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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE DEUXIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE L'ESPAGNE

04 juin 2002



CRC
30ème session
4 juin 2002




Les membres du Comité insistent sur les problèmes liés au
phénomène des enfants non accompagnés,
particulièrement nombreux à Ceuta et Melilla



Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le deuxième rapport périodique présenté par l'Espagne. Dans ses observations préliminaires sur le rapport, le rapporteur du Comité pour l'Espagne a notamment dit apprécier les progrès qui ont été accomplis ces cinq ou six dernières années dans le pays dans le domaine des droits de l'enfant. Il a mis l'accent sur l'importance de la question de la décentralisation eu égard à la fragmentation de la protection de l'enfance que ce processus peut éventuellement induire. Il appartient au gouvernement de s'assurer que le plan national en faveur de l'enfance soit appliqué de manière équitable sur l'ensemble du territoire, a souligné l'expert.
Le Comité adoptera à huis clos ses observations finales sur le rapport de l'Espagne avant de les rendre publiques à la fin de la présente session, vendredi 7 juin au matin.
Présentant le rapport de son pays, Mme María Teresa Mogin Barquín, Directrice générale de l'action sociale, des mineurs et de la famille au Ministère du travail et des affaires sociales, a rappelé que ces dernières années, l'Espagne a ratifié un certain nombre d'instruments internationaux parmi lesquels il convient de mentionner les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention. Sur le plan interne, le Code pénal a été modifié afin de durcir la législation relative aux délits commis contre des mineurs, intégrant à cet égard la notion d'extraterritorialité, a indiqué Mme Mogin Barquín.
La délégation espagnole est également composée de M. Joaquín Pérez-Villanueva y Tovar, Représentant permanent de l'Espagne auprès des Nations Unies à Genève, ainsi que de représentants du Ministère de l'éducation, de la culture et des sports, du Ministère du travail et des affaires sociales, ainsi que de la Mission permanente de l'Espagne auprès des Nations Unies à Genève. Elle a apporté aux experts des compléments d'information s'agissant, notamment, des questions d'éducation; des principes généraux énoncés dans la Convention, s'agissant plus particulièrement du principe de non-discrimination; de la situation des enfants gitans; de la situation des enfants non accompagnés; de l'âge du consentement sexuel et des questions relatives à la prostitution des mineurs; des questions relatives au travail des enfants; des enfants handicapés; ainsi que du cadre institutionnel de la protection de l'enfance et du fonctionnement de l'Observatoire de l'enfance.
La délégation a indiqué que le Ministère du travail et des affaires sociales joue auprès du gouvernement un rôle de coordination de l'action des différents ministères en faveur de l'enfance. Elle a précisé que l'Observatoire de l'enfance s'est fixé quatre grands domaines d'étude : la question des mineurs étrangers non accompagnés; la question de l'adoption et de l'accueil familial; la question des mauvais traitements infligés aux enfants, y compris les abus sexuels; ainsi que la question des services en faveur des enfants de 0 à 3 ans.
Plusieurs membres du Comité se sont inquiétés de la situation des mineurs non accompagnés et il a été relevé que 1 500 de ces enfants vivent de manière légale ou illégale dans le pays, le problème se posant de façon particulièrement aiguë à Melilla. Il est vrai que ces dernières années, l'Espagne a connu une augmentation très importante du nombre d'enfants arrivant dans le pays sans leur famille, a admis la délégation. Ces enfants ont néanmoins accès à l'éducation et à la santé quelle que soit leur situation, a-t-elle assuré. Le nombre d'enfants marocains non accompagnés arrivant à Ceuta et de Melilla a enregistré une hausse annuelle de 70%, a précisé la délégation.
Un membre du Comité s'est inquiété des dispositions législatives concernant le terrorisme dont certaines concernent les enfants âgés de plus de 14 ans, à l'encontre desquels les sanctions peuvent être extrêmement sévères.
Le Comité examinera demain, à partir de 10 heures, le rapport initial des Antilles néerlandaises (CRC/C/107/Add.1).

Deuxième rapport périodique de l'Espagne
Le deuxième rapport périodique de l'Espagne (CRC/C/70/Add.9 – non disponible en français) souligne que bien qu'il décrive la situation des enfants sur les années 1993-1997, il s'inscrit dans le contexte plus large des politiques en faveur de l'enfance qui ont commencé à être systématiquement mises en place dans les années 1980 et qui ont été décrites dans le rapport initial de l'Espagne. Du point de vue des repésentations sociales dont ils font l'objet, les enfants sont désormais acceptés en tant que catégorie sociale ayant des besoins spécifiques et en tant que membres de la société dotés de la capacité d'influer de manière active sur leur propre développement et sur leur propre environnement. Le meilleur moyen d'assurer la protection juridique et sociale des enfants consiste à promouvoir leur indépendance en tant que détenteurs de droits, souligne par ailleurs le rapport.

