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Communiqués de presse Organes conventionnels

LES EFFORTS DE l'ESTONIE POUR ELIMINER LA DISCRIMINATION FONDEE SUR LE SEXE DOIVENT INTEGRER LA SENSIBILISATION DES PUBLICS STRATEGIQUES

23 Janvier 2002



Comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes
23 janvier 2002
539 et 540èmes séances – matin et après-midi





L’écart entre le mécanisme institutionnel et juridique mis en oeuvre actuellement en faveur de la femme estonienne et le faible degré de sensibilisation des acteurs de la société aux problèmes sexospécifiques, notamment dans le domaine de l’emploi, a été constaté par plusieurs experts du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes qui examinaient aujourd’hui le rapport initial ainsi que les deuxième et troisième rapports de l’Estonie. L’Estonie, qui est devenue partie en 1991 à la Convention sur toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes présentait aujourd’hui pour la première fois les mesures prises dans divers domaines comme ceux de l’accès à l’emploi, aux soins de santé ou encore à l’éducation pour mettre en oeuvre les dispositions de la Convention

L’adhésion rapide de l’Estonie à la Convention peu après que le pays ait retrouvé son indépendance, en 1991, a été saluée par Mme Abaka, experte du Ghana et Présidente du Comité, qui a toutefois regretté les dix ans de retard dans la présentation du rapport initial, l’Etat Partie ayant ajouté que ce retard était pratiquement rattrapé avec la présentation combinée dès aujourd’hui des deux rapports suivants. Conformément à l’article 18 de la Convention, les Etats parties s’engagent à présenter un rapport sur les mesures prises pour lui donner effet dans l’année suivant son entrée en vigueur dans l’Etat Partie intéressé et puis tous les quatre ans ainsi qu’à la demande du Comité, dans des cas exceptionnel. Mme Marina Kaljuran, Sous-Secrétaire adjointe pour les affaires juridiques et consulaires de la République d’Estonie, a rappelé dans sa présentation que bien que le mouvement féministe estonien remonte à 1880, l’attention aux questions sexospécifiques s’était vraiment éveillée lors de la préparation de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes tenue à Pékin en 1995.

La représentante a précisé qu'au niveau institutionnel, deux projets ont été lancés en vue d'harmoniser la législation de l'Estonie, qui se prépare à l'intégration à l'Union européenne, avec les instruments normatifs de l'Union régissant l'égalité entre les hommes et les femmes concernant les salaires, l'accès à l'emploi et l'accès aux prestations sociales. Un plan d'action national pour l'emploi de 2002 qui se base sur les principes de la politique de l'Union européenne est actuellement mis en oeuvre. Sur le plan législatif, un projet de loi sur la parité attend d'être soumis au Parlement.

Félicitant également l'Estonie pour avoir nommé cinq femmes ministres, chiffre inégalé dans l'histoire du pays, certains experts se sont néanmoins préoccupés de la persistance de modèles de comportements stéréotypés qui freinent l'accès des femmes aux postes de décision et à la vie politique. Il semble que l'idéologie de l'égalité entre hommes et femmes imposée pendant l'époque soviétique a eu pour effet de déclencher une réaction contraire en Estonie au début des années 90, époque où l'on a tenté de revaloriser les rôles traditionnellement dévolus à chaque sexe. Malgré de bons résultats dans le domaine de l'éducation- le pourcentage total de femmes et d'hommes parmi les étudiants de troisième cycle étant respectivement de 51% et 41%- les salaires féminins demeurent en effet inférieurs d’un quart par rapport aux salaires masculins. Les femmes se trouvent en outre au bas de l’échelle de la pyramide de l’emploi et seul un nombre limité d’entre elles a accès aux postes de haut niveau.

Les experts ont demandé dans quelle mesure la population, mais également les juges et autres décideurs connaissaient le contenu de la Convention, celle-ci ayant été diffusée quatre ans après que l'Estonie l'ait ratifiée. Les experts ont demandé aux autorités estoniennes de renforcer les efforts de sensibilisation de la société et de publics stratégiques.

Le Comité entamera jeudi matin, 24 janvier à l’examen des deuxième et troisième rapports combinés de l’Uruguay.


