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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT EXAMINE LE RAPPORT INITIAL DE L'ANGOLA

27 Septembre 2004

Comité des droits de l’enfant
27 septembre 2004


Le Comité des droits de l'enfant a examiné, aujourd'hui, le rapport initial de l'Angola sur l'application des dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.

Dans des observations préliminaires présentées à l'issue de cette journée d'examen, M. Lothar Friedrich Krappmann, expert du Comité chargé de l'examen du rapport angolais, a notamment souligné que la qualité de vie et le développement des enfants en Angola restent fondamentalement liés à la situation difficile que connaît le pays. En début de journée, M. Krappmann avait relevé que, parmi les situations les plus alarmantes de l'après-guerre du point de vue du bien-être et du développement de l'enfant, figuraient celles des enfants séparés de leurs parents; des enfants orphelins; des enfants réfugiés qui reviennent en Angola; des anciens enfants-soldats; des victimes des conflits armés et des nombreux enfants qui continuent d'être blessés par des mines antipersonnel; des enfants vivant dans l'extrême pauvreté. Un enfant sur quatre meurt avant l'âge de 5 ans, a en outre noté l'expert.

Les observations finales du Comité sur ce rapport seront adoptées en séance privée avant d'être rendues publiques à la fin de la session, le vendredi 1er octobre 2004.

Présentant le rapport de son pays, Mme Ana Dias Lourenço, Ministre du plan de l'Angola, a rappelé que son pays vit sa deuxième année de paix mais que la guerre a provoqué le déplacement interne d'environ un tiers de la population, composé pour l'essentiel de femmes et d'enfants, ce qui a entraîné un accroissement de 60% de la population dans les villes. Les enfants de moins de 18 ans, qui représentent 56% de la population, constituent le groupe le plus défavorisé et le plus vulnérable, a poursuivi la Ministre. Elle a souligné que le cadre général de la situation des enfants est encore dramatique du fait, notamment, du taux élevé d'enfants sous-alimentés; du taux élevé de mortalité infantile; du nombre d'enfants - soumis à des privations physiques et émotionnelles; du grand nombre d'enfants séparés de leur famille et d'enfants des rues; ainsi que du fait de la forte proportion d'enfants en âge scolaire qui sont en dehors du système d'éducation. Pour améliorer la condition des enfants, le Gouvernement angolais a donc engagé une discussion sur l'avant-projet de la nouvelle Constitution qui prévoit un accroissement des droits et des garanties et une amélioration de la protection de l'enfant.
La délégation angolaise était également composée, entre autres, de Mme Maria da Luz Magalhaes, Vice-Ministre de l'assistance et de la réinsertion sociale; de M. João Filipe Martins, Représentant permanent de l'Angola auprès des Nations Unies à Genève; de Mme Eufrazina Mayato, Directrice nationale de l'Institut de l'enfant; ainsi que de nombreux conseillers de la République de l'Angola.

La délégation a fourni aux experts des compléments d'information s'agissant, entre autres, du processus de révision de la législation, de l'enregistrement des naissances, de la responsabilité pénale, de cas d'enfants accusés de sorcellerie, des questions d'éducation et de santé.


Le Comité entamera demain matin, à 10 heures, l'examen du rapport initial d'Antigua-et-Barbuda (CRC/C/28/Add.22).


Présentation du rapport

Présentant le rapport de son pays, MME ANA DIAS LOURENÇO, Ministre du plan de l'Angola, a expliqué que c'est pour des raisons ayant trait à la situation interne du pays que le Gouvernement angolais n'a pas pu présenter ce rapport dans les délais convenus. Elle a rappelé que l'Angola vit sa deuxième année de paix et que ces deux années de paix sont le résultat des accords du 4 avril 2002 qui ont permis l'apparition de nouvelles possibilités pour assurer le bien-être pour les familles et les enfants. L'Angola, qui a vécu les effets néfastes de la guerre, a vu les conditions sociales de la population s'aggraver avec une incidence toute particulière sur la vie des enfants, a poursuivi Mme Lourenço. Pendant ces années de guerre, on a assisté à une destruction des infrastructures de base ainsi qu'au non-respect de la libre circulation des personnes et des biens et à un afflux important de population des régions rurales, tant vers les centres urbains que vers l'étranger; ces facteurs ont constitué et constituent encore les raisons du grand retard dans la mise en œuvre de mesures en faveur de la survie, de la protection et du développement de l'enfant.

