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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT DE LA SUÈDE

11 Janvier 2005

Comité des droits de l'enfant
11 janvier 2005


Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le troisième rapport périodique de la Suède sur l'application par ce pays des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Dans des observations préliminaires présentées en fin de journée, Mme Nevena Vuckovic-Sahovic, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Suède, a affirmé que dans ses observations finales, le Comité insistera probablement sur certaines de ses observations antérieures qui n'ont pas été suffisamment suivies d'effet et pourraient de ce fait être réitérées. Le Comité recommandera probablement à la Suède de prendre de nouvelles mesures afin de lutter contre la discrimination, a-t-elle indiqué. Les observations finales du Comité devraient en outre traiter, entre autres, de la question du harcèlement à l'école ainsi que des objectifs de l'éducation et de l'accès à l'éducation, a-t-elle ajouté. Il pourrait également être recommandé à la Suède de renforcer les efforts déployés en faveur des enfants victimes de l'exploitation sexuelle ou exposés à ce type d'exploitation.

Mme Moushira Khattab, co-rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport suédois, a pour sa part souligné que les enfants, en Suède, ont beaucoup de chances, même si certaines inquiétudes persistent à l'égard des requérants d'asile et des immigrants illégaux.

Les observations finales du Comité sur ce rapport seront adoptées en séance privée et rendues publiques à la fin de la session, le vendredi 28 janvier 2005.

À l'instar du Président du Comité, M. Jacob Egbert Doek, tous les experts ont présenté à la Suède leurs condoléances pour le grand nombre de victimes suédoises qui ont péri dans le raz-de-marée du 26 décembre dernier en Asie du sud-est.

Présentant le rapport de son pays, Mme Elisabet Borsiin Bonnier, Représentante permanente de la Suède auprès des Nations Unies à Genève, a souligné que depuis que la Suède a ratifié la Convention, il y a quinze ans, le Gouvernement a été confronté à une société en mutation et à des défis nouveaux et a donc dû adapter ses politiques et stratégies afin de s'acquitter de ses obligations en vertu de la Convention. La stratégie du Gouvernement en matière de promotion des droits de l'enfant a été évaluée, ce qui a abouti à l'élaboration d'une stratégie révisée présentée au Parlement en janvier 2004, a précisé Mme Borsiin Bonnier. L'évaluation menée à cette occasion a conclu que si d'importants progrès ont été réalisés, beaucoup reste à faire pour promouvoir et soutenir diverses autorités et municipalités dans leur travail de mise en œuvre. Dans le projet de budget présenté au Parlement pour 2005, le Gouvernement a suggéré que, pour les années à venir, la priorité soit notamment accordée aux mesures de soutien aux enfants des familles pauvres; aux enfants et jeunes souffrant de problèmes de santé mentale; et aux enfants sexuellement exploités ou abusés.

La délégation suédoise était également composée de représentants du Ministère de la justice, du Ministère de la santé et des affaires sociales, du Ministère des affaires étrangères, du Ministère de l'éducation et des sciences, ainsi que de la Mission permanente de la Suède auprès des Nations Unies à Genève. Elle a apporté aux experts des compléments d'information en ce qui concerne, notamment, la coopération avec les ONG; l'institution de l'Ombudsman des enfants; la promotion de l'intégration et la lutte contre les discriminations; les harcèlements à l'école; les enfants vivant dans la pauvreté; les questions relatives à l'environnement familial; les arrestations et violences policières qui se sont produites durant le Sommet de Goteborg en 2001; la lutte contre les abus sexuels; la situation des enfants immigrants en situation irrégulière au regard de l'accès à l'éducation; les enfants handicapés; les questions d'adoption; ainsi que les enfants requérants d'asile non accompagnés et les disparitions d'enfants.

Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l'examen du rapport initial de l'Albanie (C RC/C/11/Add.27).