RAPPORT INITIAL, DEUXIEME ET TROISIEME RAPPORTS PERIODIQUES COMBINES DE LA REPUBLIQUE DE L’ESTONIE

Rapport (CEDAW/C/EST/1 à 3)

La République d’Estonie a adhéré à la Convention des Nations Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes le 26 septembre 1991. Le 21 novembre de la même année, cette Convention est entrée en vigueur dans le pays. La Constitution de la République d’Estonie consacre l’égalité de tous devant la loi. L’expression «discrimination à l’égard des femmes» n’a pas été définie dans la législation estonienne et il n’y a pas non plus de définition juridique de la discrimination, directe ou indirecte, fondée sur le sexe. Cette question de la discrimination fondée sur le sexe a commencé à recevoir une attention accrue au cours des dernières années. En tant que traité international, la Convention est directement applicable par les tribunaux estoniens. Aucune requête ou pétition portant sur une discrimination fondée sur le sexe n’a été présentée mais le statut des femmes en Estonie a tendance à être inférieur au statut des hommes, en premier lieu sur le marché de l’emploi, au sein de la famille et au niveau de la prise de décisions. Deux projets ont par ailleurs été lancés dans le cadre du programme PHARE en vue d’harmoniser la législation estonienne avec les instruments normatifs de l’Union européenne régissant l’égalité entre les hommes et femmes concernant la rémunération, l’emploi et les assurances sociales de l’Etat. Un nouveau service, le Bureau de l’égalité entre hommes et femmes, a été créé par le Ministère des affaires sociales dont la principale activité consiste à coordonner l’incorporation de la perspective d’égalité entre les sexes dans les activités de développement social et politique.

La question de la violence à l’égard des femmes est un sujet relativement nouveau en Estonie et ne fait pas l’objet d’évaluations régulières ni de statistiques. Cependant selon une étude effectuée en 1995, 6% seulement des femmes victimes de viol ont déclaré l’incident à la police. Il n’existe pas d’institutions publiques qui traitent spécifiquement des cas de violence à l’égard des femmes. Dans les années 90, un homme risquait quatre fois plus qu’une femme d’être victime d’un meurtre. Et les femmes risquent trois fois moins que les hommes, et même davantage, d’être victimes de violences entraînant des blessures corporelles. Depuis 1998, les mesures tendant à promouvoir l’égalité entre hommes et femmes font partie intégrante du plan d’action du Gouvernement qui vise notamment l’obtention d’acquis nécessaires pour l’intégration de l’Estonie à l’Union européenne.

Un Comité interministériel a été créé en ce qui concerne l’égalité entre les sexes et plusieurs programmes et projets ont été menés visant à renforcer la situation des femmes. Les femmes qui travaillent ont droit à une protection spéciale, notamment au congé parental et à des horaires de travail souples. La réglementation concernant les prestations est, à beaucoup d’égards, encore très insuffisante et a pour effet de désavantager les femmes par rapport aux hommes sur le marché du travail. Malgré le manque de statistiques officielles fiables sur les rôles stéréotypés par sexe, il semble que l’idéologie de l’égalité entre hommes et femmes imposée pendant l’ère soviétique a eu pour effet de déclencher une réaction contraire en Estonie au début des anées 90, où l’on a tenté de remettre en valeur les rôles traditionnellement dévolus à chaque sexe.

Des études effectuées entre 1995 et 1998 font apparaître une société estonienne moderne centrée sur les hommes et prisant plus les valeurs masculines que les qualités féminines. La compréhension et l’acceptation des droits des femmes deviennent toutefois un phénomène de société. Les mentalités concernant la cohabitation et les enfants nés hors mariage ont aussi évolué.

