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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT INITIAL D'HAÏTI

27 Janvier 2003



CRC
32ème session
27 janvier 2003



Le Comité des droits de l'enfant a examiné aujourd'hui le rapport initial de Haïti sur les mesures prises par ce pays pour se conformer aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant. Présentant en fin de journée des observations préliminaires sur ce rapport, Mme Awa N'Deye Ouedraogo, rapporteuse du Comité pour l'examen de la situation des droits de l'enfant en Haïti, a notamment souligné qu'Haïti rencontre d'énormes difficultés pour mettre en œuvre la Convention en raison des problèmes politiques, institutionnels, structurels et financiers qui se posent au pays. Elle a exprimé l'espoir qu'après les élections qui doivent se tenir cette année, des progrès pourront être accomplis dans la mise en œuvre de la Convention.
Mme Ouedraogo a notamment mis l'accent sur la question de l'apatridie, qui se pose dans le contexte des enfants haïtiens nés en République dominicaine. Elle a par ailleurs affirmé que le problème de la domesticité des enfants mérite de faire l'objet d'un débat national afin que soient trouvés les moyens d'aborder au mieux cette question, compte tenu du fait qu'il s'agit d'une pratique profondément ancrée dans la culture.
Le Comité adoptera ultérieurement, à huis clos, ses observations finales sur le rapport haïtien avant de les rendre publiques à la fin de la présente session, vendredi 31 janvier 2003.
Présentant le rapport de son pays, M. Charles Etzer, Représentant permanent d'Haïti auprès des Nations Unies à Genève, a reconnu que l'adoption du code de l'enfant accuse un certain retard, expliquant que le Gouvernement souhaite le déroulement d'un débat national sur la question et que le pays est confronté à une situation parlementaire délicate. M. Etzer a souligné que nombre de dispositions légales et de projets visent à favoriser le bien-être de l'enfant. Pour autant, les besoins en matière de bien-être de l'enfant sont loin d'être satisfaits, a-t-il admis. Au-delà d'un certain nombre de résultats encourageants, la situation reste préoccupante. Haïti vit actuellement une mutation durant laquelle il convient de bâtir la démocratie et consolider l'État, a conclu M. Etzer.
La délégation haïtienne, également composée d'autres représentants de la Mission permanente de Haïti auprès des Nations Unies à Genève, a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, entre autres, de la situation politique actuelle du pays; de la situation des enfants haïtiens nés en République dominicaine; des questions de santé et d'éducation; de l'administration de la justice pour mineurs; de cas de violence policière; de la vente et du trafic d'enfants; des enfants placés en domesticité.
En ce qui concerne la question de la domesticité, la délégation a expliqué qu'il s'agit d'un problème incontestablement lié à la pauvreté et plus particulièrement au dénuement dans lequel se trouvent nombre de familles paysannes.
La délégation a en outre reconnu l'existence d'un problème s'agissant de la nationalité des enfants haïtiens nés en République dominicaine dans la mesure où ils ne sont pas reconnus comme Dominicains par les autorités dominicaines. Étant donné qu'aucune démarche n'est engagée par leurs parents pour faire valoir leur droit à la nationalité haïtienne, souhaitant qu'ils obtiennent la nationalité dominicaine, leur situation reste incertaine, a expliqué la délégation, regrettant une discrimination à l'égard de ces enfants de la part des autorités dominicaines.
Demain matin, à 10 heures, le Comité examinera le deuxième rapport périodique de l'Islande (CRC/C/83/Add.5).

Présentation du rapport d'Haïti
Présentant le rapport de son pays, M. CHARLES ETZER, Représentant permanent d'Haïti auprès des Nations Unies à Genève, a souligné qu'au cours de cette dernière décennie, Haïti vit une période de mutation démocratique marquée par un climat de tensions politiques quasi-permanent, lequel s'accompagne de difficultés budgétaires affectant l'ensemble de l'action gouvernementale. Cependant, en dépit de difficultés tant politiques qu'économiques et sociales, le Gouvernement a pu, par maintes initiatives affirmer sa volonté d'appliquer la Convention.
M. Etzer a souligné qu'au-delà de l'intégration formelle de la Convention dans la législation haïtienne, d'autres mesures spécifiques d'application des dispositions de cet instrument ont été prises. Il a reconnu que l'adoption du code de l'enfant accuse un certain retard et a indiqué que, bien qu'une proposition de loi portant adoption d'un tel code a effectivement été présentée en 1998 par une commission parlementaire, le Gouvernement a préféré prendre du temps afin d'engager un débat national sur la question, ce qui - associé à la délicate situation parlementaire nationale - explique ce retard. M. Etzer a précisé que le Ministère des affaires sociales est le principal acteur de la coordination des interventions dans le domaine des droits de l'enfant.