Présentation du rapport
M. JOAQUÍN PÉREZ-VILLANUEVA Y TOVAR, Représentant permanent de l'Espagne auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que l'Espagne est un pays démocratique où l'on respecte la loi. Il a affirmé que le cadre des droits de l'enfant en Espagne n'est certes peut-être pas idyllique, mais les autorités ne prétendent pas avoir atteint la perfection dans ce domaine. ll n'en demeure pas moins que beaucoup a été fait en faveur de l'enfance dans ce pays et que les autorités agissent dans ce domaine en toute bonne foi, a-t-il assuré.
MME MARÍA TERESA MOGIN BARQUÍN, Directrice générale de la Direction générale de l'action sociale, des mineurs et de la famille au sein du Ministère du travail et des affaires sociales, a indiqué que le présent rapport a été réalisé en coopération avec un grand nombre d'intervenants, parmi lesquels on peut citer les communautés autonomes et les municipalités du pays. Ces dernières années, l'Espagne a ratifié un certain nombre d'instruments internationaux parmi lesquels il convient de mentionner les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention et traitant, l'un, de la vente des enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie impliquant des enfants et, l'autre, de l'implication des enfants dans les conflits armés. L'Espagne a par ailleurs ratifié la Convention n°182 de l'OIT sur l'élimination des pires formes de travail des enfants, a indiqué Mme Mogin Barquín.
La Directrice générale de l'action sociale a rappelé qu'au cours de la présidence espagnole de l'Union européenne, s'est tenue le 11 avril dernier la quatrième réunion du groupe d'experts intergouvernemental sur l'Europe de l'enfance. Cette réunion s'est concentrée sur quatre questions concrètes, à savoir: la session spéciale de l'Assemblée générale des Nations Unies sur les enfants; la lutte contre la pauvreté; l'exploitation sexuelle des enfants; et la création d'un réseau européen d'observatoires et autres centres sur l'enfance.
Sur le plan interne, Mme Mogin Barquín a indiqué que les droits et principes énoncés dans la Convention ont été incorporés aux lois organiques telles que la Loi organique de 1996 sur la protection juridique des mineurs et la Loi organique de 2000 sur la responsabilité pénale des mineurs. Le Code pénal a en outre été modifié afin de durcir la législation relative aux délits commis contre des mineurs, intégrant à cet égard la notion d'extraterritorialité.

