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Communiqués de presse Organes des Nations Unies

LES EFFETS DE LA MONDIALISATION SUR LE DEVELOPPEMENT DES FEMMES DEVANT LA COMMISSION DE LA CONDITION DE LA FEMME

06 Mars 2002



Commission de la condition de la femme
5ème séance - matin
6 mars 2002
 
 
L’impact de la mondialisation sur les femmes, considérée comme une entrave plus que comme une opportunité, s’est trouvé ce matin au coeur des travaux de la quarante-sixième session de la Commission de la condition de la femme.  Au troisième jour de sa session, la Commission a entendu trois experts sur le thème «Elimination de la pauvreté, notamment grâce au renforcement du pouvoir des femmes tout au long de leur cycle de vie, à l’heure de la mondialisation».  Ces experts, ainsi que plusieurs représentants des Etats Membres, se sont également inquiétés de la protection des fillettes et adolescentes, s’accordant sur la nécessité de consacrer davantage de ressources à leur éducation pour mieux préserver leurs droits et leur avenir.
 La mondialisation favorise un développement à deux vitesses au bénéfice des pays les plus compétitifs et, en raison de ses effets négatifs sur les dépenses publiques, de santé et d’éducation notamment, elle affecte surtout les femmes qui, plus que les hommes, ont besoin des programmes sociaux.  Mme Gaudence Rwamaheke, Directrice au Ministère de l’action sociale et de la promotion de la femme du Burundi, a ainsi expliqué que ce sont les femmes qui supportent les coûts sociaux des programmes d’ajustement structurel.  Pour elle, le nouvel ordre économique mondial prive donc les femmes d’opportunités leur permettant des réalisations personnelles.  Illustrant à son tour l’ambivalence de la mondialisation, une autre experte, Mme Savitri Bisnath, de Trinité-et-Tobago, a cité l’exemple de l’Asie du Sud-Est: certains groupes de jeunes femmes et de travailleuses rurales migrantes y ont trouvé des emplois dans l’industrie destinée à l’exportation, tandis que d’autres dans les entreprises publiques ou les industries nationales ont perdu le leur à la suite de programmes de restructuration et de libéralisation des termes de l’échange.  De plus, a-t-elle remarqué, des gains positifs en termes d’emploi sont souvent accompagnés par l’affaiblissement des systèmes de protection sociale.
 En d’autres termes, un consensus «officiel» existe pour accorder la priorité à l’accroissement des forces du marché, sans qu’on ait à ce jour prouvé que l’ouverture systématique des marchés réduisait les niveaux de pauvreté ou améliorait la qualité de vie des femmes et des fillettes des pays en développement.  Pour autant, la représentante du Ghana a noté que les experts n’avaient rien dit de ce que les gouvernements pourraient bien faire pour tirer parti de la mondialisation ou, tout au moins, en atténuer les effets, notamment sur les femmes rurales.  Mais pour M. Jan Vandemoortele, Conseiller du Programme des Nations Unies pour le développement(PNUD), qui considère que les gouvernements ne pouvaient pas s’abriter derrière les méfaits de la mondialisation pour s’abstenir d’agir, la question des ressources n’est pas la seule en cause.  Pour lui, on ne peut pas mettre les droits de côté en attendant le décollage économique.  A cet égard, les droits des fillettes et des adolescentes à la protection et à l’éducation a été évoqué à de nombreuses reprises.  Pour Mme Rwamaheke, il faut renforcer le pouvoir des femmes dès leur petite enfance.  En outre, la lutte contre la pauvreté contribue à lutter contre la violence sur les fillettes et les adolescentes, particulièrement exposées et vulnérables au VIH/sida du fait des conflits et des viols: les taux d’infection des jeunes filles par le VIH/sida, qui augmentent, entraînent un regain d’abandon scolaire.
 Le dialogue qui a suivi avec les délégations a insisté notamment sur le microcrédit et ses limites, le lien entre la parité et la réduction de la pauvreté, la corrélation entre libertés, éducation et prospérité, le rôle des mécanismes institutionnels dans la lutte cotre la pauvreté, la situation de la femme rurale dans le contexte de la mondialisation, et la multiplicité des discriminations à l’égard des femmes.  Des propositions ont été formulées pour la création d’un fonds de solidarité internationale et de systèmes de contrôle des abus de la mondialisation par l’Organisation mondiale du commerce.  Dans ce cadre, outre la Ministre des affaires sociales du Sénégal, certaines délégations et organisations non gouvernementales sont intervenues.
 La Commission de la condition de la femme poursuivra ses travaux, cet après-midi à 15 heures avec une table ronde intitulée «Gestion de l’environnement et atténuation des catastrophes naturelles : le point de vue des femmes».
 
