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Communiqués de presse Organes conventionnels

LE COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT CONCLUT SON DIALOGUE AVEC LA DÉLÉGATION DE LA TURQUIE

23 Mai 2001



CRC
27ème session
23 mai 2001
Après-midi




Dans ses observations préliminaires, un expert invite
la Turquie à identifier des priorités pour
l'action à mener en faveur de l'enfance



Le Comité des droits de l'enfant a achevé, cet après-midi, son dialogue avec la délégation de la Turquie concernant le rapport initial qui a été soumis par ce pays. Un membre du Comité a présenté des observations préliminaires, suggérant notamment à la Turquie d'identifier clairement ses priorités en matière de promotion des droits de l'enfant étant donné la grande variété et l'ambition des programmes en faveur de l'enfance.

Félicitant la Turquie pour son action en faveur des droits de l'enfant et pour les progrès réalisés dans ce domaine, l'expert a encouragé la Turquie à retirer ses réserves à l'égard de certaines dispositions de la Convention. Il a estimé que la Turquie devrait en outre entreprendre des études sur la violence au foyer et sur les abus, notamment sexuels, commis contre les enfants. Il conviendrait par ailleurs d'améliorer la santé de tous les enfants, sans discrimination, en mettant l'accent sur les soins de santé primaire et sur la décentralisation des services de santé.

Les observations finales du Comité concernant les rapports examinés seront adoptées à huis clos avant d'être rendues publiques à la fin de la présente session, le vendredi 8 juin.

En début de séance, la délégation turque a fourni aux experts des renseignements complémentaires en ce qui concerne, notamment, les questions relatives aux minorités, à la peine de mort, aux crimes d'honneur, aux disparitions forcées, aux brutalités policières et aux enlèvements d'enfants, ainsi que les questions de santé.

Le Comité reprendra ses travaux en séance publique vendredi après-midi, à 15 heures, pour entendre une déclaration de la Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Mme Mary Robinson.


Fin de l'examen du rapport de la Turquie

En réponse aux préoccupations exprimées ce matin par plusieurs experts s'agissant de la situation des minorités et des questions de discrimination, la délégation turque a fait référence à la situation de l'Italie à la fin de la seconde Guerre mondiale, soulignant que le Sud de l'Italie était beaucoup moins développé que le Nord mais que l'on ne parlait pas pour autant de discrimination à l'encontre des Siciliens. Or, pendant longtemps encore, la situation en Turquie sera comparable à celle de l'Italie à cette époque en raison des disparités importantes entre l'Est de la Turquie et le reste du pays. Il n'en demeure pas moins que le plus grand projet de développement actuellement en œuvre en Turquie se situe dans l'Est du pays et concerne un programme d'aménagement hydraulique des bassins du Tigre et de l'Euphrate. Il n'existe aucune discrimination en tant que telle en Turquie, a assuré la délégation. En ce qui concerne les Roms, la délégation a indiqué ne pas avoir connaissance de problèmes particuliers rencontrés par cette communauté en Turquie.

Un membre du Comité a souligné que selon un rapport de l'Union européenne datant de 2000, les Kurdes en Turquie souffriraient d'une très forte discrimination en ce qui concerne l'exercice de leurs droits les plus élémentaires. Un autre membre du Comité s'est en outre enquis de la situation des 500 000 à deux millions de personnes déplacées à l'intérieur de la Turquie.

Plusieurs experts s'étant inquiétés des disparités qui existent en matière d'accès aux services de santé et d'éducation entre les régions de l'Est et du Sud-Est de la Turquie et le reste du pays, la délégation a fait valoir que la mortalité infantile, qui était de 117 pour mille dans l'Est du pays il y a dix ans, avait baissé en 1998 de plus de 40% alors que sur la même période, cette baisse n'était en moyenne que de 20% au niveau national.

S'agissant de la peine de mort, la délégation a assuré qu'elle ne peut pas être appliquée en Turquie à un mineur de moins de 18 ans. En outre, un moratoire sur la peine capitale est en vigueur dans le pays depuis une quinzaine d'années, a rappelé la délégation.

Plusieurs experts ayant fait part de leurs préoccupations face aux allégations de disparitions forcées en Turquie, la délégation a rappelé que la Rapporteuse spéciale sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires s'est récemment rendue en Turquie mais n'a pas encore présenté son rapport. La délégation turque a cependant fait valoir qu'à l'issue de sa visite, la Rapporteuse spéciale a notamment indiqué que les violations relevant de son mandat étaient en forte baisse dans le pays.