L’activité d’une personne qui se prostitue n’est pas en soi criminelle. Le recours aux services d’une personne prostituée n’est pas non plus passible de sanctions. Selon une étude, 70 à 84% des femmes qui se prostituent le font pour des raisons économiques. La proportion des femmes dans les partis politiques est relativement élevée et elles sont relativement nombreuses sur les listes de candidats aux élections, bien que le plus souvent reléguées au bas des listes. L’accroissement du nombre de femmes élues députées révèle une certaine évolution de tendance. Depuis que l’Estonie a retrouvé son indépendance, tous les gouvernements ont comporté des femmes ministres. Selon une enquête menée en 1995 en Estonie, la plupart des indicateurs en matière d’éducation montraient que les femmes avaient, d’une façon générale, une meilleure formation que les hommes. En 1997, le pourcentage total de femmes et d’hommes parmi les étudiants qui suivaient un enseignement de troisième cycle était respectivement de 51% et 41%. D’une manière générale, l’enseignement dans les écoles estoniennes est mixte. Aucune analyse n’a été faite du matériel pédagogique du point de vue des stéréotypes de rôle selon le sexe. Tant dans les écoles professionnelles que dans les écoles techniques secondaires, on peut constater une nette ségrégation selon le sexe dans les diverses activités: les garçons comme les filles choisissent des activités dans lesquelles les élèves de leur sexe sont en majorité. La ségrégation selon le sexe dans l’enseignement supérieur a entraîné une ségrégation du même type dans les professions scientifiques. Les femmes sont les plus nombreuses à étudier les sciences humaines et les hommes prédominent dans les sciences naturelles et techniques.

Une analyse de la main-d’œuvre selon des critères sexospécifiques montre que les hommes et les femmes évoluent dans des secteurs différents d’activité, ce qui veut dire qu’en Estonie, les schémas traditionnels d’activité réputés convenir aux femmes ou aux hommes se sont renforcés.
Dans le groupe d’âge des 35 à 54 ans, les taux d’emploi des hommes et des femmes sont plus ou moins équivalents et c’est dans ce groupe qu’ils sont les plus élevés. Dans le groupe d’âge avancé, ce taux est nettement en retrait pour les femmes. Au début des années 90, il n’y avait guère de différence entre le taux de chômage des hommes et celui des femmes. Toutefois, depuis 1995, ce taux est légèrement plus élevé chez les hommes. En 1999, un nouveau plan de développement pour l’emploi et la formation a été élaboré pour la période 2000-2003. L’une des priorités énoncées dans ce plan est de garantir l’égalité des chances des hommes et des femmes sur le marché du travail. Le projet de loi sur l’égalité entre femmes et hommes comportera une disposition interdisant la discrimination en matière d’emploi en ce qui concerne l’embauche, la fixation des salaires, les conditions de travail et les congés. La modification de la loi sur les salaires garantira en outre l’égalité de rémunération entre hommes et femmes pour un même travail ou un travail de valeur égale.


Depuis 1991, le nombre de cas de maladies sexuellement transmissibles est en augmentation. Entre 1988 et 1998, avec l’expansion de l’usage des drogues, le nombre de personnes infectées par le VIH/sida a décuplé. Pour ce qui est de la maternité, celle-ci en Estonie est protégée conformément aux normes européennes. L’inégalité de la répartition des revenus selon le sexe du chef de famille est évidente. En 1997, le revenu moyen des ménages dont le chef de famille était une femme était inférieur de 14% au revenu des ménages avec un homme pour chef de famille. D’une manière générale, la situation économique d’un grand nombre de familles estoniennes s’est dégradée pendant les années 90 par comparaison avec les années 80. En raison de la baisse de la production dans les zones agricoles, le taux de chômage ne cesse de croître dans les zones rurales. Les disparités à cet égard selon le sexe sont également plus fortes dans les zones rurales que dans les villes. Les femmes prennent cependant une part plus active au développement du milieu de vie dans ces régions que dans les villes.


Présentation de l’Etat Partie


Mme MARINA KALJURAND, Sous-Secrétaire adjointe pour les affaires juridiques et consulaires au Ministère des affaires étrangères de l’Estonie, a exprimé ses regrets au sujet du retard de son pays à soumettre son premier rapport au titre de l'article 18 de la Convention. Rappelant la création de nouvelles organisations de femmes après le retour du pays à l’indépendance en 1991, elle a indiqué que les problèmes sexospécifiques ont réellement commencé à être abordés lors de la préparation de la quatrième Conférence mondiale sur les femmes qui s’est tenue à Pékin en 1995. Le plan d'action national pour l'emploi de 2002, qui est actuellement mis en oeuvre, est fondé sur les principes de la politique de l'Union européenne en matière d'emploi, incluant notamment l'intégration de la problématique homme/femme, l'augmentation de l'emploi pour les femmes, les moyens pour permettre de concilier le travail et la vie de famille, le soutien aux femmes entrepreneurs et l'amélioration de la compétitivité de leurs entreprises. Le plan national du Gouvernement pour l'adoption des acquis nécessaires à l'intégration dans l'Union européenne contient d'autre part des dispositions sur l'égalité du salaire entre hommes et femmes, de traitement sur le lieu du travail et dans l'accès à l'emploi. Le plan national relatif à la parité hommes/femmes contient aussi des mesures sur la formation des fonctionnaires et la diffusion plus large d'informations sur la sexospécificité.