La guerre a provoqué le déplacement interne d'environ un tiers de la population composé pour l'essentiel de femmes et d'enfants, ce qui a entraîné un accroissement de 60% de la population dans les villes, a poursuivi Mme Lourenço. Face à cet accroissement de la population urbaine, les services sociaux de base n'ont pas été en mesure de donner des réponses efficaces. Tous les indicateurs sociaux montrent que les zones rurales sont celles qui se trouvent dans les pires conditions, a insisté Mme Lourenço. Le Gouvernement a donc initié, sur tout le territoire national, la mise en place du programme sur l'amélioration des services sociaux de base, dont la responsabilité incombe aux gouvernements locaux, a-t-elle indiqué. Pour assurer, simultanément, la réinstallation et la réintégration de plus de deux millions de personnes, et en complément de ce programme, le Gouvernement est en train de mettre en place, avec l'appui de la communauté internationale, plusieurs programmes d'appui à la réintégration socioéconomique des populations les plus affectées par le conflit, a fait valoir Mme Lourenço. Les mines, qui ont proliféré dans le pays, entravent le retour en toute sécurité et à la réinstallation des populations dans leurs régions d'origine ainsi que la relance de l'agriculture pour les besoins alimentaires des familles, a ajouté la Ministre angolaise du plan. La population déplacée est obligée de faire face à des conditions de vie difficiles et dépend, avant tout, de la solidarité sociale, de l'aide internationale et du renforcement des programmes sociaux du Gouvernement.

M. Lourenço a souligné que les conséquences de la guerre exigent des efforts énormes de la part du Gouvernement, qui a notamment été confronté au poids excessif de la dette extérieure. Par conséquent, la réduction des capacités et des ressources disponibles a notamment obligé le Gouvernement à retarder la mise en place des politiques économiques visant notamment à surmonter les déséquilibres, à combattre la pauvreté et la famine et à promouvoir une politique de l'emploi. La Ministre a d'autre part rappelé que les mineurs (de 0 à 18 ans), représentent 56% de la population, soit 7,4 millions d'habitants, et en constituent le groupe le plus défavorisé et le plus vulnérable. Pendant la période de guerre, beaucoup d'entre eux ont été obligés de travailler dès leur plus jeune âge tandis que d'autres ont dû faire face à l'exploitation et aux abus sexuels. La guerre et la pauvreté ont laissé des traces physiques et psychologiques chez ces enfants, a insisté Mme Lourenço.

La Ministre angolaise a souligné que le cadre général de la situation des enfants est encore dramatique du fait du taux élevé d'enfants sous-alimentés; du taux élevé de mortalité infantile qui s'établit à 150 pour mille pour les enfants de moins d'un an et à 250 pour mille pour les enfants de moins de 5 ans; du nombre d'enfants soumis à des privations physiques et émotionnelles, estimé à deux millions environ, dont 940 000 sont en situation de risque; du grand nombre d'enfants séparés de leur famille et d'enfants des rues; de la forte proportion, évaluée à 25%, d'enfants en âge scolaire qui sont en dehors du système d'éducation et d'enseignement; de la non-disponibilité, pour la totalité des enfants, de l'accès aux infrastructures d'eau potable et du tout-à-l'égout; du taux de prévalence du VIH/sida, ce qui ne manque pas d'avoir une incidence sur le nombre d'enfants affectés et infectés; ainsi que du fait de l'exploitation du travail des enfants.