SUIVI DE LA QUATRIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR LES FEMMES ET DE LA SESSION EXTRAORDINAIRE DE L'ASSEMBLÉE GÉNÉRALE INTITULÉE "LES FEMMES EN L'AN 2000: ÉGALITÉ ENTRE LES SEXES, DÉVELOPPEMENT ET PAIX POUR LE XXIe SIÈCLE"
 Questions thématiques soumises à la Commission de la condition de la femme (E/CN.6/2002/9)
 Ce rapport du Secrétaire général porte sur la gestion de l’environnement et l’atténuation des catastrophes naturelles: le point de vue des femmes ainsi que sur l’élimination de la pauvreté, notamment grâce au renforcement du pouvoir d’action des femmes tout au long de leur cycle de vie à l’heure de la mondialisation.
 Après avoir dressé le bilan des mesures prises par l’ONU en matière de gestion de l’environnement et de prévention des catastrophes naturelles et des initiatives prises par l’Organisation en vue d’éliminer la pauvreté des femmes, le rapport propose une série de recommandations à l’attention des gouvernements et des organisations internationales.  Il est notamment recommandé aux gouvernements de faire de la gestion rationnelle de l’environnement, de la gestion des risques et de l’égalité des sexes des éléments à part entière du développement durable et vice-versa; de créer avec la participation des groupes locaux et de femmes des stratégies exhaustives de développement rural et urbain; de dresser la liste des situations d’urgence; de prendre en compte les besoins des femmes lors de l’allocation de ressources affectées à la gestion environnementale; et de promouvoir les interventions susceptibles de réduire la vulnérabilité des femmes dans les situations de catastrophe.  Le rapport contient également des recommandations d’ordre législatif visant notamment à protéger, promouvoir et garantir aux femmes l’accès à la terre.  D’autres recommandations portent sur les médias, l’éducation et le renforcement des capacités, la recherche et l’élaboration des méthodologies ainsi que sur des mesures de portée internationale.
 S’agissant du deuxième thème relatif à l’élimination de la pauvreté, le Secrétaire général recommande aux gouvernements, aux organisations internationales, aux institutions de développement et de financement d’améliorer la collecte, la compilation et la diffusion de données fiables ventilées selon le sexe et l’âge; d’appuyer les travaux visant à construire des indicateurs quantitatifs et qualitatifs; d’entreprendre des recherches sur la corrélation entre l’autonomisation des femmes et l’élimination de la pauvreté féminine; de concevoir des méthodes d’évaluation et de suivi de l’effet des politiques et programmes d’élimination de la pauvreté.  Il leur est également recommandé d’améliorer la capacité des dispositifs nationaux de promotion de la femme; de mener des enquêtes sur les facteurs qui font obstacle à l’autonomisation des femmes et d’identifier les risques de pauvreté accrue auxquels se trouvent confrontées les femmes âgées; de mener des études de pays et des études régionales afin de mieux comprendre l’incidence de la mondialisation sur les femmes, en particulier les femmes pauvres; et de remplacer les filets de sécurité résiduels liés à des situations de crise par des systèmes de sécurité sociale permanents et viables.  Il faut en outre que les programmes de privatisation des services sociaux et de la protection sociale n’aient pas un effet négatif sur les femmes.

Table ronde d’experts sur le thème «Elimination de la pauvreté, notamment grâce au renforcement du pouvoir des femmes tout au long de leur cycle de vie à l’heure de la mondialisation»
 