Le droit des femmes a été consolidé par plusieurs lois estoniennes. Les analyses des lois nationales ont montré que celles-ci n'ont pas le potentiel pour qu'un usage discriminatoire en soit fait. Une étape essentielle en la matière, a poursuivi la représentante, a été le projet de loi sur la parité qui a été élaborée par le Ministère des affaires sociales en 2001. Outre le fait qu'il clarifie la terminologie au regard de la problématique hommes-femmes et interdit explicitement la discrimination directe et prévoit des mesures contre la discrimination indirecte, ce projet de loi oblige les autorités et les employeurs à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes. Ce projet a été soumis au Parlement à la fin 2001 et doit être prochainement examiné.


Le Bureau sur l'égalité entre les sexes coordonne l’intégration de la problématique homme-femme dans les politiques nationales et les programmes. Selon le plan d'action pour l'emploi pour la période 2001-2003, la priorité est accordée aux politiques visant à garantir des chances égales pour les femmes et les hommes. Une attention continue a également été portée aux mesures visant à accroître la prise de conscience publique sur ces problèmes. En 1997, une formation de fonctionnaires a démarré, visant à établir un réseau de spécialistes formés aux problèmes de sexospécificité pour l'amélioration de la capacité administrative eu égard à l'intégration de la problématique homme/femme. La représentante a par ailleurs jugé encourageant l'engagement de la société civile, particulièrement des ONG, dans les affaires de parité homme-femmes. La participation des femmes en général au processus de prise de décisions pourrait être plus forte, surtout dans l'économie, a indiqué la représentante. Un changement progressif a cependant été constaté. Le rôle des femmes est en effet aujourd'hui un sujet de discussion dans les médias, alors qu'il était absent il y a cinq ans. La volonté politique dans ce domaine s'est nettement renforcée, l’action pour l'égalité hommes/femmes étant aujourd'hui incorporée au programme de plusieurs partis politiques. On a relevé lors des dernières élections au Parlement et au niveau local en 1999 une augmentation de la représentation de femmes. 13% des sièges avaient été remportés par des femmes aux élections législatives de 1992, et 12% en 1995. Le chiffre est passé à 18% en 1999. La situation est meilleure au niveau local où les femmes ont remporté 26% des sièges du Conseil municipal. Alors que la proportion de femmes a été insignifiante au cours de la période suivant l'indépendance, le nouveau gouvernement qui a été formé ces derniers jours a le plus grand nombre de femmes de son histoire, qui ont cinq portefeuilles, ceux du Ministère des affaires étrangères, de la Culture, des affaires sociales, de l'éducation et des sciences, de l'économie et des transports.

Le taux d’emploi dans la tranche d’âge 15-69 ans est passé de 71% en 1990 à 54% en 2000 chez les femmes et de 82% à 63% chez les hommes. Alors qu’il n’existait pas de différence marquée du taux de chômage entre les hommes et les femmes dans les années 1990, à partir de 1995 ce taux était un peu plus élevé chez les hommes que chez les femmes, ces dernières acceptant plus facilement de nouveaux emplois même si les salaires sont inférieurs à leurs attentes. Une autre explication tient au fait que les femmes changent moins souvent d’emploi. Le salaire féminin est néanmoins inférieur d’un quart par rapport au salaire masculin. Les effets de ces différences de salaire, les critères d’évaluation des salaires et des emplois n’ont pas encore fait l’objet d’une analyse tenant compte de la problématique homme/femme.