Pour améliorer la condition des enfants, le Gouvernement angolais a engagé une discussion sur l'avant-projet de la nouvelle Constitution qui prévoit un accroissement des droits, garanties et protection de l'enfant. La révision du Code pénal est également en cours en vue de l'adapter aux nouveaux types de crimes : crimes contre l'enfant, pédophilie, violence au sein ou en dehors de la famille, utilisation d'enfants dans le commerce de la drogue et de la pornographie, trafic et enlèvement d'enfants, usage de stupéfiants ou de boissons alcoolisées. Mme Lourenço a fait valoir que le budget général de l'État en ce qui concerne les programmes des domaines social, économique et culturel a augmenté, la part du budget consacrée à l'éducation étant par exemple passée de 4,7% en 2001 à 10,5% en 2004, et la part du budget consacrée à la santé et à l'assistance sociale étant passée de 7,3% en 2002 à 9,8% en 2004. La Ministre a par ailleurs fait part de la mise en place du programme d'éducation pour tous d'ici 2015. Dans le domaine de la santé, a-t-elle poursuivi, le Gouvernement a notamment décidé d'élargir les programmes de soins materno-infantiles, la planification familiale, les campagnes de vaccination ainsi que la lutte contre les grandes endémies.

Le rapport initial de l'Angola (CRC/C/3/Add.66) indique que le Code de la famille, en vigueur depuis 1988, consacre les valeurs essentielles telles que l'égalité absolue entre hommes et femmes, la valeur de la famille, la conception du mariage en tant qu'union volontaire, ou encore l'égalité des enfants et l'obligation de les protéger. Suite aux difficultés auxquelles le pays a dû faire face au cours de la dernière décennie, les mécanismes institutionnels établis pour l'élaboration des politiques en matière de protection de l'enfant n'ont malheureusement pas été mis en œuvre, précise le rapport. L'un des facteurs bloquant la mise en œuvre de la Convention est l'absence de plan d'action, reconnaît-il. Au cours de la dernière décennie, poursuit-il, les efforts du Gouvernement ont essentiellement été tournés vers des actions visant à faire face à la situation d'urgence et à la vulnérabilité des enfants pendant la longue période de guerre. Les questions spécifiques relatives au bien-être et à la protection de l'enfant sont de la responsabilité de deux institutions : l'Institut national de l'enfant, qui dépend du Chef de Gouvernement; et la Direction nationale de l'enfance du Ministère de l'assistance et de la réinsertion sociale.

Le rapport indique qu'en Angola, l'âge de la majorité est fixé à 18 ans. Il précise que les mineurs peuvent être soumis à des mesures de protection sociale jusqu'à 12 ans et à des mesures de prévention criminelle de 12 à 16 ans; de 16 à 18 ans, ils répondent intégralement de leurs actes, bien que leur responsabilité soit plus limitée que celle des personnes de plus de 18 ans. Selon le Code pénal, les mineurs sont soumis à la juridiction des tribunaux pour mineurs jusqu'à l'âge de 16 ans et, à leur égard, ne peuvent être prises que des mesures d'assistance, d'éducation ou des mesures correctionnelles qui sont prévues par le droit pénal. Les mineurs âgés de 16 ans ou plus peuvent être privés de liberté, ajoute le rapport. L'enseignement en Angola est obligatoire, poursuit-il. Jusqu'à la récente réforme du système scolaire, seules les quatre premières années d'éducation primaire (de 6 à 9 ans) étaient obligatoires pour les enfants angolais. Avec la loi sur la réforme éducative qui est entrée en vigueur en 2003, la période d'enseignement obligatoire a été prolongée jusqu'à la sixième classe, dont l'âge normal d'admission est entre 11 et 14 ans. L'âge limite d'entrée dans la première année d'éducation primaire est resté le même qu'auparavant, c'est-à-dire 6 ans. En application du Code de la famille, seuls les plus de 18 ans peuvent se marier. La loi prévoit, exceptionnellement, l'âge de 16 ans pour le jeune garçon et de 15 ans pour la jeune fille, avec l'autorisation de la personne qui a l'autorité sur le mineur ou quand, en examinant les circonstances et en tenant compte de l'intérêt du mineur, le mariage s'impose comme la meilleure solution. Bien que la loi interdise le mariage des femmes de moins de 15 ans et des hommes de moins de 16 ans, il existe dans le droit traditionnel des unions de fait qui commencent plus tôt, après les cérémonies de la puberté.