      Mme GAUDENCE RWAMAHEKE (Burundi), Directrice générale au Ministère de l’action sociale et de la promotion de la femme, a évoqué un développement à double vitesse et un univers de disparités exacerbées par la mondialisation.  La mondialisation bénéficie aux pays les plus compétitifs et marginalise encore davantage les économies les plus faibles, a-t-elle estimé.  Elle a des effets négatifs sur les dépenses publiques de santé et d’éducation alors que les pays en développement et les femmes en particulier ont encore largement besoin des programmes sociaux.  Au plan individuel, la mondialisation suppose la libre circulation des ressources financières, des biens et des services.  Cependant, peu de personnes ont une réelle liberté de mouvement d’un pays à l’autre en raison des règles rigoureuses d’émission de visas.  Par ailleurs, la mondialisation n’a pas la même incidence sur les hommes et les femmes, ces dernières souffrant davantage des ajustements structurels imposés par la mondialisation; les femmes supportent le fardeau et le coût social de ces politiques de par leur rôle de reproduction.  Par conséquent, le nouvel ordre économique mondial prive les femmes d’occasions leur permettant des réalisations personnelles.  Quant à la femme rurale dans les pays en développement, elle profite encore moins de la mondialisation, se trouvant dans une situation d’extrême pauvreté.  Les femmes pauvres constituent la majorité des pauvres, tant dans les pays développés que dans les pays en développement.
 Le débat général, a poursuivi Mme Rwamaheke, a permis de constater que la majorité des pays avait accompli beaucoup de progrès dans le renforcement du pouvoir de la femme mais, a-t-elle estimé, l’impact de ces aménagements a été fragilisé par mondialisation.  Là où il y a eu une volonté politique réelle, il y a eu des avancées, mais la pauvreté reste la principale entrave.  Pour l’experte, le renforcement du pouvoir des femmes passe par la reconnaissance et la protection de leurs droits.  Pour les fillettes, la priorité sera d’éduquer les enfants, fondement de leur pouvoir d’action.  Ainsi, la lutte contre la pauvreté permet de lutter contre la violence sur les fillettes, notamment le viol aux conséquences fatales en raison du VIH/sida.  Les adolescentes, quant à elles, constituent le groupe le plus vulnérable de tous: partout dans le monde, le taux d’infection de ces jeunes filles par le VIH/sida progresse, avec pour conséquence l’abandon scolaire.  Les femmes, enfin, devraient pouvoir profiter de la mondialisation, notamment la femme rurale, grâce au renforcement de son pouvoir économique.  Or, les conflits et les viols les exposent particulièrement au VIH/sida et l’experte a réclamé des campagnes de sensibilisation pour minimiser l’impact de la pandémie.  Il faut que l’homme soit placé au centre des préoccupations or, actuellement, le développement des marchés est plus rapide que le développement humain.
 En conclusion, la mondialisation ne doit pas ignorer les questions de genre, le rôle des femmes devrait être renforcé et les femmes doivent profiter des opportunités offertes par la mondialisation.  C’est pourquoi, l’experte a recommandé, notamment d’investir en faveur de la petite fille, pour qu’elle soit agressive sur le marché du travail, de lutter énergiquement contre le sida, de valoriser le travail des femmes rurales avec le microcrédit, et d’imposer l’intégration de l’aspect sexospécifique dans les programmes et projets de lutte contre la pauvreté.

M. JAN VANDEMOORTELE (Belgique), Docteur en économie du développement, Conseiller principal du Groupe pour le développement économique du PNUD, a prévenu que la pauvreté est pluridimensionnelle, se manifeste de diverses manières qu’il faut saisir comme il convient et, à cet égard, les indicateurs moyens ne sont pas toujours exacts.  Ainsi, le PIB laisse de côté certaines valeurs de la production et d’une économie de services et les analyses font abstraction de la place de la femme au foyer, qui débouchent sur des conclusions erronées.  Il a cité l’exemple de la Côte d’Ivoire et le taux d’inscription dans les écoles: dans les années 80/90, les taux paraissaient bons, mais en fait ils masquaient une discrimination par classes sociales et ainsi, les petits garçons des familles aisées avaient de bien meilleures chances que les petites filles pauvres.  De même, les taux de VIH/sida et la pauvreté sont étroitement liés et la pandémie affecte en particulier les femmes et, parmi elles, surtout les jeunes filles analphabètes.
 Evoquant ensuite la budgétisation par sexe, l’expert a relevé que ce sont surtout des hommes qui travaillent dans les ministères des finances.  Or, la question des ressources, qui fait partie des solutions, n’est pas la seule: on ne peut donc pas mettre de côté les droits en attendant le décollage économique.  Il a souhaité également souligner les liens entre commerce et pauvreté, précisant que les politiques commerciales déclenchent des inégalités dans la mesure où les hommes et les femmes ont des besoins et des accès différents aux ressources.  L’expert a toutefois jugé qu’il était inefficace pour le commerce de laisser persister des inégalités entre les sexes: les inégalités dans l’accès des femmes à l’éducation et à la santé réduisent souvent la productivité et les taux de croissance, suscitant des performances moindres.  En outre, les faibles salaires versés aux femmes à des fins de compétitivité, risquent de résulter en une détérioration des termes de l’échange entre pays en développement et pays développés, surtout dans les pays qui comptent une importante activité manufacturière à l’exportation.
 