Le marché de l’emploi estonien laisse apparaître une forte ségrégation verticale et horizontale. La division du travail par sexe montre que les femmes et les hommes mènent des activités distinctes, perpétuant ainsi des schémas traditionnels de répartition du travail. 54% des hommes travaillent dans le secteur primaire et secondaire alors que près de 70% de femmes travaillent dans le secteur des services. La majorité des femmes se trouve au bas de l’échelle de la pyramide de l’emploi tandis que seul un nombre limité de femmes a accès aux postes de haut niveau. La restructuration de l’économie et la baisse du nombre d’emplois au début des années 90 ont mené à une augmentation des emplois à mi-temps, obligeant les femmes à s’orienter vers le secteur informel. Dans le nouveau plan pour l’emploi l’une des composantes porte sur la promotion de l’égalité des chances par le biais de mesures visant à accroître les connaissances qu’ont les femmes de leur droit, à renforcer la confiance en leur potentiel et à former des partenariats entre les autorités locales, les partenaires sociaux et les réseaux de femmes. Le Ministère des affaires sociales élabore actuellement des instruments, mesures et programmes spécifiques visant à faciliter la création d’entreprises par les femmes, en particulier dans les zones rurales. En 2002, l’on a recensé un petit nombre de projets financés par des sources financières étrangères visant à promouvoir la création d’entreprises par les femmes rurales.

La santé de la femme et de l’enfant s’est considérablement améliorée en raison notamment de meilleurs soins de santé en général mais également de meilleurs soins prénataux. En 1999 a été lancé le programme concernant la santé reproductive pour 2000-2009 dont l’un des principaux objectifs une baisse constante des taux de mortalité infantile et maternelle. L’avortement est légal. Les allocations sociales sont versées à la personne qui élève les enfants, qu’il s’agisse de la mère ou du père. Les hommes ont droit à un congé de paternité de 14 jours ouvrables.

Un projet de collaboration entre la police et les travailleurs sociaux a été élaboré pour venir en aide aux femmes victimes de violence. Un manuel pour les victimes de viol a été distribué par le biais des associations de femmes. Un plan d’action du gouvernement pour alléger et prévenir la violence à l’égard des femmes est en cours d’élaboration et prévoit des activités dans 5 domaines stratégiques: sensibilisation du public, amélioration de la législation existante, une plus grande capacité d’intervention de la police dans des cas de violence domestique, mise en oeuvre d’approches centrées sur les victimes par le biais d’une aide médicale et psychologique immédiate et augmentation de la coopération interinstitutions par un plan d’action conjoint et l’instauration de réseaux.


Questions des experts

Mme CHARLOTTE ABAKA, experte du Ghana et Présidente du Comité, a fait observer que le rapport ne respecte que partiellement les directives générales fixées par le Comité. Le rapport doit en effet se présenter en deux parties: la première sur le territoire et la population du pays et la seconde doit donner des indicateurs économiques et socioculturels. Elle a salué l'Etat Partie pour avoir ratifié la Convention tout de suite après le retour à l’indépendance et sur le fait que les dispositions de la Convention peuvent être invoquées directement devant les tribunaux estoniens. Elle a cependant jugé regrettable que le rapport initial ait pris 10 ans de retard et a indiqué que le rapport ne fait aucune référence aux recommandations générales du Comité qui sont des interprétations élargies de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Mme HANNA BEATE SHOPP-SCHILLING, experte de l'Allemagne, a demandé ce qui est fait pour faire connaître la Convention auprès du public. Vous adoptez un ensemble de nouvelles lois en faveur des droits de l'homme et la société ne comprend peut-être pas toutes ces lois, a-t-elle expliqué. Le pas suivant, après l'adoption de ces lois, serait d'éduquer le public. Dans certains cas, d'autre part, en matière de statistiques, des définitions de catégories sont peut-être à revoir, notamment pour la violence à l'égard des femmes. Mme FUMIKO SAIGA, experte du Japon, a espéré que les ONG estoniennes aideraient à faire connaître la Convention dans le pays. M. GORAN MELANDER, expert de Suède, a fait remarquer qu'il n'y a pas de définition claire de la discrimination à l'égard des femmes à moins de considérer que la Convention est intégrée dans le droit interne.