Présentation du rapport de la Suède

Présentant le rapport de son pays, MME ELISABET BORSIIN BONNIER, Représentante permanente de la Suède auprès des Nations Unies à Genève, a indiqué que son pays avait initialement envisagé d'envoyer devant le Comité, en tant que chef de la délégation suédoise, le Secrétaire d'État au Ministère des affaires sociales, M. Staffan Bengtsson; mais le raz-de-marée du 26 décembre, durant lequel un grand nombre de victimes suédoises ont péri, a obligé ce dernier à modifier ses plans et à rester en Suède afin de répondre aux questions urgentes qui se posent suite à cette gigantesque catastrophe naturelle qui est aussi une tragédie humaine.

Mme Borsiin Bonnier a par ailleurs souligné que depuis que le pays a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant, il y a quinze ans, le Gouvernement suédois a été confronté à une société en mutation et à des défis nouveaux et a donc dû adapter ses politiques et stratégies afin de s'acquitter de ses obligations en vertu de la Convention. La Représentante permanente de la Suède a rappelé que la pierre angulaire des politiques de son pays relatives à l'enfance réside dans la mise en œuvre de la Convention au sein de la société suédoise. Cette approche a trouvé sa concrétisation dans une stratégie unanimement adoptée par le Parlement en 1999, a fait valoir Mme Borsiin Bonnier. L'un des éléments clefs de cette stratégie consiste à faire en sorte que tous les programmes d'éducation supérieure à l'attention des groupes professionnels incluent une formation à la Convention et à son contenu. L'Agence nationale pour l'éducation supérieure s'est vue confier la tâche d'assurer que les institutions d'enseignement supérieur incorporent la Convention dans leurs programmes d'éducation. Mme Borsiin Bonnier a d'autre part souligné qu'une quarantaine d'institutions gouvernementales ont été priées d'adopter une approche soucieuse des droits de l'enfant. Les autorités locales et régionales sont les principaux acteurs du travail de mise en œuvre des mesures prises en faveur des droits de l'enfant, a ajouté la Représentante permanente. Elle a précisé que les mesures législatives, l'allocation de ressources de l'État et les mesures spéciales d'incitation financière figurent au nombre des principaux instruments dont dispose le Gouvernement pour soutenir le travail en faveur de l'enfance au niveau local.

L'Ombudsman (médiateur) des enfants joue un rôle important en matière de promotion de la Convention ainsi qu'en matière de surveillance de la mise en œuvre de cet instrument, a poursuivi Mme Borsiin Bonnier. En 2002, la loi relative à cet Ombudsman a été amendée et son mandat a été renforcé, a-t-elle fait valoir. L'Ombudsman s'est vu octroyé, à cette occasion, un supplément de ressources, a-t-elle ajouté.

La Représentante permanente de la Suède a précisé que la stratégie du Gouvernement suédois en matière de promotion des droits de l'enfant a été évaluée, ce qui a abouti à l'élaboration d'une stratégie révisée qui a été présentée au Parlement en janvier 2004. L'évaluation menée à cette occasion a conclu que si d'importants progrès ont été réalisés, beaucoup reste à faire pour promouvoir et soutenir diverses autorités et municipalités dans leur travail de mise en œuvre. Dans le projet de budget présenté au Parlement pour 2005, le Gouvernement a suggéré que, pour les années à venir, la priorité soit notamment accordée aux mesures de soutien aux enfants des familles pauvres; aux enfants et jeunes souffrant de problèmes de santé mentale; et aux enfants sexuellement exploités ou abusés. En 2003, a ajouté Mme Borsiin Bonnier, le Gouvernement suédois a adopté un Plan national d'action contre les mutilations génitales féminines et a accueilli une conférence internationale sur cette question. La Suède a également accueilli en novembre dernier une conférence internationale sur la violence perpétrée, en rapport avec l'honneur, à l'encontre les femmes et les fillettes, l'objectif étant de mettre un terme à la pratique des crimes d'honneur.