En ce qui concerne les crimes d'honneur, la délégation a reconnu que ces pratiques tragiques surviennent parfois dans le Sud et dans l'Est du pays. En l'état actuel de la législation, l'article 162 du Code pénal prévoit que pour les crimes tels que le meurtre d'un membre de la famille, le délai de prescription sera réduit. La délégation a reconnu que cette disposition du Code pénal, qui date de 1926, n'est plus acceptable car elle n'est pas conforme aux normes contemporaines ni à l'évolution de la société turque. Aussi, le projet de nouveau Code pénal que le pays envisage actuellement d'adopter entend-il abolir de telles dispositions.

En réponse aux préoccupations exprimées ce matin par certains experts s'agissant d'allégations de brutalités policières, la délégation a souligné que de telles brutalités ne sont pas un phénomène propre à la Turquie. Certes, la situation à laquelle le pays est confronté depuis plusieurs années en raison du terrorisme - terrorisme d'ailleurs en baisse ces derniers temps - ne
peut que favoriser de telles brutalités. Mais si quelques cas isolés ont pu se produire, il ne saurait être question de généraliser en affirmant que cette pratique est fréquente. La Direction générale de la police est respectueuse des droits de l'homme et des droits de l'enfant, a assuré la délégation.

En ce qui concerne les enlèvements d'enfants, la délégation a notamment indiqué que, loin d'être aussi nombreux que certaines informations semblent laisser entendre, leur nombre s'est élevé à 451 sur quatre ans.

Un membre du Comité a fait état d'informations attestant de la persistance d'un trafic de femmes et d'enfants vers la Turquie en tant que pays de transit et de destination. La délégation a rappelé que la Turquie a signé la Convention sur le crime transnational organisé ainsi que les deux protocoles s'y rapportant. Le processus de ratification de ces instruments est en cours, a précisé la délégation.

S'agissant de la santé des adolescents, la délégation a indiqué que 2% des adolescentes de 15 ans et 23% des adolescentes de 19 ans sont enceintes. Si une élève du secondaire tombe enceinte, elle n'a malheureusement pas d'autre choix que de quitter l'école, a souligné la délégation. En Turquie, l'avortement est autorisé depuis 1993 et peut être pratiqué légalement pendant les dix premières semaines de la grossesse. Le consentement des parents est nécessaire pour procéder à tout avortement lorsque qu'il s'agit d'une mineure, a précisé la délégation.


Observations préliminaires concernant le rapport de la Turquie

Présentant des observations préliminaires sur le rapport de la Turquie, un membre du Comité a félicité le pays pour son action en faveur des droits de l'enfant et pour les progrès réalisés dans ce domaine. L'expert a pris acte des problèmes rencontrés par la Turquie en raison de l'ajustement économique en cours et aux deux séismes qui ont secoué le pays. L'expert a encouragé la Turquie à retirer les réserves qu'elle a émises à l'égard de certaines dispositions de la Convention. Il a également suggéré à la Turquie d'identifier clairement ses priorités en matière de promotion des droits de l'enfant étant donné la grande variété et l'ambition des programmes en faveur de l'enfance. Il serait bon, en outre, que le pays se dote d'une institution chargée de recueillir les plaintes pour violation des droits de l'enfant. Il semble que les principes généraux énoncés par la Convention ) non-discrimination, respect de l'intérêt supérieur de l'enfant ) ne soient pas clairement reflétés dans la législation turque.

S'il faut se réjouir que la loi ait été modifiée en ce qui concerne la question des crimes d'honneur, une campagne de sensibilisation sur la question pourrait judicieusement être menée auprès des dirigeants religieux et communautaires, a estimé l'expert. La Turquie devrait en outre entreprendre des études sur la violence au foyer et sur les abus, notamment sexuels, commis contre les enfants. Il faudrait également faire en sorte que l'impératif de discipline au sein des familles ne sacrifie pas à la dignité de l'enfant: à cet égard, il convient d'interdire clairement les châtiments corporels.

Pour ce qui est des questions de santé, l'expert a suggéré que la Turquie prenne des mesures pour améliorer la santé de tous les enfants, sans discrimination, en mettant l'accent sur les soins de santé primaire et sur la décentralisation des services de santé. Il conviendrait en outre de ne pas négliger, non plus, les soins de santé mentale et la santé génésique.


La délégation turque a assuré le Comité qu'elle avait pris bonne note des critiques constructives faites par le Comité tout au long de cette journée d'examen. La délégation a également assuré que la Turquie ferait de son mieux pour progresser encore davantage sur la voie de la pleine et entière réalisation des droits de l'enfant.





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