Mme MARIA REGINA TAVARES DA SILVA, experte du Portugal, a jugé que la présence de femmes à des postes ministériels est un bon signe. Concernant l'adoption de la loi sur la parité entre les sexes par le Parlement, elle a espéré que ce texte serait adopté prochainement. Mme SCHOPP-SCHILING, a souhaité savoir, à propos de la loi sur la parité, si elle prévoit des sanctions contre les auteurs des violations ainsi que des recours. S'est-elle inspirée de la Convention? Couvre-t-elle le secteur privé et public? L'experte a aussi demandé si le Gouvernement prévoit de signer le Protocole facultatif. Sur la loi sur la publicité, y a-t-il eu des plaintes à propos de stéréotypes sexuels? Et y a-t-il d'autre part des règles de procédure au sein du Gouvernement pour vérifier la conformité de tout programme sur la parité?

Mme SAVITRI GOONESEKERE, experte du Sri Lanka, a félicité l’Estonie pour ses réalisations même si l’élaboration des rapports a pris du retard. Elle a souligné le caractère essentiel de la loi sur l’égalité des chances compte tenu du fait que la Constitution ne comporte pas de définition juridique de la discrimination fondée sur le sexe. De plus, la procédure de recours prévue n’est pas claire, en particulier lorsque cela touche aux acteurs non étatiques qui violent ces droits. Par ailleurs, les dispositions de la législation ne couvrent pas tous les actes de violence à l’égard des femmes. Mme NAELA GABR, experte de l’Egypte, compte tenu du fait que le pays a recouvré son indépendance récemment, a félicité la délégation pour les accomplissements des dix dernières années tout en souhaitant qu’il soit fait davantage. Vous suivez les directives des instruments de l’Union européenne et avez signé les conventions de l’OIT mais des lacunes subsistent et les femmes doivent encore être éduquées à leurs droits pour bénéficier des instruments juridiques existants. L’experte a demandé des précisions au sujet du partage des biens en cas de divorce.

Mme HEISOO SHIN, experte de la République de Corée, a, elle aussi voulu savoir si la Convention n’a jamais été utilisée devant les tribunaux estoniens. Dans la négative, cela signifie-t-il que les tribunaux ne sont pas au fait de son existence. Elle a demandé si le fait de n’avoir pas enregistré de plaintes venait du fait que les femmes n’étaient pas sensibilisées à la question et peut-être ne connaissaient pas l’existence du médiateur.

Mme SCHÖPP-SCHILLING et Mme SHIN ont demandé un complément d’informations sur le Bureau de la parité, notamment sur son budget, ses effectifs et son fonctionnement. Dans quelle mesure l’Institut de recherche sur les femmes est financé par le Gouvernement et dans quelle mesure fait-on appel à cet organe? Mme ROSARIO MANALO, experte des Philippines, a demandé dans quelle mesure le Bureau pour l’égalité a été efficace pour suivre les lois et politiques en matière de parité et comment l’égalité a progressé. Mme SHIN a demandé quel était le niveau de priorité accordé à la promotion de la femme dans le cadre du plan national. Elle a suggéré à l’Etat Partie d’inclure la lutte contre la violence à l’égard des femmes dans sa politique.

Mme SCHÖPP-SCHILLING a souligné l’insuffisance de l’impact des mesures temporaires spéciales en faveur des femmes. M. MELANDER a relevé le très faible nombre de cas renvoyés devant les tribunaux en raison de discrimination qui peut traduire l’absence d’une prise de conscience ou le coût élevé des procédures judiciaires. Est-il question de fournir une aide financière aux femmes victimes de discrimination? Mme SHIN s’est demandé si l’Etat partie comprenait bien la nature de l’article 4 de la Convention sur les mesures temporaires spéciales.

Mme SJAMSIAH ACHMAD, experte de l’Indonésie, a fait part de la préoccupation que lui inspire la persistance de comportements stéréotypés dans l’ensemble du pays. Pour les éliminer, il faut élaborer des stratégies précises et de longue haleine. Elle a constaté que l’une des mesures stratégiques mise en place est la loi sur la parité mais elle s’est dite préoccupée par son contenu. Quels en sont les principes, a-t-elle demandé. Outre les dispositions législatives, il existe également une structure institutionnelle nationale pour assurer la mise en oeuvre de la Convention. Ce mécanisme doit permettre de coordonner les actions aux niveaux central, régional et local ainsi que les activités intersectorielles entre ministères. Il est essentiel que le cadre conceptuel des politiques tienne compte de votre capacité de traduire dans la réalité les dispositions juridiques adoptées. L’experte s’est dite préoccupée par les mécanismes institutionnels mais également par le niveau de connaissance des acteurs de la société. Elle a demandé quelles étaient les ressources allouées au Plan d’action pour les femmes.