Le troisième rapport périodique de la Suède (CRC/C/125/Add.1) indique que les comparaisons effectuées au plan international et historique confirment que les enfants, en Suède, sont dans de bonnes conditions; mais de graves insuffisances peuvent actuellement être relevées, et beaucoup d'entre eux sont victimes de négligence ou de mauvais traitements. La crise économique des années 1990 a été suivie d'importantes restrictions des dépenses publiques, poursuit le rapport avant de souligner que les réductions des dépenses sont des mesures douloureuses. Néanmoins, ajoute le rapport, l'important redressement récent des finances publiques allié à la baisse des taux de chômage a eu pour conséquence une amélioration de la situation des enfants et des familles. L'aide financière à ces dernières s'est accrue et d'autres améliorations sont en cours. Les conseils municipaux et les conseils de département peuvent à nouveau affecter des ressources au renforcement des activités et des services pour les enfants et les jeunes. En Suède, ce sont essentiellement ces conseils qui ont la responsabilité des services et de l'aide pour les jeunes, à savoir les écoles, les garderies pour les enfants d'âge préscolaire et scolaire, les soins de santé et les soins médicaux, ainsi que les services sociaux. Le Gouvernement considère qu'une partie des ressources largement accrues qui sont actuellement mises à la disposition des municipalités suédoises - à la suite de l'augmentation des subventions de l'État et des recettes de l'impôt sur le revenu - pourrait être utilisée pour améliorer la qualité des services offerts aux enfants. Il existe, dans différents secteurs, un certain nombre de tendances inquiétantes qu'il convient de prendre au sérieux et qui exigent à la fois des mesures générales et des mesures ciblées, précise par ailleurs le rapport. Parmi elles, on note la prévalence croissante des allergies et une détérioration perceptible de la santé mentale des enfants et des jeunes. Il convient également de se préoccuper de la situation des parents célibataires, ainsi que des problèmes particuliers auxquels doivent faire face les jeunes filles dans certaines circonstances. Le stress et le surmenage professionnels sont récemment devenus préoccupants, surtout en raison de la forte augmentation du nombre de congés de maladie de longue durée. L'alourdissement de la charge de travail dans l'entreprise a également un coût qui s'évalue en réduction du temps et de l'énergie pouvant être consacrés à des activités extérieures. Il n'est pas déraisonnable que l'enfant demande que ces dernières lui soient en partie consacrées.

Le rapport souligne d'autre part que des règles claires concernant la lutte contre les brimades à l'école ont été introduites dans la loi sur l'éducation; cependant, pour que cela soit efficace, il faut que chaque école applique des mesures préventives et correctives dans ce domaine. Faisant observer qu'aujourd'hui, un écolier sur quatre est d'origine étrangère (c'est-à-dire que l'un de ses parents, au moins, est né hors de Suède), le rapport précise que des mesures pour combattre la discrimination et la ségrégation sont en cours de mise en oeuvre à différents niveaux et dans le cadre de divers projets, y compris le plan national de développement des zones urbaines. En mars 1999, ajoute le rapport, le Riksdag (Parlement) suédois a approuvé à l'unanimité une stratégie nationale proposée par le Gouvernement pour l'application, en Suède, de la Convention; elle était fondée sur la proposition contenue dans le rapport intitulé Faire passer avant tout l'intérêt supérieur de l'enfant élaboré en 1997 par le Comité interparlementaire des droits de l'enfant. Pour rendre efficace la mise en oeuvre de la stratégie et les efforts destinés à renforcer les droits de l'enfant, un organe de coordination avec un directeur responsable a été créé au sein du Ministère des affaires sociales, indique le rapport.

Le rapport fait observer qu'en 1999, 3,6% des enfants âgés de 0 à 17 ans vivaient dans des foyers dont la situation financière était précaire (c'est-à-dire disposant d'un revenu annuel inférieur à 50% du revenu moyen disponible pour l'ensemble de la population). Au printemps de 2001, 79,2% des élèves de troisième - et dernière - année d'enseignement secondaire de deuxième cycle ont obtenu leur diplôme de fin d'études secondaires, ce qui représente une baisse de 3,5% par rapport à l'année scolaire précédente. Cette baisse du pourcentage de réussites finales a été partiellement due à un amendement à l'ordonnance relative à l'enseignement secondaire de deuxième cycle qui est entré en vigueur le 15 septembre 2000 et en vertu duquel les enseignants ne peuvent pas attribuer des notes permettant d'obtenir les diplômes de fin d'études s'ils n'ont pas les moyens suffisants d'évaluer les résultats d'un élève en raison de son absentéisme scolaire.