Examen du rapport
M. LUIGI CITARELLA, rapporteur du Comité pour l'examen du rapport de l'Espagne, a déclaré que le rapport présenté par l'Espagne donne à penser que des mesures tout à fait positives ont été prises dans le sens de la mise en œuvre de la Convention. L'expert a toutefois regretté qu'en raison de la longueur de ce rapport, il soit quelque peu difficile d'avoir une vision globale de la situation dans le pays en matière de promotion et de protection des droits de l'enfant. L'amélioration de la situation des enfants en Espagne a été rendue possible par un certain nombre de facteurs dont le moindre n'est pas le développement économique rapide qu'a connu le pays, a souligné M. Citarella. À l'avenir, a-t-il poursuivi, les choses pourraient encore s'améliorer en ce qui concerne les châtiments corporels au sein des familles ainsi qu'en ce qui concerne le respect du principe de non-discrimination (plus particulièrement à l'égard des réfugiés, des Roms et des minorités), deux questions déjà soulevées antérieurement par le Comité.
M. Citarella a par ailleurs souligné que la question basque préoccupe le monde entier. Des lois antiterroristes adoptées récemment pourraient avoir des conséquences négatives sur les enfants basques et il serait bon que la délégation fournisse un complément d'information à cet égard, a affirmé l'expert.
Un autre membre du Comité s'est inquiété des dispositions législatives relatives au terrorisme dont certaines concernent les enfants âgés de plus de 14 ans, à l'encontre desquels les sanctions peuvent être extrêmement sévères. La délégation a expliqué qu'en vertu de la loi 5/2000 modifiée par la loi 7/2000, a été créée à Madrid un tribunal (Juzgado Central de Menores de la Audiencia Nacional) spécifiquement chargé de juger les mineurs impliqués dans des délits terroristes. Selon la loi en vigueur, un jeune de 14 à 15 ans coupable de délit terroriste encourt une peine de détention allant de 1 à 5 ans et un jeune de 16 à 17 ans coupable de ce même délit encourt une peine pouvant aller jusqu'à huit ans de prison. Ces peines peuvent être plus sévères en cas de commission de plusieurs délits combinés (terrorisme et homicide, par exemple).
S'agissant des questions d'éducation, la délégation a indiqué qu'un projet de loi concernant une éducation de qualité est en cours d'élaboration et pourrait être adopté à l'automne prochain. L'éducation est conçue en Espagne comme un processus permanent ayant un rôle social important, a déclaré la délégation. Il convient dans ce cadre d'enseigner un certain nombre de notions essentielles telles que la liberté et la responsabilité sociale, a-t-elle précisé. Interrogée sur la part du budget national consacrée à l'éducation et sur la répartition budgétaire entre les différentes communautés autonomes, la délégation a affirmé qu'il ne serait pas juste de laisser entendre que les dépenses en matière d'éducation ne sont pas suffisantes en Espagne car le pays n'a eu de cesse que de les accroître ces dernières années. En Espagne, l'enseignement est gratuit de 6 à 16 ans, ce qui implique un effort économique important, a souligné la délégation. L'éducation est une priorité du budget de l'Etat et 100% de la population enfantine jusqu'à 13 ans est scolarisée, a-t-elle fait valoir. Elle a précisé que ces dernières années, le nombre de professeurs augmentait de 16% alors que le nombre d'élèves ne cessait de diminuer, du fait de la faible croissance démographique du pays (la plus faible de l'Union européenne). Le taux moyen d'élèves par professeur est de 13, soit le chiffre le plus bas de toute l'Union européenne, a souligné la délégation.
En ce qui concerne les principes généraux énoncés dans la Convention, en particulier le principe de non-discrimination, un membre du Comité a fait part de sa préoccupation face au nombre élevé de jeunes roms ayant quitté l'école prématurément et s'est donc inquiété de l'existence d'une discrimination dans ce domaine. D'autres experts se sont enquis des différences de niveau de développement qui peuvent exister entre les diverses communautés autonomes du pays. Certains ont relevé l'existence de tensions avec les immigrants marocains, comme en témoignent les incidents survenus dans la province d'Almeria (Andalousie) il y a quelques années et dont plusieurs organes des Nations Unies se sont inquiétés. À cet égard, il a été recommandé à l'Espagne de ratifier la Convention des Nations Unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leurs familles.
Interrogée sur la situation des enfants roms ou gitans dans le pays, la délégation a indiqué qu'il n'est pas possible en Espagne de recenser la population sur la base de l'origine ethnique des habitants. On ne dispose donc que d'estimations pour évaluer la taille de la population gitane en Espagne. Certes, il existe un problème d'absentéisme scolaire chez les gitans, en particulier en ce qui concerne les petites filles, a admis la délégation.
Un membre du Comité a relevé que 1 500 enfants non accompagnés vivent de manière légale ou illégale dans le pays et que ce problème se pose de façon particulièrement aiguë à Melilla où il a été déclaré que ces enfants ne seraient plus considérés comme des enfants et seraient renvoyés au Maroc ou expulsés du territoire. La délégation a souligné que ces dernières années, l'Espagne a connu une augmentation très importante du nombre d'enfants arrivant dans le pays sans leur famille. Ces enfants ont néanmoins accès à l'éducation et à la santé quelle que soit leur situation, a assuré la délégation. Elle a admis que le problème des enfants non accompagnés se pose de façon tout à fait particulière à Melilla. Une augmentation de plus de 70% par an du nombre d'enfants marocains arrivant à Ceuta et Melilla a été enregistrée, a précisé la délégation. Il faut donc trouver une solution et cela ne se fera ni facilement ni rapidement, a-t-elle déclaré. Melilla est pour ces enfants une tête de pont leur permettant d'entrer en Europe, a insisté la délégation.