Mme TAVARES DA SILVA, a estimé que la faible participation des femmes aux efforts visant à modifier les modèles de comportement traditionnels était le principal problème. Mme MAVIVI MYAKAYAKA-MANZINI, experte de l’Afrique du Sud, a relevé que les femmes en dépit de leur niveau d’éducation élevé continuent de jouer un rôle subordonné. Elle a demandé des informations sur les pratiques religieuses ou traditionnelles qui entravent la promotion de la femme. Le contenu des manuels scolaires a–t-il été modifié. Y-a-t-il des efforts en direction des médias. Mme SCHÖPP-SCHILLING s’est dite frappée par le fait que des personnes éduquées ayant des revenus élevés ont une attitude négative à l’égard des femmes. En théorie pourtant, les personnes éduquées sont des alliés naturels des femmes. Par ailleurs, que fait le Gouvernement pour pallier au défaut de paiement des pensions alimentaires que doivent verser les pères?

M. MELANDER a demandé des précisions au sujet de la prostitution. Il semble qu’un trafic se fait avec les pays scandinaves. Une préoccupation reprise par l’experte des Philippines qui a relevé l’absence d’information à ce sujet. Mme FRANÇOISE GASPARD, experte de la France, a félicité le gouvernement pour son rapport qui témoigne d’une prise en considération déterminée de la situation de la femme estonienne. Elle s’est réjouie de la nomination de 5 femmes au Gouvernement notamment à l’économie et aux affaires étrangères. La présence des femmes dans les lieux de prise de décisions est un indice de l’évolution de leur situation et constitue un moyen de briser les stéréotypes. Le fait que les femmes sont mieux acceptées sur les listes électorales est un autre fait encourageant. Elle s’est cependant demandé pourquoi les femmes diplômées se désintéressaient des questions politiques. Elle a voulu savoir quelle est la place des femmes aux fonctions exécutives dans les conseils municipaux. Disposez-vous de statistiques sur ce sujet?

Mme SCHOPP-SCHILLING s'est réjouie que sur 14 postes ministériels, 5 soient occupés par des femmes. Elle a demandé des informations sur le soutien financier apporté aux ONG de femmes. Mme DA SILVA a demandé si les femmes ne veulent réellement pas entrer en politique. Pourquoi ce manque d'intérêt ou est-ce une expression déguisée de la difficulté qu'ont les femmes à avoir accès à la vie politique? C'est une contradiction avec le fait que 5 ministres sont des femmes. Mme MYAKAYAKA-MANZINI a demandé si le système électoral en place va dans le sens de la promotion des femmes, y a-t-il représentation proportionnelle? Allez-vous profiter des avances que vous avez faites ces derniers jours au niveau de l'exécutif pour essayer de faire augmenter le nombre de femmes au Parlement et comment allez-vous procéder?

Mme IVANKA CORTI, experte de l'Italie, a félicité la représentante du gouvernement d'Estonie pour son rapport exhaustif. Concernant la nationalité, quelle est la procédure pour obtenir la nationalité estonienne? Avez-vous des précisions sur les apatrides? Concernant les femmes, quels sont les problèmes posés par les mariages mixtes? S'agissant du problème posé par les minorités, quels sont les droits qui leur sont reconnus, comment intégrez-vous les citoyens étrangers? Mme SCHOPP-SCHILLING a souhaité savoir s'il existe une différence entre hommes et femmes en ce qui concerne les droits de ceux qui n’ont pas la nationalité estonienne? Y a-t-il une différence entre les hommes et les femmes apatrides ? Les demandeurs de la nationalité doivent-ils suivre obligatoirement des cours de langue et dans l’organisation de ces cours est-il tenu compte des contraintes familiales que subissent les femmes?