Le rapport rappelle par ailleurs que toute personne qui désire se marier en Suède doit faire légalement entériner son droit au mariage dans le pays dont elle est citoyenne. Toutefois, un ressortissant étranger peut faire attester ce droit en vertu de la loi suédoise à condition d'être domicilié en Suède depuis deux ans au moins. Dans une note ministérielle de 2002, le Ministère de la justice propose que toute enquête sur les obstacles juridiques à un mariage devant avoir lieu en Suède soit effectuée conformément à la loi suédoise. C'est l'âge minimum du mariage en Suède (18 ans) qui serait ainsi retenu quelle que soit la nationalité de l'intéressé et l'autorisation de se marier avant l'âge de 18 ans ne serait accordée qu'à titre exceptionnel. Cette note propose aussi que, dans le cas où une personne ayant des liens avec la Suède se marie dans un pays étranger selon les lois de ce pays, alors que ce mariage lui serait interdit en Suède devant une instance suédoise, ce mariage ne puisse pas être considéré comme valide en Suède. Une autre proposition de ce texte est que la loi soit amendée spécifiquement pour empêcher que puissent être reconnus les mariages forcés.

Le 1er juillet 2001, une nouvelle loi sur la nationalité suédoise est entrée en vigueur, qui dispose que tout enfant de mère suédoise acquiert automatiquement la nationalité suédoise à la naissance. Dans le cas où le père est le seul parent de nationalité suédoise, l'enfant acquiert automatiquement la citoyenneté suédoise si les parents sont mariés. S'ils ne sont pas mariés, il faut, pour cela, qu'il soit né en Suède. Tout enfant né à l'étranger acquiert la nationalité suédoise si son père le demande avant que l'enfant n'atteigne l'âge de 18 ans. Tout enfant de nationalité non suédoise acquiert la nationalité suédoise à la demande (notification) de la personne qui en a la garde à la condition qu'elle soit titulaire d'un permis de résidence permanent et soit domiciliée en Suède depuis cinq ans au moins. Le consentement de l'enfant est nécessaire s'il est âgé de 12 ans révolus.



Examen du rapport

MME NEVENA VUCKOVIC-SAHOVIC, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Suède, a présenté ses condoléances au Gouvernement et au peuple suédois qui ont été fortement touchés par la catastrophe qui a frappé l'Asie du sud-est.

Mme Vuckovic-Sahovic a souligné que la Suède jouit d'une très bonne réputation pour ce qui est du respect des droits de l'enfant, une partie de ce succès s'expliquant par le fait que ce pays n'hésite pas à prendre note de ses lacunes et à essayer d'y remédier. En outre, la Suède consacre une part importante de son PIB à l'aide publique au développement, dont une bonne partie est affectée aux enfants. Mme Vuckovic-Sahovic a toutefois relevé que la Suède n'a toujours pas ratifié le Protocole à la Convention qui traite de la vente d'enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie impliquant des enfants.

Le Gouvernement suédois applique-t-il à sa politique intérieure la même perspective soucieuse des droits que celle qu'il exige des autres pays auxquels il apporte une aide au développement, s'est par ailleurs enquise Mme Vuckovic-Sahovic? La Suède n'a pas manqué de déployer des efforts pour lutter contre l'intolérance, le racisme et la xénophobie, en particulier dans les écoles, a-t-elle poursuivi; pour autant, le racisme existe et les enfants qui ne sont pas nés en Suède - ou ceux dont les parents ne sont pas nés dans le pays - sont victimes de brimades. Pourquoi existe-t-il une différence d'attitude à l'égard des races, des croyances religieuses et des langues qui sont différentes? Que pourrait-on faire de plus pour surmonter ces différences? Les enfants eux-mêmes affirment qu'ils ne fréquentent pas les enfants de race différente qui vivent en Suède, a relevé Mme Vuckovic-Sahovic. Elle s'est également enquise de l'éventuel lien qui pourrait exister entre cette problématique et les questions de sécurité voire les menaces de terrorisme.

