurs d'asile a considérablement augmenté au cours des dernières années et la Norvège est un des pays qui reçoit le plus de réfugiés par rapport à sa population. Le nombre de demandeurs a augmenté de 75% entre 2000 et 2002. Cela pose bien sûr un certain nombre de problèmes, a déclaré la délégation, qui a reconnu que des incidents concernant des demandeurs d'asile ou des immigrés impliqués dans des crimes graves ont reçu une attention très forte de la part des médias. Toutefois, rien n'indique une augmentation du racisme en Norvège mais, au contraire, une sensibilité accrue de la société à la nécessité de combattre la discrimination et de promouvoir l'égalité des droits. La délégation a néanmoins reconnu que le principal problème demeure la discrimination dont les minorités ethniques sont victimes au quotidien, en particulier en ce qui concerne l'accès au logement et sur le marché de l'emploi. Tout en soulignant la difficulté qu'il y a à mesurer le racisme et la discrimination, la délégation a fait état de différentes mesures adoptées pour améliorer le système de surveillance et de rapport, notamment par le biais d'informations émanant d'organisations non gouvernementales, en particulier d'organisations représentant les minorités ethniques. En outre, elle a indiqué qu'une étude sur le niveau de vie des immigrés est en préparation qui se concentrera notamment sur les expériences de discrimination.
En ce qui concerne la lutte contre la discrimination en matière de logement, le Gouvernement a adopté une loi sur le logement qui contient des dispositions interdisant explicitement la discrimination dans le logement. Elle s'appliquera aussi bien aux propriétaires privés que publics et fera l'objet d'une information auprès du public.
Au nombre des mesures pour lutter contre le chômage parmi les immigrés, la délégation a d'abord expliqué les forts taux de chômage, notamment parmi les Africains, du fait du peu de qualification de ces personnes, de la méconnaissance de la langue et de la culture norvégiennes mais aussi de la discrimination qu'elles subissent. Tous les immigrés ont droit à la même aide et aux mêmes cours que le reste de la population, mais également à des programmes spécialement élaborés pour eux qui combinent formation professionnelle et apprentissage de la langue norvégienne. L'administration locale du travail porte une attention prioritaire aux immigrés et s'est donnée pour objectif de trouver du travail à 60% des immigrés au chômage. En outre, la délégation a attiré l'attention sur la nouvelle loi relative au programme d'induction pour les nouveaux arrivants qui offre le droit mais fait aussi obligation aux nouveaux arrivants de suivre ce programme basé sur leurs besoins individuels spécifiques, et est assorti d'un certain nombre d'avantages. Il est espéré que ces dispositions auront un effet significatif sur la situation des femmes sur le marché du travail. La délégation a également précisé la politique de la Norvège en matière d'immigration de main d'œuvre, assurant que le contrôle de l'immigration pour raison de travail s'est assoupli au cours des dernières années, notamment vis-à-vis des pays de l'Union européenne, de l'Islande ou du Liechtenstein.
Répondant à une question sur la discrimination dans les discothèques, restaurants ou bars, la délégation a précisé les diverses mesures réglementaires permettant de prévenir la discrimination et comment la police et les autorités municipales peuvent combattre la discrimination raciale dans ce genre d'établissements. Le plan national de lutte contre le racisme et la discrimination pour la période 2002-2006 s'attaque également à cette question et le Gouvernement va renforcer ses efforts notamment par le biais d'une proposition de loi visant à introduire la possibilité de retirer les licences d'alcool aux établissements pratiquant la discrimination ainsi que par la loi contre la discrimination raciale qui couvrira cette forme de discrimination.
Par ailleurs, la Norvège a pris des mesures pour mettre en œuvre la résolution 1373 du Conseil de sécurité relative à la lutte contre le terrorisme international, notamment par le biais de certains amendements à la loi sur les étrangers en ce qui concerne par exemple le refus d'entrée ou l'expulsion de personnes inculpées pour activités terroristes ou en cas de forts soupçons d'implication d'une personne dans ce genre d'activités. Cela n'affecte toutefois pas l'obligation de non-refoulement et l'expulsion ne doit pas être ordonnée si elle représente un châtiment disproportionné.
Au sujet de l'enseignement du christianisme à l'école et de l'éducation religieuse et morale, la délégation a précisé qu'à l'issue d'une évaluation de cet enseignement en 2001, le besoin d'une meilleure connaissance des différentes religions et cultures a été reconnu mais il a été décidé de maintenir cet enseignement comme obligatoire. Toutefois, selon la réglementation, un élève d'une autre confession peut être exempté de ce cours.