Mme SAIGA a noté une discrimination déguisée en cas de mariage mixte, lorsque le mari est étranger. Mme MANALO, a félicité la délégation estonienne eu égard à l'éducation. Les stéréotypes existent toujours et aucune réforme du programme ne semble mise en oeuvre, pourquoi? Quelles sont les incitations prévues par le Gouvernement estonien pour les femmes qui étudient dans des domaines qui ne leur sont traditionnellement pas destinés? Il y a un pourcentage très faible de femmes titulaires de chaires. Que pense faire le Gouvernement à cet égard?

Mme AYSE FERIDE ACAR, experte de la Turquie, a été déçue de constater que le niveau élevé d’éducation ne se traduit pas par des meilleures conditions d’emploi et par un meilleur accès aux postes politiques élevés. L’experte a demandé aux représentantes de l’Estonie de procéder à un réexamen de ces questions. Elle a dit ne pas comprendre les inégalités au niveau du professorat. Les femmes sont-elles intégrées pleinement au niveau de l’enseignement supérieur? Mme SCHÖPP-SCHILLING a demandé dans quelle mesure la prévalence des femmes dans le secteur mal rémunéré des services, héritage de l’ère soviétique, inquiète le gouvernement. Prévoit-il des cours de formation et de recyclage? Est-ce que le congé parental est accompagné du droit de retour au poste et/ou de celui à recevoir une formation? Quelle est la situation des femmes âgées qui semblent souffrir de la pauvreté en raison de retraites très faibles?

Mme ABAKA, demandant des précisions au sujet de la loi sur l’avortement, a signalé que l’interruption de grossesse ne fait pas partie des droits en matière de reproduction couverts par la Convention. Selon votre rapport, il semblerait que l’avortement soit une forme de contraception. Elle a demandé à l’Etat Partie de mettre en oeuvre des programmes agressifs intégrant l’homme dans les politiques de planification familiale. D’autres sources indiquent un taux de suicide élevé aussi bien chez les femmes que chez les hommes. Y-a-t-il eu des recherches sur les causes de cette situation? Relevant le nombre élevé de femmes médecins, elle a demandé quelle était leur rémunération par rapport à d’autres professions. Elle a souhaité savoir dans quelles disciplines scientifiques travaillent les femmes.

Mme MARIA YOLANDA FERRER GOMEZ, experte de Cuba, a jugé inconcevable qu’il y ait 98 avortements pour 100 naissances et a demandé à l’Etat Partie de renforcer ses programmes d’éducation sexuelle. Mme GASPARD a demandé des précisions sur la loi sur l’avortement et sur les causes de ce taux élevé. Mme CORTI a demandé quelles étaient les différences entre hôpitaux privés et publics et comment la population était en mesure de payer les frais d’hospitalisation dans le privé. Que fait l’Etat en matière de prévention du VIH/sida? L’experte a également demandé plus d’information sur la consommation de stupéfiants des femmes.

Mme SCHOPP-SCHILLING a indiqué qu'un tiers de la population estonienne vit dans les zones rurales avec un nombre plus important de femmes que d'hommes. Il manque une approche d'ensemble, globale sur ce problème. Quand le Gouvernement va-t-il aborder cette question des femmes rurales afin que l'on ait dans le prochain rapport des chiffres plus précis? Il semble y avoir un nombre important de femmes qui travaillent dans les exploitations agricoles en tant que membres de la famille non rétribués. Est-ce que le Gouvernement envisage de prendre en considération le travail domestique non rémunéré? Concernant la féminisation du corps des magistrats, M. MELANDER a demandé si cela ne s'expliquait pas par le fait qu'il s'agit d'une profession peu rémunératrice. Mme EMNA AOUIJ, experte de Tunisie, a aussi relevé le nombre important de femmes magistrates. Elle s'est demandé si l'on pouvait utiliser ces femmes pour faire avancer la promotion de la femme. Elle s'est dite préoccupée par la chute du nombre de mariages et l'augmentation des unions libres alors que le nombre de divorces est très élevé. Le divorce est-il vraiment facile à obtenir? Mme GOONESEKERE a félicité la délégation estonienne pour les résultats en matière d'éducation. Elle a demandé des informations supplémentaires concernant la légalité des mariages d'enfants.





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