Mme Vuckovic-Sahovic a en outre fait part de sa préoccupation suite aux nombreux cas d'usage excessif de la force par la police, qui se sont soldés par de graves blessures voire la mort, s'agissant notamment de personnes placées en garde à vue ou encore lors du Sommet européen de Goteborg en 2001. Durant ce Sommet, 141 enfants de moins de 18 ans ont été détenus par la police, a insisté l'experte. Elle a souligné que les organisations non gouvernementales (ONG) ont également exprimé leurs préoccupations face aux arrestations massives et aux longues privations de liberté; les ONG estiment en outre que les droits des enfants de se rassembler et de manifester ont été violés.

Mme Vuckovic-Sahovic a d'autre part mis l'accent sur la difficulté qu'il y a à fixer la limite entre la nécessité de protéger l'enfant contre tout abus ou négligence et la nécessité pour l'État de ne pas intervenir excessivement dans la vie familiale. Elle a par ailleurs regretté le manque de statistiques s'agissant du nombre d'enfants jugés comme des adultes et du nombre de cas de violence ou de mauvais traitements contre des enfants placés en détention.

MME MOUSHIRA KHATTAB, co-rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport suédois, a relevé que l'Ombudsman (médiateur) des enfants n'est pas habilité à engager des poursuites individuelles et se retrouve de ce fait à traiter des dossiers d'un point de vue général, ce qui ne manque pas, à long terme, d'entamer sa légitimité. Mme Khattab a par ailleurs souhaité obtenir des données plus précises sur les victimes d'exploitation sexuelle. Relevant qu'une personne de moins de 18 ans peut, dans des circonstances exceptionnelles, être condamnée à une peine de prison, Mme Khattab s'est enquise de la nature de ces circonstances exceptionnelles. Elle s'est également enquise de la situation des enfants immigrants en situation irrégulière. Mme Khattab a relevé l'existence d'une forme de discrimination, en matière de garde d'enfants, à l'encontre des parents non-Suédois ; en effet, les tribunaux suédois accordent rarement la garde des enfants aux parents qui ne sont pas Suédois. Le risque de vivre dans une famille pauvre est quatre fois plus élevé pour les enfants vivant dans des foyers dont les parents ne sont pas Suédois, a par ailleurs souligné l'experte.

Un autre expert a souhaité en savoir davantage sur la politique relative aux enfants handicapés, lesquels sont davantage susceptibles que les autres enfants d'être victimes de discrimination.

Un membre du Comité a fait part de sa préoccupation face au regain d'attitudes racistes dans les écoles.

Un autre membre du Comité a fait observer que la pauvreté enfantine est un phénomène croissant en Suède et s'est enquis de ce qui est envisagé pour prendre en compte ces "poches de pauvreté", sur lesquelles il conviendrait de se pencher dans les plus brefs délais.

Les membres du Comité ont présenté à la Suède leurs condoléances pour le grand nombre de victimes suédoises qui ont péri dans la catastrophe qui a frappé le 26 décembre dernier l'Asie du sud-est.


Renseignements complémentaires fournis par la délégation suédoise

En ce qui concerne les données statistiques, la délégation a souligné qu'à l'instar de nombreux autres pays européens, la Suède ne recueille aucune statistique qui soit fondée sur des considérations telles, par exemple, que l'appartenance religieuse. Le Gouvernement n'est pas disposé à revenir sur sa position concernant cette approche de la collecte des données, a souligné la délégation.

En ce qui concerne la coopération avec les organisations non gouvernementales (ONG), la délégation a affirmé que le rôle de ces organisations est très important, notamment pour ce qui est de surveiller la mise en œuvre de la Convention. Les autorités suédoises entretiennent un bon dialogue avec les ONG, a assuré la délégation. Elle a précisé que le troisième rapport périodique de la Suède a été publié en 5 000 exemplaires et diffusé dans toutes les municipalités et toutes les bibliothèques publiques, une note d'accompagnement précisant que des exemplaires supplémentaires pouvaient être envoyés sur demande.