Le Représentant permanent d'Haïti a souligné que nombre de dispositions légales et de projets visent à favoriser le bien-être de l'enfant. Pour autant, les besoins en matière de bien-être de l'enfant sont loin d'être satisfaits, a-t-il reconnu. Au-delà d'un certain nombre de résultats encourageants, la situation reste préoccupante. Chaque année, environ 138 000 enfants haïtiens de moins de cinq ans meurent, a-t-il indiqué. En outre, 60% de ceux qui survivent ne grandissent et ne se développent par normalement. Ces données n'infirment pas, par contre, les progrès réalisés dans la réduction de la mortalité infantile, qui a diminué de 150 à 74 pour 1000 au cours de ces vingt dernières années. Le plus fort taux de réduction s'observe au cours de la période 1987 à 1993. La part du budget national allouée au Ministère des affaires soicales est passé de 9, 35% pour l'exercice 1996-1997 à 22% pour l'exercice 1999-2000, ce qui démontre l'importance accordée par le Gouvernement à la promotion de l'enfant haïtien, a souligné M. Etzer. Malgré tout, seulement 1, 7% des 120 000 enfants handicapés en âge de scolarisation fréquentent aujourd'hui des écoles spéciales, a-t-il poursuivi. Pour le moment, il n'existe pas de politique propre en faveur de ces handicapés. D'autres points de préoccupation ont trait aux enfants de la rue et aux enfants domestiques, a indiqué M. Etzer. Il a souligné que les trois objectifs principaux poursuivis par le pays dans le domaine de la santé sont l'amélioration de l'état de santé de l'enfant haïtien; la réduction de la morbidité et de la mortalité infantiles; ainsi que la promotion de la participation de la population aux actions de promotion et de protection de la santé des enfants et adolescents. Haïti vit actuellement une mutation durant laquelle il convient de bâtir la démocratie et consolider l'État, a conclu M. Etzer.
Le rapport initial d'Haïti (CRC/C/51/Add.7) indique que le Code du travail fixe à 15 ans l'âge minimum du travail rémunéré des enfants mais l'engagement se fait avec l'autorisation de la Direction du travail. Cependant, selon le Code du travail, un enfant peut être confié en domesticité déjà à partir de 12 ans avec cette fois-ci l'autorisation de l'Institut du bien-être social et de recherche (IBESR). Celui-ci, s'opposant de fait à la domesticité, n'en délivre plus. Le rapport indique également que l'âge de la majorité pénale est fixé à 16 ans environ. Néanmoins, les enfants de 13 à 16 ans qui commettent des crimes et des délits sont traduits devant le tribunal pour enfants. Seuls les mineurs de 16 ans sont passibles de la Cour d'assises des mineurs. La responsabilité pénale (condamnation) et les mesures privatives de liberté (détention) ne frappent pas les enfants à proprement parler, ajoute le rapport. Le mineur de moins de 13 ans bénéficie du principe de l'irresponsabilité pénale, poursuit le rapport avant d'ajouter que ne peuvent être prononcées contre eux que des mesures de protection, d'assistance, de surveillance et d'éducation. Pour la période 1994-1999, le service d'adoption de l'IBESR a enregistré 338 cas d'adoption intrafamiliale pour 2 097 à l'étranger. Les adoptions au niveau national sont réalisées dans le groupe d'âge de 10 à 15 ans tandis que celles enregistrées à l'étranger se situent dans le groupe d'âge de 1 à 3 ans.
Le rapport indique par ailleurs que le Plan stratégique de prise en charge globale de l'enfant (1997-2000) vise avant tout la réduction de la morbidité et de la mortalité infantiles. Par définition même, le Plan consiste en une démarche de prise en charge simultanée d'un ensemble de pathologies qui, dans leur association constante, sont à l'origine de la morbidité et de la mortalité chez les enfants, particulièrement dans le groupe d'âge 0 à 5 ans.
S'agissant de l'éducation, le rapport souligne notamment que durant la période 1994-1998, le taux net de scolarisation (enfants de 6 à 11 ans) est de 6, 7% contre 3, 13% sous le coup d'État. Selon les estimations, indique par ailleurs le rapport, le nombre d'enfants de la rue variait en 1991 entre 1 500 et 2 000. Aujourd'hui, leur nombre aurait augmenté de 300%.