Comme conséquence de la faible performance du système éducatif et d'autres facteurs, le taux d'analphabétisme a atteint des niveaux très élevés, affirme par ailleurs le rapport. Malgré les efforts déployés par le Gouvernement et la société, environ un tiers de la population ne sait ni lire ni écrire, avec des disparités très élevées entre les hommes et les femmes. En ce qui concerne le taux de scolarisation, 44% des enfants n'ont pas fréquenté les quatre premières années et 94% n'ont pas fréquenté le second niveau de l'enseignement de base. La capacité d'accéder à l'enseignement de base est directement liée au niveau socioéconomique des familles, ajoute le rapport. Parmi les causes d'exclusion scolaire, on trouve notamment la grossesse précoce, le VIH/sida, la privation de liberté et surtout le faible taux d'enregistrement des naissances, précise le rapport. Selon une enquête de 1996, environ 85 000 enfants de 0 à 18 ans souffrent de handicaps. Les blessures causées par des accidents de guerre, ou en relation avec celle-ci, tels que l'explosion de mines ou la détonation d'engins non explosés, sont responsables de 15% de tous les handicaps chez les enfants, indique le rapport. Les conditions socioéconomiques et le niveau d'extrême pauvreté d'une grande partie de la population sont en train de faire émerger des maladies qui étaient presque supprimées, comme la tuberculose et la lèpre, atteignant environ 30% des enfants, ajoute-t-il. Le paludisme est la principale cause de mortalité et de morbidité chez les enfants, précise le rapport.


Examen du rapport

M. LOTHAR FRIEDRICH KRAPPMANN, rapporteur pour l'examen du rapport de l'Angola, a souligné que l'Angola reste confronté à de nombreux problèmes malgré la signature des accords de paix. Il a souligné que l'Angola est un pays très riche qui, durant la guerre, a perdu des centaines de milliers de personnes, sans parler des nombreux blessés et des quatre millions environ de personnes déplacées. Parmi les situations les plus alarmantes de l'après-guerre du point de vue du bien-être et du développement de l'enfant, M. Krappmann a attiré l'attention sur celles des enfants séparés de leurs parents, au nombre de 100 000 environ; des plus de 100 000 enfants qui sont orphelins à cause de la guerre, mais aussi de plus en plus souvent en raison de la propagation du VIH/sida; des enfants et de leurs parents déplacés, qui sont encore au nombre d'un million environ et dont un grand nombre ne bénéficie d'aucune protection; des enfants qui avaient fui dans les pays voisins et qui reviennent en Angola; des anciens enfants-soldats, qui ont été physiquement et psychologiquement traumatisés et dont le nombre est d'environ 10 000, tous n'ayant pas encore été démobilisés et réintégrés; des victimes des conflits armés, blessées et mutilées; des nombreux enfants qui continuent d'être blessés par des mines antipersonnel, dont il reste 80 000 selon Handicap International; des enfants vivant dans l'extrême pauvreté (plus d'un million d'Angolais sont assistés par les organisations humanitaires et un nombre encore plus élevé mériteraient de l'être); des enfants qui n'ont pas accès à une eau potable; ainsi que sur la situation des enfants vivant dans les prétendus «abris informels».