Pour ce qui est des différences de revenus entre différents groupes d'immigrés, la délégation a fait valoir que les immigrés d'Europe occidentale sont souvent des spécialistes très bien payés, souvent recrutés par l'industrie pétrolière ou d'autres entreprises qui ont besoin de spécialistes très qualifiés.
Répondant à des questions sur la formation de la police, la délégation a précisé que des cours sur la compréhension des cultures étrangères et les efforts pour lutter contre le racisme font partie du programme de base de tous les étudiants policiers à l'académie de police. Ils peuvent en outre suivre des cours facultatifs supplémentaires sur ces questions. En ce qui concerne le nombre d'étudiants policiers d'origine immigrée, le nombre de postulants cette année était de 73, contre 40 l'année dernière. Néanmoins, seuls sept de ces étudiants ont été acceptés.
S'agissant des questions posées sur les Roms, la délégation rendu compte des plans d'éducation à distance destinés aux enfants rom afin de s'adapter à leur style de vie nomade. Le Ministère de l'éducation a entamé un dialogue avec les organisations des peuples roms et romanis pour déterminer leur intérêt vis-à-vis de mesures spéciales, telles que l'enseignement à distance, mais pour l'instant aucun projet concret n'a encore été lancé. Par ailleurs, un réseau national de données est en cours de développement qui permettra d'offrir de nouvelles possibilités aux enfants nomades.
Des questions ayant été posées sur la question de la stérilisation forcée de femmes rom, la délégation a précisé qu'un groupe de travail est en voie d'achever un rapport sur l'indemnisation des victimes de ces pratiques qui ont touché 128 personnes entre 1934 et 1977, ainsi que 17 autres femmes dans cinq hôpitaux.
À la question de savoir si les Roms sont revenus à leur ancien style de vie après la fin de la politique d'assimilation, la délégation a indiqué que les styles de vie des Roms aujourd'hui sont très variés et il n'est pas évident que les personnes souhaitent être considérés comme Roms. En effet, bien qu'ils soient fiers de leur culture, beaucoup ne souhaitent pas être trop visibles par peur de discrimination ou d'abus. Le Gouvernement norvégien respecte la liberté de choix individuelle et le droit de chacun de créer sa propre identité et de décider s'il souhaite être considéré comme appartenant à une minorité nationale ou non.
La délégation a par ailleurs indiqué que la règle générale en droit civil est que la charge de la preuve incombe au plaignant. Toutefois, la Commission désignée pour examiner les moyens de renforcer les protections juridiques contre la discrimination a recommandé une charge partagée pour les affaires civiles relevant de la loi contre la discrimination ethnique. Cela signifie que lorsque les circonstances laissent à penser qu'il y a eu discrimination, celle-ci soit considérée comme prouvée sauf si la personne incriminée démontre qu'il n'y a pas eu discrimination. Dans le cadre du Code pénal, les dispositions relatives à la charge de la preuve ne changent pas mais la Commission recommande l'amendement de certaines sections afin de les rendre plus efficaces et en étendre le champ d'application, notamment pour ce qui concerne les propos racistes ou toute expression publique de racisme.
S'agissant des activités des organisations néo-nazies, les autorités norvégiennes sont très préoccupées de l'existence de tels éléments mais le problème majeur n'est pas les groupes racistes qui font par ailleurs l'objet d'une étroite surveillance, mais les formes plus subtiles de discrimination quotidienne, a réitéré la délégation. C'est pourquoi il a été décidé de privilégier l'interdiction des activités racistes organisées plutôt que l'interdiction des groupes. Des mesures importantes ont en outre été adoptées afin d'encourager les jeunes liés à ces groupes à s'en séparer, de prévenir le recrutement et de développer des moyens de réhabilitation de ces jeunes. La délégation a également informé des efforts redoublés visant à combattre le racisme par le biais de l'Internet.
Revenant sur la question de l'usage du concept de race, la délégation a estimé qu'un des pas importants pour combattre le racisme est de s'écarter de l'idée que l'humanité est divisée en différentes races avec non seulement des caractéristiques physiques différentes mais aussi des caractéristiques psychologiques et intellectuelles différentes. C'est pourquoi, le concept de race n'a pas été utilisé dans le Plan d'action ni dans aucune nouvelle loi ou amendements.