S'agissant de l'Ombudsman des enfants, la délégation a indiqué que ce médiateur a deux missions: appliquer la Convention relative aux droits de l'enfant en Suède et travailler au nom des enfants dans ce pays. Il est vrai que l'Ombudsman des enfants n'est pas habilité à s'occuper de cas individuels, mais cela n'érode en rien sa légitimité, a ajouté la délégation. Ce médiateur se distingue des autres médiateurs (ils sont six en Suède, au total) en ce sens qu'il doit faire œuvre de persuasion auprès des autorités locales et régionales pour qu'elles appliquent les dispositions de la Convention, alors qu'il est difficile aux autres médiateurs de s'impliquer de la sorte dans le travail et la politique des autorités locales. Pour sa part, le Médiateur pour les personnes handicapées, institution créée en 1994, a pour mission de surveiller toutes les questions en rapport avec les droits des personnes handicapées, a poursuivi la délégation. D'un point de vue général, les autorités suédoises sont en train de procéder à une évaluation du système de l'ombudsman, mais aucune conclusion n'est pour l'heure disponible, a précisé la délégation.

S'agissant du rôle des municipalités en matière de promotion des droits de l'enfant et de l'aide qui leur est apportée de ce point de vue par l'État, la délégation a rappelé que les municipalités et les conseils de comtés sont autonomes, personne ne pouvant intervenir directement dans leurs politiques. Le Gouvernement central ne peut donc que s'efforcer de convaincre ces instances locales de prendre les bonnes décisions. Il n'en demeure pas moins que le Gouvernement peut user de mesures incitatives, en octroyant par exemple des fonds de l'État aux municipalités qui souhaitent recruter du personnel pour des jardins d'enfants. Prochainement, les autorités suédoises vont publier un ouvrage rassemblant les bonnes pratiques en matière de promotion des droits de l'enfant afin d'inciter les gouvernements locaux à adopter de telles pratiques.

Exposant les mesures prises par la Suède pour promouvoir l'intégration et lutter contre les discriminations, la délégation a notamment souligné que des bureaux de lutte contre la discrimination ont, avec l'aide du Gouvernement, été mis en place dans nombre de municipalités. En outre, une loi sur la discrimination ethnique est entrée en vigueur et le pays s'est doté d'un Plan national d'action contre le racisme et la discrimination. Un Centre contre le racisme, composé de plus 100 ONG et financé par le Gouvernement, a même été récemment mis en place, a insisté la délégation. À l'heure actuelle, un projet de loi sur les nouveaux immigrants est en cours d'examen qui vise une meilleure intégration de ces personnes; ce projet doit être examiné par le Parlement au printemps prochain, a également indiqué la délégation. Sans nier qu'il puisse exister en Suède des problèmes de discrimination - sur les lieux de travail, notamment - la délégation a toutefois fait valoir que contrairement à ce qui était le cas il y a dix ans, aucun parti xénophobe ne siège au Parlement.

Le personnel scolaire se doit de promouvoir la compréhension et la tolérance, conformément aux objectifs fixés dans la loi sur l'éducation, a poursuivi la délégation Aujourd'hui, la Suède est une société multiculturelle dont 20% des habitants sont nés hors de la Suède ou ont au moins un de leurs parents qui est né à l'étranger, a-t-elle ajouté. Les valeurs fondamentales - telles que l'égalité de tous, indépendamment de toute différence - se doivent de figurer au cœur du système scolaire. C'est pourquoi le Ministère de l'éducation a lancé un programme dont l'objectif était précisément de rappeler ces valeurs fondamentales à chacun des établissements du pays.

Le nombre d'élèves harcelés à l'école est en baisse, ce qui laisse à penser que les mesures prises par les autorités pour lutter contre ce phénomène portent leurs fruits, a par ailleurs indiqué la délégation.