Le rapport souligne d'autre part que la domesticité des enfants est une pratique de fait condamnée par les instances publiques. Certes, l'idée de l'adoption de mesures contraignantes par l'État pour interdire la domesticité présente l'avantage d'être facile au regard de la Convention, poursuit le rapport. Mais elles seront de nul effet si elles ne s'accompagnent pas de mesures supplémentaires pour permettre aux parents de répondre à certaines exigences quotidiennes, car les familles qui confient leurs enfants en domesticité le font parce qu'elles n'ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins. Il s'ensuit que la domesticité leur apparaît bien souvent aussi comme un ascenseur social.

Examen du rapport
MME AWA N'DEYE OUEDRAOGO, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport haïtien, a relevé qu'Haïti est un pays très pauvre où le taux de chômage atteint les 70%. Elle a rappelé qu'Haïti est en outre un pays qui subit des sanctions de l'Union européenne. Mme Ouedraogo a par ailleurs souligné que ce pays n'a ratifié aucune des conventions régionales interaméricaines, pas plus qu'il n'a ratifié les conventions n°138 et 182 de l'OIT sur l'âge minimum d'accès à l'emploi et l'élimination des pires formes de travail des enfants. Le rapport suit dans une large mesure les directives du Comité concernant l'élaboration des rapports des États parties, a toutefois relevé Mme Ouedraogo. Il n'en demeure pas moins que ce document comporte des lacunes considérables, a-t-elle poursuivi. À titre d'exemple, il n'aborde absolument pas les mesures prises pour lutter contre le VIH/sida, a-elle fait observer. L'experte s'est enquise de la situation politique qui prévaut actuellement dans le pays. Un parlement a-t-il été désigné, a-t-elle demandé, relevant que l'absence de parlement est un facteur de blocage évoqué tout au long du rapport haïtien?
Mme Ouedraogo s'est également demandée si la Convention relative aux droits de l'enfant avait déjà été invoquée devant les tribunaux haïtiens. L'experte a en outre relevé que la législation haïtienne aborde davantage les droits de l'enfant sous l'angle du bien-être de l'enfant que sous l'angle des droits de l'enfant. Elle s'est inquiétée que selon le Code du travail, un enfant puisse être confié en domesticité à partir de l'âge de 12 ans.
Il semble qu'il existe en Haïti une forte discrimination à l'égard des femmes, ainsi qu'à l'égard des enfants nés hors mariage, a relevé un membre du Comité. Un autre membre du Comité s'est inquiété des informations selon lesquelles 25% des enfants haïtiens seraient séparés de leurs parents.
S'agissant de la situation politique actuelle du pays, la délégation a rappelé que des discussions se sont engagées entre le Gouvernement et l'opposition. Une résolution a été adoptée par l'Organisation des États américains (OEA) aux termes de laquelle des élections anticipées doivent se tenir en Haïti au début de cette année, a rappelé la délégation. Pour l'heure, on discute encore des modalités de mise en œuvre de cette résolution, a-t-elle indiqué. Le Parlement haïtien ne fonctionne toujours pas et cela explique les nombreux retards enregistrés dans plusieurs domaines, s'agissant notamment du Code de l'enfant, a par ailleurs souligné la délégation.
Il est difficile de savoir s'il existe une politique globale de l'enfant en Haïti car chaque ministère dispose de sa propre ligne d'action dans ce domaine, a par ailleurs déclaré la délégation. Il n'en demeure pas moins que c'est au Ministère des affaires sociales que revient le rôle de coordonner ces différentes lignes d'action.
La délégation a indiqué que Haïti travaille d'ores et déjà à la signature de la Convention contre la torture. Les deux protocoles facultatifs se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant devraient également être ratifiés prochainement, a indiqué la délégation. Il en va de même pour ce qui est du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, a-t-elle ajouté.
En ce qui concerne la question de la domesticité, la délégation a expliqué qu'il s'agit d'un problème incontestablement lié à la pauvreté et plus particulièrement au dénuement dans lequel se trouvent nombre de familles paysannes. Nombre d'enfants placés en domesticité sont battus, a reconnu la délégation. Mais il faut aussi relever que, dans les familles aisées, nombre d'enfants domestiques sont bien traités et sont même envoyés à l'école, certains parvenant même à aller jusqu'à l'Université. La situation est certes très différente pour les enfants placés en domesticité dans des familles pauvres, a admis la délégation. Elle a toutefois souligné que la domesticité est désormais condamnée en Haïti et que l'Institut qui délivrait les permis dans ce domaine n'en délivre plus aujourd'hui. La délégation a estimé que pour lutter efficacement contre ce phénomène de domesticité, il faudrait avant tout mettre en œuvre une politique de développement dans les campagnes, afin que les parents soient moins enclins à envoyer leurs enfants travailler dans les villes. «Il ne faut pas se faire d'illusion, a poursuivi la délégation: ce n'est qu'avec le développement du pays que la question sera résolue».