Observations préliminaires
M. Mario Jorge Yutzis s'est félicité des réponses détaillées à chacune des questions posées par les membres du Comité en particulier sur le problème des immigrés, sur le statut de la Convention, sur la discrimination résiduelle, sur les cours de religion, sur le chômage, sur la charge de la preuve, sur les Roms, sur les Samis ou encore sur l'Internet. Tout cela montre la détermination de la Norvège de poursuivre le dialogue avec le Comité mais aussi la vivacité du débat qui existe au sein de la société norvégienne et qui est un élément déterminant de tout progrès dans l'application de la Convention, a estimé M. Yutzis. Il a toutefois relevé que certains problèmes demeurent en ce qui concerne notamment l'intégration de la Convention dans le droit norvégien ou encore le projet de loi Finnmark qui est toujours en cours d'examen mais qui ne règle pas sur le fond le conflit qu'il peut y avoir entre le droit à l'autodétermination des Samis et l'exploitation des ressources notamment gazières sur leur territoire. Il a également exprimé sa préoccupation en ce qui concerne les recours en matière d'immigration, les expulsions en vertu de la loi sur le terrorisme même s'il n'y a eu aucun cas à ce jour, les problèmes liés à la discrimination résiduelle, l'éducation religieuse obligatoire ou encore sur le peu d'intérêt des juges et des policiers à suivre les cours de formation contre la discrimination. Il a par ailleurs encouragé la poursuite de la réflexion sur les concepts de race et d'ethnicité. Il s'est dit convaincu que la Norvège poursuit son chemin vers une application toujours améliorée de la Convention.
La délégation de la Norvège s'est félicitée de la matière à réflexion et de l'élan qu'a permis le dialogue très fructueux avec le Comité et qui sera très utile pour l'élaboration du prochain rapport.
Observations finales sur le rapport de la République tchèque
Aux termes de ses observations finales sur le rapport de la République tchèque, examiné les 7 et 8 août (compte rendu HR/CERD/03/38), le Comité pour l'élimination de discrimination raciale accueille avec satisfaction le rapport autocritique soumis par la République tchèque et les réponses constructives apportées aux questions posées. Il se félicite de la déclaration faite au titre de l'article 14 de la Convention relative à la compétence du Comité à examiner des communications individuelles ainsi qu'a l'acceptation de l'amendement à l'article 8 prévoyant le financement du Comité sur le budget ordinaire de l'Organisation des Nations Unies. Il prend note de l'amendement à l'article 10 de la Constitution tchèque selon lequel tous les traités internationaux ont un effet direct et l'emportent sur le droit interne. Il se félicite également des efforts législatifs en vue de donner effet aux dispositions de la Convention, en particulier dans le domaine de la protection des minorités, ainsi que pour renverser la charge de la preuve de la victime à l'accusé. En outre, le Comité se félicite de l'existence de nombreux organes consultatifs s'occupant des droits de l'homme et en particulier des droits des minorités nationales. Il apprécie grandement les nombreuses mesures concrètes, programmes et stratégies adoptés afin d'améliorer la situation des Roms et autres groupes marginalisés, y compris les réfugiés.
Le Comité, notant les efforts du Gouvernement afin d'élaborer une législation globale contre la discrimination, est néanmoins préoccupé des difficultés rencontrées dans ce processus et encourage l'État à achever ce processus et à en assurer l'application. Il l'exhorte également à incorporer dans cette nouvelle loi la définition de la discrimination telle qu'elle figure dans la Convention. Tout en notant les efforts déployés par l'État pour contrer la violence raciale et la discrimination, le Comité demeure préoccupé par la poursuite d'actes de violence raciste, l'incitation à la haine, la persistance de l'intolérance et d'une discrimination de fait, en particulier à l'égard des Roms. Le Comité exhorte en outre l'État à revoir sa législation afin de déclarer punissable toute participation à des organisations qui font la promotion et incitent à la discrimination raciale. Le Comité est également préoccupé par les allégations de mauvais traitement à motivation raciste, de protection inefficace et de discrimination contre les Roms de la part des personnes chargées de l'application des lois, en particulier la police. À cet égard, il souligne que des enquêtes promptes et impartiales sont d'une importance cruciale pour lutter contre les attitudes et pratiques discriminatoires. Il recommande à cet égard que les procédures d'enquête sur les plaintes concernant le travail de la police soient confiées à un organe indépendant de la police et du Ministère de l'intérieur.
Le Comité note les efforts visant à faciliter l'accès au marché de l'emploi aux personnnes ayant des difficultés à trouver du travail, y compris les Roms, les demandeurs d'asile et autres groupes marginalisés. Il exhorte toutefois l'État à poursuivre et intensifier ses programmes de réduction de la pauvreté et de l'emploi en faveur des Roms et à envisager la mise en place d'un système de prêts fonctionnels pour les secteurs socialement défavorisés, afin d'offrir une alternative à l'usure. Il l'encourage également à poursuivre ses recherches d'une solution au problème du logement et de trouver des solutions pour promouvoir l'intégration sociale des Roms. Il exhorte également le Gouvernement à améliorer la situation des Roms en ce qui concerne l'éducation à travers notamment leur intégration dans les écoles du système ordinaire.
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