Mme SAVITRI BISNATH (Trinité-et-Tobago), étudiante en Doctorat au Département de la planification régionale et urbaine à l’Université Cornell, a indiqué que les femmes et les fillettes étaient plus vulnérables à la pauvreté que les hommes dans la mesure où elles subissent des inégalités dans la redistribution des revenus, dans l’accès aux soins de santé, aux ressources productives comme le crédit, et à la propriété et pour ce qui est également du contrôle de leurs revenus.  Les femmes sont aussi victimes de préjugés sur le marché de l’emploi ainsi que de la marginalisation et l’exclusion de diverses institutions politiques et économiques.  L’experte a expliqué qu’au cours de ces dernières années, les stratégies d’autonomisation des femmes ont évolué.  Il est cependant difficile d’établir une corrélation entre l’autonomisation des femmes et la réduction de la pauvreté dans la mesure où ces deux concepts sont complexes et multidimensionnels et ne peuvent pas être appréhendés par le biais de simples indicateurs.
 Mme Bisnath a souligné que la mondialisation a présenté des opportunités et des défis à l’objectif de l’élimination de la pauvreté.  Bien que le siècle dernier ait connu des progrès notables concernant certains aspects du développement humain, l’aube du XXIème siècle est marquée par l’ampleur des privations que connaît l’être humain et l’accroissement des inégalités.  Elle a précisé que les conséquences de la mondialisation n’étaient pas les mêmes selon les pays.  Par exemple, le processus d’intégration international et de la croissance se caractérise par la marginalisation de certains pays.  En 1999, le rapport sur le développement humain a fait apparaître l’accroissement des inégalités entre pays.  Le nombre d’individus en Europe de l’Est et en Asie centrale vivant avec moins d’un dollar par jour est passé au cours de ces dix dernières années à 13 millions.  En Asie du Sud et en Afrique subsaharienne, ce chiffre est respectivement de 35 et 39 millions.
 Malgré cette dure réalité, un consensus “officiel” s’est dégagé qui accorde la priorité à l’accroissement du rôle des forces du marché dans les stratégies de réduction de la pauvreté.  La suppression des barrières commerciales a été encouragée sur la base du postulat selon lequel le libre échange mènera à une productivité accrue, à la croissance et à la concurrence et donc à la réduction de la pauvreté.  Cependant, au cours des dix dernières années, de nombreux pays ont ouvert leurs marchés à la concurrence internationale à un rythme plus rapide que celui de la réduction des niveaux nationaux de pauvreté.  Il n’existe pas d’évidence absolue que l’ouverture systématique des marchés réduit les niveaux de pauvreté et améliore la qualité de vie des femmes et des fillettes des pays en développement.  Comme la crise asiatique l’a montrée, l’ouverture exerce des pressions qui risquent d’exacerber la pauvreté et accroître les disparités entre les revenus.
Il a été reconnu que l’accès des femmes au marché de l’emploi est un facteur de réduction de la pauvreté.  Toutefois, les femmes ne bénéficient pas toutes des avantages de la mondialisation.  En Asie du Sud-Est par exemple, certains groupes de jeunes femmes et de travailleuses rurales migrantes ont trouvé des emplois dans l’industrie destinée à l’exportation tandis que celles employées dans les entreprises publiques et les industries nationales ont perdu leur emploi à la suite de programmes de restructuration et de libéralisation des termes de l’échange.  De plus, les gains positifs sur le marché de l’emploi se sont accompagnés de l’affaiblissement des systèmes de protection sociale.  Les processus de décentralisation ont par ailleurs mené à l’instabilité de l’emploi et au chômage.
 Les effets de la libéralisation des échanges sur les femmes des pays en développement, en particulier en termes d’accès à l’emploi et de sécurité alimentaire, seront de plus en plus visibles à mesure que se mettent en place les accords multilatéraux commerciaux.  Il est probable d’assister à l’augmentation du coût de l’alimentation, des services sociaux et de l’éducation.  De plus, l’adoption de mesures d’austérité, comme partie intégrante des programmes de restructuration économique, et l’intégration des pays à l’économie internationale, ont donné lieu à la rationalisation des services publics et à la délégation de telles responsabilités aux ONG et à la famille.  L’experte a plaidé en faveur de l’intégration des politiques sociales et économiques pour lutter efficacement contre la pauvreté.  La distinction qui est faite aujourd’hui entre les politiques économique et sociale ne permet pas de comprendre dans quelle mesure ces deux paramètres se renforcent mutuellement.  Un exemple de cette complémentarité est le lien qui existe entre la croissance économique durable et l’éducation.  De même, l’accès aux soins de santé et à l’alimentation contribue à renforcer les capacités productives des travailleurs.
      L’experte a recommandé un certain nombre de mesures comme par exemple le réexamen des politiques et stratégies d’élimination de la pauvreté; le développement d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs pour mesurer la pauvreté et l’impact des politiques d’élimination de la pauvreté; l’identification des facteurs faisant obstacle à l’autonomisation des femmes comme la violence, le manque d’informations, les attitudes traditionnelles, les lois et pratiques discriminatoires.  Il faudrait également créer un climat propice pour allouer des ressources, y compris par le biais de processus budgétaires nationaux; identifier la dimension sexospécifique des accords commerciaux existants; encourager la distribution équitable des gains tirés de la libéralisation des termes de l’échange par l’imposition de taxes ou de programmes de formation; réglementer les mouvements de capitaux sur le court terme pour protéger les stratégies de survie des femmes pauvres.  Il faut en outre assurer que la privatisation des services sociaux n’ait pas d’effets négatifs sur les femmes.  L’experte a aussi plaidé en faveur de l’intégration des politiques sociales et économiques.
 Répondant aux questions posées par les délégations, Mme RWAMAHEKE a souligné la nécessité de renforcer le pouvoir de la femme dès sa petite enfance.  La femme de demain c’est d’abord la petite fille d’aujourd’hui puis l’adolescente.  Le microcrédit, même s’il est positif, doit être mis à l’essai dans diverses zones d’un même pays.  Des facteurs inhérents aux modes de vie au sein même de chaque communauté peuvent ne pas se prêter à cette expérience.  Il faut déterminer les formes d’aide les plus adaptées aux besoins des diverses communautés.
 