M. Krappmann a également souligné qu'un enfant sur quatre meurt avant l'âge de 5 ans et que l'espérance de vie est d'environ 40 ans en Angola. Seule une moitié environ des enfants suit une éducation primaire et le taux d'achèvement du cycle primaire après 5 ans de scolarité est très faible, a par ailleurs souligné l'expert. Malheureusement, des problèmes émergent aujourd'hui qui n'étaient pas visibles durant la période de guerre, comme les mauvais traitements graves infligés aux enfants et la délinquance juvénile, a ajouté M. Krappmann. Il a reconnu que nombre d'informations confirment que le Gouvernement a initié un certain nombre de projets et de programmes visant à améliorer la situation sur les aspects les plus fondamentaux.

Relevant que l'Angola est un pays doté d'importantes ressources, notamment en diamants et en pétrole, qui lui assurent d'importants revenus, M. Krappmann a souligné qu'une question tourmente nombre d'observateurs : où est cet argent? En effet, de nombreux reproches ont été faits à maintes reprises s'agissant du fait que des millions, voire des milliards de dollars ont tout simplement disparu, et un groupe international d'experts a cité l'Angola au nombre des pays faisant le moins preuve de transparence en matière de transactions financières et les plus touchés par la corruption. Le Gouvernement n'a eu de cesse que de protester contre ces accusations et a signé la Convention internationale contre la corruption; mais pourquoi si peu d'argent est-t-il disponible pour la réinstallation des populations, le logement, l'infrastructure sanitaire et les services d'éducation et de santé, a demandé M. Krappmann? Il a souligné que la confiance est une condition préalable pour la coopération internationale.

M. Krappmann a souhaité savoir où en était le processus de révision de la législation nationale aux fins de mise en conformité avec les dispositions de la Convention. À cet égard, il a fait part des inquiétudes que lui inspire un projet d'article associé à la nouvelle Constitution dont le pays entend se doter; il s'agit du projet d'article 72 qui autorise de priver un enfant de liberté pour lui apporter une protection, une assistance ou une éducation. Cet article n'établit aucune distinction entre les problèmes d'origine sociale et ceux d'origine criminelle, a souligné l'expert. Il a rappelé que la Convention exprime clairement une préférence pour les mesures à caractère social et éducatif.

M. Krappmann a en outre voulu savoir à qui incombe, en Angola, la responsabilité de surveiller la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l'enfant. Il s'est enquis des priorités que les autorités se sont fixées en matière de politique visant la mise en œuvre de cet instrument. Il a en souhaité connaître les obstacles que la culture traditionnelle dresse sur la voie de la mise en œuvre des droits de l'enfant.

Un autre membre du Comité a cité des chiffres indiquant que 80% des enfants naîtraient à domicile et non dans des hôpitaux, et s'est inquiété des conséquences que cela peut avoir pour l'enregistrement civil des naissances.

Un expert a souhaité connaître l'âge minimum de la responsabilité pénale en Angola.

Un membre du Comité a relevé que le handicap n'est pas mentionné dans les dispositions de la législation angolaise relatives au principe de non-discrimination. Un autre expert s'est enquis des programmes mis en place pour prévenir toute discrimination, en particulier contre les enfants handicapés.

Plusieurs experts se sont inquiétés de la dégradation des systèmes d'éducation et de santé en Angola. L'éducation primaire est obligatoire mais n'est pas gratuite en Angola, a relevé un membre du Comité. Il a souligné qu'alors que 1,5 million d'enfants sont actuellement scolarisés dans le primaire, ils seront 5 millions à l'être en 2015, selon les prévisions. Qu'en sera-t-il alors de l'obligation scolaire si le pays n'est pas en mesure de faire face à cette hausse des effectifs et à assurer la scolarisation de ces effectifs accrus ? Un autre membre du Comité s'est inquiété de constater qu'il y a en moyenne dans le pays 64 enfants par classe, de sorte que les cours sont dispensés par rotation des effectifs.