S'agissant de la définition de l'enfant, la délégation a indiqué qu'en Haïti, est considéré comme mineur tout individu qui n'a pas atteint l'âge de 18 ans. Le Code civil, hérité du Code Napoléon, date du XIXe siècle, a par ailleurs rappelé la délégation. Dans la pratique, une jeune fille qui est enceinte peut contracter mariage avant 18 ans avec le consentement de ses parents, a-t-elle indiqué.
En ce qui concerne les sévices corporels, la délégation a indiqué qu'en octobre 2001, le Parlement haïtien a adopté une loi sur la protection de l'enfant protégeant l'enfant haïtien contre ce type de sévices.
Plusieurs experts ayant fait part de leur préoccupation face à la situation des enfants haïtiens nés en République dominicaine, la délégation a reconnu l'existence d'un problème s'agissant de la nationalité de ces enfants dans la mesure où ils ne sont pas reconnus comme Dominicains par les autorités dominicaines. Certes, aux termes de la Constitution haïtienne, ils sont reconnus comme étant des Haïtiens, mais étant donné qu'aucune démarche n'est engagée par leurs parents pour faire valoir ce droit à la nationalité haïtienne, leur situation reste incertaine, a expliqué la délégation. En fait, les parents de ces enfants souhaiteraient que leurs enfants obtiennent la nationalité dominicaine, a-t-elle insisté. Il s'agit en fait, a poursuivi la délégation, d'une discrimination à l'égard des enfants haïtiens de la part des autorités dominicaines puisque la loi dominicaine dans ce domaine reconnaît en principe le jus soli.
Tout enfant né de parents haïtiens est Haïtien, a d'autre part rappelé la délégation. La loi prévoit que tout enfant ayant renoncé à sa nationalité haïtienne au profit d'une autre nationalité puisse retrouver sa nationalité d'origine, a ajouté la délégation.
En ce qui concerne les questions de santé, la délégation a indiqué qu'une aide financière a été accordée à des familles de personnes atteintes du VIH/sida. Bien entendu, étant donné les difficultés financières auxquelles est confronté le pays, le nombre de familles ayant pu bénéficier de cette aide n'est pas très élevé, a précisé la délégation. Elle a en outre mis l'accent sur les campagnes d'information menées auprès de la population haïtienne afin de prévenir la propagation du VIH/sida.
Pour ce qui est de l'allaitement maternel, la délégation a indiqué que des efforts sont déployés dans le pays pour élargir l'initiative «Hôpitaux pour bébés» à l'ensemble du pays.
En principe, l'avortement est interdit en Haïti, a déclaré la délégation. Mais en réalité, les cas d'interruption volontaire de grossesse sont courants et relativement bien acceptés dans la société, a-t-elle affirmé. Un nombre croissant de jeunes femmes enceintes vont à l'école même s'il est vrai que des efforts restent à consentir dans ce domaine, a par ailleurs déclaré la délégation. La discrimination à l'égard des femmes et des jeunes filles reste un problème en Haïti, a-t-elle reconnu. Des cas d'agressions sexuelles en milieu scolaire imputables à des enseignants ont été rapportés, même si cela reste à prouver, a en outre indiqué la délégation.
En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a notamment indiqué que l'âge normal d'entrée dans le système scolaire se situe à 5 ans. En Haïti, l'enseignement est obligatoire et gratuit, tout au moins dans les établissements publics, a ajouté la délégation.
S'agissant de l'administration de la justice pour mineurs, la délégation a indiqué que la réforme judiciaire qu'entendent mener à bien les autorités vise la révision des différents codes dont la plupart contiennent des dispositions qui sont aujourd'hui dépassées. Des fonds sont nécessaires pour mener cette réforme à terme, a souligné la délégation haïtienne.
La délégation a par ailleurs souligné que la législation pénale haïtienne distingue plusieurs catégories de mineurs. Ainsi, les mineurs de moins de 13 ans ne peuvent pas faire l'objet de poursuites pénales. On ne peut que leur adresser une admonestation ou infliger une amende à leurs parents. Les mineurs de 13 à 16 ans peuvent être poursuivis devant les tribunaux pour enfants; la loi prévoit que des tribunaux pour enfants soient créés dans chacune des 15 divisions administratives du pays, mais ces tribunaux n'existent pas encore, a reconnu la délégation. Néanmoins, des cours sont actuellement prévus afin que des juges reçoivent une formation spéciale dans ce domaine, a-t-elle précisé. Au-delà de 16 ans, les mineurs sont présentés devant une cour d'assises spéciale pour enfants, a déclaré la délégation.