En ce qui concerne les enfants qui vivent dans la pauvreté, la délégation a souligné que le Gouvernement, soucieux de leur sort, a entrepris de se pencher sur ce phénomène et d'en évaluer l'ampleur. Le nombre d'enfants vivant dans des familles qui éprouvent des difficultés économiques est en baisse ces dernières années, a en outre fait valoir la délégation. L'emploi et l'intégration au sein de la société sont deux facteurs qui influent particulièrement sur la situation des enfants du point de vue de leur vulnérabilité face à la pauvreté ; il s'agit donc de deux leviers qu'il convient d'activer si l'on veut lutter contre l'exclusion sociale des enfants.

Tous les enfants vivant en Suède sont couverts par la sécurité sociale, à l'exception de ceux dont la demande d'asile est en cours d'examen - pour lesquels existe un système d'assistance distinct, a en outre indiqué la délégation.

En ce qui concerne l'environnement familial, un membre du Comité a relevé que l'évolution de la société - qui se manifeste notamment par la réduction de la taille des familles, par les longues heures de travail des parents et par le peu de soutien apporté par la famille élargie - amène les enfants à se plaindre que leurs parents ne soient plus en mesure de passer suffisamment de temps avec eux. En Suède, 70% des enfants vivent avec leurs deux parents, a souligné la délégation. Il n'en demeure pas moins qu'avec l'éclatement des familles, de nouveaux problèmes se posent sur lesquels il convient de se pencher, a-t-elle ajouté.

Les circonstances dans lesquelles se déroulait en 2001 le Sommet européen de Goteborg, au cours duquel de nombreux jeunes ont été arrêtés, étaient tout à fait exceptionnelles, a par ailleurs déclaré la délégation. Il n'en demeure pas moins que la police se doit de respecter un certain nombre de principes dans le cadre de ses interventions. Pour sa part, suite aux événements de Goteborg, le chef de la police a été traduit en justice devant le tribunal de district et la Cour d'appel et a finalement été acquitté par les deux instances, a précisé la délégation.

Interrogée sur les raisons pour lesquelles la Suède n'a toujours pas ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention qui traite de la question de la vente d'enfants, la délégation a indiqué qu'un travail est en cours en vue de la ratification de cet instrument, laquelle devrait intervenir dans le courant de cette année. Si cette ratification n'est pas encore intervenue, c'est parce que la Suède a choisi avant tout de porter son attention sur les amendements législatifs à apporter au niveau interne afin que le pays soit en mesure de s'acquitter de ses obligations internationales. Ainsi, convient-il de souligner que, depuis juillet dernier, la traite d'être humain est désormais pénalisée en Suède, a fait valoir la délégation.

Certains experts s'étant inquiétés du faible nombre de personnes déférées devant les tribunaux pour abus sexuels, la délégation a souligné qu'en 2003, le Procureur général a procédé, à ce sujet, à une analyse de la situation qui a effectivement révélé que la qualité des enquêtes n'était pas satisfaisante et que trop peu de cas faisaient l'objet de poursuites devant les tribunaux. Les crimes sexuels commis contre des enfants constituent, en vertu du droit pénal suédois, des crimes plus graves que s'ils étaient commis contre des adultes, a ajouté la délégation. Elle a précisé qu'un comité parlementaire sur l'exploitation sexuelle a transmis aux autorités suédoises un rapport qui contient un certain nombre de propositions actuellement examinées par le Ministère de la justice.

Selon une étude menée par le Conseil national sur la prévention du crime, qui identifiait 70 cas d'exploitation sexuelle, plus des deux tiers des enfants victimes avaient été exploités par des personnes qu'ils connaissaient, a par ailleurs indiqué la délégation.

Un membre du Comité a attiré l'attention sur les nombreux rapports qui s'inquiètent de la façon dont les enfants requérants d'asile non accompagnés sont accueillis dans les centres prévus à cet effet. Cet expert s'est inquiété des cas de disparitions dans ce contexte, dont le nombre s'élèverait à 124 pour l'année 2004.

Beaucoup d'efforts ont été faits afin d'assurer que ces enfants ne puissent pas disparaître aussi facilement qu'auparavant, a assuré la délégation.