Un membre du Comité s'est inquiété du grand nombre d'enfants des rues en Angola. Il a cité le chiffre de 24000 enfants qui vivraient dans les rues du pays, dont 3000 dans la seule capitale. Quels mesures sont prévues pour ces enfants afin qu'ils puissent bénéficier des services sociaux de base et, surtout, retourner dans leur milieu familial, a demandé cet expert ?


Renseignements complémentaires fournis par la délégation

Fournissant des renseignements complémentaires et répondant aux questions des membres du Comité, la délégation a souligné que la situation d'urgence que le pays a connue est la raison principale qui explique que l'Angola n'a pas été en mesure de présenter son rapport dans les délais.

S'agissant du processus de révision de la législation nationale aux fins de mise en conformité avec les dispositions des divers instruments internationaux auxquels l'Angola est partie, la délégation a indiqué que le processus de révision de la Constitution a débuté en 2001; il est mené par une commission nationale composée d'experts provenant des différents partis siégeant à l'Assemblée nationale, a expliqué la délégation.

L'Angola se considère comme un pays potentiellement riche mais pas encore riche, a tenu à préciser la délégation. Elle a souligné à cet égard que 68% des Angolais vivent dans un état de pauvreté et environ 24% dans un état de pauvreté extrême, c'est-à-dire avec moins d'un dollar par jour.

La délégation a rappelé que pendant de nombreuses années, les ressources tirées du pétrole ont dû être consacrées à l'effort de guerre. Le paiement de la dette a absorbé la moitié du budget de l'État, a en outre souligné la délégation.

En ce qui concerne l'enregistrement des naissances, la délégation a indiqué qu'en 1998, le Gouvernement a lancé une campagne d'enregistrement civil gratuit des mineurs et adolescents âgés de 0 à 18 ans qui a permis d'enregistrer environ 658 620 enfants. À partir de 2000, environ 2,2 millions d'enfants supplémentaires ont pu être enregistrés dans le cadre de la deuxième phase de cette campagne, a précisé la délégation. Les autorités exigent une petite contribution équivalant à un peu plus de trois dollars pour l'édition de la carte d'identité et les frais administratifs associés à l'enregistrement civil, a-t-elle ajouté.

S'agissant de la définition de l'enfant, la délégation a indiqué qu'en Angola, la responsabilité pénale commence à 16 ans; en outre, de 17 à 21 ans, un individu reste mineur du point de vue pénal mais n'est pas totalement exempt de responsabilité.

La délégation a souligné que la législation actuelle - articles 360 et suivants du Code pénal - prévoit déjà des peines pour les délits corporels volontaires entraînant une incapacité d'agir ou de travailler.

S'agissant des enfants accusés de sorcellerie, la délégation a indiqué que ces cas se localisent dans seulement trois provinces du pays, dont celle de la capitale. Ces cas ont commencé à être identifiés à la fin des années 1990, a indiqué la délégation. Elle a invoqué à cet égard la forte influence de sectes religieuses introduites en Angola à partir des pays situés au-delà de la frontière septentrionale. L'analphabétisme et la pauvreté peuvent être à l'origine de la prolifération de ces pratiques dans les provinces touchées, a ajouté la délégation.

En ce qui concerne les questions d'éducation, la délégation a rappelé le lancement du Programme «Education pour tous», mis en œuvre avec l'appui de l'Unesco et dont l'objectif est entre autres d'augmenter le taux de scolarisation à l'horizon 2015, en procédant notamment à la construction d'environ 44 000 salles de cours. La formation des enseignants est une priorité des autorités, a assuré la délégation.

Si elle persiste parfois, la rotation des élèves en raison de pénuries de salles de cours, afin qu'ils suivent les cours à tour de rôle durant la journée, n'est plus une pratique généralisée dans le pays, a assuré la délégation.

La plupart des enfants et adolescents provenant des zones qui ont été affectées par le conflit sont encore lourdement touchés par l'analphabétisme, a également souligné la délégation.