M. VANDEMOORTELE, a expliqué pour sa part qu’il n’y avait pas d’acteur unique chargé d’assurer la parité mais une multitude d’acteurs que sont les gouvernements, les ONG, les institutions financières internationales, les Nations Unies, et les institutions internationales spécialisées.  Les années 1990 n’ont pas permis de réaliser les promesses et engagements pris.  Même s’il y a eu prospérité mondiale et progrès technologiques, les années 1990 ont été marquées par un ralentissement des avancées réalisées dans les années 1980.  La parité n’est pas un sous-produit mais un droit.  Le microcrédit n’est pas la solution mais est une option.  Il a expliqué que le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) s’attache à réaliser par pays les objectifs fixés lors du Sommet du Millénaire.  L’aspect sexospécifique du développement constitue une partie importante du travail accompli par le PNUD.  Le déclin du prix des matières premières a paralysé les efforts en faveur du développement et de la parité.  Il faut muscler l’Organisation internationale du travail (OIT) pour qu’elle suive le respect des normes du travail sur un plan mondial.
 
Mme BISNATH a expliqué, quant à elle, qu’il fallait renforcer les organisations chargées de la condition et de la promotion de la femme pour qu’elles exercent une plus grande influence sur le plan international.  La sécurité des femmes est un droit fondamental et il conviendrait d'augmenter les dépenses consacrées à la santé.
 