Un membre du Comité a relevé que la plupart des enfants arrêtés sont placés en détention préventive pendant une longue période, allant parfois jusqu'à deux ans. Certains membres du Comité s'étant enquis des mesures prises pour prévenir la violence policière, la délégation a reconnu que des informations relatent, certes, quelques cas de violence policière. Mais on ne peut pas dire qu'il existe dans le pays une violence policière systématique, a-t-elle assuré. La police est en effet tenue d'exercer ses attributions dans le cadre de la loi et en veillant au respect des droits de l'homme.
En ce qui concerne la vente et le trafic d'enfants, la délégation a admis ne pas être en mesure d'affirmer que ces phénomènes n'existent pas. Mais si cela existe, il s'agit de cas très rares que la loi interdit d'ailleurs expressément, a-t-elle souligné. Un membre du Comité a néanmoins fait état d'informations selon lesquelles près de 2 500 enfants haïtiens auraient été victimes de trafic vers la République dominicaine. Après avoir rappelé que ces chiffres émanent d'une étude de l'UNICEF, la délégation a affirmé que cette étude n'est qu'un premier pas et a souligné que les autorités haïtiennes ont pris un certain nombre de mesures afin de lutter contre ce phénomène. Ainsi, les contrôles aux frontières ont-ils été renforcés, a notamment indiqué la délégation. Quoi qu'il en soit, la solution à ce problème ne saurait être purement législative, a-t-elle affirmé. Il s'agit en effet aussi d'un problème de développement, a-t-elle Souligné.
Les données concernant la prostitution enfantine font défaut, a souligné la délégation. Quant au tourisme sexuel, la question se pose avec moins d'acuité en Haïti que cela n'est le cas ailleurs, pour la simple raison que le tourisme – déjà faible – est déclinant du fait de la situation politique qui prévaut ces dernières années, a déclaré la délégation.
À l'invitation du Président du Comité, un représentant de l'UNICEF a notamment indiqué que l'UNICEF travaille avec l'IBESR par le biais du Ministère des affaires sociales. Il a fait état de progrès dans le secteur de la santé, beaucoup plus que dans les secteurs de l'éducation ou de la protection de l'enfance, a-t-il affirmé.

Observations préliminaires
Présentant des observations préliminaires sur ce rapport, Mme Awa N'Deye Ouedraogo, rapporteuse du Comité pour l'examen de la situation des droits de l'enfant en Haïti, a notamment remercié la délégation pour les efforts qu'elle a fournis afin de répondre aux questions du Comité en dépit du fait que les membres de la délégation ne soient pas des experts en matière de droits de l'enfant.
Haïti rencontre d'énormes difficultés pour mettre en œuvre la Convention en raison des problèmes politiques, institutionnels, structurels et financiers qui se posent au pays, a déclaré Mme Ouedraogo. Elle a exprimé l'espoir qu'après les élections, des progrès pourront être accomplis en matière de mise en œuvre de la Convention. Il faut en outre qu'Haïti adopte une approche axée davantage sur les droits de l'enfant. Il serait également nécessaire que les autorités haïtiennes établissent des priorités afin de tirer le meilleur parti des maigres ressources dont elles disposent. La création d'un mécanisme de contrôle de la mise en œuvre de la Convention s'avère également nécessaire, a estimé l'experte.
Mme Ouedraogo a par ailleurs rappelé que les membres du Comité sont gravement préoccupés par le système d'enregistrement des naissances, qui doit être amélioré. La question de l'apatridie s'est également posée dans le contexte des enfants haïtiens nés en République dominicaine, a rappelé l'experte. Elle a d'autre part estimé que le problème de la domesticité mérite de faire l'objet d'un débat national afin que soient trouvés les moyens d'aborder au mieux cette question, compte tenu du fait qu'il s'agit d'une pratique profondément ancrée dans la culture. En dehors du phénomène de la domesticité, le travail des enfants n'est pas sans poser quelques problèmes et il faut espérer qu'Haïti maintiendra une relation étroite avec l'Organisation internationale du travail sur cette question. Mme Ouedraogo a ajouté que le système de justice pour mineurs doit également être réformé.
La délégation haïtienne a remercié les experts pour la compréhension dont ils ont fait preuve à son égard. Elle a assuré que les questions qui n'ont pas obtenu de réponse aujourd'hui seront transmises à la capitale pour qu'il y soit répondu ultérieurement. Le Gouvernement haïtien est conscient des problèmes et de leur ampleur, mais la démarche visant à les résoudre est une œuvre de longue haleine, a souligné la délégation.



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