La délégation a précisé qu'en vertu de la loi espagnole, un mineur non accompagné ne peut être renvoyé dans son pays qu'après identification de sa famille d'origine.
Un expert a estimé qu'il serait judicieux, alors que cette question avait déjà été soulevée lors de l'examen du rapport initial de l'Espagne, que le pays procède à la mise en place d'un comité permanent hispano-marocain qui s'efforcerait de trouver des réponses adéquates à ce phénomène des enfants non accompagnés.
Un expert ayant jugé très bas l'âge du consentement sexuel, fixé à 13 ans dans le pays, la délégation a déclaré qu'en dessous de l'âge de 13 ans, il ne saurait effectivement être question de parler de consentement du mineur pour tout acte sexuel dans lequel il pourrait être impliqué. Elle a par ailleurs indiqué que favoriser la prostitution des mineurs ou distribuer du matériel pornographique impliquant des mineurs sont autant de délits passibles de peines d'emprisonnement en vertu du Code pénal.
En ce qui concerne le travail des enfants, un membre du Comité a relevé que l'Espagne est le deuxième bailleur de fonds de l'IPEC (Programme international de l'OIT pour l'élimination du travail des enfants). La délégation a indiqué qu'en réponse au chiffre de deux cents mille (200 000) enfants travaillant dans le pays qui avait été avancé par l'Organisation internationale du travail (OIT), les autorités espagnoles avaient envoyé une lettre à l'OIT afin de protester contre cette évaluation pour le moins fantaisiste; suite à quoi l'OIT a admis que cette évaluation était erronnée et reposait en fait sur des évaluations datant de plus de dix ans. En fait, a affirmé la délégation, seuls 17 enfants travaillant ont été enregistrés dans le pays.
La délégation a par ailleurs souligné que le pays compte quelque 50 000 enfants handicapés et que seuls 2% d'entre eux sont placés dans des institutions spécialisées.
La délégation a également admis l'existence d'un problème en ce qui concerne les grossesses précoces puisque l'Espagne a enregistré 11 000 jeunes filles enceintes de moins de 13 ans.
Interrogée sur le cadre juridique de la protection de l'enfance dans le pays, la délégation a indiqué que le Ministère du travail et des affaires sociales joue auprès du Gouvernement un rôle de coordination de l'action des différents ministères en faveur de l'enfance. Elle a précisé que le pays s'est doté d'une Commission interministérielle concernant les questions de la famille et d'une Commission de l'enfance et de la jeunesse. Il existe en outre dans le pays un Observatoire de l'enfance dont la mise en place résulte dans une large mesure de la volonté d'assurer le suivi des recommandations du Comité des droits de l'enfant. Les 17 communautés autonomes ainsi que les deux villes autonomes (Ceuta et Melilla) forment la conférence sectorielle qui se réunit régulièrement et prend les décisions relatives à la protection des enfants, a par ailleurs indiqué la délégation.
Plusieurs experts ayant souhaité mieux connaître le fonctionnement de l'Observatoire de l'enfance, la délégation a indiqué que cet organe fonctionne à travers des groupes de travail permanents chargés d'identifier les défis qui se posent en matière de promotion et de protection des droits de l'enfant et de définir les priorités en vue de relever ces défis. Actuellement, l'Observatoire s'est fixé quatre grands domaines d'études : la question des mineurs étrangers non accompagnés; la question de l'adoption et de l'accueil familial; la question des mauvais traitements infligés aux enfants, y compris les abus sexuels; la question des services en faveur des enfants de 0 à 3 ans. En ce qui concerne les méthodes de travail de l'Observatoire, la délégation a souligné que c'est la règle du consensus qui s'applique. Les enfants ne participent pas directement aux travaux de cet Observatoire, a par ailleurs précisé la délégation.
La délégation espagnole a indiqué qu'il existe à travers le pays environ 11 000 organisations non gouvernementales œuvrant dans le domaine de l'action sociale. Pour la grande majorité de ces organisations, l'action en faveur de l'enfance constitue incontestablement la priorité. Quarante-huit pour cent de ces ONG sont nées dans les années 1990 et le grand défi réside aujourd'hui dans la nécessaire mise en place de réseaux entre ces différents acteurs. À cet égard, il convient de souligner l'importance de la plateforme des ONG pour l'enfance mise en place dans le pays.

Observations préliminaires sur le rapport
Dans les observations préliminaires qu'il a présentées en tant que rapporteur du Comité pour l'examen du rapport espagnol, M. Luigi Citarella a dit apprécier les progrès qui ont été accomplis dans le pays dans le domaine des droits de l'enfant au cours de ces cinq ou six dernières années. L'expert a mis l'accent sur l'importance de la question de la décentralisation eu égard à la fragmentation de la protection de l'enfance que ce processus peut éventuellement induire. Il appartient au gouvernement national de s'assurer que le plan national en faveur de l'enfance soit appliqué de manière équitable sur l'ensemble du territoire, a souligné M. Citarella. Il serait bon que l'Espagne précise si elle entend adopter une approche globale de la promotion de la Convention et il pourrait à cet égard être judicieux pour le pays de mettre en place un plan global intégrant la totalité des aspects des droits de l'enfant.
La délégation a assuré que, pour l'Espagne, la décentralisation ne signifie pas «inégalités». À chaque fois qu'il voit qu'un problème se pose en matière de mise en œuvre de la Convention, le Gouvernement espagnol prend des mesures législatives afin d'y remédier, a assuré la délégation.



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