Mme CHARLOTTE ABAKA (Ghana), Présidente du Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, en réponse à différentes questions, a recommandé que la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes soit considérée comme un élément important de lutte contre la pauvreté.  A cet égard, elle a jugé que les dispositions de l’article 4 (1), relatif aux mesures spéciales temporaires devraient être mises en oeuvre pour accélérer de facto l’égalité entre l’homme et la femme, afin que les femmes n’aient pas à attendre encore dix ans pour vivre une existence digne de ce nom.
      Evoquant l’expérience de son pays en matière de microfinancement, la Ministre de la famille du Sénégal a insisté sur la nécessité de développer des mesures de formation et des mécanismes d’évaluation et de suivi.  Il serait aussi indiqué, à l’image de ce qui a été réussi en Tunisie, de mettre en place un fonds de solidarité qui aurait aussi pour intérêt de mobiliser les opportunités existantes au plan national.  De l’avis de la Ministre, il est de temps de développer un mécanisme de crédit qui favoriserait un entreprenariat féminin digne de ce nom permettant aux femmes de devenir enfin de véritables acteurs économiques.
 Reprenant la parole, Mme RWAMAHEKE a insisté sur la part de la solidarité internationale pour évoluer vers le développement humain.  Répondant à une question posée par la délégation de la Roumanie, elle a reconnu que la volonté politique, à elle seule, ne suffit pas.  En vérité, il a souvent été difficile de mesurer ce qui a été accompli en faveur des femmes, d’où l’intérêt des indicateurs pour mesurer l’impact des politiques sur les femmes.  Beaucoup de pays ont encore des difficultés à établir ces indicateurs, a reconnu l’experte, qui en a appelé aux instituts de recherches pour qu’ils donnent aux pays les outils nécessaires leur permettant de mesurer les progrès réalisés, aux plans quantitatif et qualitatif.
 Au sujet de la solidarité, M. VANDEMOORTELE a estimé qu’il y avait deux logiques: celle des droits de l’homme, qui est une logique d’habilitation et celle des marchés, qui est une logique de mérite et surtout de pouvoir.  Il faudrait, selon lui, établir un élément de complémentarité.  Quant au fonds de solidarité mondiale évoqué par plusieurs intervenants, l’expert a constaté l’apparition de fonds spéciaux tel celui sur le VIH/sida ou celui, proposé, en faveur de l’éducation primaire, mais il a dit douter que ces fonds soient la bonne solution.  A propos de l’éducation des filles, il a déploré le manque de progrès en dépit des mesures prises: il lui semble tellement plus facile d’y parvenir, compte tenu des technologies et des ressources, que de vaincre le sida car, a-t-il fait remarquer, tous les éléments sont en place alors que nous n’avançons pas.
 De l’avis de Mme BISNATH, les femmes formées dans des domaines où elles ne travaillent pas habituellement, apportent non seulement de nouveaux revenus à leurs familles et, en plus, inspirent d’autres femmes, ce qui souligne l’importance des formations et de l’éducation.
 
Mme RWAMAHEKE a précisé que pour asseoir une base solide de développement, il faut qu’il repose sur de bonnes politiques, l’état de droit et la stabilité qui est un défi pour les pays africains.  Il faut espérer que les nouveaux concepts de bonne gouvernance permettront d’évoluer dans la bonne direction sur la base d’indicateurs de réussite.  En réponse à la question de la délégation du Ghana sur les responsabilités des gouvernements vis-à-vis de la femme rurale, elle a précisé que celle-ci est confrontée à des problèmes plus importants que ceux portant sur l’intégration à la mondialisation.  Il faut permettre à la femme rurale de bénéficier progressivement des nouvelles technologies de l’information, en luttant contre l’analphabétisme et en faisant en sorte que l’objectif de scolarisation universelle soit atteint et en privilégiant la décentralisation à tout point de vue.
 
      Pour sa part, M. VANDEMOORTERLE a expliqué que bien souvent, on ne voyait pas le lien entre le microcrédit et les autres aspects de la stabilité économique et du développement durable.  Nous voyons les choses de façon séquentielle alors que la réalité est différente.  Les gouvernements peuvent faire davantage en faveur des femmes rurales mais la mondialisation risque d’être exploitée comme prétexte pour réduire les politiques nationales économiques et sociales, ce qui a été le cas dans le contexte de la lutte contre la pandémie du VIH/sida.
 
Mme BISNATH a fait valoir qu’un bon système de santé et d’éducation est essentiel à la création d’un environnement sain sur le plan économique.  Les politiques économique et fiscale ne devraient pas avoir la priorité sur les objectifs sociaux de la réduction de la pauvreté.  Il faut intégrer de façon plus efficace les politiques sociales et économiques.  Les gouvernements doivent définir les secteurs et produits importants au regard des échanges mais également protéger les stratégies de survie des femmes rurales.  Le Consensus de Monterrey fixe les objectifs que peuvent atteindre les politiques économiques et monétaires mais passe sous silence les aspects sociaux.
 
En conclusion, Mme RWAMAHEKE s’est demandée si des mesures spéciales temporaires ne devaient pas s’imposer dans le domaine de l’élimination de la pauvreté, compte tenu notamment du peu de temps qui reste avant l’examen en 2005 des progrès réalisés dans l’application du Programme d’action de Beijing.
 
 
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