La délégation a indiqué que les enfants immigrants qui se trouvent en situation irrégulière n'ont pas accès à l'éducation car les autorités suédoises tiennent à maintenir le principe selon lequel les immigrants illégaux n'ont pas les mêmes droits que les immigrants légaux.

La délégation a précisé que l'objectif des autorités suédoises est de faire en sorte que les demandes des enfants requérants d'asile non accompagnés soient traitées dans un délai de trois mois, même si, pour un certain nombre de raisons, il convient de ne pas se montrer trop rigide face à ces délais. Pour tous les autres cas, l'objectif global est de faire en sorte que chaque demande d'asile soit traitée dans un délai de six mois.

Un membre du Comité a souhaité connaître la politique que la Suède entend appliquer à l'avenir en matière de regroupement familial, dans la mesure où si, en droit, un tel regroupement est possible, dans la pratique les délais d'attente sont longs.

En ce qui concerne les enfants handicapés, la délégation a indiqué que 70% d'entre eux sont scolarisés au même niveau que les enfants de leur âge. Il existe à leur intention des classes spécialisées qui sont situées dans les mêmes établissements que ceux que fréquentent les autres enfants.

Pour ce qui est de l'adoption, la délégation a souligné que la loi sur l'adoption a été amendée au 1er janvier de cette année afin d'assurer qu'il n'y ait pas, dans le contexte d'une adoption, de transaction d'argent non conforme à la Convention de La Haye. La délégation a précisé qu'environ mille adoptions internationales sont enregistrées chaque année en Suède. Des changements ont en outre été apportés à la législation suédoise qui permettent désormais à des couples homosexuels de pouvoir adopter.

Relevant que le suicide des jeunes est un grand problème en Suède, un autre membre du Comité a souligné que les enfants eux-mêmes affirment que lorsqu'ils se sentent déprimés, ils ne savent pas à qui s'adresser. Dans certaines municipalités, le temps d'attente pour obtenir des soins psychiatriques est très long et peut atteindre jusqu'à six mois, a insisté cet expert.

Certains membres du Comité ont mis l'accent sur le manque de coordination dont pâtit la Suède pour ce qui est des activités menées en faveur de la promotion des droits de l'enfant, tant au niveau national qu'au niveau local.


Observations préliminaires

MME NEVENA VUCKOVIC-SAHOVIC, rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport de la Suède, a estimé que les observations finales que le Comité adoptera d'ici la fin de la présente session aborderont sans aucun doute les questions relatives aux mesures de suivi mises en œuvre et aux progrès accomplis depuis la présentation du deuxième rapport périodique du pays. Le Comité insistera probablement sur certaines observations finales antérieures qui n'ont pas été suffisamment suivies d'effet et pourraient de ce fait être réitérées. Les juges auraient besoin d'une bonne formation aux droits de l'enfant, a par ailleurs affirmé Mme Vuckovic-Sahovic. Le Comité recommandera probablement à la Suède de prendre de nouvelles mesures afin de lutter contre la discrimination, même si le pays fait déjà beaucoup dans ce domaine, y compris pour lutter contre la xénophobie et l'intolérance. Les observations finales du Comité devraient en outre traiter, entre autres, de la question du harcèlement à l'école ainsi que des objectifs de l'éducation et de l'accès à l'éducation. Il pourrait être recommandé à la Suède de renforcer les efforts en faveur des enfants victimes de l'exploitation sexuelle ou exposés à ce type d'exploitation.

MME MOUSHIRA KHATTAB, co-rapporteuse du Comité pour l'examen du rapport suédois, a estimé d'un point de vue personnel que les observations et recommandations du Comité devraient être moins nombreuses que ce qui était prévu. Les enfants, en Suède, ont beaucoup de chances, a-t-elle souligné, même si certaines inquiétudes persistent à l'égard des requérants d'asile et des immigrants illégaux ainsi qu'en ce qui concerne les questions de racisme. Il serait souhaitable que l'Ombdusman des enfants ait plus de pouvoir que cela n'est actuellement le cas, a ajouté Mme Khattab.



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