Le programme de repas scolaire n'est pas mis en œuvre sur tout le territoire nationale, a par ailleurs reconnu la délégation.

La délégation angolaise a indiqué que, dans le cadre du processus de réintégration sociale des populations les plus vulnérables, le Gouvernement s'efforce de faire en sorte que les jeunes accèdent à leur premier emploi et a notamment recours, à cette fin , à une politique de micro-crédits.

S'agissant des questions de santé, la délégation a notamment reconnu que la pratique de la vente de médicaments sur les marchés informels persiste en Angola. Des mesures ont été prises pour lutter contre ce phénomène, a-t-elle affirmé. Rappelant que le paludisme est l'une des principales causes de mortalité et de morbidité infantiles, la délégation a par ailleurs fait valoir que le sous-programme de lutte contre le paludisme mis en place par le Gouvernement en partenariat avec des organisations non gouvernementales et la société civile s'efforce de promouvoir l'usage de moustiquaires.

La délégation a par ailleurs fait part de la mise en place d'une Commission nationale de lutte contre le VIH/sida et les autres endémies, présidée par le Président de la République. L'Angola a engagé un processus de négociation pour l'acquisition de médicaments génériques au Brésil, a précisé la délégation.

Certaines régions du pays n'ont pas encore de réseaux routiers ni d'eau, a ajouté la délégation. Néanmoins, des programmes sont en cours, en coopération avec la Banque mondiale et avec la Banque africaine de développement, afin de corriger cette situation, a fait valoir la délégation.

Eu égard aux besoins immenses du pays suite à la guerre, l'Angola ne saurait prétendre avoir résolu tous les problèmes en deux années de paix, a souligné la délégation. Néanmoins, a-t-elle estimé, le Comité dispose désormais d'une bonne vue d'ensemble de la situation et des différents indicateurs actuels et il est incontestable que l'évolution est positive.

En réponse à une question d'un expert, la délégation a indiqué que l'Angola n'a pas connu d'afflux de réfugiés sénégalais. En revanche, certains étrangers africains ont pénétré illégalement dans le pays, attirés par les zones diamantifères, a-t-elle ajouté.

La loi angolaise condamne la violence contre les enfants, qu'elle se produise dans le cadre familial ou dans celui des écoles ou autres institutions, a par ailleurs souligné la délégation. Un enfant victime de violence, que ce soit au sein de sa famille ou à l'école, peut s'adresser à des centres municipaux, aux centres dits SOS, mais aussi à la police ou encore au juge pour mineurs, a-t-elle précisé.


Observations préliminaires


Présentant ses observations préliminaires, M. Lothar Friedrich Krappmann, rapporteur pour l'examen du rapport angolais, a souligné que chacun a bien conscience du fait que l'Angola se trouve dans une situation difficile. Il semble clair que la qualité de vie et le développement des enfants restent fondamentalement liés à tous les problèmes que connaît le pays, a-t-il ajouté. Il a remercié la délégation pour les compléments d'information qu'elle a fournis tout au long de cette journée d'examen ainsi que pour ses évaluations de la situation. M. Krappmann a souligné que les observations finales que le Comité adoptera au sujet de l'Angola ne devraient pas manquer d'aborder les questions en rapport avec la discrimination; la situation de discrimination à l'égard des fillettes; les handicapés; les enfants accusés de sorcellerie; les problèmes législatifs et la manière dont les lois sont appliquées; la famille; les ressources budgétaires; la santé et l'éducation; l'enregistrement des naissances; ainsi que le système de justice pour mineurs, entre autres. Il faudra que l'Angola dégage des ressources supplémentaires pour assurer la mise en œuvre des droits de l'enfant, a souligné M. Krappmann. La coopération internationale s'avèrera nécessaire et les observations finales ne devraient pas manquer d'y faire référence, a-t-il ajouté.


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